La HDSP 9652, fabriquée par le constructeur allemand RME Audio, est l'évolution logique des cartes audionumériques de la série DIGI, et plus particulièrement de la DIGI 9652. On pourrait situer cette carte d'hybride entre une Hammerfall en rack et l'ancienne Hammerfall DIGI9652. Cette nouvelle version ajoute en effet deux entrées / sorties MIDI qui étaient totalement absentes dans le modèle précédent ainsi qu'un nouvel outil, le TotalMix, permettant de mixer 52 canaux sans latence.
Un univers purement numérique et orienté pro
Le carte audionumérique RME Audio HDSP 9652 étant purement numérique, elle est avant tout destinée à une utilisation semi professionnelle ou même professionnelle. Les deux cas de figure les plus courants seront de connecter la carte son à une table de mixage numérique au travers de ses nombreuses entrées / sorties ADAT, ou encore d’adjoindre des convertisseurs externes haut de gamme (jusqu’à 24 bit / 96 KHz) sur ces mêmes entrées / sorties. Des connecteurs internes permettent en outre d’ajouter à la carte une ou deux extensions « AEB8/1 ». Chacune remplace alors (selon le modèle) une entrée ou une sortie ADAT par respectivement huit entrées ou huit sorties analogiques haute qualité. Avec deux cartes d’extension AEB8/1, on dispose donc de 16 entrées analogiques et d’une entrée ADAT huit canaux.
Au niveau de la synchronisation numérique, RME propose plusieurs modes. Le premier est certainement le plus simple pour l’utilisateur, puisqu’il s’agit d’une synchronisation automatique de la carte son sur l’une des entrées numériques (ADAT ou SPDIF). C’est ici que la PLL de la carte son est particulièrement sollicitée puisque la carte se cale en permanence sur la fréquence de l’horloge source. Dans ce cas, l’utilisateur doit choisir une entrée préférentielle comme référence, afin que la carte son sache sur quelle entrée ADAT ou SPDIF se synchroniser en priorité. Pour effectuer des tests dans ce mode, nous avons changé la fréquence d’échantillonnage de la table de mixage sur laquelle était synchronisée la carte. La HDSP s’est alors calée immédiatement sur la nouvelle fréquence d’échantillonnage sans aucun problème.
Le second mode de synchronisation, réservé aux configurations plus professionnelles, se fait via l’entrée / sortie WordClock. Cette interface présente dans la plupart des matériels audio haut de gamme, permet de synchroniser plusieurs appareils « [def]esclave[/def]s » sur un seul appareil « [def]maître[/def] ». Il est rare de trouver des entrées / sorties [def]Wordclock[/def] sur une carte audionumérique. Ceci est un élément supplémentaire poussant à croire que la HDSP 9652 est dédiée aux stations professionnelles avant tout.
Pour finir, un connecteur ADAT Sync est également disponible afin de synchroniser la HDSP 9652 avec des produits disposant d’un tel connecteur (notamment les produits Alesis). En pratique, le circuit électronique intégré à la carte (PLL), qui permet une synchronisation sur les signaux numériques externes, s’avère particulièrement stable et fiable. Pas un seul décrochage numérique ne s’est fait entendre lorsque la HDSP était branchée en esclave sur la table de mixage numérique, la synchronisation ayant été effectuée via l’entrée ADAT puis via l’entrée WordClock. L’inverse (carte son en maître et table de mixage en esclave) donne bien sûr des résultats de la même qualité, ceci dépendant en grande partie de la table de mixage esclave (ici, une Ramsa DA7).
La résolution interne des traitements numériques (routing, mixage, panoramique…) se fait en 40 bits, ce qui est assez impressionnant compte tenu du fait que ce chiffre dépasse la résolution interne de la plupart des tables de mixage numériques professionnelles. Un musicien que l’informatique ne rebute pas et qui dispose de peu de place dans son studio pourra donc très bien envisager d’acquérir une HDSP et un ou plusieurs convertisseurs externes et de tout piloter via son séquenceur audionumérique préféré, ce qui lui permettra de s’affranchir d’une table de mixage externe.
