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Test flight - Test Native Instruments Reaktor 4.x

Voilà, je viens de recevoir ce que j'attendais depuis longtemps : l'un des logiciels de synthèse modulaire et de sampling les plus puissants du marché : Reaktor 4.0 ! Le logiciel qui devrait m'ouvrir de nouveaux horizons... Voyons à présent ce qu'il en est après plusieurs semaines d'utilisation intense.

Voilà, je viens de rece­voir ce que j’at­ten­dais depuis long­temps : l’un des logi­ciels de synthèse modu­laire et de sampling les plus puis­sants du marché : Reak­tor 4.0 ! Le logi­ciel qui devrait m’ou­vrir de nouveaux hori­zons… Voyons à présent ce qu’il en est après plusieurs semaines d’uti­li­sa­tion intense.

 

Machine de test :

Je vous passe les tradi­tion­nelles ouver­tures du carton. L’ins­tal­la­tion sur Mac est, comme souvent, sans problème; les auto­ri­sa­tions ne néces­sitent pas de clé physique et se font donc en partie en ligne sur le site de Native. Reak­tor s’ins­talle en Stan­da­lone et plugins (AU, Dxi, RTAS, VST).

« Ghos­tri­der 1.1, this is Tower Control you’re clea­red for takeoff »

Check list achevé, mon reak­teur en chauffe, je lance ma première session. J’ouvre un premier ensemble (quelle belle inter­face compa­rée à celle de Reak­tor 3.0), j’ap­puie sur la touche C3 de mon clavier maître. Silen­ce… Zut, flûte, je n’ai pas fini mon check list. Audio, MIDI tout est confi­guré, je suis main­te­nant opéra­tion­nel, et sors le premier son du monstre.

Qualité sonore

Première impres­sion : je suis souf­flé par la gros­seur du son, si chère aux newbies de nos forums. Le vrom­bis­se­ment de la puis­sante machine est à faire pâlir. J’ha­sarde mes doigts sur le clavier, l’ins­pi­ra­tion qui me fait parfois carence me revient mira­cu­leu­se­ment. Chaque nouveau preset est source d’ins­pi­ra­tion, chaque ensemble (instru­ment) est un fleuve d’uni­vers sonores diffé­rents.

Afin de véri­fier cette « obésité » sonore, je me permets de couper tous les effets par défaut, ceux dont certains créa­teurs de sons ne se privent pas, enro­bant ainsi faci­le­ment d’un peu de miel des sons trop cheap. Bien qu’un peu sec, le son garde toutes les carac­té­ris­tiques qui lui donnent son ampleur.

La qualité des inter­faces varie d’un instru­ment à l’autre, certaines sont très complexes et laissent présa­ger les possi­bi­li­tés de l’en­semble. On y trouve aussi bien les boutons de contrôle habi­tuels (LFO, ADSR, etc…) que des champs XY qui permettent (à l’image d’un touch­pad) de contrô­ler deux para­mètres à la fois.

Contrô­leurs graphiques

Ce qui m’a impres­sionné le plus en premier lieu, ce sont les moyens de véri­fi­ca­tion des signaux… qui sont des plus utiles aux plus folk­lo­riques, sous forme de simples voyants lumi­neux qui s’al­lument lorsqu’un signal passe, de crête-mètres tradi­tion­nels, d’os­cil­lo­sco­pe…

On trouve aussi le fameux indi­ca­teur X/Y permet­tant des affi­chages extra­or­di­naires. Par exemple, on peut mettre sur l’axe verti­cal (Y) le signal sortant, et sur l’axe hori­zon­tal (X) une rampe synchro­ni­sée sur le tempo. Ceci permet d’ob­te­nir un signal corres­pon­dant à la forme d’onde qui se promène suivant X, dont la trace s’at­té­nue avec le temps, et dont le rafraî­chis­se­ment se fait en rythme avec le tempo (cf visuel à droite).

