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Sujet de la discussion Sociologie de la Loudness War: tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur la guerre du volume!
Bonjour à tous !

J'ai fait mon mémoire de sociologie sur la guerre du volume dans le monde de la production musicale, et j'aimerais le partager avec les membres de ce forum, que cela devrait intéresser. C'est un travail qui m'a pris énormément de temps, et dont je suis assez content ; je pense que c'est de la qualité.

C'est un mix entre des analyses statistiques sur l'augmentation du volume à partir d'un échantillon d'albums de musique, et une enquête "de terrain" (comme on dit) dans des studios, par l'interview d'artistes, de producteurs, de directeurs artistiques, de programmateurs radio, d'attachés de presse, etc.

La première partie est technique à certains endroits, mais j'espère que ça ne vous arrêtera pas si vous êtes intéressés, parce que la partie la plus intéressante pour les membres du monde musical est la deuxième partie, qui se donne la tâche de comprendre quel sens a le phénomène de loudness war pour ses acteurs ainsi que de montrer le réseau de contraintes qui la rend presque inévitable.

Je pense avoir découvert certains éléments intéressants dont on ne se doutait pas forcément a priori. Mais je ne dévoile pas tout maintenant...

Donc, si vous avez envie de lire sur le sujet, voici le résultat :

fichier pdf: Joël Girès - Des transformations convergentes sans chef d'orchestre..pdf

En espérant avoir des retours !

[ Dernière édition du message le 29/12/2011 à 03:18:02 ]

2
Citation :
C'est un travail qui m'a pris énormément de temps, et dont je suis assez content ; je pense que c'est de la qualité. [...] Je pense avoir découvert certains éléments intéressants dont on ne se doutait pas forcément a priori

Encore des promesses... y'a des élections bientôt ou quoi ? :-)

Bon alors, après un très rapide parcours de la thèse, je dois avouer ne pas avoir découvert grand chose. Il faut-dire que sur AF, le sujet est ancien et largement débattu et étayé.

Néanmoins, l'approche "sociologique" est originale et si elle se conclue sur des résultats déjà connus, elle résume plutôt bien les mécanismes qui ont porté la loudness war.
Je recommande en particulier, les interviews des artistes, producteurs, programmateurs radio etc... Cette partie est terriblement croustillante, les propos recueillis par l'auteur sont effarants. L'émotion, la musique est totalement absente des discours, les acteurs auraient probablement tous mieux réussi s'ils s'étaient engagés comme traders à la City. Leur incompétence sur le sujet (le son) et surtout la totale incompréhension et l'absence abyssale de communication entre tous les acteurs de la chaîne de production est flagrante.

Oui, la Loudness War est bien la conséquence du marché, un marché du disque sans régulation, qui comme celui des produits financiers, c'est planté par excès.

Le mémoire ne s’aventure pas à proposer des solutions. On reste donc un peu sur sa faim. En même temps, les solutions face aux excès, on les connait: la régulation. La norme EBU R128 annonce une fin rapide à la guerre du Loudness.

Bonne lecture et encouragement à l'auteur pour son travail. :-)

Trop de morceaux de musique finissent trop longtemps après la fin. [Igor Stravinsky]

3

posté à 2h 45

137 pages..

 

Réaction à 10 h 45

 

sacré esprit de synthèse....

4
Je viens de télécharger ton PDF, et je vais le lire avec attention.
En parlant de la norme EBU R128, le mémoire que je dois réaliser cette année porte sur ce sujet :)
Il pourrait "boucler la boucle" comme on dit, je le posterais si il vous interesse !
5

Flag. Evidemment j'ai pas encore tout lu.

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Même chose pour moi, le sujet est intéressant, je vais prendre le temps de le lire...

Autant l'hiver éclate que l'hétéroclite...

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Juste par curiosité, c'est quel album qui tape à -3dB rms? :lol::lol:
8
Citation de microwAves :
Juste par curiosité, c'est quel album qui tape à -3dB rms? :lol::lol:


"Massacre" de Wu Tang Clan.
Un des plus horribles albums de tous les temps :)
9

Rarement titre d'album fut aussi bien porté, soit dit en passant. bravo

10
Ils ont réussi à faire plus moch... euh, fort que death magnetic de metallica... Je pensai pas ça humainement possible...
11
Je trouve l'idée intéressante. Je jetterai un oeil sur le lien pdf bientôt. ;-)

 

 

 

12

Citation de SampleHunter :

La norme EBU R128 annonce une fin rapide à la guerre du Loudness.

Comme j'aimerais être aussi optimiste, à ma connaissance la norme R128 ne s'impose qu'aux diffuseurs et à leurs fournisseurs de programmes. Rien n'oblige une production phonographique à respecter cette norme.

Ca me rappelle qu'un jour une boîte de gravure de DVD m'a interpelé parce que le niveau RMS du programme était trop faible. Ben on avait pas compressé comme des brutes, c'est tout... C'est pas obligatoire.

JM

[ Dernière édition du message le 29/12/2011 à 13:30:29 ]

13
Citation de SampleHunter :
Bon alors, après un très rapide parcours de la thèse, je dois avouer ne pas avoir découvert grand chose. Il faut-dire que sur AF, le sujet est ancien et largement débattu et étayé.


