Acheter une guitare acoustique relève souvent du parcours du combattant pour le guitariste à la recherche d’un instrument qui ne l’endettera pas sur plusieurs générations. Les modèles haut de gamme sont souvent assez inabordables et les marques bon marché proposent trop souvent des instruments qui sont inconfortables à jouer, avec une action haute, des finitions souvent brouillonnes ou encore des couleurs et des formes de caisses qui ne sont pas toujours du meilleur goût…
Nous vous proposons aujourd’hui le test de la Washburn WD20SCE qui affiche un excellent rapport qualité/prix pour les jeunes musiciens qui ont besoin d’une acoustique qui pourra leur servir aussi bien à la maison que sur scène.
Un petit cours d’histoire et un rappel des connaissances pour les derniers de la classe…
La firme américaine Washburn est née à Chicago vers la fin du XIXe siècle. Elle propose aujourd’hui une gamme très large de guitares aussi bien électriques qu’acoustiques. Ainsi, pas moins d’une trentaine de modèles de guitares acoustiques réparties en 15 séries différentes font partie de son catalogue. La série Tahoe propose deux modèles : la Washburn WD20S et sa petite sœur la Washburn WD20SCE qui est de facture identique à peu de choses près sauf qu’elle a un pan coupé et qu’elle est munie d’un Fishman 301T afin de pouvoir être amplifiée sur scène.
La caisse de la guitare est de type dreadnought avec un pan coupé à la vénitienne pour un accès plus aisé jusqu’à la 17e frette. Pour les novices, le modèle « dreadnought » a été inventé en 1916 par la marque de guitares acoustiques américaine : Martin and Co. À l’époque, elle fabriquait ce type de modèle en sous-traitance pour la société d’édition de partitions originaire de Boston : la « Oliver Ditson Company ». Le modèle dreadnought fut définitivement intégré à la gamme de produits de Martin au début des années trente.
Si j’étais un charpentier…
La guitare est livrée en carton. Le flightcase est disponible, mais uniquement en option. Pour un prix moyen de 330 euros environ en magasin, il ne faut pas non plus être trop exigeant ! Au premier coup d’œil, la finition est vraiment à la hauteur. Il n’y a pas de traces de colle, le travail de marqueterie est finement réalisé et le vernis a été correctement appliqué. Il n’y a pas de défaut apparent, ni dans la lutherie ni dans la jonction entre le manche et la caisse. Le double binding sur le corps, mais également sur le manche et la tête est très bien exécuté, les finitions sont propres.
La table d’harmonie de la Washburn WD20S, en épicéa de Sitka canadien, est massive. C’est l’essence la plus utilisée dans le domaine de la facture des guitares folk. Elle permet une meilleure diffusion des fréquences ainsi qu’une meilleure projection sonore de l’instrument. Un petit nœud dans le bois confère à notre modèle une petite touche d’originalité. Les fibres du bois de la table d’harmonie laissent apparaître de légers reflets roses. Tout le corps de l’instrument est recouvert d’un épais vernis polyuréthane en finition brillante et la guitare reste dépourvue de pickguard. Le vernis sur la table est épais certes, mais je crains néanmoins de très vite voir apparaître des rayures au niveau de l’ouïe. Le dos, les éclisses et le chevalet sont en palissandre. Cette essence, ici aux teintes plutôt sombres, offre également de jolis dessins. Les chevilles sont en plastique blanc décoré d’un petit point noir. Le travail de marqueterie autour de la rosace n’est pas du tout de mon goût, mais il faut admettre que sa réalisation est très bien exécutée et assez raffinée.
Le manche possède 21 cases. Il rejoint la caisse de la guitare au niveau de la 14e frette. Il est en acajou avec une touche rapportée en palissandre. Le réglage du truss rod se fait en bas du manche, à l’intérieur de la caisse de résonance. Cela n’est du plus pratique surtout quand les concurrents font l’effort de placer le réglage du truss rod en haut du manche. La tête est affublée du nom de la marque et son logo y est finement incrusté. La guitare est montée avec un jeu de d’Addario de tirant 10/47. Le modèle qui a été mis à notre disposition est très bien réglé. On ne remarque pas de buzz, les cordes ne frisent pas même lorsqu’on attaque fortement à vide.
Le manche possède un diapason de 25,5 pouces pour un radius de 16 pouces, ce qui est l’idéal pour le réglage d’une action très basse. Les repères de manche sont de type point. Le manche est fin sur toute sa longueur et le vernis à son dos est satiné offrant ainsi un confort de jeu optimal permettant également d’avoir une excellente prise. Il permet un jeu fluide, détaché et précis aussi bien en mode accompagnement qu’en solo. Les barrés jusqu’à la 10e frette ne demandent aucun effort. Les frettes ont été correctement arrondies à leur extrémité permettant ainsi de glisser sans résistance le long du manche. Les mécaniques chromées « die cast » de type Gotoh sont robustes et souples. J’ai été très agréablement surpris par la très bonne tenue de l’accord de l’instrument. Même avec des attaques fortes, la justesse n’en pâtit pas, ce qui est un plus pour une guitare dans cette gamme de prix. On doit également au sillet et aux pontets (tous les deux en os) la parfaite intonation de l’instrument.