Plus fort encore (et encore moins utile), il est possible de mettre en X un modu­la­teur, et en Y un réso­na­teur. Le résul­tat est un spectre, incom­pré­hen­sible pour le commun des mortels… On sent bien pour­tant que ce visuel est asservi au son… Mais rien de plus compré­hen­sible !

Après la décou­verte senso­rielle, je passe à la décou­verte théo­rique : j’ouvre le manuel. Là, les choses sont claires : dès la première page, on sait qu’on est face à du gros gibier « Complexe », « Exotiques », « Concep­tion », « A coeur vaillant rien d’im­pos­sible ». J’en avale ma salive. Malgré les plus de 500 pages du pavé, pas un mot sur les prin­cipes des diffé­rents types de synthèse, tout au plus un « granu­laire » par ici, un « FM » par là, « Sous­trac­tive », « Addi­tive » de temps à autre. Tout cela est consi­déré comme acquis, voir inné. Hum… mon premier synthé fait maison atten­dra peut-être un peu !

Reak­tor 4 & User Libra­ries

Reak­tor 4 Library

Heureu­se­ment pour les néophytes (et mêmes les amateurs éclai­rés), Reak­tor est livré avec une série d’en­sembles, divi­sés en cinq caté­go­ries.

Synthés

C’est proba­ble­ment ce pour quoi Reak­tor est le plus connu, la « partie émer­gée de l’ice­berg ».

On trouve par exemple Carbon, un synthé­ti­seur sous­trac­tif, avec quatre oscil­la­teurs, modu­la­teurs et filtres. Green Matrix est l’un de mes préfé­rés, qui n’a rien à envier à un instru­ment virtuel vendu seul pour plus de la moitié du prix de Reak­tor, avec deux oscil­la­teurs à forme d’ondes multiples, deux filtres multi­modes, distor­tion, delay, chorus… Bref, un bon petit jouet, avec une qualité de son au rendez-vous. P-Bass est un petit géné­ra­teur de basse bien sympa­thique.

Synthés séquen­cés

Dans la conti­nuité, on dispose de versions plus complexes et plus spécia­li­sées comme Wave­wea­ver, basé sur la synthèse wave­table, avec un oscil­la­teur utili­sant de petits fichiers audio pour forme d’onde. On trouve égale­ment DSQ-32, une drum­box avec 7 éléments permet­tant de créer des séquences montant jusqu’à 32 pas.

Sampleurs et Trans­for­mers

Après la synthèse, on se retrouve dans le sampling. On a à dispo­si­tion des outils aux objec­tifs divers. BeatS­li­cer permet d’uti­li­ser une boucle afin d’en extraire des petits bouts indé­pen­dants, pour les réex­ploi­ter dans une nouvelle ligne ryth­mique. GrainS­tates va, lui, géné­rer des paysages sonores granu­laires en temps réel (il faut l’en­tendre pour le comprendre, on est loin de taper sur deux morceaux de bois). On notera la possi­bi­lité d’im­por­ter des CD Akai.

Live Tools

Bien que tous les types d’ins­tru­ments présen­tés jusqu’à présent puissent être utili­sés en live, on a ici deux outils spécia­le­ment copnçus pour une telle utili­sa­tion : Go Box et Scena­rio. Le premier est un sampleur avec des contrô­leurs bi-dimen­tion­nels (imagi­nez le résul­tat en live avec le contrô­leur d’une Nova­tion Remote 25), et une inter­face claire, pour faci­li­ter la lisi­bi­lité en live. Le second est un lecteur de boucles (4 en l’oc­cu­rence) qui permet entre autres d’ap­pe­ler des presets (on peut en créer plus 16000) les uns après les autres, tout en gardant le contrôle sur le travail en cours.

