Sorti en 2005, Volcano se voulait être une émulation des filtres analogiques de nos synthés vintage préférés avec des possibilités de modulation. Dans sa troisième version qui nous arrive, le plug-in promet beaucoup plus que des opérations soustractives. Une bonne raison pour voir si ce volcan est aussi chaud qu’on le dit.
Filtre tout sauf le café
Depuis le début, le but de Volcano est d’allier la flexibilité d’une interface numérique avec une reproduction fidèle du son analogique, d’autant plus fidèle quand on met le plug-in en mode High Quality en bas de l’interface, ce qui permet d’obtenir la meilleure qualité sonore au détriment de la charge de calcul de votre ordinateur.
Il semblait évident de proposer le trio gagnant des filtres de synthé résonnants, le passe-haut qui va filter les fréquences basses de votre son, le passe-bas qui, lui, filtre les fréquences hautes et le passe-bande qui permet de balayer le spectre sur une plage de fréquences donnée.
Cette nouvelle version ajoute à tout cela un filtre en cloche, sorte de passe bande plus étroit ainsi que des filtres de dégradé haut et bas et un filtre passe-tout. Tous sont déclinables en plusieurs pentes selon que l’on veuille une coupure plus ou moins agressive (6, 12, 24 ou 48 dB/octave) et tous sont résonnants à l’exception du 6dB/octave.
Si cela ne suffit pas, vous avez également accès à une liste de 11 modèles de filtres qui donneront des saveurs différentes à la résonance ainsi qu’à la saturation de votre signal. On citera par exemple le modèle Tube (émulation de lampes), Extreme (pour les amateurs de sons agressifs) ou encore Smooth (pour des sons plus crémeux). Tout ces changements sont relativement subtils lorsque le filtre résonne peu mais on apprécie d’avoir ces options car elles donnent parfois de plaisantes surprises notamment lorsqu’on pousse la résonance dans ses retranchements, à plus forte raison quand la saturation est de la partie : outre des fonctions de mixage simples de volume et de panoramique, une fonction drive permet en effet de saturer le filtre, ce qui sera bien pratique pour grossir les basses par exemple.
En additionnant tout cela, on a un choix virtuel de plus d’une centaine de filtres différents et pour couronner le tout, vous pouvez ajouter jusqu’à 4 filtres par presets, avec la possibilité de définir leur relation : soit en parallèle, soit en série ou dans diverses autres configurations, sachant qu’on fait cela via des diagrammes très clairs. Il y a du coup de quoi ouvrir des possibilités immenses en terme de traitement créatif. Et on découvre d’ailleurs en explorant les très bons presets qu’avec de bons filtres et de l’ingéniosité, il est possible de reproduire un très grand nombre d’effets de modulation et même de créer des séquences basiques pour peu qu’on se plonge dans les modulations.
Ça bouillonne sous la surface
En tant qu’amateur de synthé, s’il y a bien quelque chose que je sais, c’est qu’un filtre est fait pour être modulé. Les développeurs de Fabfilter l’ont visiblement compris car depuis ses débuts, ce plug-in dispose de plusieurs moyens de faire bouger les filtres dans le temps. Un des premiers outils à notre disposition est un Enveloppe Follower qui va s’avérer très pratique lorsque on veut que le mouvement du filtre suive le volume d’attaque de notre son. Cette enveloppe dispose d’un mode normal et d’un mode transient qui augmentera sa vitesse de réaction. Autre point intéressant, il est aussi possible de déclencher l’enveloppe grâce à un signal externe en side chain, ce qui peut permettre des effets intéressants. Voyez cet exemple où l’on envoie un rythme de batterie dans un pad :
Rien qu’avec cette enveloppe, on s’amuse bien et on obtient très vite des résultats très créatifs. Le deuxième outil de modulation est le XLFO qui est un LFO configurable dans sa forme d’onde grâce a un astucieux système permettant de dessiner sa propre forme d’onde. Cela permet de créer de véritables séquences de modulation que l’on pourra même régler sur des fréquences précises correspondant à des notes. C’est ainsi qu’en faisant résonner un filtre jusqu’à l’auto-oscillation, on peut créer des séquences musicales à partir d’un son simple. Et c’est en explorant ces LFO que l’on comprend véritablement la partie créative de ce plug-in que l’on ne regarde alors plus comme un filtre mais comme un multi-effet d’un genre nouveau. Autre exemple possible avec ces XLFO, vous pouvez créer un effet de chorus franchement bluffant en utilisant à la fois la panoramique et des filtres en cloche dont la résonance évolue.
