réactions à la news Les britanniques restaurent un EMS Synthi 100

Citation de : Ny Batteri

Effectivement, je pense que ceux qui ont beaucoup bossé à l'époque sur tout ce matériel devenu légendaire doivent avoir une toute autre vision des choses que nous aujourd'hui.
Tous ces problèmes de fiabilité des consoles, de désaccordage des instruments, la pénibilité du travail sur bande, devaient tout de même leur faire s'arracher les cheveux régulièrement. Sans compter la crainte de faire une grosse bourde !

 S'arracher les cheveux régulièrement ? Non, pas plus qu'aujourd'hui car pour prendre l'exemple du montage sur bande et des opérations/manipulations en musique concrète ou électroacoustique cela faisait partie des contraintes inhérentes à ce style de musique. Et couper dans la bande avec la lame de rasoir, en diagonale pour effectuer un filé, inverser, etc. c'était des tâches habituelles. Et puis, il fallait inventer pour obtenir d'autres sons. Et d'ailleurs à cet égard, il faut lire "Journal de mes sons" de Pierre Henry qui décrit bien tout le processus de création à partir des bandes magnétiques. De même, il y a ce texte publié en 1974 et écrit par deux poids lourds de l'électroacoustique, Michel Chion et Guy Reibel et qui retrace bien comment on travaillait à l'époque, les différentes opérations sont décrites, ils évoquent la mutation des techniques avec l'arrivée du synthétiseur et de l'ordinateur (avec le mythique programme Music V de Max Mathews) et ils proposaient aussi un panorama des studios de musique électronique en France et dans le Monde entier. Le Pdf est ici.

Sinon, concernant L'IPEM de Gand et de son EMS Synthi 100 et il y a deux documents où sont évoqués son histoire. Celui sur le site belge matrix-new-music et qui retrace l'histoire de la musique électronique en Flandre dès les années 50 "Contemporary Music in Flanders: Flemish Tape Music since 1950, historical overview, discussion of selected works, and inventory" : ici.
Autre document intéressant "New Interfaces #2: Fifty Years of Electronic and Electroacoustic Music at the Ghent University" : ici. Et il y a des exemples de pièces de Louis de Meester, Lucien Goethals, David van de Woestijn. 
Enfin, un tour d'horizon des studios dans cette histoire "120 Years Electronic Music, the history of electronic Music from 1800 to 2015". Une histoire qui est abondamment illustrée avec des photos, des vidéos. C'est ici.

PS : Bien évidemment, les possibilités offertes par l'ordinateur pour ne serait-ce que monter des fichiers audio pour ma part je les apprécie, on gagne du temps et en précision. Mais il y a encore des passionnés pour monter directement sur des bandes magnétiques, pour le rapport "direct" avec le son, quand on cale le son avec de petits mouvements en avant et en arrière. C'est un peu semblable avec ceux qui continuent à privilégier en photo l'argentique. 

Citation de : Will Zégal

deb76 : tu parles d'une musique assez particulière et d'un usage assez particulier des bandes. Ce que tu évoques était un travail artisanal, réalisé par des personnes seules ou des petites équipes et où ce travail était partie prenante de la création (tout comme un tirage photo est partie prenante de la création de celle-ci).

Mais lorsqu'il s'agissait, en studio, de synchroniser plusieurs enregistreurs pour gérer les multipistes, etc. tout ça avec un groupe qui était là pour enregistrer et dans des situations où tout souci technique pouvait interrompre le processus créatif et lieu de l'enrichir (ce qui arrivait occasionnellement), je pense que le regard n'était pas du tout le même.

De même qu'en HS, on peut à la rigueur se permettre de perdre une prise parce que l'ordinateur a buggé (ce qui, à ma connaissance, est quand même devenu bien rare), on ne peut pas se permettre ce genre de choses en studio pro.

