Il y a des modèles de guitares qui résonnent dans la tête de l’apprenti musicien en quête de gloire, de reconnaissance et de fortune comme le Saint Graal. La série des Gibson Les Paul en fait partie depuis ses origines.
Depuis les années 50 avec la Les Paul Junior puis plus tard dans les années 80s avec la Les Paul Studio, Gibson n’a pas cessé de nous montrer qu’il était possible de fabriquer des instruments d’étude de très bonne qualité à des prix très attractifs. Afin de ne pas faillir à cette tradition, Gibson remanie son catalogue en mettant cette année sur le marché une nouvelle déclinaison de son modèle que l’on ne présente plus : la fameuse Les Paul.
Le modèle que nous proposons aujourd’hui en test est celui de la Gibson Les Paul '70s Tribute. L’instrument est entièrement “MADE IN USA” et affiche un prix public moyen en boutique de 1000 ou 1200€, suivant que l’on choisisse un jeu de mécaniques traditionnel et le système d’accordage automatique moderne et perfectionné très discret, sur lequel nous reviendrons ultérieurement en détail, qui répond au doux nom de Min-Etune.
Gibson propose ce modèle en trois finitions Gold Top (Dark back), Vintage Sunburst, Ebony, Wine Red avec ou sans l’accordeur intégré. La finition de l’instrument que nous vous proposons aujourd’hui en test est la version « Gold Top Dark Back ».
Un savoir-faire à la hauteur de la légende ? Voyons cela…
Je remarque d’emblée que cette Les Paul 70s est relativement légère. L’instrument est bien équilibré. L’épaisseur du corps est plus mince de quelques millimètres qu’une Les Paul Standard. Du point de vue du timbre, cela se traduira par une sensible réduction de l’amplitude des fréquences basses du spectre. Le corps de la guitare est en deux parties : la table d’harmonie et le corps même de l’instrument. Ce dernier, en acajou, est constitué de 5 parties qui sont collées. D’un point de vue esthétique, un corps en plusieurs parties, ce n’est pas beau à voir mais d’un autre côté, c’est la partie du corps qui est cachée derrière le musicien… La table, sculptée en érable est rapportée et la teinte du vernis, de type nitrocellulose, est « Gold Top ». Ce dernier jouera un rôle déterminant dans la respiration de l’instrument et surtout dans sa résonance ; les fréquences n’étant pas prisonnières de l’épaisseur de la laque.
L’instrument n’a pas de pickguard mais la surface n’étant pas tendre, la guitare ne marquera pas facilement. Du point de vue des finitions, je suis un petit peu mitigé. En effet, la jonction entre le manche et le corps n’est pas très propre. On remarque un excès de peinture qui s’est traduit par une petite boursouflure sur plusieurs centimètres. De la même façon, il y a un petit défaut dans la table d’harmonie juste au-dessus du chevalet qui se traduit par une légère bosse. Il semble qu’elle ait été un petit peu trop rabotée en profondeur, donnant malgré tout à notre instrument une petite touche d’originalité. Je reprocherai également la qualité des plastiques utilisés autour des micros et de la fiche jack de type « Switchcraft » qui fait un petit peu trop « bon marché ». Ce n’est pas grave en soi mais pour un prix supérieur à 1000 euros, je ne m’attendais pas à voir de tels éclats dans l’émail.
Le manche est en acajou. Son diapason est de 24.75" soit 628mm. Sa jointure, comme il est d’ordinaire chez Gibson, est de type collé, avec tenon et mortaise. La touche rapportée est en palissandre. Le profil du manche est de type 70s très fin et son sillet en corian (un polymère acrylique). Il est d’un confort absolu, sa finition est propre et soignée, sa touche est très douce et ses repères sont en nacre et de type trapèze. Les frettes, au nombre de 22, sont de type « médium jumbo ». Le vernis au dos est très fin et il n’est pas glissant. On voit et on sent bien les fibres du bois dans la paume de la main. On parcourt l’instrument de bas en haut du manche sans aucun effort, c’est un véritable régal. On accède jusqu’à la 16e case sans problème. Le réglage du truss rod se fait par le haut du manche, une petite plaque en plastique noir affublée de la lettre « T » pour Tribute (hommage) venant cacher sa vis. La guitare est montée avec un jeu de cordes de tirants 010/046. Le chevalet « Tune-O-Matic » et le cordier de type « Stopbar » sont en zamak, un alliage à base de zinc. Ils sont tous les deux de bonne facture et tout l’accastillage est chromé.
La guitare est livrée dans une housse « Gibson Premium Gig bag ». Même si ce n’est qu’une housse, la guitare est quand même bien protégée mais je préconise un flight case digne de ce nom si vous êtes amenés à la transporter souvent. Les têtes de manches des Gibson sont leur talon d’Achille, il faudra en prendre rigoureusement soin !
La guitare du futur !