Effets

Pour finir, nous trou­vons les effets, proba­ble­ment la partie la plus submer­gée de notre iceberg. Oui, Reak­tor peut être utilisé en plugin, en insert. On y trou­vera aussi bien des réverbes surround, comme Space Master, qu’un simu­la­teur d’am­plis tel Banaan Elec­trique (rien à voir avec une obscure bois­son chimique), du plus convainquant effet, ou encore un voco­der bien rétro : Clas­sic Voco­der.

Users Library

Si treize synthés, deux machines pour du live, quatre sampleurs-trans­for­meurs vous semblent insuf­fi­sants (imagi­nez le prix pour les mêmes en hard), plus de 1400 autres ensembles sont dispo­nibles.

Et c’est la grande force de Reak­tor : une commu­nauté active, avec 40 000 utili­sa­teurs [autaunt que de membres d’Au­dio­Fan­zine le 1er janvier 2004, NDLR ;) ], un forum bien présent, et surtout, les géné­reuses contri­bu­tions qui donnent une autre dimen­sion à l’ou­til, en en décu­plant les possi­bi­li­tés.

On trouve dans la biblio­thèque en ligne (en libre accès pour les utili­sa­teurs enre­gis­trés de Reak­tor et Reak­tor Session) les rayons atten­dus : Synthé­ti­seurs, Sampleurs, Séquen­ceurs, Studios, Effets, une Section spéciale, des Macros, et des Presets.

Et là, il y en a pour tous les goûts. On trouve aussi bien des versions virtuelles de synthés légen­daires que des effets en surround, en passant par des outils de sound design, les plus déli­rants.

Ce qui est vrai­ment plai­sant avec ce prin­cipe de librai­rie en ligne, c’est la possi­bi­lité d’uti­li­ser les ensembles créés, de les modi­fier, de les amélio­rer à sa conve­nance, car à l’image de l’open source du monde libre, toutes les struc­tures sont complè­te­ment libres. On peut donc trou­ver diffé­rentes versions d’un même instru­ment évoluant d’une version de Reak­tor à l’autre, chan­geant de look, de proces­seur, ou bien le retrou­ver tout simple­ment dans un nouvel ensemble plus vaste.

Le coté obscur de la force – La Struc­ture

L’objec­tif de Reak­tor reste au final de permettre de créer ses propres synthés, ses propres effets, bref, ses propres outils de travail.

C’est en forgeant qu’on devient forge­ron. Mais je complè­te­rai en préci­sant qu’avant de forger, mieux vaut regar­der faire un vrai forge­ron. Car je ne vous cache pas que j’es­pé­rais pouvoir épater la gale­rie, dans le cadre de ce test, en créant une réverbe à convo­lu­tion. Faute de temps, je n’ai pu m’y atte­ler sérieu­se­ment. Suffi­sam­ment cepen­dant pour me rendre compte que créer un instru­ment complexe est loin d’être simple.

Pour vous faire décou­vrir le bestiau, j’ai décidé de vous présen­ter un des instru­ments livrés par Native, des plus simples, P-Bass.

Et vous allez voir, il ne paye pas de mine, mais il est… struc­turé. Sur la barre d’ou­tils, je clique donc sur le bouton Struc­ture, et là m’ap­pa­raît cette petite fenêtre.

Meuh? ya rien !!! Hem… Si, déjà, on voit qu’il n’y a pas d’en­trée audio. C’est un géné­ra­teur pur. On notera au passage que 16 entrées ne font pas peur à Reak­tor (il est simple de passer de 16 à 32, il suffit de rajou­ter un « Audio in »). On découvre au milieu de l’écran notre struc­ture P-Bass, que l’on va explo­rer tout de suite. On se rend alors compte qu’il est mono­pho­nique, mais qu’il a pour voca­tion de travailler en stéréo, puisque la sortie unique est reliée sur les pistes 1 et 2 du stéréo out. A nouveau on réalise qu’on peut lais­ser libre cours à son imagi­na­tion quant au nombre de sorties audio.

Double click (même sur Mac) sur la struc­ture P-Bass.

