Bien que fondé en 1976 aux USA, Schecter aura dû attendre de nombreuses années pour voir enfin ses guitares débarquer en France. Suite à un changement de distribution, elles s'étaient faites rares ces derniers mois, mais les voici de retour dans l'hexagone. Le modèle que nous a confié High Tech Distribution, la Sunset Custom FR a tout à fait l'air de rester dans la tendance dark, malgré des formes 'superstrat' classiques. Mais voyons plutôt...
Bien que fondé en 1976 aux USA, Schecter aura dû attendre de nombreuses années pour voir enfin ses guitares débarquer en France. Suite à un changement de distribution, elles s’étaient faites rares ces derniers mois, mais les voici de retour dans l’hexagone. Le modèle que nous a confié High Tech Distribution, la Sunset Custom FR a tout à fait l’air de rester dans la tendance dark, malgré des formes 'superstrat’ classiques. Mais voyons plutôt…
D’abord axé sur la construction de 'super strats’, Schecter s’est diversifié au cours des années, sortant des modèles originaux (l’Avenger par exemple…) que l’on a surtout vu dans les pattes de musiciens estampillés 'musique énervée’ ou 'dark’. Ainsi, Robert Smith (The Cure) possède son modèle signature, ou encore Jeff Loomis (Nevermore), et l’on voit couramment des groupes comme Ministry, Type o Negative ou Carnivore s’afficher avec des pelles estampillées Schecter.
Aspect général & caractéristiques
Au déballage du carton, on se retrouve avec dans les pognes une gratte au look stratoïde très classique, lui donnant un air de famille très prononcé avec un tas de guitares aux mêmes influences sorties chez les constructeurs orientés « gros shred ». Le corps, en tilleul, comporte donc les deux cornes classiques, un chanfrein pour le bras droit et un autre à l’arrière pour caser son petit ventre à bières.
Pour donner une idée des proportions du corps, il faudrait imaginer le rejeton d’une RG ayant consommé son mariage avec la Strat Fender traditionnelle… c’est à dire ni trop radical, ni trop rond à la fois. L’originalité réside par contre dans la finition de la sunset, une peinture noire satinée, douce au toucher, qui tape agréablement à l’oeil, et mise en valeur par un joli binding couleur ivoire taillé directement dans le bois, et qui fait tout le tour du corps de la guitare.
Continuons le tour du propriétaire par le manche. Celui-ci est de type vissé, taillé dans un morceau d’érable et surmonté d’une touche en palissandre. La crosse est inversée (comme Hendrix ou Nuno Bettencourt), et la forme générale de celle-ci rappelle un peu certains modèles sortis en leur temps chez Lag, d’inspiration strat '70 mais en plus fin et arrondi. La tête est coordonnée au corps, et le logo Schecter bien mis en valeur, écrit en lettres gothiques, histoire d’être cohérent avec la finition du corps.
Mais les références dark ne s’arrêtent pas là, puisqu’on remarque que les repères de touche de la guitare sont en forme de croix gothiques, et façon 'nacre noire’. Si l’on peut apprécier le parti-pris esthétique, il faut avouer que des repères noirs sur une touche sombre, ce n’est guère pratique pour se repérer, surtout sur scène où l’on risque fort d’être plongé dans la pénombre. Enfin, on y retrouve le binding en bois naturel, esthétiquement réussi et très bien fini sur le modèle testé.
L’accastillage est bien sûr cohérent avec le reste de la bête, à savoir fait d’une chrome sombre (cosmo black chez certains constructeurs). Il est composé d’une copie de vibrato Floyd Rose sous licence (aucune indication sur sa provenance, ce qui laisse supposer à une production asiatique), accompagné de sa barre de rétention sur la tête (ce qui permet aux cordes d’être bien appuyées dans les gorges du sillet et améliore la stabilité du vibrato).
Côté électronique, les choses tournent au sérieux, puisqu’on retrouve une paire de humbuckers Duncan Designed (la production délocalisée de Seymour Duncan, inspirée de la gamme micros US). Surprise, il s’agit d’une paire de micros actifs, les HB-105, probablement inspirés des modèles blackouts ou livewire développés récemment par Seymour Duncan (et utilisés entre autres par Dave Mustaine). Niveau contrôles, le pilotage des sonorités se fait par un switch à 3 positions type « Gibson », ainsi que 3 potards: 1 volume par micro, plus une tonalité.
L’ensemble dégage une impression de sérieux, sans toutefois parvenir à faire oublier l’origine asiatique de la belle, ne serait-ce que par ces similitudes de formes et d’accastillage qu’elle partage avec nombre de ses cousines des autres marques. Mais La Fontaine nous l’aurait rappelé, le plumage n’augurant pas du ramage, voyons si la sunset est le phénix des hôtes de ces bois !
