Après les interfaces audio, les multi-effets, les claviers, les contrôleurs et les microphones, c’est au tour des guitares électriques de se doter d’une connectique USB. La preuve avec l’iAXE393, proposée à un tarif des plus agressifs par Behringer.
Après les interfaces audio, les multi-effets, les claviers, les contrôleurs et les microphones, c’est au tour des guitares électriques de se doter d’une connectique USB. La preuve avec l’iAXE393, proposée à un tarif des plus agressifs par Behringer.
Champion toutes catégories du matos audio à petit prix, Behringer s’intéresse depuis quelque temps déjà au marché des instruments de musique. Après les amplis et pédales d’effets guitare, les multi-effets façon POD et les pianos numériques présentés au dernier Musikmesse, voici donc venir l’iAXE393 USB, une guitare électrique qui, comme son nom l’indique et tout comme l’iGuitar.USB de Brian Moore, dispose d’une connectique USB pour être utilisée directement avec un ordinateur.
Une interface audio avec des cordes…
Du coup, sans que cela soit véritablement mis en avant par le constructeur, on en déduit que l’iAXE intègre une véritable interface audio, ce qui nous est confirmé par la présence de pilotes Mac et PC (le PC disposant même d’un driver ASIO pour obtenir la plus faible latence possible lors du jeu) mais aussi et surtout par l’intégration d’une sortie audio stéréo au format Jack 6,35. Cette dernière permettra, selon les besoins, de brancher un casque ou une paire d’enceintes pour entendre le son de l’instrument lorsqu’il est branché sur un ordinateur. Pas besoin d’interface audio préalable donc : l’iAXE se charge de tout et assume pleinement sa vocation Plug’n’Play. Le grand public devrait adorer…
Cette originalité mise à part, la guitare de Behringer n’en demeure pas moins une guitare électrique 6-cordes des plus classiques. Rappelant à quelques petits détails près les formes de la Fender Stratocaster, la belle est dotée d’un manche vissé, légèrement bombé, en érable satiné, de 22 frettes, de mécaniques et d’un vibrato chromés et de trois micros simples corrélés à un sélecteur 5 positions et à 3 potars : 2 pour la tonalité des micros grave et intermédiaire, 1 pour le volume. Aucun détail n’est fourni sur le corps de la guitare dont on devine, compte tenu du prix de l’instrument, qu’il ne s’agit probablement pas d’acajou massif. Tout juste notera-t-on que la laque blanche qui recouvre ce dernier n’est pas sans évoquer le look de l’iPod, histoire d’être raccord avec l’engouement du grand public pour le baladeur d’Apple. Enfin, un connecteur 6,35 permet de relier l’iAXE à un véritable ampli.
Bien au-delà du périphérique USB, c’est donc bien à une vraie guitare que nous avons à faire, même si la facture de cette dernière est très loin d’être irréprochable : on constate un jour à la jonction corps/manche, un autre entre la table de protection et le corps, cependant que le vibrato ne garantit pas la meilleure tenue d’accord qu’on puisse imaginer (on aura mieux fait, d’ailleurs, de dévisser sa tige…) et que l’instrument n’est pas réglé au mieux (l’action sur le modèle testé était particulièrement haute). Si ces aspects n’ont rien de catastrophique ou de scandaleux en regard du prix réclamé, ils laissent dubitatif sur l’aptitude de l’iAXE à bien vieillir… Mais, après tout, attend-on vraiment d’une guitare à 142 € qu’elle sache vieillir ?
Guitare en bundle
Comme pour mieux faire passer la pilule, Berhinger a soigné les à-côtés du produit : en plus de la guitare, de son cordon USB, le constructeur allemand nous gratifie ainsi d’une sangle réglable, de 3 médiators, d’un poster présentant les diagrammes des principaux accords et d’un CD. Et quel CD puisqu’en plus des pilotes de l’iAXE, celui-ci contient une édition spéciale du Guitar Combos de Native Instruments !