Will Zegal : Le sujet à la base c'est l'EMS Synthi 100 et sa restauration et pas les studios de production professionnels. Et ce que j'évoque avec les liens, c'est l'histoire de la musique électronique et électroacoustique et issue de la musique concrète. Et ce en droite ligne de ces studios où pouvait-être implanté un EMS Synthi 100. Où est le problème ? D'autant que j'ai rappelé tout au début que l'IPEM de Gand avait un EMS Synthi 100. Et ce dernier fait partie de l'histoire de la musique électronique de la Belgique. Faut-il rappeler qu'en 1981, toute la jeune génération belge (Peter Beyls, André Stordeur, Léo Kupper, Gilles Keev, etc.), militant pour la musique électronique et électroacoustique était à l'origine d'un grand festival à Bruxelles, le "Festival de Musique Electronique, Video et Computer Art" et qui s'était déroulé du 28 octobre au 10 novembre 1981 et avec un programme où pour ne citer qu'eux Morton Subotnick, Don Buchla, John Appleton animaient des ateliers (j'avais fait un PDF autour de ce somptueux programme). Bref, je pensais être dans le sujet et donc désolé. Mais tu peux si tu le souhaites modérer ma réponse.  

Citation de Will Zégal

Hors sujet :

Il n'en reste pas moins que c'était une avant-garde fort peu nombreuse et que, si l'on s'interroge de façon plus générale sur pourquoi les systèmes analogiques anciens ont pu être foutus à la poubelle, l'explication se trouve à mon avis dans les pratiques beaucoup répandues.

Hors sujet :

Juste un dernier point sur cette avant garde fort peu nombreuse. Peut-être quoique je n'en suis pas totalement convaincu en terme de nombre si on reporte ça au niveau international. Et dans les liens que j'ai cités, si je devais en retenir un, c'est celui de Michel Chion et de Guy Reibel qui font un état des lieux de cette avant garde en 1974. Avec d'une part un chapitre sur  la Tape Music - d'où est issu notamment Morton Subotnick - et sur la création du GRM où ils furent nombreux à participer ou à faire un stage, Boulez, Stockhausen, Xénakis à l'époque de Schaeffer et de la musique concrète. Mais pour les sérialistes (Boulez, Nono, etc.) la démarche de Schaeffer n'était pas assez rigoureuse, et les manipulations concrètes pas assez précises, trop limitées. Et c'est Stockhausen qui a porté le fer en participant à l'ouverture du studio de la radio à Cologne, avec l'environnement électronique (oscillateurs, générateurs d'enveloppes, etc.). Et ça a fait boule de neige au niveau international, grosso-modo dans les radios au niveau Européen, le GRM pour la France, la BBC pour l'Angleterre, les universités aux Etats Unis (avec les travaux aussi de Max Mathews avec l'ordinateur (le mythique programme Music V (aujourd'hui, dans ses différentes déclinaisons dont Music 10, devenu Csound) et aidé par Jean-Claude Risset, pour le travail sur les timbres, mais aussi de Milton Babbit pour les possibilités combinatoires, de précision de calcul et d'interprétation, de virtuosité),  mais ça essaimé rappelle Chion et Reibel en évoquant en tout 19 pays. Ce qui était quand même pas mal au bout du compte.

Le lien du PDF de Chion et Reibel et qui est vraiment très intéressant, passionnant à lire : ici.

PS : J'ai un  problème pour insérer des liens. Si je les insère directement, mon message disparait. Il faut que je passe par un mot, par ici pour les insérer. Et ça me fait ça sur trois ordinateurs sur Safari et Chrome.  

**** Contenu modéré ****

Pour tous ceux qui apprécient le lien sur le PDF de Michel Chion et de Guy Reibel : ça me parait normal de partager ce type de document.

 Je suis tout à fait d'accord avec toi concernant le montage sur bande magnétique. On sentait physiquement le son quand on calait pour couper précisément à un endroit précis, avec ces petits mouvements d'avancée et de recul, de gauche à droite et vice-versa, on était dans le son. Perso, guitariste à la base, j'ai commencé empiriquement fin 1968 avec un Huer Royal avant de passer sur Revox puis une formation au GMEB de Bourges en 1972. C'est vraiment là que j'ai appris les techniques de montages et de manipulations/opérations pour créer des pièces électroacoustiques. 
Mais en même temps, le passage à l'informatique musicale (stage de 40 jours à l'Ircam durant l'été 1981) a été pour moi une grande révélation. D'ailleurs, je dis toujours, et ce même si j'ai, j'ai eu beaucoup de synthés analogiques, de culture numérique avant tout (je sais que je vais en faire bondir certains en préférant les possibilités d'un puissant ordinateur pour composer). Mais j'aime bien aussi les machines à sons que peuvent-être les synthétiseurs. D'ailleurs, je note que j'ai un regain d'intérêt sur ces derniers avec un clavier depuis que j'ai pris des cours de piano. Il y a un aspect jeu que je découvre et qui est très agréable alors qu'avant ils n'étaient là que pour les sons "inouïs" qu'ils pouvaient créer. 