Bref, voyez la variété de choses qu’il est possible d’obtenir :
- Ghost Melody Beat00:15
- Spooky Chop00:22
- Pumping Pad00:34
- Phasey Break00:28
- Chorus_Rhodes00:16
- XLFO Beat00:16
- Drum Sidechain00:28
Les autres outils de modulations sont une envelope ADSR, un contrôleur XY qui vous permettra de faire rapidement du morphing entre vos différents paramètres ainsi que des sliders pour faire des contrôleurs macro. Dernier outil de modulation et pas des moindres, le MIDI ! Grâce à celui ci vous pouvez assigner n’importe lequel des paramètres MIDI, de la molette de modulation à la vélocité en passant par l’ensemble des 127 CC que comporte la norme. C’est un point important car cela rend ce plugin prêt à suivre les musiciens sur scène.
Interface explosive
Peu d’éditeurs de plug-in peuvent se targuer, comme Fabfilter, de devoir autant leur renommée à la qualité sonore de leurs algorithmes qu’à l’excellence de leur ergonomie. Concernant Volcano 3, l’interface est absolument remarquable tant au niveau de l’expérience d’utilisation que de la lisibilité : en haut à droite de l’interface, on trouve ainsi la possibilité de passer le plug-in en mode plein écran (ce qui peut servir si vous voulez faire une belle photo de votre studio pour votre communauté Instagram ou que vous voulez simplement avoir la meilleure visibilité possible sur ce que vous faites) ou de sélectionner différentes tailles de fenêtre. Et comme d’habitude avec Fabfilter, on dispose de bulles d’aide qui s’affichent lorsqu’on laisse la souris sur un paramètre (fonction désactivable), tout comme de la possibilité d’annuler/rétablir une modification ou de la possibilité de comparer deux patches différents grâce à l’option A/B : en conjonction avec la fonction Copy, cela vous permet de retomber sur vos pattes si vous avez un peu trop joué avec les XLFO.
Mais l’intéraction est au-delà de cela un vrai régal. Même sur des presets complexes, on retrouve vite son chemin car chacun des filtres est numéroté : il suffit de cliquer dessus pour que les paramètres affichés correspondent à celui-ci ! On apprécie également de voir une animation du spectre de notre signal ainsi que des animations des filtres lorsqu’ils sont modulés. Sur le plan de l’ergonomie, soulignons d’ailleurs que pour créer une modulation, il vous suffit de sélectionner et de déplacer le point coloré de votre modulateur vers n’importe laquelle des destinations (fréquence, drive, etc.) ; un petit menu s’affiche ensuite vous permettant de régler la profondeur de la modulation et le tour est joué !
Quand la cendre retombe
Il m’est arrivé à maintes reprises d’utiliser des filtres logiciels mais j’avoue que je pense avoir trouvé celui qu’il me fallait. Une interface claire, un son malléable, modulable et toujours de grande qualité et des capacités de communication avec l’extérieur grâce aux fonctions de sidechain et au MIDI : c’est tout ce dont on a besoin. Que l’on soit un savant fou qui veux expérimenter en empilant LFO sur LFO pour créer des formants bizarres ou que vous vouliez simplement créer des automations de filtres sur votre morceau afin de le rendre plus dynamique, vous trouverez avec Volcano 3 tous les outils dont vous avez besoin.
Certes, on n’est pas au point de dinguerie de « l’égaliseur » UVI Shade qui offre encore plus de types de filtres (filtre en peigne notamment) modulations (Pitch Tracking notamment qui permet de moduler en fonction de la hauteur tonale du signal) et de traitements (dynamiques notamment, de sorte qu’on peut en faire un compresseur multibande comme un EQ dynamique), plus de bandes aussi, avec des pentes atteignant jusqu’à 6000 dB/octave, et la possibilité de paramétrer chaque filtre en mode LR ou MS, et non pas seulement la globalité du plug-in comme dans Volcano… Sauf que sans que cela ne retire aucun mérite à l’exceptionnel plug-in d’UVI, Volcano 3 entend rester à sa place de filtre dans la gamme de Fabfilter, et s’avèrera peut-être plus aisé à prendre en main parce qu’il en fait moins justement, qu’on n’est pas tenté de s’y perdre. C’est à vous de juger donc, sachant que ce qui nous est livré là mérite sans problème ses 109 euros et qu’on a hâte, du coup, de voir quelle lave sortira de Volcano 4…