Une connectique sobre et efficace
La HDSP 9652 possède trois entrées / sorties ADAT ainsi qu’une entrée / sortie SPDIF, ce qui lui permet d’attendre 52 entrées / sorties simultanées. En branchant trois convertisseurs huit canaux sur les entrées / sorties ADAT, on atteint donc en nombre d’entrées l’équivalent d’une table de mixage numérique 24 canaux, ce qui demeure assez appréciable. Il est de plus possible en théorie de cumuler trois HDSP au sein d’un même ordinateur, étendant ainsi le nombre d’entrées / sorties à 156 ! S’il ne nous a pas été possible de tester en pratique ce cumul de trois cartes, il faut noter que le bus PCI d’un ordinateur ne devrait a priori pas saturer lors du transfert d’un tel flux audio. Ceci dépend néanmoins de la qualité de la carte mère. Attention donc aux cartes mères bas de gamme dont la bande passante du bus PCI est souvent limitée.
Deux entrées / sorties MIDI sont disponibles (une nouveauté par rapport à l’ancien modèle la DIGI 9652). Malheureusement, le port PS2 utilisé pour connecter les quatre câbles MIDI s’avérait (dans le modèle de test tout au moins) plutôt fragile et il vaut mieux ne pas toucher au connecteur une fois que l’on reçoit bien le signal MIDI dans son séquenceur. RME Audio nous avait habitués à des produits d’une plus grande robustesse ! On espère donc que la prochaine série de HSDP n’aura plus cette petite lacune.
La HDSP permet de choisir une résolution de 16 à 24 bit et une fréquence d’échantillonnage de 44,1 à 96 KHz. Seule restriction : le mode 24 bit / 96 KHz limite le nombre de canaux simultanés à 12 canaux au lieu de 26 lors du playback. Cette limitation s’explique notamment par celle du format ADAT (qui à l’origine sait véhiculer 8 canaux en 48 KHz / 16 bits).
Outils Logiciels
Le logiciel Digicheck de RME Audio
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L’utilitaire DigiCheck permet de mesurer avec précision le niveau crête, le niveau RMS et la phase du signal entrant.
Il ne faut pas s’attendre à disposer d’une version « allégée » d’un quelconque séquenceur fourni avec la carte son. Les seuls logiciels accompagnant la HDSP 9652 sont des outils de diagnostic propriétaires à RME Audio. Parmi eux, Digicheck permet entre autres de mesurer le niveau des crêtes, RMS, la composante continue du signal et, détail fort intéressant, la phase du signal. Il s’agit donc d’outils fort utiles pour contrôler le son avec précision, mais qui se cantonnent à ces fonctionnalités de base. Par conséquent, il faudra, lors de l’achat d’une configuration complète, penser à se réserver un budget pour les logiciels de musique car aucune version « allégée » d’un séquenceur ou d’un édtieur audio n’est fournie.
Routing au sein de la carte
Le TotalMix permet de mixer sans latence les 26 entrées audio de la HDSP 9652 en un seul écran.
L’une des grandes nouveautés de la HDSP 9652 est certainement le TotalMix. Cet outil logiciel permet de mixer les 26 entrées et d’effectuer de nombreux routings différents vers les sorties, ou bien en interne, et ce avec une « latence zéro ». Entendez par « latence zéro » que celle-ci est non comparable à celles des cartes son traditionnelles, qui se compte en millisecondes. Cette faible latence est rendue possible par le fait que le mixage s’effectue au sein de la carte son sans passer par le bus PCI de l’ordinateur. Les applications du totalMix sont nombreuses, à commencer par la fonction « patchbay », permettant de rerouter n’importe quelle entrée sur n’importe quelle sortie. Etant donné que l’ADAT regroupe huit canaux en une seule fibre optique, il est impossible de câbler physiquement les canaux séparément. Le TotalMix permet de contourner ce problème de manière purement logicielle. Un autre type d’utilisation du TotalMix est de mixer la sortie de plusieurs programmes vers une seule sortie physique ainsi que les 26 entrées de la carte, pour obtenir un seul canal stéréo. Et tant qu’à faire, pourquoi ne pas utiliser la sortie SPDIF pour router ce signal mixé, et l’envoyer vers son enregistreur DAT ? Les possibilités d’utilisation du logiciel sont donc nombreuses.