C'est clair que beaucoup de mes hypothèses viennent des forums de MAO, mais je pense tout de même montrer des éléments intéressants !

Comme la différence majors/indépendants, ou le fait que l'augmentation du volume diminue, sans doute parce que la convention de qualité joue contre la loudness war, et surtout les mécanismes concrets qui mènent à ce phénomène ! Le fait par exemple que les producteurs imitent les prods des majors, tout en ayant beaucoup de défiance vis-à-vis de ces dernières ! C'est très intéressant ! Ça permet aussi, je pense, de trancher dans le débat "c'est la faute aux ingés - non c'est celle des artistes - non c'est celle du mp3 - non c'est celle de la démocratisation - etc". Là on saisit comment ça se passe, et c'est tout le monde, de concert, qui marche là dedans. Pas pour les mêmes raisons, on le voit bien, mais on voit aussi qu'on a toute une configuration qui fait que le phénomène est relativement inévitable.

Citation :
Je recommande en particulier, les interviews des artistes, producteurs, programmateurs radio etc... Cette partie est terriblement croustillante, les propos recueillis par l'auteur sont effarants. L'émotion, la musique est totalement absente des discours, les acteurs auraient probablement tous mieux réussi s'ils s'étaient engagés comme traders à la City. Leur incompétence sur le sujet (le son) et surtout la totale incompréhension et l'absence abyssale de communication entre tous les acteurs de la chaîne de production est flagrante.


L'émotion n'est pas totalement absente, loin de là, et c'est l'objet du 9ème chapitre, où on voit que l'attachement des artistes à la notion de "qualité" les fait tout de même freiner leur envie de volume (et donc de compétitivité). C'est très intéressant ! La notion de "passion" rentre donc dans le jeu, et a un impact. Il n'empêche, effectivement, que je ne pensais pas la dimension "entrepreneuriale" aussi forte.

Citation :
Oui, la Loudness War est bien la conséquence du marché, un marché du disque sans régulation, qui comme celui des produits financiers, c'est planté par excès.


Pour résumer très fort, on peut dire ça. Ça veut dire, pour être plus précis, que l'artistique se produit dans des relations de concurrence, et c'est cette configuration de concurrence qui produit le phénomène de loudness war.

Pour les solutions, je n'en propose pas, parce que ce n'est absolument pas le rôle d'un travail scientifique. Ce que je montre aussi d'ailleurs, c'est que la loudness war n'est pas un problème "en soi", mais qu'il l'est parce que l'histoire du disque a produit un attachements à une esthétique particulière, que bat en brèche la loudness war, et parce que ce phénomène se passe en même temps que la démocratisation du matériel audio, qui attaque le statut des ingés son pro (v. chap. 9).

Citation :
Bonne lecture et encouragement à l'auteur pour son travail. :-)


Merci ! Et bon mémoire à toi aussi :)
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Après trente ans d'exercice de ce métier dans différentes structures, voici les constats que j'en tire, en vrac :

  • l'émotion n'est pas absente chez la plupart des programmateurs de radio, enfin pas seulement l'émotion, la culture musicale et l'intelligence font aussi souvent gravement défaut, j'ai des noms (et oui !icon_cry.gif).
  • on aimerait que les affirmations précédentes ne soient pas applicables aux producteurs, mais c'est hélas parfois le cas aussi icon_confus.gif
  • il faut croire que les musiciens et leurs prods ont à la fois assez peu confiance dans la qualité de leurs produits, et celle de leurs auditeurs/acheteurs potentiels pour ne se reposer que (ou presque) sur l'argument du niveau sonore pour espérer vendre.
  • Accuser les ingés son, les musiciens, les "tout ce que vous voudrez" d'être responsables est un raccourci confortable. Dans chaque catégorie il y a des complices et des gens qui résistent. Je constate que les vrais mélomanes sont toujours dans la seconde quelles que soient leur fonctions.
  • du constat précédent, on déduit qu'il est toujours possible de nos jours de produire des enregistrements qui ne soient pas hyper-compressés, il faut les faire avec des musiciens, des producteurs et des ingés son qui aiment la musique et qui ont la culture du beau son. Chacun d'entre eux n'étant pas préoccupé plus que nécessaire par des considérations mercantiles basées sur des concepts idiots.
  • rester optimiste face à la bêtise dans un monde ou Claude Guéant peut être le ministre de l'intérieur d'une démocratie, c'est pas facile-facile.

JM

15
Citation :
Ça permet aussi, je pense, de trancher dans le débat "c'est la faute aux ingés - non c'est celle des artistes - non c'est celle du mp3 - non c'est celle de la démocratisation - etc". Là on saisit comment ça se passe, et c'est tout le monde, de concert, qui marche là dedans

C'est ici que le mémoire est intéressant. Il fait le constat de responsabilité partagée des uns et des autres dans la Loudness War et qui me semble assez juste.

