Ce n’est pas parce qu’on n’a pas la notoriété des plus grandes marques que les produits sont moins bons. FabFilter, jeune éditeur (société fondée en 2002, premier produit, FabFilter One, sorti en 2004) le montre encore une fois avec la nouvelle version de son plug de filtrage, Volcano 2. Revue de détail de cet outil qui se veut le plus complet possible.
Ce n’est pas parce qu’on n’a pas la notoriété des plus grandes marques que les produits sont moins bons. FabFilter, jeune éditeur (société fondée en 2002, premier produit, FabFilter One, sorti en 2004) le montre encore une fois avec la nouvelle version de son plug de filtrage, Volcano 2. Revue de détail de cet outil qui se veut le plus complet possible.
Présentation
On peut acheter le plug sur le site de l’éditeur, bien que des versions boîte soient disponibles dans certains pays (pas en France), FabFilter ayant confié la distribution de ses logiciels à quelques distributeurs. Le plug est fourni aux formats AU, VST2, VST3 (bravo) et RTAS, pour PC et Mac (Intel et PPC). La version complète est vendue 119 € (hors TVA, soit 141,61 € TTC), la mise à jour à partir de Volcano 1 coûte quant à elle 39 € et une version crossgrade est vendue 79 € (il faut avoir un des autres plugs de FabFilter). Le plug peut être essayé pendant une période de 30 jours, et l’autorisation s’effectuera grâce à une clé de licence envoyée par mail dès l’achat effectué. On prendra soin de sauvegarder sur un support quelconque une copie du mail, on ne sait jamais…
Les changements sont nombreux, le premier d’entre eux est d’ordre graphique puisqu’il reprend la charte commune aux autres plugs (Twin, Timeless) : une interface aux couleurs pastel séparée en trois parties, tout en donnant une plus grande importance à la visualisation des manipulations et de leur résultat selon une variation du principe WYSIWIG, (“what you see is what you get”, littéralement “ce que vous voyez est ce que vous obtenez”), ici appelée “what you use is what you see” (ce que vous voyez est ce que vous utilisez). On n’ouvre et fait apparaître que les éléments dont on a besoin, fini les interfaces encombrées.
Là où Volcano première manière semble regorger de possibilités et de réglages, Volcano 2 fait plutôt impression discrète au premier abord. Si l’on reprend les caractéristiques du premier, on dispose de deux sections de filtrage, offrant le choix entre sept filtres, tous résonants, multimode, multipente avec réglage de Pan et capables d‘auto-osciller. Le routing permet de les utiliser en série ou en parallèle. Puis on trouve deux LFO, un générateur d’enveloppe et la possibilité pour chacun d’intervenir indépendamment sur l’un des trois réglages principaux de chaque filtre (fréquence, résonance et pan). Ajoutons un Midi Learn complet, un mode de triggering Midi (pour redéclencher/forcer la phase d’un LFO, par exemple), une quantité respectable de presets soigneusement conçus, une aide en ligne interactive (des bulles d’aide quand on laisse la souris sur un paramètre) et quelques autres subtilités et l’on a déjà entre les mains un ‘filtre’ polyvalent, d’une grande souplesse d’utilisation et créatif.
Puissance 4
Alors Volcano 2 multiplie-t-il tout par… deux ? Oui, et non. Oui, puisque l’on peut maintenant empiler jusqu’à quatre filtres. Non, parce qu’il propose bien plus qu’un simple doublement des autres fonctions.
Onze filtres sont maintenant à disposition. Afin de comprendre ce qu’apporte chaque filtre, j’ai joué un accord simple avec une forme d’onde en dent-de-scie, j’ai couché en audio et j’ai effectué via automation un balayage en mode LP 48 dB/oct., avec la résonance à fond (l’auto-oscillation est débrayée), puis une fois arrivé à ouverture complète, descente de la résonance et de la fréquence de coupure (la première à zéro, la seconde à la moitié de sa course) puis réouverture du filtre à fond. Outre le ‘géniteur’, le modèle FabFilter One, on trouve les filtres suivants : Smooth, Raw, Hard, Hollow, Extreme, Gentle, Tube, Metal, Easy Going et Clean. Le volume a été adapté afin d’éviter l’utilisation d’un limiteur, et ce que l’on entend est donc le volume de sortie respectif de chaque filtre à partir d’un même fichier (pas de normalisation). Une grosse exception et deux petites. Les dernières d’abord : Tube et Metal ont un volume plus élevé que les autres, et le limiteur a réagi (-1,57 dB pour le premier, –0,54 dB pour le deuxième).