Les choses sérieuses commencent. Je sens que j’ai perdu quelques lecteurs déjà. On le voit, P-Bass est divisé en plusieurs parties, la section Midi, qui va gérer, je vous le donne dans le mille, les entrées et sorties midi.

(C’est amusant, j’ai l’im­pres­sion que vous êtes de moins en moins nombreux). On peut consta­ter que la gestion des infor­ma­tions Midi, même pour un instru­ment aussi simple, n’est pas une mince affaire.

On fait appel à des relais, à des racines carrées, à des opéra­teurs logiques, à des filtres… C’est de l’élec­tro­nique embarquée !

Conti­nuons à mettre les mains dans le cambouis, et regar­dons un peu comment est géné­rée notre corde.

Aïe, aïe, aïe, des fonc­tions expo­nen­tielles, des rapports, des correc­tions d’en­ve­loppe, des filtres, des sélec­teurs…

Jetons un oeil à la section de filtrage et d’am­pli­fi­ca­tion.

Bon, là encore, on trouve un panel de fonc­tions utili­sées dans tous les sens. Mais pour vous prou­ver que lorsqu’il n’y en a plus, il y en a encore, j’ai double-cliqué sur le module de norma­li­sa­tion (celui avec la barre marron, en haut à droite), et voici ce qu’on découvre.

Il en va ainsi pour les diffé­rentes sous-struc­tures d’une struc­ture.

Allez, un petit dernier pour la route, histoire de complé­ter le tableau, la zone d’ef­fet et d’os­cil­la­teurs.

On se rend compte qu’on est face à un para­doxe comme je les aime : un instru­ment en appa­rence simple peut s’avé­rer en réalité complexe. Un instru­ment complexe n’est qu’une succes­sion d’élé­ments simples, car tout au long de cette page, j’ai fait comme si tout était d’une atroce complexité, mais si on y regarde bien de plus près, cela reste compré­hen­sible (« A coeur vaillant rien d’im­pos­sible »).

Il ne reste plus qu’à mettre la main à la pâte (après tout, forge­ron peut être un noble métier). Il n’em­pêche, lorsqu’on voit à quoi ressemble la struc­ture d’un petit synthé de basse, on ne peut être qu’ad­mi­ra­tif devant la complexité de certains instru­ments, et je n’ose imagi­ner le nombre d’heures passées à leur créa­tion. Car décor­tiquer un instru­ment est une chose, mais partir d’une page blanche est une autre paire de manches.

A titre d’in­for­ma­tion, on trouve des modules de Midi, de math, de signal, d’os­cil­la­teurs, d’échan­tillon­neur, de séquen­ceur, de LFO, d’en­ve­loppe, de filtre, de delay, de modi­fi­ca­tion audio, de proces­seur d’evé­ne­ments, etc… mais égale­ment des macros toutes faites exploi­tant ces modules.

Pour ceux qui connaissent, le prin­cipe utilisé par Native est celui du Langage-G (graphique) qu’uti­lise Natio­nal-Instru­ments (rien à voir avec Native-Instru­ments) avec son logi­ciel de program­ma­tion Labview, qui est utilisé dans certains labo­ra­toires scien­ti­fiques. Ce langage permet de déve­lop­per des exécu­tables sans rien connaître aux langages complexes, en ayant décrit simple­ment la struc­ture (tiens, comme on se retrouve). Avec ce type de système, on défi­nit en fait simple­ment l’al­go­rithme du programme. Grâce à ce prin­cipe de câblage entre modules, au final, utili­sa­teurs du Langage-G peuvent contrô­ler des appa­reils de labo­ra­toire, analy­ser des mesures, remplir des bases de données… ou construire un synthé­ti­seur virtuel !

