Maintenant que nous avons énuméré les usages possibles de la compression, je vous propose de prendre un instant pour décortiquer le fonctionnement d’un compresseur. Pour ce faire, nous allons expliquer de façon purement théorique les principaux paramètres généralement présents sur un tel engin.
C’est pas sorcier
Comme vous devez sûrement le savoir, le principe de base d’un compresseur est de réduire le niveau du signal audio dès lors que celui-ci dépasse un certain niveau fixé par l’utilisateur. Ce niveau charnière est appelé niveau seuil — ou threshold en anglais — et s’exprime en décibels. C’est théoriquement seulement lorsque le signal franchit et reste au-dessus de ce niveau que le compresseur est actif. Dans les faits, il arrive que la compression intervienne en dessous du seuil, comme nous le verrons par la suite.
Pour réduire le niveau du signal après le franchissement du seuil, le compresseur suit une sorte de règle mathématique imposée par le paramètre de taux de compression, plus connu sous le terme de ratio. Ce taux de compression s’exprime sous la forme « X:1 » qu’il faut lire « X pour 1 ». Dans les faits, cela veut dire que pour un dépassement de X dB du niveau seuil en entrée, le compresseur réduira ces X dB à un seul et unique petit décibel en sortie. Dit autrement, on peut considérer que pour un ratio de X:1, le niveau de la portion du signal dépassant le seuil est divisé par X.
La notion vous échappe encore ? Prenons donc un exemple plus concret : supposons que nous ayons fixé le seuil d’un compresseur à −12 dB et que le ratio soit de 4:1, si un signal audio entre dans le compresseur avec un niveau de −8 dB, soit 4 dB au-dessus du seuil, ces 4 dB de différence seront réduits à seulement 1 dB par le compresseur, ce qui se traduira par un signal en sortie de −11 dB, soit bien 1 dB de différence avec le niveau seuil.
Avant de passer à la suite, sachez que le ratio d’un compresseur peut monter jusqu’à un taux infini (inf:1 ou ∞:1) mais qu’au-delà de 10:1, ou 20:1 si vous êtes généreux, on ne parle plus vraiment de compression et l’on pénètre sur les terres du limiteur.
Passons maintenant aux constantes temporelles qui sont bien trop souvent mal comprises. Contrairement à la croyance populaire, le temps d’attaque d’un compresseur — ou Attack en anglais — n’est pas un laps de temps pendant lequel le compresseur patiente avant de compresser une fois le seuil franchi par le signal. Le compresseur commence bel et bien à compresser dès que le signal dépasse le niveau seuil fixé ! Cependant, le taux de compression exigé par le réglage du ratio n’est pas atteint instantanément. Le temps d’attaque est donc le temps que met le compresseur à réduire le niveau du signal afin de respecter le ratio demandé, ceci bien sûr seulement à partir du moment où le signal a dépassé le seuil.
En ce qui concerne le temps de relâchement — Release en anglais — c’est plus ou moins le même type de quiproquo. Lorsque le signal retombe en dessous du niveau seuil, l’action du compresseur est censée cesser sans s’assécher. Cependant, le réglage du temps de relâchement est là pour rendre la transition moins abrupte. Et une nouvelle fois, il ne s’agit pas d’un laps de temps pendant lequel le compresseur patiente avant d’arrêter net de compresser, mais bel et bien du temps que le compresseur prend pour diminuer progressivement son action afin de retourner au repos. Notez donc qu’en vertu de ce qui précède, le compresseur compresse bel et bien le signal alors que celui-ci est en dessous du niveau seuil ! Mais ne vous faites pas de nœuds au cerveau pour ça, gardez juste cette idée bien au chaud dans un coin de votre tête, on ne sait jamais, cela pourrait un jour vous aider à briller en société lors d’un apéro entre « audio geeks ».
Avant de conclure, juste un mot concernant le réglage du « knee » — littéralement « genou » en français. Ce paramètre conditionne la transition qui intervient au niveau seuil entre le taux de compression unitaire (1:1, pas de compression) et le taux de compression réglé par le ratio. On parle de « hard knee » lorsque cette transition est abrupte, et de « soft knee » lorsqu’elle est progressive. Notez qu’avec un « soft knee », nous avons encore une fois le compresseur qui commence à travailler avant de dépasser à proprement parler le niveau seuil.
Bien, la théorie, c’est bien sympa, mais la pratique c’est tout de même plus fun ! Rendez-vous donc dans le prochain épisode pour une méthode de réglage d’un compresseur qui devrait sensibiliser vos oreilles à l’impact sonore de chacun des paramètres.