Qu'est ce qui vous agace automatiquement?

En ville, ça dépend surtout des arrêtés en vigueur.

Chez moi, j'étais le spécialiste.
Le divisionnaire ne prenait m^m plus la peine de me convoquer moi et mes vieux vu qu'à chaque fois mon daron lui explosait de rire au pif lorsqu'il annonçait les faits (du moins, jusqu'à l'épisode que je vais vous raconter plus bas).
On avait beau lui demander comment il régirait en pareille situation lors de son jogging dominical, mais il goûtait assez peu la blague vu que la pratique de la "planche à roulettes" était réglementée sur ma ville par un arrêté de 1979, date à laquelle une notable du coin s'était faite renverser sans grande gravité par un môme à l'époque des petites planches en plastique à large roulettes... Les 70's quoi...
Ce débile de divisionnaire n'avait rien d'autre à foutre de ses journées et en avait fait une affaire personnelle, si bien que je recevait les PV directement chez moi après la troisième convocation.

Il a fini par se faire mettre à pied après un magnifique article dans le journal local concernant le zèle avec lequel il s'attaquait au petit groupe de skaters que nous étions, d'autant qu'à l'époque, l'un des conseillers municipaux, adeptes de sport puisque justement enseignant dans cette matière dans un collège bien connu de la ville, s'était mis en tête, sans doute pour raisons électorales, de nous construire un skate-park et nous faciliter l'utilisation de certains secteurs du centre-ville.

Bref, ça a été la guerre avec ce keuf' que personne, du reste, ne pouvait blairer dans son commissariat (j'y connaissais plusieurs flics car c'est une petite ville de 25000 habitants) pendant environ 2 ans jusqu'à ce qu'il suscite l'intérêt de sa hiérarchie (voir plus bas).

N’empêche, à l'époque, chaque PV, c'était 75Frs.

La goute d'eau, ce fut donc le jour où, en public, il a décidé de m'interpeller.
Ce jour là, j'avais pété un roulement à billes et je ne pouvais plus rouler. Résultat, j'avais passé l'après-midi le cul sur ma board à regarder les copains.
L'autre se pointe, et tout le monde se barre en courant ou en roulant pour ceux qui se savaient inconnus du gaillard.
Moi, n'ayant rien à me reprocher puisque dans l'incapacité de rouler, je me lève, très sereinement, et tourne les tallons, planche sous le bras.
Ce con de keuf', il décide de m'interpeller en m'appelant par mon nom de famille, mais en l'écorchant à plusieurs reprises le rendant de ce fait méconnaissable.
J'ai joué au con comme lui, je me suis pas retourné et j'ai continué à marcher tranquillement vu que ce n'était pas "moi" qu'on appelait.
Lui hurlait mon "nom-erroné" de plus en plus fort persuadé de son bon droit.
Il fini par accélérer le pas, et à ma hauteur, furibond, m'attrape par l'épaule et m'envoie valser au sol en hurlant: "MONSIEUR "MACHIN"!!! QUAND UN POLICIER VOUS APPELLE VOUS ÊTES SOMMÉ DE VOUS ARRÊTER IMMÉDIATEMENT!!".
Je tombe, me pète un peu la lèvre qui saigne.
Je me retourne vers lui et lui demande s'il a un problème et s'il veut que j'appelle la police vu que, je ne le connais pas (il est en civil) et que je suis victime d'une agression en pleine ville devant au bas mot 80 témoins. (ses hurlements ont ameuté tous les badaud qui sont comme figés autour de nous pour voir ce qui se passe..)
Il me choppe par le col pour me redresser, je le laisse faire (faut toujours laisser faire dans ces cas là).
Il est rouge de colère et ne se maitrise plus.
Moi, connaissant un peu le gugusse, je reste d'un calme olympien qui m'étonne encore 20 ans après, et je lui explique tranquillement que je ne comprends pas ce qu'il me veut et que s'il est vraiment membre des forces de l'ordre, je n'ai toujours vu ni plaque ni carte qui le justifie.
Il bouffe sa moustache et me demande si je veux aller m'expliquer au poste "manu-militari", et toujours très calme, je lui répète que je n'ai toujours aucune preuve de son appartenance à la police, mais que s'il le souhaite, je me ferais un plaisir pour l'accompagner dans le but de porter plainte pour agression.
Entre temps, plusieurs amis (non-skaters) présents tout près se sont rapprochés et commencent à s'interposer en expliquant qu'ils ont tout vu et souhaitent témoigner.

Bref, un joyeux bordel d'un bon quart d'heure au terme duquel le flic zélé en question, après être passé par toutes les couleurs, à fini par lâcher l'affaire en maugréant sans avoir, à aucun moment, présenté la moindre carte ni plaque comme je le lui avais demandé à plusieurs reprises.

Dans les jours qui ont suivi, mon histoire à fait le tour de la ville et j'ai eu mon petit 1/4 d'heure de gloire locale .
Pourtant, quelques jours après les évènements, j'ai reçu un splendide PV à la maison comportant l'infraction à l'arrêté de 1979 agrémenté d'un splendide "outrage à AFP" et de je ne sais plus quel autre assaisonnement.

Il va de soi que ce fut le dernier, car suite à l'incident, mes parents ont porté plainte (j'étais à quelques semaines de la majorité à l'époque des faits) en relatant la totalité des faits et des arguments que j'avais stockés:
-Agression verbale à mon encontre avec un patronyme déformé que je ne pouvait prendre que pour une insulte (n'insistez pas, je ne vous direz pas mon vrai nom ni celui qu'il avait inventé pour l'occasion) ou au mieux, pour le nom d'un autre
-Défaut de présentation en tant qu'AFP
-Accusation fallacieuse de pratique de la planche à roulettes (interrogé, l'AFP n'a pu qu'admettre devant témoin qu'il avait supposé ma pratique mais pas la constater)
-Violence caractérisée (photo de ma lèvre ensanglantée prise dans un photomaton avec journal du jour [fourni par un commerçant témoin de l'altercation] juste après le départ du flic ce jour là)

Et en prime, j'avais porté les témoignages écrits de plusieurs amis, ainsi que de deux commerçants qui, comme un fait exprès, se trouvaient justement avoir déjà eu des accrocs avec le fameux AFP qui était vraiment un spécialiste du cassage de couilles pour des conneries plutôt que de s'occuper de vraies affaires...

Ce fut la dernière fois qu'il nous emmerda. Quelques semaines plus tard, j'ai découvert qu'il avait quitté son appartement situé en plein centre-ville (ce qui expliquait sa rapidité à nous tomber sur la tronche dès les premiers bruits de planches) pour emménager... comble du comble, dans une maison située juste derrière chez mes parents, au bout de notre jardin.
Ses fenêtres donnaient pile sur mon jardin, dans lequel je me suis empressé dans les mois suivant de construire... une mini-rampe!!!

Tout ça pour une bande de gamins qui pratiquaient le skate comme un sport sans rien demander à personne.
Le pire, c'est que de toute la bande que nous étions à l'époque, aucun n'a mal fini. Personne n'a eu le moindre problème avec la justice ou quoi que ce soit.
Nous étions tous des p'tits gars plutôt bien sous tous rapports si ce n'est, qu'on aimait le skate.

*Dit l'homme qui peinait à mettre un point à ses fins de phrases.