Au pays des interfaces audionumériques, la guerre fait rage. TC Electronic tente de tirer son épingle du jeu en proposant une jolie petite boîte FireWire intégrant à la fois deux préamplificateurs micro et des effets. Mais cela suffira-t-il pour sortir du lot ?
TC Electronic a réussi à se faire un nom dans le monde de l’audio grâce à ses effets de studio hardware et autres processeurs et cartes de traitement à DSP en tout genre. Alors quand la marque danoise décide d’intégrer son savoir-faire, qui n’est plus à démontrer, dans une interface audionumérique FireWire, évidemment ça met l’eau à la bouche. La konnekt 24D a donc comme particularité principale d’intégrer un DSP en plus des traditionnelles entrées micros, ligne, instrument, S/PDIF et ADAT. Reste à savoir si la petite dernière est à la hauteur de la renommée de TC Electronic.
Déballage
En ouvrant le carton, on a l’agréable surprise de tomber sur une boite en aluminium esthétiquement très réussie. Toute les personnes ayant pu approcher la bête sont unanimes, la konnekt 24D est très belle et c’est avec un plaisir certain que l’on découvre les différents potentiomètres et boutons blancs arborés en face avant de l’interface. En plus d’avoir un look très ‘Apple’, elle a l’air très solide et respire véritablement la qualité. En contrepartie, la belle pèse son petit poids d’amour, ce qui n’est pas forcément un inconvénient, car cela lui permettra de rester bien en place. La première impression est donc très bonne et laisse présager de bonnes choses pour la suite…
Chaud devant
La face avant possède deux entrées de type combo XLR/Jack permettant d’y brancher un micro et un instrument. Un switch permettra d’enclencher un pad de –20dB et d’atténuer ainsi la sensibilité en entrée en cas de signal trop élevé, obligatoire si l’on veut brancher une source de niveau ligne. Par contre, le pad devra être désactivé si vous voulez brancher directement une guitare ou une basse. Un autre switch active l’alimentation fantôme 48V nécessaire pour la majorité des microphones statiques. Les entrées 1 et 2 se voient affublées d’un classique potentiomètre de gain et de 3 LEDs indiquant le niveau d’entrée. Un troisième switch permet quant à lui de désactiver les entrées XLR au profit des entrées Jack TRS (et donc symétriques) situées sur la face arrière. Une LED indique l’état de fonctionnement de l’interface.
On continue avec un potentiomètre cranté ayant une course sans fin et entouré de LEDs qui permet de contrôler le niveau (ou la panoramique, après avoir exercé une pression dessus) de l’un des 4 canaux de l’interface, sélectionnable via le switch juxtaposé. Le dernier switch permet de faire un recall, l’utilisateur pouvant enregistrer trois configurations différentes. Nous passons sur le classique, mais néanmoins indispensable, potentiomètre de niveau de sortie pour mettre en lumière la présence de deux sorties casque 6.35mm, dont une coupe les sorties principales.
Froid derrière
En retournant la bête, on retrouve les entrées/sorties MIDI, S/PDIF (optique et coaxiale), ADAT et les deux prises FireWire qui permettront de chainer jusqu’à 4 Konnekt 24D ensemble. Au niveau des entrées et sorties analogiques, l’interface en dispose de quatre au format jack 6.35mm TRS, et donc symétriques. Il est aussi important de souligner que le switch de mise sous tension se trouve sur le panneau arrière, ce qui n’est pas forcément très pratique, mais c’est sûrement le prix à payer pour garder une interface abordable… En revanche, TC nous a réservé l’agréable surprise de pouvoir alimenter sa konnekt 24D via le bus FireWire, ce qui est très utile pour une utilisation nomade, à condition bien sûr que votre ordinateur portable possède une prise 6 broches et non 4 broches. Sachez néanmoins que si vous décidez de chaîner plusieurs unités, une seule pourra être alimentée via le FireWire, les autres devront utiliser leur bloc d’alimentation (fourni).