La guitare mise à notre disposition est équipée de l’accordeur automatique Min-Etune. C’est un accordeur extrêmement perfectionné qui est directement intégré aux mécaniques de l’instrument. De conception compacte, cet accordeur est localisé au dos de la tête dans un petit boîtier qui est placé dans l’espace situé entre les 6 mécaniques. Discret et léger, il ne déséquilibre pas le centre de gravité de l’instrument. Il fonctionne sur une pile qui est intégrée et que l’on pourra recharger grâce à un chargeur qui est fourni dans l’étui de la guitare. Le niveau de charge de sa batterie est indiqué par un voyant lumineux de type LED.
Le Min-Etune possède 3 banques d’accordages réparties en trois couleurs. Les banques de couleur rouge et vert contiennent 6+6 (soit 12) accordages différents. On retrouvera les accordages standard en Mi, Mib, mais aussi de nombreux « open tuning » de mi, ré, sol, accordage en quartes, etc. Vous pourrez également mémoriser 6 accordages personnalisables de votre choix dans la banque bleue.
Le mode opératoire du Min-Etune est relativement simple. Une pression sur le bouton « ON » permet d’activer l’accordeur. Deux pressions sur le bouton MENU nous permettent de choisir la banque d’accordages disponibles. Une fois la banque de couleur choisie, on se déplace à droite ou à gauche afin d’accéder au type d’accordage recherché. Une fois que vous aurez choisi votre « preset » d’accordage, il suffira d’égrener les cordes et (comme par magie) les mécaniques se mettent toutes seules en mouvement. Si une corde n’est pas correctement accordée, son nom s’affiche en rouge. Il suffit alors de pincer la corde qui doit être accordée et son nom s’affiche en vert. Une fois l’accordage correctement effectué, les noms de toutes les cordes clignotent deux fois en vert et l’accordeur se met hors tension. Un indicateur nous permet de voir le niveau de la batterie.
La pêche au gros… son !
Cette guitare relève avant tout du « plug and play ». La prise en main est rapide et efficace mais nous tenons à préciser que l’instrument était assez mal réglé d’usine avec une action trop basse et une intonation qui laissait à désirer. De petits réglages furent nécessaires afin de pallier ces petits défauts.
Les contrôles de la guitare se résument à un bouton de volume et un bouton de tonalité par micro. Les potentiomètres de volume sont de type linéaire alors que ceux des tonalités ne le sont pas. Les capuchons de type « Witch Hat » sont des reproductions authentiques des modèles originaux des années 70. De conception résolument basique, cette Les Paul possède 2 micros à double bobinage et un sélecteur avec 3 positions. Celui-ci permet d’obtenir en position 1 le micro chevalet seul, en position 2 le micro chevalet et manche et enfin en position 3 le micro manche seul. Les deux micros répondent au doux nom de « Dirty Fingers » (doigts sales). Ils sont apparents : ils n’ont pas de capot. Ils sont directement inspirés des « Super Hot humbuckers » qui furent développés par Gibson au cours des années 70. Ces micros ont des aimants de type céramique surbobinés. Il en découle un très important niveau de sortie. Je ne remarque pas de prise au feedback, cela venant sûrement d’une protection des bobines avec un paraffinage adapté aux caractéristiques de ces derniers.
- Clean Twin 00:56
- Crunch JCM800 00:54
- Sat Supersonic 00:16
Il n’y a pas de doute, cette guitare est taillée pour le gros son. Les potentiomètres de tonalité sont très précis et permettent de bien corriger le son en fonction du timbre que l’on désire obtenir. En jouant avec le volume de chaque micro, on obtient en seconde position des combinaisons timbrales très intéressantes. Le son délivré par ce kit de micros est énervé, un petit peu baveux mais extrêmement riche aussi bien en clair qu’en saturé. Les leads en overdrive sonnent très « flûtés ». Le son clair est puissant, riche et rond. Les crunchs sont très chargés en harmoniques mais je trouve néanmoins qu’ils manquent de finesse et de précision dans les attaques. Je comprends maintenant enfin l’appellation des micros de « dirty fingers » ! On a un petit côté un petit peu sale qui contribue à donner à cette guitare un caractère bien trempé. Son timbre massif et très épais ne donne pas dans la dentelle. Ce kit de micros sonne, pour le blues, très gras, le rock heavy, très énervé et très chargé en distorsion.
En conclusion
Bien qu’elle fasse partie de l’entrée de gamme de Gibson, cette guitare jouit d’un caractère très affirmé pour ne pas dire rutilant. Elle sera un excellent tremplin pour les musiciens qui ont un jour envie de posséder une Les Paul sans avoir à hypothéquer la maison de campagne familiale. Elle permet de découvrir tout ce qui fait le son d’une Gibson, quitte ensuite à monter en gamme pour éventuellement faire l’acquisition, pour une somme plus importante, d’une Les Paul Standard. L’accordeur intégré est très pratique et relève de la merveille technologique tant par sa taille que son fonctionnement. Cependant, je ne peux pas m’empêcher de demander comment il va traverser les affres du temps. Time will tell !