Mon petit doigt me dit que les écouteurs intraauriculaires (ou in-ears monitors) sont actuellement en pleine extension. Ils visent deux publics : musiciens et auditeurs. À chacun, ils offrent un confort et une praticité qu'aucun autre produit ne peut donner.
Mon petit doigt me dit que les écouteurs intraauriculaires (ou in-ears monitors) sont actuellement en pleine extension. Ils visent deux publics : musiciens et auditeurs. À chacun, ils offrent un confort et une praticité qu’aucun autre produit ne peut donner.
Rappelons d’abord qu’il s’agit de casques audio qui au lieu de se placer sur les oreilles, s’introduisent dans l’entrée du conduit auditif. Avec à la clé de multiples avantages : moins encombrants à transporter qu’un casque classique, ils sont aussi beaucoup plus discrets. Et par rapport à de simples écouteurs, ils isolent au moins partiellement des bruits extérieurs.
Côté auditeurs, avec une population ayant des durées de trajets croissantes dans des transports en commun bruyants avec, les casques in ears offrent de meilleures conditions d’écoute à volume raisonnable sans enquiquiner ses voisins et en préservant son look.
Côté musiciens, ils donnent sur scène une solution de retour avec de multiples avantages. D’abord, on peut bénéficier de sa propre balance sans qu’elle soit polluée ni par les retours des autres musiciens, ni par l’ampli d’un guitariste fou ou l’agression des cymbales qui vous explosent aux oreilles. On a ainsi de bonnes chances de préserver ses oreilles dont on sait qu’elles sont si fragiles et irréparables. Et puis, c’est moins encombrant qu’un retour bain de pieds et en couplant le casque à un émetteur-récepteur, on gagne une belle mobilité puisqu’on ne dépend plus de l’emplacement des enceintes.
Les produits testés
Sennheiser IE4
Ce casque ne figure pas au catalogue produit de Sennheiser, mais à son catalogue de pièces détachées. C’est en effet le casque qui est livré de base avec les systèmes in ears EW300IEMG2 comportant émetteurs et récepteurs. Son prix est autour 65 € ce qui offre, pour les désargentés, une solution correcte d’entrée dans le monde des intraauriculaires.
M-Audio : IE-10, IE-20 XB et IE-30
Les trois produits de M-Audio offrent un choix de 100 à 250 € ce qui les place plutôt dans le milieu de gamme du marché. Le IE-10 est le premier prix. L’IE-20 XB s’appelle XB pour extra-bass et est destiné selon son constructeur à l’audition de musiques qui s’écoutent habituellement avec un sub. Le IE-30 est le haut de gamme sensé fournir la plus grande fidélité.
Future Sonic Atrio M5
Ce produit US semble ne pas être commercialisé en France. On peut cependant le commander en ligne pour 199 $, soit autour de 140 €.
Présentation
Tous ces casques sont livrés avec un ensemble d’embouts de tailles diverses pour s’adapter aux différentes morphologies. Le kit de l’Atrio est le plus complet avec un choix de quatre tailles d’embouts caoutchoutés plus de nombreux en mousse de différentes tailles. La même chose chez M-Audio, mais avec une seule mousse et aucune pour le Sennheiser IE-4.
Au niveau des accessoires, le Sennheiser étant une pièce détachée, on a le strict minimum : le casque et différents embouts.
Les M-Audio IE-10 sont livrés avec une housse souple de transport, plutôt réussie, mais assez petite. Il faut bien ranger le casque dedans pour que ça tienne et on n’emportera rien d’autre.
La boîte livrée avec les IE-20 XB et IE-30. Un peu épaisse, mais volumineuse et solide comme un tank |
Les IE-20 XB et IE-30 en offrent beaucoup plus : en plus de la housse, on a une boîte rigide, plus un atténuateur (nous y reviendrons) et un adaptateur jack ¼". Les M-Audio sont les seuls à fournir un véritable manuel (en anglais).
L’Atrio dispose d’un étui semi-rigide qui s’avère être le meilleur compromis taille / protection de l’objet et aspect. D’autant que sa taille permet d’emporter aussi quelques accessoires. Le manuel est inexistant. Un peu de blabla qui n’apporte rien et, par contre, un bon de commande pour se faire des moulages sur mesure.
Les casques
Tous les modèles ont la construction classique d’un câble unique côté prise qui se sépare ensuite en deux pour aller aux écouteurs. À part le Sennheiser, ils sont tous munis d’une coulisse qui permet de resserrer les deux câbles autour du cou, le plus souvent sur la nuque en utilisation scène.
