La légendaire TB rejoint le catalogue d’Arturia dans une version largement améliorée. De quoi en faire un incontournable ?
L’histoire est facétieuse : conçue par le génial Tadao Kikumoto auquel on doit aussi la 909, la TB-303 fut un énorme flop à sa sortie en 1982 au point que sa production en 20 000 exemplaires n’a duré que 18 mois. Il faut dire que son but était initialement de proposer aux guitaristes un outil capable de générer des lignes de basse pour qu’ils puissent travailler leur instrument… Quelques années plus tard, alors qu’on la trouve pour quelques poignées de dollars dans les vide-greniers, la TB connait un regain d’intérêt de la part d’un autre public : les DJ. À Chicago comme à Detroit, on s’enthousiasme en effet pour le filtre sans compromis de la machine qui permet d’obtenir des sons décrits comme acides : on est alors à la naissance de la House et de l’Acid House, avant que la machine soit ensuite adoptée dans la Techno et la Trance et qu’elle fasse, quinze ans après son lancement, le bonheur de deux versaillais casqués pour leurs travaux domestiques…
Une machine mythique donc, mais mythique jusque dans sa virtualisation puisque l’émulation de la 303 était au cœur du ReBirth de Propellerhead, l’un des premiers synthés virtuels vraiment réussis de l’histoire de la MAO…
On n’en a jamais Acid
Inutile de dire que la TB a depuis été maintes fois reproduite, notamment par D16 et AudioRealism puis pas Roland lui-même, au point qu’Arturia ne pouvait pas s’en tenir à un bête fac-similé de l’original, mais se devait d’élargir les capacités de la 303 pour rendre son Acid-V attractif. Et ça tombe bien car c’est exactement ce qu’ont fait les Grenoblois, loin de s’en tenir au minimum syndical.
Outre une belle section d’effets (17 effets à utiliser dans 4 slots) et des possibilités de séquence plus développées (arpégiateur, etc.), ces derniers ont ainsi pris la liberté de rajouter un oscillateur dédié aux subs (qui pourra descendre jusqu’à deux octaves dans le bas avec trois formes d’ondes au choix), un vibrato qui va donner plus ou moins de mouvement à chaque note et une distorsion proposant 14 algos différents.
Si le look de l’interface évoque sans conteste la TB-303, les commandes sont donc assez différentes dans leur nombre comme dans leur emplacement… Et encore n’est-ce là que la partie visible de l’iceberg car comme toujours avec les modélisations d’Arturia, on peut déplier l’interface pour accéder à encore plus de fonctionnalités. On la dépliera vers le haut pour aller chercher les réglages fins de la modélisation : accentuation des basses, niveau de bruit, niveau des accents, plage de la fréquence de coupure, etc.
En cliquant sur Advanced, on dépliera le bas de l’interface où nous attendent les trois enveloppes de modulations, la section d’effets et surtout le séquenceur/arpégiateur, autrement plus évolué et pratique que le séquenceur rudimentaire de l’original : d’abord par ce qu’on dispose d’un système de contrainte à une gamme (plusieurs presets sont disponibles, mais un mode Custom permet de faire votre sauce) et ensuite parce qu’on dispose de la fonction Transmutation qui n’est ni plus ni moins qu’un générateur de patterns aléatoires assorti d’un réglage de densité : avec ce dernier vous aurez ainsi des motifs avec plus ou moins de notes, tandis que des petits dés permettront d’agir au niveau des accents, des slides ou des vibratos en particulier… Précisons-le, Transmutation n’impacte que la séquence, mais pas les modulations ou les effets…
Enfin, soulignons une dernière particularité d’Acid-V : on peut l’utiliser en mode séquenceur, en mode arpégiateur… ou en mode externe, c’est-à-dire triggé par les notes que vous saisirez dans votre piano roll en sachant que fort logiquement, un glide sera déclenché à la moindre superposition de notes tandis que la vélocité déclenchera ou non l’accentuation. Simple, basique, comme dirait l’autre, mais éminemment fun à jouer !
La tirade d’Acid…
Et du coup, comment ça sonne ? Bien, très bien même, à commencer par la disto dont voici trois algos différents sur le même motif :
- Disto100:11
- Disto200:11
- Disto300:11
Le vibrato permet d’ajouter un mouvement intéressant aux notes tenues :
Et inutile de dire que l’oscillateur Sub n’est pas là pour faire de la figuration. Voyez le même son sans, puis avec sur un réglage à –1, puis un réglage à –2 :
- NoSub00:04
- Sub-100:04
- Sub-200:04
À la faveur de tout cela, on peut obtenir pas mal de choses, dont des sons bien agressifs comme on les aime :
- BigBottom00:04
- Hardcore00:04
- nasty00:04
- hardcore00:05
Mais aussi pas mal de sons qu’on n’imagineraient pas forcément sortir d’une TB :
- ambient00:11
- Ambient200:04
- hiphop00:05
- lead00:36
- Cloud00:04
- quiet00:04
- trance00:04
Et voyez tout cela mis en situation :
Bref, tout ce qu’a ajouté Arturia agrandit significativement les horizons sonores de la machine sans que l’ergonomie n’en souffre jamais : le succès de la TB-303 s’explique entre autres par sa simplicité d’usage qui n’est absolument pas mise à mal par tous les ajouts des Grenoblois. Bravo pour ça !
Alors bien sûr, on est face à une petite bête bien typée et on a vite fait de se promener dans les genres de musique électronique où elle s’est illustrée, mais on voit qu’il est possible, à force de modulation, d’effets et de réglages de tirer la belle vers des genres qui ne lui sont pas forcément associés, comme le hip-hop par exemple…
Conclusion
Bref, il n’y a vraiment pas grand-chose à reprocher à cette Acid-V. Peut-être aurait-on aimé une fonction de génération aléatoire au niveau des modulations ou des effets, mais en dehors de cela, la copie rendue par les grenoblois frise la perfection : le caractère de la TB est là et bien là tandis qu’en termes d’ergonomie comme de fonctionnalité, Arturia a emmené la machine bien plus loin qu’elle n’allait. Et comme son design simple ravira les débutants, il est inutile de dire que le plug est promis à un bel avenir !