Installation et driver
À l’heure où j’écris l’article, TC vient de mettre à jour le driver et le firmware de son interface. Ces derniers apportent de nouvelles fonctions très intéressantes, mais restent en version bêta. L’installation ne s’est pas faite sans heurts et sur les différentes machines utilisées, nous avons dû installer manuellement le dernier firmware pour pouvoir ensuite installer le driver en indiquant le chemin de son emplacement à Windows. Ceci-ci est sûrement dû à la jeunesse de ces pilotes, on peut tout de même saluer TC pour avoir apporté des nouvelles fonctions que nous allons découvrir ensemble durant ce test…
Une fois l’interface correctement installée, on lance le panneau de contrôle qui permettra de faire les divers réglages concernant le monitoring des entrées/sorties, la latence et les effets intégrés. La première page dénommée ‘mixer’ permet de voir le niveau du signal en entrée grâce aux Vumètres, de régler le niveau de chaque entrée (1 à 4) dans le monitoring, de les muter, de les mettre en solo, de gérer la panoramique, d’envoyer une partie du signal dans la réverbération intégrée (Fabrik R) via le potentiomètre ‘send’ et de mettre en insert le compresseur / deesser / égaliseur intégré (Fabrik C). Le petit ‘plus’ TC Electronic est de pouvoir contrôler certains potentiomètres virtuels avec ceux bien réels de la face avant de l’interface. Ainsi, les volumes et les panoramiques des 4 entrées peuvent être modifiés avec le potentiomètre ‘source’. C’est toujours sympathique de ne pas avoir à toucher à la souris pour faire ces quelques réglages. L’anneau lumineux entourant le bouton indique alors la position du fader virtuel. Sur la partie droite de l’interface, on retrouve le monitoring du DAW (station informatique audio), un niveau général de sortie (Main Out) et le retour d’effet de la réverbération. Une fois votre configuration terminée, vous pourrez la sauvegarder sur le disque dur ou dans l’un des trois emplacements presets accessibles directement sur la face avant de l’interface via le switch ‘DSP total recall’. Sachez néanmoins que les paramètres des effets ne seront pas sauvés.
La deuxième page ‘Setup’ permettra de linker en stéréo les deux premières entrées, pratique pour un synthétiseur par exemple. On pourra régler aussi la synchronisation des entrées/sorties numériques : horloge interne ou source externe. Toujours concernant les entrées/sorties digitales, trois configurations sont disponibles : ADAT 1–8 (tous les canaux sont réservés à l’ADAT), ADAT 1–6 + S/PDIF 7–8 (6 canaux ADAT + 2 canaux S/PDIF coaxial) ou TOS 1–2 + S/PDIF 7–8 (2 canaux TOS sur la liaison optique et 2 canaux S/PDIF coaxial). C’est toujours sur cette page que l’on pourra régler le routing et les sources affectées aux sorties analogiques et numériques de l’interface. Pour finir, on pourra choisir le taux d’échantillonnage (jusqu’à 192 KHz). Sachez toutefois qu’à 96Khz, Fabrik C et R ne pourront fonctionner simultanément, il faudra choisir ! À 192 KHz, les effets intégrés seront complètement désactivés, et c’est bien dommage…
Tu m’fais de l’effet
Justement, les effets, parlons-en ! Deux sont disponibles, Fabrik C et R. Le premier est ce que l’on appelle dans le jargon des sondiers une ‘tranche de console’ complète, c’est-à-dire le regroupement d’un compresseur, d’un deesser, d’un égaliseur et d’un limiteur, le deuxième effet est une réverbération. Les réglages des effets se veulent accessibles et pour cela TC electronic a décidé de passer par une petite série de presets couvrant bon nombre de situations. Fort heureusement il est aussi possible de faire ses réglages aux petits oignons, ce qui ravira les utilisateurs plus expérimentés.