Le plus modeste est le Sennheiser. Ses écouteurs sont les plus petits et les câbles sont fins, au point qu’ils m’avaient fait craindre pour la solidité lors du test du EW300IEMG2. Pourtant, après plusieurs mois d’un usage assez régulier, il fonctionne toujours à la perfection. La petite taille des écouteurs les rend très discrets.
L’Atrio présente également des fils assez fins qui semblent pourtant s’avérer tout aussi résistants à l’usage. Ses écouteurs sont plus gros et ont un design bio dissymétrique assez esthétique.
Avec le Sennheiser et l’Atrio, on était dans le noir classique (notez que l’Atrio existe aussi en version bleu cobalt sous la référence M8). Avec les M-Audio, on passe au look blanc translucide mis à la mode par Apple. Personnellement, j’adhère assez moyennement à ce style qui me donne l’impression de me promener au rayon d’accessoires de salle de bains de la Foir’fouille. Question de goût.
La gaine des câbles des IE est transparente et leur donne un assez bel aspect. Relativement épais et assez rigides, ils véhiculent une impression de solidité que seul un usage longue durée pourra confirmer. Point fort : ils sont détachables : ils sont liés aux écouteurs par une petite prise deux broches tellement bien intégrée que je ne l’ai découverte qu’à la lecture des spécifications ! Voilà un sacré bon point pour cette gamme.
Mise en place
Les M-Audio IE-20 XB : ils font payer leurs belles basses par une taille conséquente |
On parlera de ‘position casque’ pour un placement avec les câbles tombant simplement vers le bas et d’une ‘position retours’ avec les câbles passés au-dessus de l’oreille. Cette dernière est la plus fréquemment utilisée sur scène, notamment pour sa discrétion. La première solution a pour elle l’avantage d’être pratique, car les écouteurs sont installés et enlevés en un clin d’œil. La seconde offre normalement une meilleure tenue, mais implique un enfilage plus fastidieux, d’autant qu’il est préférable dans ce cas de passer les câbles dans le dos de l’utilisateur. Très peu pratique quand il s’agit de chausser son casque entre la sortie du boulot et la première bouche de métro.
Les IE-4 et les Atrio M5 sont les plus faciles à mettre, et ceci dans chaque position. La mise en place est réalisée en un clin d’œil. Sur l’IE-4, les côtés gauche et droit sont identifiés par une sérigraphie bien lisible qui ne s’altère pas avec le temps. Sur l’Atrio, ceci est assuré par une gravure dans le plastique de l’oreillette qui est difficile à voir en conditions normales et absolument invisible dès qu’on n’est pas en pleine lumière. En position casque, pas de soucis puisque la forme des écouteurs incite et oblige quasiment à les mettre dans le bon sens. Mais en position retour, il faut inverser les écouteurs ! Ceci n’est à priori par très grave si on a un retour mono, mais s’il est stéréo, la communication avec l’ingé son pour faire la balance risque de s’avérer olé olé ! Sur les premiers centimètres du câble, on a une enveloppe plastique semi-rigide qui conserve la forme qu’on lui donne et permet ainsi d’accrocher l’écouteur sur le dessus de l’oreille, renforçant ainsi la tenue.
Les M-Audio sont assez peu utilisables en position casque. En effet, leur tenue dans l’oreille est insuffisante pour porter le poids du câble et des écouteurs, plus lourds que les concurrents. L’installation en position retours est assez fastidieuse. Comme sur l’Atrio, on a une partie semi-rigide sur le début des câbles assurée ici par un petit fil métallique inséré dans la gaine. À part les IE-20 XB, pas de marquage gauche droit clair : c’est à la forme qu’on se repère. Une fois la mise en place effectuée, la tenue est bonne. Le câble vient mieux entourer l’oreille que sur le modèle de Future Sonic et on peut alors s’agiter autant qu’on veut sans aucune crainte de perdre ses écouteurs. Comme pour l’Atrio, il faut inverser les oreillettes entre la position casque et la position retours. En fait, c’est la position retours qui donne la latéralisation correcte. On voit donc que ces modèles sont réellement prévus pour être portés ainsi, un plus certain sur scène, mais pas en utilisation casque d’écoute.