La caisse de forme dreadnought offre une projection correcte, mais sans plus. L’instrument sonne un petit peu creux et manque de basses. En effet, ces dernières manquent de rondeur et de rayonnement aussi bien au médiator qu’aux doigts. La guitare commence à délivrer un son plus charnu à partir du registre des médiums. Elle est parfaite pour le strumming et l’accompagnement. Les aigus sont très brillants sans être trop criards. Les leads passent bien dans le registre extrême aigu. De prime abord, même si cet instrument jouit d’un bon rapport qualité-prix, on perçoit vite ses limites, car il manque un peu de sustain. En effet, les accords que l’on laisse sonner disparaissent vite du fait du manque de résonance de l’instrument.
Electro-acoustique
La guitare est équipée d’un piezo de type barrette qui est placé sous le sillet du chevalet. Le préampli est un Fishman Isys+, version améliorée du Fishman IsysT. Il n’y a pas de câble qui se promène librement dans la caisse, tout est correctement arrimé. Le bloc du préampli du Fishman Isys+ est constitué d’un accordeur, du volume de sortie de la guitare, de 2 potentiomètres d’égalisation (aigus et graves), d’un indicateur de charge de la batterie (9 Volts) ainsi que d’un inverseur de phase dont nous verrons ultérieurement le fonctionnement.
Tous les exemples audio ont été faits avec les boutons d’égalisation en position neutre. Il n’y a ni saturation ni feedback lorsque le bouton de volume est tourné à 100%. Je déplore les dimensions du bouton d’ajustement du volume de sortie de l’instrument qui est trop petit afin de pouvoir ajuster avec précision le niveau de sortie. De plus, sa surface lisse est glissante, ce qui pourra s’avérer problématique surtout lorsque l’on a les mains moites lors d’une prestation scénique.
L’accordeur, même s’il est d’apparence plutôt rustique, est simple d’emploi et efficace. Il agit également comme un coupe-circuit lorsque la fonction accordeur est activée. Je déplore la taille trop petite des boutons d’égalisation pour pouvoir être manipulés avec précision. Ils sont moins pratiques que les boutons d’égalisation à bandes des marques concurrentes qui, d’un simple coup d’œil, permettent de mieux doser les réglages.
Avec les deux potentiomètres en position neutre, le timbre obtenu en notes détachées et en arpèges en sortie directe est un petit peu fin, sec voire même un petit peu piquant quand on monte le manche. On a beaucoup d’attaque mais le timbre est un peu maigre et le sustain fait défaut. De la même façon, la guitare, en picking, manque de puissance et de rondeur. On perçoit ici les limites de cet instrument plutôt orienté, il faut le rappeler, vers des budgets plutôt serrés. En revanche, la guitare tient bien la route pour les accompagnements de type folk assez dynamiques. Elle arrivera parfaitement à se fondre dans un ensemble instrumental sans prendre trop de place dans le spectre.
- Arpèges Mic 00:17
- Arpèges Phase Off DI 00:18
- Arpèges Phase On DI 00:17
- Arpège Phase Off Mic + DI 00:18
- Arpège Phase On Mic + DI 00:17
- Accords Mic 00:27
- Accords Phase Off DI 00:28
- Accords Phase On DI 00:27
- Accords Phase Off Mic + DI 00:28
- Accords Phase On Mic + DI 00:27
- Blues Mic 00:27
- Blues Phase Off DI 00:29
- Blues Phase On DI 00:27
- Blues Phase Off Mic + DI 00:29
- Blues Phase On Mic + DI 00:27
Des choix pas toujours très judicieux…
Washburn bouleverse ici les conventions. La prise jack ne se trouve pas au niveau de l’attache courroie de la sangle, comme c’est d’ordinaire le cas sur les guitares électro-acoustiques, mais un petit peu plus bas dans l’éclisse inférieure. La fiche jack a été fixée avec quatre petites vis. Je déplore sa position qui n’est vraiment pas pratique. De plus, la prise jack est vissée au bloc avec un écrou qui aura, j’en suis sûr, une fâcheuse tendance à régulièrement se desserrer et sortir de son étroit logement. La batterie du préampli n’est pas logée dans le boîtier du préampli, mais juste à côté du jack de sortie. Bien que la guitare ait été pensée pour la scène, on remarque l’omission d’une attache courroie sur le talon du manche (ce qui est vraiment fâcheux), mais auquel on pourra remédier soi-même à moindres frais.
Une simple pression permet d’activer le bouton « phase » qui, contrairement à ce que laisserait supposer son nom, n’est pas décrit dans le notice comme un inverseur de phase. D’après cette dernière, celui-ci permet, d’une part d’atténuer l’effet feedback aux niveaux sonores élevés et d’autre part d’accentuer la réponse en fréquences basses de l’instrument à faible volume. Il est vrai que l’on perçoit une légère différence lorsqu’on joue seul, mais cette fonction ne pourra pas être perçue dans un mixage lorsque la guitare sera mélangée avec d’autres instruments. La fonction anti-feedback quant à elle se relève très pratique : sa sensibilité au larsen à fort volume avec ce système étant nettement diminuée, c’est fort agréable surtout lorsque l’on s’approche de trop près de son amplificateur afin d‘ajuster ses réglages..
Malgré quelques détails décevants tels que la projection, le manque de basses et le positionnement des composants électroniques, je dresse un bilan plutôt positif du test de la Washburn WD20SCE. En effet, cette guitare jouit d’un excellent rapport qualité-prix pour un musicien débutant ou de niveau intermédiaire qui cherche un instrument qu’il pourra aussi bien utiliser à la maison, en studio ou amplifiée sur scène. Il reste à voir comment la guitare va vieillir et si elle va se bonifier et gagner en projection, ce qui sera pour elle et nos oreilles, un plus grand bien !