Compa­ra­ti­ve­ment, je repro­che­rais à Reak­tor ses modules trop austères, tous iden­tiques, et qui empêchent une distinc­tion aisée. Je regrette qu’il soit impos­sible de faire du pas à pas, en suivant les flux de données (distin­gués suivant le type) au fur et à mesure. Si bien que si on est face à la situa­tion où aucun son ne sort du modu­le… Il faut ramer pour trou­ver où notre cogni­tion a fait défaut.

Conclu­sion

Il y a un détail qui ne trompe pas… Je l’es­time révé­la­teur : cela fait plusieurs semaines que j’ai reçu Reak­tor et qu’on me met la pres­sion pour rédi­ger ce test… Et au-delà de la phase d’ap­pren­tis­sage qui est proba­ble­ment plus longue que pour un instru­ment virtuel plus clas­sique, je me rends compte qu’à chaque fois que je lance Reak­tor, je ne peux m’em­pê­cher de jouer avec pendant dix minutes, un quart d’heure d’af­fi­lée avant d’écrire une ligne. Le seul remède est de débran­cher mon clavier maître.

J’ai vrai­ment été agréa­ble­ment surpris par les possi­bi­li­tés de Reak­tor, par la qualité des sons que l’on peut obte­nir avec un simple ordi­na­teur, en géné­ra­tion totale (ie sans sample à l’ori­gine).

Person­nel­le­ment, je connais­sais il y a encore quelques temps unique­ment les grands prin­cipes de la synthèse. Grâce à Reak­tor, j’ai appris bon nombre de choses en regar­dant « derrière » (chose impos­sible avec un instru­ment hard­ware, car même en l’ou­vrant et faisant sauter par la même occa­sion la garan­tie, on n’y compren­drait rien).

Ayant un peu testé Csound et JMax (la version gratuite de Max) qui jouent dans la même caté­go­rie, je dirais que la grande force de Reak­tor, c’est une inter­face, quoi que j’en dise, agréable à program­mer pour un créa­teur plus musi­cien qu’in­for­ma­ti­cien. Et je crois l’avoir déjà trop dit, l’un des atouts majeurs est la commu­nauté rela­ti­ve­ment impor­tante (par rapport à la niche dont nous parlons), car avec un éditeur comme Native, les réponses arrivent rapi­de­ment sur les forums, y compris de la part des modé­ra­teurs et des déve­lop­peurs. Des petits défis sont même lancés comme par exemple des compa­ra­tifs Mac/PC, étant donné que les ensembles sont cross-plate­forme.

Citons à présent les petits bémols. Bien que pour ce test je parle essen­tiel­le­ment de la version Stand Alone, ou simple­ment des instru­ments, je me sers prin­ci­pa­le­ment de Reak­tor comme d’un plugin dans Logic.

Et là, les choses se corsent, car si l’uti­li­sa­tion en plugin est simple (pas besoin d’avoir une version tour­nant en appli­ca­tion exté­rieure, comme avec Absynth par exemple), la version sur Mac en plugin pose problème. Et ce égale­ment avec les toutes dernières mises à jour de l’OS, de Logic, et de Reak­tor. Les ensembles, même ceux livrés avec, plantent aléa­toi­re­ment avec Logic, lorsqu’on les appelle depuis leur réper­toire origi­nal. La solu­tion (propo­sée par un membre du forum Reak­tor, car Native n’en touche mot offi­ciel­le­ment) est de sauve­gar­der à partir de la version stand alone l’en­semble dans le réper­toire où se trouve le projet sous Logic. Lorsqu’on sait ce que l’on veut, ça ne pose pas de problème, mais lorsque l’on scrute, que l’on cherche des idées, avoir une épée de Damo­clès au-dessus de la tête engendre un manque de créa­ti­vité.