Prise en main et sonorités
Autant ne pas vous le cacher, la prise en main de cette Schecter Sunset est déroutante. De par ses faux airs de famille avec la production de chez Ibanez, Lag ou ESP, on s’attendrait a priori à un manche plat, fin, a priori autoroute à déboule pour les shredders de tout poil, d’autant que comme ses cousines, ce manche fait bien ses 24 cases et présente bien les bonnes frettes jumbo que l’on rencontre d’habitude…
Mais non, ce manche n’est pas du tout une planchette… Large, d’un profil en C dans les premières cases, il se fait bien présent en main, s’affinant sur la longueur pour adopter un profil en D un peu plus fin vers la jonction corps/manche. Sans atteindre non plus l’épaisseur des profils « bûches » traditionnellement associés à certains modèles de Les Paul, il faut avouer que ce profil relativement épais demande un petit temps d’adaptation, surtout au vu de la largeur et du diapason (648mm, type Fender) qui lui est associé. Mais je dois avouer qu’après un petit quart d’heure, mes grandes mains ont vite trouvées leur marques. Je me demande si les petits doigts seront aussi à l’aise…
Jouée à vide, la guitare est plutôt résonnante, produit un son équilibré, plutôt neutre, avec une attaque plutôt franche et un sustain correct. C’est tout à fait le genre de sonorités que l’on peut attendre d’une guitare au corps en tilleul, bois réputé un peu « passe-partout » en lutherie, mais sans mauvaises surprises. La guitare est « saine » au niveau de la lutherie, et paraît armée pour vieillir sans encombre.
Évidemment, jouer une solid-body non-branchée n’a finalement que peu d’intérêt… J’ai donc sorti mon ampli favori pour voir ce que notre Schecter « diamond series » a dans le ventre. Le test s’est effectué sur une Laboga Mr Hector, équalisation « au neutre » (tous les potards à midi), branchée dans un Two Notes Torpedo VB101, baffle « Marshall Slash signature » en Celestions V30 et pris par un micro Neumann U87. Soit du matériel à même de retranscrire le caractère de la guitare… en avant pour le crash-test donc ! Car, c’est souvent branchées que l’on ressent les limites des séries « économiques », l’électronique se montrant le plus souvent le point faible.
Hé bien, autant ne pas faire durer le suspense: les sonorités de la Sunset FR m’ont franchement surpris. Les 3 positions du micro se sont montrées très agréables, tant en son clair qu’en son saturé.
L’exemple de sonorités 'claires’ (3 fois la même phrase jouée sur les 3 positions du sélecteur) le démontre: les HB105 sont des micros puissants (ils font un peu saturer le canal clair), mais à la fois précis et plutôt chaleureux. La dynamique est excellente, les différentes positions sont plutôt équilibrées entre elles en terme de volume sonore. Le micro en position manche est définitivement la révélation de cette guitare: très équilibré, pas gras pour un sou, il conserve bien l’attaque en n’étant jamais boueux.
Et en saturé ? Hé bien, voyons sur un autre exemple sonore: 1 guitare rythmique de chaque coté, plus une guitare solo improvisée (et je demande votre indulgence, la fée qui a filé du talent à mon collègue Tristan m’ayant oublié en chemin) se situant au milieu, jouant d’abord sur le micro chevalet, puis manche. La bonne impression des sons clairs se confirme: on retrouve d’excellentes sonorités sur le micro chevalet, parfaites pour les musiques énervées, avec des attaques tranchantes quelque soit le micro, et un grain très facile à exploiter.
Clairement, ces micros sont le gros atout de la Schecter. D’autant qu’avec la disposition des contrôles, on peut mixer à loisir la proportion des deux micros en position intermédiaire, ce qui donne beaucoup de possibilités sonores.
Conclusion
Clairement, que cette guitare cache plutôt bien son jeu. Nous ne sommes pas du tout ici en présence de la nième copie asiatique d’une Ibanez RG, d’ ESP M-II. Malgré une lutherie plutôt classique et des choix d’essences de bois réputés plutôt « neutres », la Sunset a une identité affirmée, tant au niveau de son ergonomie que de ses sonorités.
Certes, le choix du profil de manche sera plutôt un inconvénient pour les petites mains, mais pour les autres, il est, pour ce qui est du jeu « rythmique » surtout, très confortable à l’usage. Le parti pris pour les micros est judicieux, il est franchement rare sur une guitare de ce prix de voir des micros à la personnalité aussi sympathique. Mes seules réserves concernent en fait la finition noire satinée, qui a tendance à marquer (mais c’est l’inconvénient sur toutes les guitares présentant ce genre de finitions), le floyd « économique » (bien qu’il se soit parfaitement comporté lors de l’intégralité du test… c’est en vieillissant qu’on aperçoit les limites de ces accessoires), les repères de touche noirs, peu pratiques, et enfin pour chipoter, l’ordre des boutons de volumes sur la caisse (on joue plus souvent sur le micro chevalet, la logique aurait voulu que cela soit le contrôle le plus proche à atteindre en jouant).
Clairement donc, une vraie guitare avec sa personnalité à part entière, qui nécessitera un essai pour se décider. Schecter prouve en tout cas que cette marque a un vrai trou à se faire dans le marché de la guitare, beaucoup de guitaristes risquant de trouver ces guitares attachantes.