Epiphone revisite son modèle iconique dans une finition brute, l’occasion de voir ce qu’il reste de la légende en 2021.
Apparue au catalogue de la marque en 1961, l’Epiphone Casino est devenue rapidement un instrument de choix pour de nombreux guitaristes de l’époque. De Howlin’ Wolf à Keith Richards en passant par les Beatles, sa conception entièrement creuse et ses deux micros P-90 ont su séduire ces musiciens qui se sont rapidement approprié l’instrument. La Casino n’a jamais quitté les rangs de la marque et a connu plusieurs déclinaisons au fil des années. Cette dernière mouture se pare de nouvelles finitions dénommées « Worn » qui confèrent à l’instrument un aspect plus brut.
Casino presque royale
Cette nouvelle version de la Casino reprend les caractéristiques qui ont fait le succès de la guitare au fil de ces soixante dernières années. On retrouve donc un corps creux entièrement construit en cinq plis d’érable contreplaqué et un manche collé en acajou. Jusqu’ici, rien de nouveau. La touche de ce nouveau modèle est en laurier indien, comme sur la quasi totalité des nouveaux modèles de la marque qui sont passées entre nos paluches. Epiphone s’est rabattu sur cette essence suite aux nouvelles restrictions concernant l’utilisation du palissandre. Selon les modèles, la teinte de cette touche peut varier légèrement. Sur notre exemplaire, elle affiche une jolie couleur sombre. Elle est sertie de vingt-deux frettes Médiums Jumbo pour un diapason de 24.72 pouces et de repères trapézoïdaux, véritable signature de la marque que l’on retrouve sur de nombreux modèles comme la Texan. Le rayon de la touche est de 12.01 pouces.
La Casino étant un modèle original Epiphone, elle conserve la forme de tête traditionnelle du fabricant new-yorkais et le logo à l’ancienne. La grande nouveauté de ce modèle 2020 est la finition « Worn ». Il s’agit d’une finition open-pore assez particulière. On a l’impression que la guitare a été entièrement poncée au grain très fin. Le premier contact avec l’instrument est assez étrange et ce dernier paraît, de prime abord, plutôt fragile. En jouant cette Casino, cette nouvelle finition devient rapidement confortable, surtout sur le manche, et prendra une jolie patine avec le temps. La construction totalement creuse de la guitare lui permet d’être très légère ce qui est un bon point. Attention au Larsen cependant, surtout quand on commence à monter le volume …
La recette étant la même depuis 1961, on retrouve une paire de micros Pro P-90 signés Epiphone. Ce sont des modèles Dog-Ear avec capots chromés. Ces micros sont contrôlés par un volume et une tonalité chacun auxquels vient s’ajouter un sélecteur à trois positions. Comme sur les modèles Epiphone 2020, les potards sont estampillés CTS. Enfin, l’accastillage est nickelé et intègre un chevalet LockTone Tune-O-Matic, un cordier en forme de trapèze décoré d’un diamant, véritable signe distinctif du modèle, des mécaniques Epiphone Vintage Deluxe et une plaque blanche à trois plis ornée du logo « E » traditionnel. Les boutons de potentiomètres sont les Gold Top Hats et sont munis de petits pointeurs métalliques. Un filet couleur crème fait le tour du corps de l’instrument, sur la table et le dos et entoure également le manche. Le sillet est un GraphTech en NuBone.
Une Casino quasi-yes
La guitare bénéficiant d’une construction totalement creuse, elle dégage un volume important jouée à vide. Le corps étant intégralement en érable laminé, le son à vide est en revanche un peu « crin-crin ». Il n’est quand même pas désagréable de pouvoir travailler ses gammes sur son instrument électrique, sans avoir à le brancher. Une fois branchée dans un ampli au son clair, la Casino révèle sa personnalité qui oscille entre jazz, blues et rock.
- Epiphone Casino-Clean all pickups03:40
- Epiphone Casino-Crunch all pickups02:47
- Epiphone Casino-Lead all pickups04:17
Le micro manche est très rond et chaleureux, idéal pour du jazz bien que l’instrument manque globalement de présence. La position intermédiaire amène un peu de claquant et d’attaque dans le son. Le micro aigu manque un peu de caractère, c’est dommage.
En passant en son crunch, la guitare se réveille un petit peu et on comprend pourquoi Keith Richards et John Lennon en ont fait un instrument de choix à l’époque. Le micro chevalet manque toujours cruellement de personnalité, mais en attaquant la guitare un peu plus fort (même beaucoup plus fort), on peut la faire réagir de manière assez plaisante et retrouver une certaine énergie dans le son. Attention cependant aux résonances provoquées par le cordier en trapèze, symptôme que nous avions pu observer sur la Riviera déjà testée dans nos colonnes. Ce n’est pas dérangeant et fait parti du charme de la guitare. Le micro grave affirme encore plus sa personnalité en son crunch et développe une quantité impressionnante de basses qui enveloppent le son avec beaucoup de douceur et de velouté. C’est sympa. Le sustain est plutôt satisfaisant et la guitare est plus expressive sur ce réglage. La position intermédiaire est pour ma part assez anecdotique bien qu’on puisse jouer avec les potards pour trouver des sonorités originales. On passe sur le canal High Treble de notre Marshall SV20 et on monte le volume pour attaquer les saturations plus poussées.
Bien que la guitare ne soit pas faite pour ça, elle s’en sort tout à fait dignement. Encore une fois, il faut lui rentrer très franchement dans la tronche pour la faire réagir et obtenir l’énergie souhaitée et les micros perdent un peu de leur définition. Leur comportement reste cependant très honorable pour un instrument de cette gamme. On perçoit le côté acoustique de l’instrument, un léger voile qui donne un côté plus aérien au son et un sustain très musical. Le micro manche conserve sa personnalité et sa dose de basses avec un côté crémeux plutôt agréable.
Un coup de Poker
Si cette nouvelle version de la Casino est très jolie, notamment en Worn Olive Drab, cette finition Worn lui donne un aspect un peu « cheap », c’est dommage. La guitare est confortable à jouer et à prendre en main bien que le premier contact soit … étonnant. La lutherie n’est pas à la hauteur de celle de la Riviera et on sent les faiblesses de la guitare, d’autant qu’il faut lui rentrer dedans pour la faire réagir. Les micros sonnent bien sans être transcendants mais retranscrivent assez correctement la personnalité de la guitare. Néanmoins, on a le sentiment d’avoir un instrument somme toute assez banal, sans réels âme ni caractère. En revanche, le profil du manche, le traditionnel 60’s « C » est très confortable, et aucun bord de frette ne dépasse. C’est un détail à souligner pour une guitare de ce tarif. Proposée à 459 € dans sa finition Worn Blue Denim, la nouvelle Epiphone Casino a un rapport qualité/prix correct d’autant qu’elle est quasi seule sur ce segment. C’est une guitare qui ne demande qu’à s’affirmer et qui se bonifiera probablement avec le temps en la faisant vibrer tous les jours.