Autre détail frus­trant, Reak­tor, véri­table usine à gaz (à gaz ou nucléaire ?) peut s’avé­rer être un glou­ton friand de qui trouve que le CPU est un mets déli­cat et tout à son goût. Sachant cela, j’ai acheté un double-CPU, qui est malheu­reu­se­ment non géré par Reak­tor (alors qu’il est possible d’uti­li­ser les CPU d’autres machines en réseau, à condi­tion d’avoir un Reak­tor, donc une licence tour­nant sur chaque machine – une expli­ca­tion ?). Du coup, para­doxa­le­ment, pour pouvoir en faire plus avec mes CPU, je dois lancer une appli­ca­tion supplé­men­taire, Logic, qui lui gère très bien les multi­pro­ces­seurs.

Bien que n’ayant pas testé Reakror sur PC, je tiens à préci­ser que ces problèmes ne semblent pas être rencon­trés par les utili­sa­teurs de la version VSTi sous Windows.

Point de vue subjec­tif

Commençons par l’in­ter­face. Bien qu’une grande amélio­ra­tion ait été appor­tée depuis les versions anté­rieures, les inter­faces restent un peu trop rustiques, version sous-marin nucléaire sovié­tique. Ce qui, pour un artiste, est parfois un facteur bloquant. Certaines inter­faces sont vrai­ment lourdes, et l’in­for­ma­tion n’est pas faci­le­ment visible. D’autres au contraire sont magni­fiques (je parle là aussi bien des ensembles Native que des ensembles Utili­sa­teurs).

Ceci s’ex­plique selon moi de la façon suivante et amène un autre sujet : trop de possi­bi­li­tés, tue ses possi­bi­li­tés. Reak­tor est capable de faire telle­ment de choses que chacune d’entre elles semble parfois sous-exploi­tée. Du moins, les presets ne laissent pas trans­pa­raître toutes les possi­bi­li­tés d’un instru­ment. Et comme on a souvent tendance à vouloir essayer tous les instru­ments tout de suite, on essaye deux ou trois preset, et s’ils ne nous convainquent pas, l’ins­tru­ment tombe aux oubliettes, alors qu’il aurait la poten­tia­lité d’un plugin à 300 EUR (ou trouve parfois de véri­tables perles dans la biblio­thèque en ligne).

A mes yeux donc, cette avalanche de possi­bi­li­tés d’en­semble est un bien comme un mal pour qui ne sait être patient. Il faut des heures et des heures de mani­pu­la­tion pour aller dans tous les recoins de la bête.

Pour qui ?

La ques­tion que tout le monde se pose, c’est : à qui s’adresse Reak­tor ? Bien préten­tieux est celui qui voudrait appor­ter une réponse défi­ni­tive.

Pour ma part voici la mienne : à tous ceux qui ne sont pas de simples consom­ma­teurs, et qui savent que ce qu’ils savent n’est rien comparé à ce qui leur reste à savoir, à apprendre et à décou­vrir. Hem… Essayons d’être plus précis. Les cibles de Reak­tor sont nombreuses. La première qui vient à l’es­prit, c’est les musi­ciens de l’élec­tro. Cela parait évident, mais devant les possi­bi­li­tés créa­tives, on ajou­tera les sound desi­gners, les ingé­nieurs du son, qui veulent se créer leur propres effets. Soyons fous, ajou­tons aussi les scien­ti­fiques qui veulent rendre plus ludiques leurs lourdes théo­ries (et là, je ne parle pas dans le vide, puisque je connais un profes­seur de trai­te­ment du signal d’une école supé­rieure répu­tée qui est très inté­ressé par les possi­bi­li­tés de Reak­tor dans son domaine, comme présen­ta­tion à ses étudiants).

En revanche je décon­seille Reak­tor à celui qui veut tout, tout de suite. Même s’il ne veut pas créer ses outils. Je l’orien­te­rais plutôt vers un Reason, par exemple, qui demeure plus acces­sible.