La vraie exception : le filtre Clean ne produit pas de distorsion et, à l’inverse des autres, montre un comportement totalement linéaire. Le limiteur a cette fois été obligé d’appliquer une réduction de plus de 118 dB au moment ou fréquence et résonance ont la plus grande interaction (voir copie d’écran ci-dessus) ! Les exemples sont très parlants, et je vous invite à les télécharger pour les comparer dans un éditeur audio. Mais ce n’est là que la partie visible de l’iceberg. En effet, on peut utiliser simultanément quatre de ces filtres, les paramétrer indépendamment en Low, Hi, ou BandPass, en mode 12, 24 ou 48 dB/oct. D’autre part, le routing peut être configuré en stéréo (soit quatre filtres), soit en L/R ou en M/S (soit deux filtres par canal). Le montage montre la répartition des filtres (voir capture de droite). On peut très aisément reproduire des effets de formants, et les filtres peuvent être liés de façon à ce que des modifications sur l’un entraînent des modifications sur l’autre : les manipulations doivent alors se faire de façon graphique, grâce au petit symbole qui apparaît alors.
Si Freq et Peak sont des paramètres usuels, on trouve deux moins fréquents, Pan et Delay. Le premier agit sur la fréquence de coupure : si l’on panne d’un côté, ce canal sera traité avec une fréquence de coupure plus basse que celle de l’autre canal. Le deuxième, Delay, permet de reproduire entre autres les effets de filtrage en peigne, chorus, flanging. Ou mettre en application l’effet cher à Helmut Haas qui permet de jouer sur la perception psycho-acoustique de la provenance des sons (voir cet article). Moduler le retard d’un canal par rapport à l’autre en mode L/R offre ainsi des effets de localisation, de pitch assez intéressants. Cet exemple fait entendre en quatre étapes : un beat sans effet, puis dont le canal gauche est filtré, ce filtrage retardé puis la proportion de retard modulé par un LFO.
D’autre part, et comme si cela ne suffisait pas, les filtres peuvent être reliés selon plusieurs algorithmes, mélanges de série et parallèle rappelant ceux des oscillos de la FM, et bien entendu modulés pour donner ce genre de résultat, sur une suite d’accords toujours à partir du même son de dent-de-scie et un seul Volcano 2. Mais n’allons pas trop vite…
Modulations
L’intérêt d’avoir autant de filtres et de solutions de routage serait minoré sans la possibilité de les moduler en tout sens. C’est ce que propose donc FabFilter ; mais là où Volcano n’offrait ‘que’ trois modulateurs, Volcano 2 est survitaminé. Le principe de l’architecture est le suivant : un modulateur à choisir entre LFO (ici nommé XLFO), Envelope Generator, Envelope Follower et source Midi agit sur un ou plusieurs paramètres de filtrage par l’intermédiaire d’un contrôleur à taux variable, avec Bypass et inversion (Slot) placé dans une matrice. Un même modulateur peut être assigné à plusieurs paramètres de plusieurs filtres, et un même paramètre recevoir des modulations en provenance de plusieurs sources. La configuration est extrêmement simple et graphiquement très réussie : un modulateur dispose d’une petite cible sur laquelle on clique puis on tire un lien vers le paramètre choisi. Le plug-in crée alors le Slot correspondant (le montage image ci-dessus montre les deux étapes, le lien puis la création). Avant de passer en revue les modulateurs, il faut savoir que l’on a à disposition jusqu’à six XLFO, six Envelope Generator, quatre Envelope Follower et dix MIDI Source ! Sans compter la possibilité de tout commander par Midi grâce au très simple MIDI Learn, et de moduler un XLFO par un Envelope Generator ou un autre XLFO… Bref, les possibilités de modulation sont énormes.