Discrétion et confort
Les M-Audio IE-10 et 30 gagnent la palme dans ce domaine pour un usage scénique grâce à leur couleur blanche transparente. Le Sennheiser s’en sort bien grâce à l’extrême petitesse des écouteurs. Vient ensuite l’Atrio relativement visible. En dernier, on trouve les IE-20 XB dont la taille les rend très proéminents et absolument pas discrets. D’autant qu’une petite pièce en plastique d’aspect plus ou moins chromé placée à l’extérieur reflètera les projecteurs. En utilisation quotidienne d’écoute, tous ces modèles se valent plus ou moins (à part les IE-20 XB qui vont vous donner un look de cyborg). Les M-Audio sautent moins aux yeux par la couleur, mais sont assez volumineux et font un peu penser à de l’appareillage médical là où IE-4 et l’Atrio sont beaucoup plus classiques.
Cet aspect est à prendre avec des pincettes : il peut dépendre beaucoup de la morphologie de chaque individu, mais aussi, curieusement, du moment. J’ai remarqué qu’on supporte plus ou moins bien les in ears selon les jours, phénomène que j’ai également constaté avec les bouchons antibruit : il y a des jours où on les conserve longuement sans soucis et des jours où ils occasionnent une gêne et peuvent démanger.
En ce qui me concerne, les Sennheiser IE-4 remportent la palme haut la main : une fois en place, ils s’oublient et se portent longtemps sans aucune gène. Viennent ensuite les Atrio qui est sont confortables en position retour, bien qu’un peu intrusifs puisque les écouteurs pénètrent plus loin dans le conduit. En position casque, ils se montrent parfois un peu gênants. En dernier vient toute la gamme M-Audio. Même avec le plus petit embout, ils donnent une impression assez envahissante et relativement inconfortable. On s’y fait cependant : ils n’occasionnent pas de véritable gène, mais on ne peut pas dire que le confort soit là.
Ma chère et tendre qui a essayé les cinq modèles est claire : pour elle, l’Atrio remporte la palme du confort haut la main. De plus, elle estime que c’est celui qui offre la meilleure isolation acoustique.
Le son
Quel que soit leur prix, aucun de ces casques n’est capable de concurrencer les modèles classiques de studio autour de 150 €. Si vous pensez investir dans un intraauriculaire pour une telle utilisation, c’est de l’argent mal placé. Le seul usage vraiment envisageable est en retour musicien lors d’une prise de son. D’autant que, à moins de volumes d’écoute déraisonnables, ils laissent peu ressortir le son, ce qui limite les risques de repisse dans les micros. Mais le studio n’est pas la place de ces casques.
Le son le moins bon est clairement celui du Sennheiser IE-4. C’est celui qui dispose de la moins bonne définition sonore, dont le son est le moins détaillé. Le bas est assez brouillon et les aigus manquent de précision. Attention : ce n’est absolument pas un mauvais casque. Simplement, on en a pour son argent. Il est équivalent à certains casques ‘walkman’ dans cette gamme de prix, l’isolation en plus. Mais c’est le moins bon de ce test d’un point de vue sonore, ce qui n’a rien de surprenant quand on sait que c’est (de loin) le moins cher.
Le M-Audio IE-10 apporte un son beaucoup plus défini, notamment dans le bas qui est relativement net, bien qu’un peu léger. Côté aigu, on en a à foison, ce qui fait bien ressortir les cuivres de batteries, mais aussi donne une belle présence aux guitares acoustiques. Les voix sont claires. Par contre, le son manque de structure et d’assise dans le bas médium. On a vraiment l’impression d’une égalisation trop creusée. De plus, à la longue, le son se montre agressif jusqu’à en devenir fatigant.
Les IE-2O XB sont destinés, rappelons-le, à l’écoute de musiques qui nécessiteraient un sub. De ce côté là, ce produit est une véritable réussite. Les musiques électroniques chargées en basses sont bien vivantes et très agréables à écouter avec. C’est aussi vrai pour d’autres styles. Car si les basses sont bien présentes, elles ne sont jamais envahissantes et restent définies sans baver sur le bas médium. Étonnant. Le son est tout simplement plein et riche. Les aigus aussi sont une fois de plus bien présents donnant de beaux cuivres de batterie et des réverbes très distinctes. On retrouve cependant un peu de l’agressivité des IE-10, surtout sur les musiques acoustiques, mais pas seulement. Par exemple, sur Till Death Do Us Part de Cypress Hill, la caisse claire a tendance à se montrer agressive dès qu’on monte le volume. Sur la plupart des chants tous styles confondus, les sifflantes ressortent beaucoup, parfois jusqu’à l’agression. La perfection n’existe décidément pas.
Côté sonore, les IE-20 XB sont toutefois une vraie une belle réussite, plutôt dédiée aux musiques actuelles, essentiellement électroniques, Hip-Hop et Dub. Dommage qu’on le paye par une telle taille des écouteurs et une certaine fatigue sur la durée d’écoute.
