Petite structure proposant depuis près de 40 ans des guitares acoustiques, les Guitares Boucher ont ouvert les portes de leur atelier à AudioFanzine. L'occasion d'en savoir plus sur la naissance de ces belles canadiennes à cordes.
Présentation
Créé en 1968 par Normand Boucher sous le nom de « Les guitares Normand enrg », le design des instruments au départ, se base sur les guitares Martin à certains égards, avec un barrage en X sous la table d’harmonie et une forme de caisse de type « dreadnought ». Par contre, la fixation du manche est unique, elle est boulonnée et sans talon. Un nouveau concept, à l’avant-garde et un système très efficace pour contrôler l’ajustement du manche de l’instrument. Le but premier de Normand Boucher fut de produire une guitare de qualité à prix abordable en utilisant en grande partie les meilleures ressources locales de bois.
En 1972, la compagnie s’incorpore sous le nom de « Les guitares Norman Inc. » et le luthier offre la distribution de ses produits à M. Robert Godin. La compagnie au fil des ans s’est diversifiée en concevant et en produisant des guitares classiques, des guitares électriques et un modèle acoustique « grand concert » qui portait le nom de « folklore ».
En 1988, la compagnie « Les guitares Norman Inc. » vend son atelier et ses marques de commerce à M. Robert Godin. Normand Boucher décède le 21 décembre 1997 à l’âge de 81 ans et c’est Claude Boucher, son fils, qui possède le secret de fabrication, qui reprendra la relève en 1998 pour se concentrer sur la fabrication de guitares acoustiques à cordes acier 6 et 12 cordes sous le nom de « Boucher ». En 2005, Claude s’associe avec Robin, son cousin et ouvre un grand atelier à Berthier-Sur-Mer dans le sud-est du Canada.
Ce petit historique vous permettra donc de ne pas confondre une guitare « Norman » devenu « Godin » et une guitare « Boucher » réalisée par le luthier Claude Boucher.
La table d’harmonie
Est-il encore nécessaire de préciser que la table d’harmonie est l’élément capital dans la qualité sonore d’une guitare acoustique ?
En effet, le choix de l’essence pour la table aura plus de conséquences sur la sonorité de la guitare que pour les éclisses et le dos. On recherche alors des bois dits « de résonance » qui offrent un très bon rapport rigidité/faible masse afin de favoriser la propagation des vibrations et permettre une bonne dynamique (temps de réponse). On retrouvera ces qualités mécaniques dans les bois de la famille des conifères avec pour les plus utilisés : le cèdre et l’épicéa. Pour ce dernier, la variété la plus recherchée pour ses qualités mécaniques est l’épicéa d’Adirondack ou épinette rouge ou encore Red Spruce.
L’épinette des Adirondacks (dont le nom botanique est : Picea Rubens ) pousse exclusivement au Nord-Est de l’Amérique du nord, en bordure de la côte de l’océan Atlantique. Aux USA : dans les Adirondacks, soit dans les états de New-York, du Vermont et du Maine. Au Canada, dans les Appalaches, soit dans les provinces de Québec, Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse. Aux États-Unis, les arbres (épinette des Adirondacks ) assez gros pour fabriquer une guitare sont devenus très, très difficiles à obtenir. Ils sont devenus rares au fil des ans…
L’atelier de Claude Boucher se situe en plein milieu d’immenses forêts et les variétés d’arbres que l’on peut y trouver et servant à la lutherie sont : Épinette des Appalaches (Adirondack spruce), Érable à sucre ondé (hard rock flamed Maple), Érable à sucre piqué (hard rock birdseye Maple), Noyer (Walnut) et Cerisier (Cherry).
De grands fabricants, comme Martin, Gibson Santa-Cruz et Bourgeois se fournissent en épicéa d’Adirondack chez Claude Boucher. Pour Martin, c’est 70% de leurs besoins en épinette des Adirondacks qui est couvert par les guitares Boucher.
La découpe de l’arbre et la première sélection pour la table
Les bûcherons des scieries d’Amérique du nord coupent les arbres en 3 différentes longueurs de billots : 2,50 mètres = (8 pieds) 3,75 mètres = (12 pieds) 5,00 mètres = (16 pieds). Chez Boucher le billot est recoupé sur sa longueur en section de 60 cm (2 pieds). C’est donc 4 sections pour un billot de 2 ,50m, 6 pour un de 3,75m et 8 pour un de 5,00m
Ensuite, ces sections sont refendues en plusieurs quartiers, un peu comme des pointes de tartes… mais de 60 cm d’épaisseur. Cette découpe de quartiers est la première étape de sélection pour la table d’harmonie. Seul le regard expert du luthier permettra la bonne répartition de coupe afin d’obtenir les meilleurs quartiers en sachant tout de même que sur un billot de 60 cm de hauteur, c’est près de 60% de celui-ci qui servira aux barrages et non aux tables.
L’étape suivante va consister à débiter du quartier sélectionné et découpé précédemment, des tables de 5 mm 33. Celles-ci seront ensuite séchées pendant quelques jours. Affinées jusqu’à 3 mm 55 d’épaisseur, les tables seront ensuite travaillées pour recevoir une rosace et le barrage qui va renforcer la table et qui constitue l’une des parties essentielles de la guitare.
Pour des guitares folk, le barrage le plus courant est le barrage en X initialement conçu par C.F. Martin. Claude Boucher y apporte quelques modifications liées aux caractéristiques mécaniques de l’épicéa d’Adirondack.
Vous pourrez apprécier dans la deuxième partie de cette vidéo les explications de Claude sur les qualités mécaniques de ce bois et les modifications au X de son barrage :