Pour ceux qui ne connaîtraient pas le logiciel, précisons que Guitar Combos est un ensemble de 3 amplis virtuels utilisant les algorithmes de l’excellent Guitar Rig. Au programme, on a ainsi droit à une modélisation du Fender Twin Reverb incluant un chorus, un vibrato et une réverb à ressort, une modélisation de Vox AC-30 incluant un trémolo et une réverb à ressort, et une modélisation du JMP50 de Marshall, incluant une fuzz, une disto et un delay inversable. Chaque logiciel dispose d’un gestionnaire de presets et d’un magnétophone virtuel nommé Tapedeck. Issu de Guitar Rig, ce dernier intègre un métronome (avec tap tempo), un limiteur, et permet de lire un fichier playback au format WAV/MP3/OGG (avec bouclage et transposition du tempo ou du pitch possibles) ou d’enregistrer ce que vous jouez… sans la simulation d’ampli, hélas. Il est bien dommage en effet de ne pouvoir enregistrer que le son non traité de la guitare (dry). Pour s’enregistrer en son traité (wet), il faudra donc passer par un magnétophone externe, un driver multiclient virtuel façon Total Recorder, ou encore un séquenceur en utilisant d’autres plug-ins (comme ceux de la Simulanalog Guitar Suite). C’est en effet la dernière limitation de ce Guitar Combos Behringer Edition par rapport à la version originale : les amplis virtuels ne sont disponibles que sous forme de 3 applications distinctes (pas de version plug-in donc). Guitar Combos étant vendu à 179 €, on ne s’offusquera pas de ces différences dans un produit vendu à 142 €, d’autant que les simus sont bien là et permettent de bosser sans problème.
Si en terme de rapport prestation/prix, Behringer fait donc très fort comme à son habitude, il reste à juger maintenant de la cohérence du package sur le plan sonore.
Le son
Là encore, même si l’on observe du bon et du moins bon, l’iAXE parvient quand même à tirer son épingle du jeu. Certes, le sustain n’est pas le point fort de la guitare. Certes, les micros simples sont un peu mous du genou et ne permettent pas, on s’en doutait, d’aborder des gros sons métal. Certes, les 5 combinaisons offertes par le sélecteur n’offrent pas des milliards de possibilités (grosso modo, plus on va vers le chevalet, moins on a de graves, sans pour autant gagner nettement en claquant ou en agressivité). Mais malgré ces défauts, force est de constater qu’utilisée avec un Guitar Rig, l’iAXE produit des sons tout à fait exploitables, en son clair, crunch et dans les saturations modérées… Le manche est agréable à jouer, et si les shreders ne seront pas à leur affaire pour jouer du Vai ou du Satriani en raison de la touche bombée, l’accès aisé aux aigus permet de bosser des solos sans soucis… Bref, on peut faire suffisamment de choses avec une iAXE pour qu’elle puisse intéresser durablement un débutant, du moins dans les premiers mois ou années de son apprentissage, selon la rapidité de ses progrès. Voici quelques exemples de sons enregistrés avec Guitar Rig 2, et un peu de compression : Clair, Funk et Saturé.
Conclusion
Réussie sur le plan informatique grâce notamment à son bundle logiciel de qualité, la guitare USB de Behringer n’est certes pas, du point de vue de la lutherie, le meilleur instrument dont puisse rêver un débutant. Reste que le concept ‘Guitare + ampli virtuel’ plug & play propose un rapport prestation/prix imbattable, avec une approche ‘périphérique musical’ qui devrait sans doute plaire au grand public. Blanche comme un iPod et vendue au prix de 3 jeux vidéo Playstation, l’iAXE est sans doute le cadeau à faire à votre petit frère de 12 ans pour qu’il s’initie à peu de frais à la gratte, ou à votre oncle Georges qui s’est lancé dans la création musicale sous Garageband et aimerait aller un peu plus loin dans la musique…
Certes, les plus élitistes préféreront conseiller aux débutants d’acheter une guitare cor(t)éenne d’entrée de gamme et un petit ampli de voyage, mais ce faisant, le budget s’élèvera au minimum au triple du prix de l’iAXE et de sa solution logicielle, et plus probablement aux quadruple ou quintuple… Il y a donc mieux, mais c’est beaucoup plus cher et selon le degré d’investissement de l’utilisateur et ses ambitions, le différentiel de prix ne sera pas forcément justifié : si elle ne vous suivra pas pendant des années sur toutes les routes, l’iAXE peut sans problème faire office de première guitare pour bosser dans sa chambre, et écrire ses premières compos. Après tout, un accord de Mi reste un accord de Mi, qu’on le joue sur une guitare à 3000 € ou sur une gratte à 150 €. C’est mon avis et, quitte à faire parler les morts, je le partage avec l’auteur d’un certain Little Wing qui, il est bon de le rappeler, a révolutionné le rock et la 6 cordes quelques années après avoir acheté une guitare à 5 $. CQFD.