Ça compresse
On commence avec le compresseur qui peut fonctionner en pleine bande ou sur trois bandes séparées. Le multibande peut servir si vous désirez compresser un instrument couvrant une large bande de fréquences, un groupe d’instruments ou un mix entier. Cependant, TC ne recommande pas l’utilisation de ce dernier pour le mastering. Via une série de presets où l’on choisit le type de source (voix, guitare, batterie, etc.), le compresseur se prérègle et l’utilisateur n’a plus qu’à peaufiner le son avec les réglages de gain, de compression et de niveau. C’est un fonctionnement qui peut dérouter un peu au début. En fait, le réglage de seuil est déterminé par le type de la source et il sera plus ou moins rapidement atteint suivant le réglage de gain. En gros, pour compresser, au lieu de baisser le seuil de déclenchement de la compression, on augmente le gain du signal pour que ce dernier atteigne le seuil plus rapidement. Les réglages se font en déplaçant des leviers sur un quadrillage composé de lignes horizontales et verticales. Ainsi, si l’on déplace le levier du gain horizontalement, il agira sur le gain de sortie, et verticalement sur le gain en entrée. En mode trois bandes, un triangle se dessine sur le quadrillage, chaque coin représentant une bande de fréquence (basse, médium et aiguë), et deux réglages supplémentaires s’offrent à nous. La quantité de compression, représentée par le point ‘C’, se règle en déplaçant ce dernier vers un coin du triangle au choix : ‘basse fréquences’ pour compresser les basses, etc. Le dernier réglage, ‘level’, ou contrôle de niveau, et vous permettra de rehausser ou baisser le niveau d’une bande de fréquences particulière.
L’égaliseur est beaucoup plus classique dans l’utilisation et possède quatre bandes paramétriques. Quatre types de filtres sont disponibles : Notch, paramétrique, Shelving (plateau) et Cut (à coupure). Le notch a une bande étroite de 0.02 octave, le shelve va de 3 à 12 dB/octave. Pour couronner le tout, le Fabrik C possède aussi un deeser (facile à régler avec son paramètre unique), un limiteur ayant une plage allant de –12 à 0dB.
Ça réverbère
La Fabrik R inclut 4 algorithmes signés TC : Live, Hall, Plate et Club. Au niveau des réglages, on reste dans l’esprit de la Fabrik C, c’est-à-dire simple. Quatre paramètres sont mis à la disposition de l’utilisateur : Reverb, Color, Modulation et Distance. Le levier ‘C’ (color) peut se tirer dans n’importe quelle direction dans le triangle dont les angles représentent les paramètres LoColor, HiColor et HiFactor. Ce dernier paramètre gère la largeur de la bande sélectionnée par le HiColor. Le levier ‘Distance/Level’ balance entre les paramètres ‘Dry’ (dosage du signal direct), ‘Early’ (quantité de premières réflexions) et ‘Reverb’ (quantité de réverbération issue du champ diffus). Le levier ‘Reverb’ permet de régler le decay et le pré délai tandis que le dernier levier de Modulation ajuste la profondeur (depth) et le taux de modulation (rate).
Routing
Les effets internes de la Konnekt 24D peuvent être utilisés de différentes manières suivant les situations. Les deux modules Fabrik possèdent leurs propres entrées/sorties disponibles dans le séquenceur et peuvent donc être utilisés comme des véritables effets hardware externes. L’utilisateur peut décider d’enregistrer à la fois une piste sans effet et une piste compressée, égalisée ou réverbérée (ou tous les trois en même temps !). De plus, grâce à la nouvelle version des drivers il est désormais possible d’utiliser les effets en VST directement dans le programme hôte. Il suffit juste de signaler dans le panneau de contrôle si l’on veut utiliser les effets en mode VST ou en mode interne. Le gros avantage des DSP intégrés est la latence nulle : vous pouvez envoyer au chanteur que vous enregistrez un peu de réverbération (pour qu’il ait l’impression de mieux chanter) directement dans son casque sans aucune latence et sans solliciter votre ordinateur. Vous n’êtes cependant pas obligés d’enregistrer cette réverbération, libre à vous ! Il sera possible aussi de compresser et égaliser à la prise et c’est d’ailleurs là l’utilisation première de la Fabrik C. En effet, lors du mixage, on a souvent besoin de plus d’un compresseur, et comme la Fabrik C ne permet d’avoir qu’une seule instance à la fois… La Réverbération sera par contre très utile lors du mixage utilisée en effet auxiliaire dans votre séquenceur préféré.