Le TotalMix permet également un monitoring direct ASIO sans latence, même lors de l’utilisation d’un séquenceur en parallèle. L’interface homme machine du logiciel est pour le moins austère et assez chargée du fait qu’il y a beaucoup d’entrées sorties à gérer en un seul écran. Cet outil n’en demeure pas moins fonctionnel, et l’enregistrement de presets dans cette « table de mixage virtuelle » permet d’enregistrer tous les paramètres de volume et de panoramique. Cet outil, aussi pratique qu’il soit, ne saura cependant pas remplacer toutes les fonctionnalités de traitement et de routing d’un séquenceur audionumérique. Il n’est par exemple pas possible d’enregistrer une évolution dynamique d’un fader et de synchroniser cette évolution avec le séquenceur. Le principal intérêt du TotalMix est de pouvoir retrouver certains routings type rapidement (via les presets) et de s’affranchir d’un séquenceur lorsqu’il s’agit simplement d’entendre ce qui entre dans la carte son. Le TotalMix s’avère donc bien utile lors de l’utilisation de la HDSP 9652 en tant que véritable « table de mixage ».
Performances
La machine de test est une « petite » configuration : un AMD Duron 750 avec un chipset VIA (un PC particulièrement « sensible », donc, en ce qui concerne sa compatibilité avec les cartes son professionnelles). Ce PC dispose de 512 Mo de RAM et tourne sous Windows 2000. Le séquenceur utilisé pour les tests est Cubase SX. La carte son est branchée sur un port ADAT de la table de mixage numérique en entrée / sortie. Les deux entrées / sorties MIDI sont utilisés simultanément. La synchronisation numérique est faite d’abord automatiquement sur l’entrée ADAT, puis via l’entrée Wordclock (l’horloge de la carte son étant synchronisée sur celle de la table de mixage).
Dans le cas du jeu via un séquenceur comme Cubase SX, il a été possible de descendre, avec un morceau d’une dizaine de pistes, à seulement 3 ms, ce qui met cette carte en tête de peloton des faibles latences. Pour les machines peu puissantes ou les morceaux très chargés en nombre de pistes, monter à 6 ou 12 ms sera souvent une solution, ce qui engendrera une latence encore fort acceptable.
Et les drivers ? Fidèles à la tradition, RME Audio propose de nombreux drivers sur Mac et PC. On trouve les classiques drivers MME, multiclients, qui s’avèrent efficaces sous des séquenceurs audionumériques comme Sonar, à défaut de disposer de drivers WDM pour Windows 2000 / XP. L’ASIO 2 est également de mise, permettant une latence théorique de 1,5 ms (en pratique, nous sommes descendus à 3 ms sans clics audibles sur la machine de test). Enfin, les drivers GSIF permettent d’atteindre une latence très faible sous Gigasampler. La liste des systèmes d’exploitation reconnus est également quasi exhaustive : Windows 98 / Millenium / 2000 / XP sur PC et MacOS 9 et MacOS 10 sur Macintosh (Sur Mac, seul l’ASIO 2 est proposé). Enfin, sachez que des drivers sous Linux peuvent être utilisés avec la HDSP. Les Linuxiens qui ont foi en des projets de séquenceurs « open source » comme Agnula (www.agnula.org) pourront donc rêver d’utiliser leur carte HSDP sous cet OS avec une suite logicielle digne de ce nom.
Conclusion
Certes le prix (739 €) ne met pas cette carte son à la portée de toutes les bourses, mais pour le musicien désirant s’affranchir d’une table de mixage, la HDSP semble être une solution fiable et fonctionnelle. Dans ce cas, il faudra acheter des convertisseurs internes (AEB 8/1) ou externes, à moins que toutes les sources audio soient toutes numériques. La synchronisation sur une table de mixage numérique est une autre solution envisageable. Et qu’en est-il de l’évolutivité de la carte ? Il faut savoir que la HDSP 9652 peut être facilement mise à jour grâce à son BIOS flash intégré. Les drivers, régulièrement mis à jour sur le site du constructeur, assure également la pérennité de la carte sur les futurs systèmes d’exploitation. Ceux qui cherchent la fiabilité et la performance avant tout ont peut-être trouvé la carte idéale…