Le son, suite
Les IE-30 offrent un assez bel équilibre. Les basses sont là, sans être comparables à ce qu’on a avec les IE-20. Pour le reste, ils sont un peu meilleurs : on perd de l’agressivité dans les aigus et on gagne en équilibre général. Les IE-30 gagnent la palme de fidélité de ce test, ce qui est bien normal étant donné que ce sont de loin, les plus chers. Par contre, ce casque sonne quand même très aigu, ce qu’on peut ne pas apprécier et rend l’écoute fatigante sur la durée.
Si vous avez plusieurs casques, rangez-les dans leurs housses ! |
Notons que les trois modèles de M-Audio ont un très fort niveau de sortie. Par rapport aux autres, il faut baisser le volume de la source d’environs 12 à 14 dB pour obtenir une puissance équivalente, d’où la présence d’un atténuateur pour les IE-20 et 30. Celui-ci fait aussi plus ou moins office de limiteur. Son introduction dans le circuit diminue effectivement considérablement le niveau de sortie, jusqu’à le rendre moins élevé que les modèles concurrents. Par contre, il dégrade pas mal le son et en poussant le volume, on arrive vite à de la bouille sonore.
En ce qui concerne les Atrio, comparés directement aux IE-30, s’ils semblent criards dans les premières secondes, c’est qu’ils sonnent très médium. On a pourtant des basses très correctes et des aigus assez présents et sans aucune agressivité. Il manque par contre un peu de bas médium pour assoir la musique et lui donner de la plénitude. De plus, les médiums ont une certaine tendance à se montrer un peu brouillons. Pourtant, sur la durée, ils s’avèrent moins fatigants que tous les M-Audio. En effet, on n’a pas cette hyper présence en aigus et on peut les écouter longtemps à bon volume sans fatigue. Concernant la définition et la précision, ils gagnent largement sur les IE-4, mais n’atteignent pas la précision de la gamme M-Audio.
Dans le domaine de l’isolation, ces casques se valent plus ou moins. Les données constructeur (entre 12 et 19 dB d’atténuation) sont à prendre avec des pincettes : l’isolation dépend de nombreux paramètres, dont la morphologie de l’utilisateur, la façon dont les écouteurs s’insèrent plus ou moins bien dans l’entrée du conduit auditif, etc. De plus, l’atténuation n’est évidemment pas la même sur toutes les fréquences et si les aigus sont plutôt bien filtrés, les basses passent largement. Ce qui est d’ailleurs plutôt souhaitable en situation de scène. Quoi qu’il en soit, on est loin de ce que peuvent apporter des bouchons antibruit ou des moulages personnalisés. Cependant, ces in ears donnent une isolation et donc un confort d’écoute sans commune mesure avec des écouteurs classiques. Si on doit faire un classement, disons qu’on a en tête les IE-4, puis les IE-30. Ensuite viennent les autres avec les IE-20 XB et les Atrio en queue de peloton.
Conclusion
Aucun produit de ce test ne ressort de façon exceptionnelle par rapport aux autres. Chacun a de quoi convaincre une clientèle en fonction de ses priorités personnelles. Les Sennheiser IE-4 ont pour eux leur prix, le confort et l’excellente tenue, mais sont en retrait côté son. Les M-Audio ont chacun un rapport qualité-prix cohérent. Ils offrent une belle définition, mais il faut s’accommoder de leurs aigus un peu agressifs. Sans doute l’idéal pour des gens dont l’audition, mise à mal par les concerts et les écoutes trop fortes au casque, a pas mal perdu en aigus. Les Future Sonic Atrio M5 sont en retrait d’un point de vue de la définition sonore par rapport aux M-Audio, mais ne sont pas fatigants et leur prix est bien placé. Je remettrais tout de même la palme à deux produits : le Future Sonic Atrio M5 et le M-Audio IE-20 XB à la fois pour leur cohérence globale et leur tarif.
Future Sonic Atrio M5
[+] Rapport qualité-prix
[+] écoute peu fatigante
[+] Utilisables en position casque ou retours
[-] Précision sonore perfectible
[-] Manque d’assise dans le bas
[-] Inversion gauche droite nécessaire en position retours
M-Audio IE-20 XB
[+] Très belles basses pour des écouteurs
[+] Bonne définition sonore
[+] Câbles détachables et accessoires
[-] Taille des écouteurs
[-] Confort perfectible
[-] Aigus un peu agressifs