Assimilator
Assimilator est un soft livré avec la Konnekt 24D et ne fonctionnant que si l’interface est branchée à l’ordinateur. Le programme consiste à analyser la courbe de fréquence d’un mix ou d’une piste pour ensuite l’appliquer à votre propre mix ou piste que vous venez d’enregistrer. Cela peut servir si vous voulez que votre mixe sonne comme le numéro un du top 50 ou encore pour que vos morceaux soient plus homogènes et gardent la même identité sonore et le même équilibre spectral. Pour cela, il faut d’abord analyser le fichier audio ‘source’, puis la ‘cible’ et ensuite lui appliquer la courbe du fichier référence. Ce soft est très simple à utiliser et pour aider les débutants. Sachez néanmoins qu’il n’y a pas de solution miracle pour faire sonner un mix et Assimilator est un outil qui pourra vous aider dans votre quête, ou pas. En effet, d’autres paramètres, comme la dynamique et la panoramique, rentrent en compte dans un mixage. Le programme reste dans la lignée des Fabrik C et R : simple à utiliser et garantissant un résultat honnête même pour les néophytes. D’ailleurs, une bardée de presets est disponible pour aider les utilisateurs : mix général, instruments solos (batterie, guitare, piano, sax, cordes, etc.), voix et effets.
Le son
Rentrons maintenant dans le vif du sujet : comment ça sonne ? Dans une interface audio numérique, la qualité du son est principalement dépendante de la qualité des préamplificateurs, des convertisseurs intégrés et de l’horloge numérique. Pour ce qui est des préamplis, je les ai testés en branchant un micro statique large membrane, le 4040 de chez Audio-Technica. Je l’ai placé devant une guitare acoustique, et plus précisément pointant vers la jonction manche/caisse de l’instrument. Je n’ai pas eu à pousser le gain : un tiers de la course suffisait à faire saturer l’entrée et c’est bon signe, les préamplis IMPACT en ont dans le ventre sans pour autant souffler. Il y aura de la réserve pour les micros moins sensibles. Le timbre de l’instrument est bien respecté et le tout est équilibré. Les convertisseurs sont du même niveau et une bonne qualité globale se dégage du produit. La belle robe de la Konnekt cache de très bonnes qualités sonores.
Pour ce qui est des effets intégrés, je les ai trouvés très simples d’utilisation. Ce côté ‘plug & play’ est très pratique et ravira les moins expérimentés d’entre nous. J’ai compressé, égalisé et ajouté une réverbération à la prise de guitare, le meilleur moyen de vous faire une idée est d’écouter ! Le compresseur peut dérouter au début, car ses réglages sont inhabituels, il n’empêche qu’il s’est révélé très efficace. L’égalisation est plus classique et remplit très bien son rôle. Je garde le meilleur pour la fin : la réverbération. On le sait, la marque a déjà fait ses preuves dans le domaine et ses effets sont utilisés dans beaucoup de studios professionnels. TC ne faillit pas à sa réputation : les quatre algorithmes se complètent très bien et possèdent tous une qualité sonore excellente, surtout pour le prix ! Voici la prise de la guitare acoustique sans effets et avec les effets (compression, égalisation et reverb) de la konnekt 24D.
Conclusion
Ce n’est pas la peine de faire durer le suspens plus longtemps : la Konnekt 24D est une franche réussite, aussi bien sur le plan esthétique, ergonomique que sonore. Nous sommes en possession d’une interface qui ravira plus d’un utilisateur notamment grâce au DSP intégré qui n’est pas un gadget, bien au contraire. TC Electronic profite de son expérience dans le domaine et c’est un plus indéniable par rapport aux autres interfaces disponibles sur le marché. Que ce soit à la prise ou au mixage, les effets intégrés vous rendront service. Bien sûr, l’interface n’est pas exempte de tout reproche et on aurait aimé avoir plus d’effets intégrés, plus d’instances possibles simultanément (on en veut toujours plus !) ou la possibilité d’avoir des réglages plus classiques pour le compresseur. Mais peut-être que le constructeur nous réserve la surprise pour une mise à jour prochaine…