Voyons le XLFO : en quoi diffère-t-il d’un LFO traditionnel au point de justifier une appellation propre ? Principalement par le fait qu’on peut y créer ses propres formes d’ondes, suivant un Step Sequencer, de 2 à 16 pas, ou utiliser les presets fournis (on peut aussi sauvegarder les siens). Chacun d’entre eux dispose de son réglage de hauteur (afin de recréer des périodes), de Glide (temps de montée ou de descente suivant la hauteur du pas, qui fonctionne en relation avec le Glide global du XLFO), du choix de la pente utilisée pour ce Glide (quatre types de Linear à Sine), et d’une fonction Random qui fournira une valeur aléatoire et différente à chaque passage du Step Sequencer sur ce pas. Un bouton Freq permet de régler la vitesse du cycle, de 0.02 à 500 Hz en mode Free. Le LFO peut être synchronisé à l’hôte, dans ce cas, les valeurs du menu varieront entre 16 mesures et le 1/64e de mesure. Freq correspond alors à un Offset de la division choisie, avec cinq présélections s’affichant sous la forme de points blancs. Le potard Balance fera varier respectivement les deux pentes de la période de la forme d’onde, plus rapidement d’un côté impliquant plus lentement de l’autre. La période peut aussi être redéclenchée via Midi, dès réception d’un message note-on. Idéal pour avoir une modulation toujours synchrone au jeu ou à une figure rythmique particulière, ou quand le plug lui-même produit une séquence rythmique. Ces XLFO sont donc extrêmement sophistiqués et permettent toutes sortes de variations, qu’elles soient calées rythmiquement ou aléatoires, avec en plus la possibilité de se moduler entre eux ou d’être modulés par un générateur d’enveloppe…
Modulations, encore
On continue avec les générateurs d’enveloppe, de classiques enveloppes ADSR. Un threshold (niveau de seuil) est présent afin d’ajuster précisément la réaction de l’enveloppe au niveau entrant. L’EG répond à trois types d’entrées (mais n’oublions pas que c’est un modulateur…) : le signal Normal, celui en provenance du Side Chain ou une note Midi. Un menu d’appel et sauvegarde de presets est aussi disponible.
FabFilter n’oublie rien en incluant un Envelope Follower, doté de réglages d’Attack et Release, acceptant le signal normal ou celui du Side Chain et disposant toujours d’un menu de presets. Ce type de modulateur appliqué à des réglages adéquats (fréquence de coupure ou résonance) peut redonner vie à un son terne, ou au contraire filtrer un contenu trop riche en fonction de ce qui est joué.
On finit par la dernière source de modulation, la MIDI Source. À ne pas confondre avec le Midi Learn, puisque le contrôleur choisi passera obligatoirement par un slot pour modifier le paramètre désiré, alors que le Midi Learn permet de contrôler directement ce paramètre.
Rajoutons à tout ça un Undo/Redo, une comparaison A/B, un manuel en ligne très complet, des aides en pop-up, le bypass de l’auto-oscillation, la sélection du signal à l’écoute (sortie, entrée ou Side Chain), des réglages de niveaux entrants et sortants avec leur balance, et un réglage de Mix.
Conclusion
Que l’on veuille juste l’utiliser en coupe-bas pour nettoyer une piste, ou comme un outil de création très inspirant, Volcano 2 répond présent à chaque fois, avec une simplicité de mise en route et de réglages assez unique. Aucun click, pas d’effet d’escalier, un comportement exemplaire quel que soit le type de filtre choisi, c’est impressionnant. Et l’interface graphique est vraiment de toute beauté, sachant parfaitement allier utilité et plastique.
La visualisation systématique des réglages, la puissance de modulation et de routing, la diversité et la qualité des types de filtre font du plug un outil très agréable à utiliser et que l’on paramètre extrêmement vite. La possibilité de sauvegarder des presets à chaque étape, au niveau de la matrice de modulation ou des configurations de filtres est un gain de temps très appréciable.
Ce plug donnera toute sa mesure sur des projets créatifs, du sound design à gogo, et il enrichira et rendra méconnaissable une banque de samples un peu terne. Mais il saura aussi se faire discret et efficace dans une utilisation ‘classique’. D’autant que sa consommation CPU est négligeable en regard des performances offertes et du son global.
Peu de filtres logiciels offrent ce niveau d’exigence sonore, de puissance de programmation et cette polyvalence. Nitro de PSP vient à l’esprit, mais n’offre pas cette souplesse à niveau des LFO, Filtroid de TC Electronic permet des choses intéressantes, mais ne dispose que deux filtres, SFX Machine Pro peut approcher certaines configurations. Après, il faut créer l’équivalent dans un environnement modulaire (Max, Reaktor, etc.).
Mais ce serait oublier que la qualité de Volcano 2 ne se limite pas qu’à ses nombreuses possibilités de programmation : non, ce qui est le plus important, c’est qu’il ne sonne comme aucun autre filtre. Mieux ou moins bien que l’un ou l’autre, là n’est pas la question. Volcano 2 a sa personnalité propre, et dans l’arsenal nécessaire à tout pratiquant de MAO, il aura sans nul doute une place de choix. Il n’y a qu’à télécharger la version de démo pleinement fonctionnelle pendant 30 jours pour s’en convaincre.