Et Reak­tor Session ? Mon avis reste mitigé sur ce point. Car pour celui qui ne veut pas se prendre le choux, une fois de plus, qu’il passe son chemin. Celui qui se dit « j’achète Session, puis je passe­rai à la version complète », ne passera jamais à la version complète. Pourquoi ? Car il devra payer plus pour se retrou­ver avec le même outil, et n’aura pas le courage de s’y mettre sérieu­se­ment. Il préfè­rera conti­nuer à utili­ser ce que les autres feront pour lui, or pour moi, la philo­so­phie de Reak­tor, c’est la poten­tia­lité. Avec un tel outil « il est possible de… » l’uti­li­sa­teur Lambda (vous, moi) a, avec Reak­tor 4, les outils pour maté­ria­li­ser un jour une idée qui germera. Mais cette idée ne germera jamais s’il n’y a pas une terre fertile pour l’ac­cueillir. Reak­tor Session s’adresse selon moi plus à quelqu’un qui possède déjà Reak­tor et qui veut pouvoir exploi­ter des ensembles sur une autre [def]DAW[/def], ou bien à quelqu’un qui a repéré des ensembles qui lui conviennent, et ne tient pas à dépen­ser une fortune.

Quel « niveau d’études » pour la créa­tion d’un ensemble ?

Dire qu’une telle entre­prise est à la portée de tout le monde est faux. Il ne faut pas se leur­rer, cela reste tout de même un réel travail. Moi même, pour m’y être essayé, je peux vous dire qu’ob­te­nir un son d’une excep­tion­nelle nullité est on ne peut plus simple, mais qu’ob­te­nir quelque chose de conve­nable et d’ex­ploi­table (j’en­tends par là un bontempi – noel 1983) néces­site un inves­tis­se­ment lourd, surtout pour celui qui n’a aucune connais­sance en synthèse, en mathé­ma­tique, en physique ou en program­ma­tion infor­ma­tique. A moins de s’es­sayer à la bidouille hasar­deuse, mais là, rares sont les succès reten­tis­sants.

Une fois de plus, celui qui n’a pas peur de faire l’ef­fort d’ap­prendre, de lire 550 pages d’un manuel, de faire preuve d’un peu de jugeote, peut finir par créer quelque chose de potable. La première fois, l’ins­tru­ment ainsi créé sera certai­ne­ment rustique, puis la fois suivante, ça le sera moins, puis de fil en aiguille on finira par créer un instru­ment magni­fique, opti­misé pour consom­mer le moins de CPU possible, tout en donnant une ampleur sans précé­dant au son. Bref, c’est comme la compo­si­tion : plus on travaille et plus le résul­tat est satis­fai­sant.

La grosse limi­ta­tion de Reak­tor c’est nous même. Il est théo­rique­ment possible de tout faire. Créer toutes sortes d’ins­tru­ments d’ef­fets, de la même facture que les plus grands outils qui valent parfois de petites fortunes, est du domaine du possible avec Reak­tor. Le prix de ces appli­ca­tions est géné­ra­le­ment justi­fié, non pas par la taille du programme, non pas par leur appli­ca­tion, mais par toutes les connais­sances, et l’in­tel­li­gence, les détails, qui ont été mis en oeuvre pour arri­ver à ce résul­tat.

Je tiens enfin à signa­ler que cet article n’est qu’une partie de ce qui peut être dit sur Reak­tor. Il a pour but de présen­ter, dans un premier temps, cet instru­ment virtuel singu­lier, tel que je l’ai décou­vert. Je veille­rai à ce qu’il soit complété par la suite. Car à l’image de ses instru­ments, Reak­tor est un outil complexe et vaste; il y a donc de nombreuses possi­bi­li­tés que je n’ai pas abor­dées ici. On trouve par exemple la possi­bi­lité de passer d’un snap­shot à un autre par morphing sonore, ou encore, la possi­bi­lité de créer une sorte de clus­ter Reak­tor, via l’OSC, sur un réseau IP.

Vien­dront égale­ment les possi­bi­li­tés que l’on peut en attendre, avec par exemple les effets exploi­tés dans un séquen­ceur grâce à Reak­tor FX, avec certains effets tout simple­ment magni­fiques.

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