Citation de : Frajean

Citation de deb76 :

 
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Mais en même temps, le passage à l'informatique musicale (stage de 40 jours à l'Ircam durant l'été 1981) a été pour moi une grande révélation. D'ailleurs, je dis toujours, et ce même si j'ai, j'ai eu beaucoup de synthés analogiques, de culture numérique avant tout (je sais que je vais en faire bondir certains en préférant les possibilités d'un puissant ordinateur pour composer).
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Ahhhh l'IRCAM. Je vous envie beaucoup pour avoir pu y réaliser ce stage de 40 jours. J'ai un très grand souvenir d'y avoir passé une après-midi, lors d'une ouverture au public. Je crois que c'était lors de la journée du patrimoine, fin des années 80/début 90. On pouvait discuter avec les chercheurs, leur poser toutes sortes de questions, voir des démos de logiciels expérimentaux, écouter des pièces musicales. J'ai été impressionné d'entendre des sonorités que je n'imaginais même pas possibles, alors que j'étais un grand fan de musiques électroniques. J'avais les intégrales de JMJ, Vangelis, Tangerine Dream, Klaus Schulze, etc. et pourtant, tout un nouveau monde sonore s'ouvrait à moi !
J'aurais aimé entrer dans cet institut, mais après avec discuté avec ces chercheurs, j'ai compris qu'il fallait un très sérieux bagage mathématique, physique et musical; et je n'avais aucun des trois
Je n'y suis jamais retourné... est-ce que ça se visite toujours ?

A l'époque, été 1981,  on travaillait sur des mino-ordinateurs PDP11 et autres Vax avec Music 10 (une des mises à jour de Music V de Max Mathews (aujourd'hui Csound) et nous étions en temps différé et c'était un va-et-vient entre le code, sa validation, le temps de calcul puis l'écoute. Mais c'était fascinant, on découvrait la FM avec les travaux de Chowning, le programme chant (4 heures de calcul pour ces 10 secondes de synthèse vocale crée pour le 50e anniversaire du Beffroi de Lille, l'Internationale) mais ce qui m'a le plus fasciné ce fut la station musicale 4X en temps réel. C'était prodigieux. Et aujourd'hui, avec les outils dont on dispose, on a de quoi faire. C'est, d'ailleurs pour cette raison que je privilégie une station de travail puissante (Imac 27 i7 Retina 5k 32 Go de Ram) en tant que lutherie informatique, pour créer et traiter de la matière sonore, créer des sons inouïs.  

Hors sujet :

 Je pense que oui. Et de toute façon, il y a des concerts programmés, des manifestations autour du forum Ircam. C'est beaucoup plus ouvert qu'on ne le pense. Perso, outre le fait que j'utilise les logiciels de l'Ircam, je travaille sur un projet "pédagogique" qui m'amène à être régulièrement en contact avec des membres de l'institut. Et pas plus tard qu'hier matin, j'étais en visio-conférence avec d'autres compositeurs avec un des compositeurs/chercheurs de l'Ircam pour approfondir des points sur Open Music. Et c'était passionnant.
Mais rien ne vous empêche d'utiliser le logiciel de Composition Assistée par Ordinateur (CAO) Open Music qui est distribué gratuitement sur les trois plateformes (Mac, Windows et Linux) et s'inscrire au forum Ircam pour les échanges :

Open Music présentation, téléchargement, documentation. 

Et pour ne pas "polluer" le sujet, on peut en discuter en privé. N'hésitez pas.