La création d'un Album est un vrai travail d'équipe, long, complexe à chaque étapes (création, enregistrement, mixage, promotion, diffusion etc...). Et ce que je lis dans les interviews des différents acteurs qui composent cette chaîne, c'est leur incapacité à travailler ensemble sur le projet. Ils ne se comprennent pas, s'opposent au lieu de s'expliquer, bref le degré zero de la communication, comme si chacun devait combattre l'autre pour défendre un business qui est pourtant le même pour tous: vendre de la musique. Je sais que de travailler en équipe est difficile mais l'état des lieux qui est brossé ici involontairement par les protagonistes est redoutable.

Trop de morceaux de musique finissent trop longtemps après la fin. [Igor Stravinsky]

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Citation :
à ma connaissance la norme R128 ne s'impose qu'aux diffuseurs et à leurs fournisseurs de programmes. Rien n'oblige une production phonographique à respecter cette norme.

Oui, mais c'est là que le la norme est intéressante. Plutôt que de contraindre tous les acteurs, on pénalise uniquement le dernier maillon: le diffuseur. Ce sont les déciderus aujourd'hui, ils sont peu nombreux et donc facilement contrôlables. De fait, alors qu'ils privilégiaient pour certain les productions qui tapaient dans le rouge, avec ce système contraignant, ils choisiront forcément les productions qui respectent la dynamique. Mais tu as raison, sur le principe, un artiste pourra toujours sortir un album compressé "non compatible" pour les Média. :-)

Trop de morceaux de musique finissent trop longtemps après la fin. [Igor Stravinsky]

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Tu n'as pas tort. Mais il faut faire le pari que le constat d'inutilité de cette guéguerre mènera a plus d'intelligence dans la production. Ca viendra peut-être, mais ça demandera du temps de toutes façons.

JM

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Citation :
L'émotion n'est pas totalement absente, loin de là, et c'est l'objet du 9ème chapitre, où on voit que l'attachement des artistes à la notion de "qualité" les fait tout de même freiner leur envie de volume

Je ne suis pas certain que les acteurs de la Loudness War soient si attachés à la qualité. Comme l'évoque Jan, ils se sont souvent compromis en privilégiant le business. Et je trouve qu'ils ont beau jeu, dans le chapitre 9, de larmoyer sur leur propre sort. On est plutôt dans le registre de la repentance, après une guerre dans laquelle on a fournit les armes et au terme de laquelle tout le monde a perdu: en qualité et en business.

Trop de morceaux de musique finissent trop longtemps après la fin. [Igor Stravinsky]

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sujet très intéressant.

je vais télécharger le pdf.

 

ce qui est gênant dans la loudness war ce sont aussi les conséquences sur la santé auditive qui commencent à être pointées par certain (je me souviens d'un reportage dans un journal, sur France2 je crois.

 

à force d'écouter la musique trop compressée et trop forte, les oreilles ne se reposent plus et les dommages apparaissent à plus ou moins long terme.

20
J'ai commencé à lire....
Petite phrase incompréhensible en 8-3

Citation :
Moi : à ton niveau, est-ce qu'il y a, fin, toi c'est important le volume ou c'est un truc
que t'as jamais vraiment fait gaffe.

Studio de Mastering en ligne http://www.lvmastering.com/

21
Je ne suis ni universitaire, ni sociologue, mais il manque un volet important à ton mémoire. Celui des conditions d'écoute qui orientent aussi le travail de production vers un usage intensif de la compression. Jen n'ai pas les statistiques, mais la tendance est au développement d'un usage nomade de la musique que ce soit en voiture, avec les téléphones "inteligents" ou de simple lecteurs mp3. L'age d'or de la hi-fi où des grosses enceintes trônaient à côté du magnétophone à bande dans les salons bourgeois est révolu. Le SACD (super qualité numérique) est un échec absolu, alors que le mp3 est un succès. L'industrie n'a fait que s'adapter aux nouveaux usages en adaptant le contenu aux performances dynamiques des chaines audio actuelles. Les conditions probables d'écoute sont les suivantes: Source mp3 + ampli alimenté par une simple pile 1.5V + earbuds + bruit des transports.
Autant je trouve normal que certaines productions massacrées au mastering aient fait scandale, autant je m'étonne de l'absence générale de réaction pour les musiques amplifiées en live où la compression de dynamique fait encore plus de dégâts que sur CD. La "loudness war" est un vaste sujet et le point de vu "politiquement correcte" de la dénonciation/constatation est confortable. La recommandation 128 de l'EBU sur le niveau moyen de diffusion pour les broadcasters, ne changera pas les conditions d'écoute modernes de la musique enregistrée.

[ Dernière édition du message le 29/12/2011 à 21:11:26 ]

22

Je trouve au contraire que l'argument des conditions d'écoute est une escroquerie intellectuelle. Les conditions d'écoutes étaient bien pire il y a vingt ans, avec des systèmes bas de gamme bien moins performants par rapport à leurs équivalents actuels. Les lecteurs nomades étaient à K7 et avaient de bien mauvaises performances.

Les gens qui aiment vraiment écouter de la musique achètent toujours des chaines HiFi de qualité, simplement le marché, comme il y a vingt ans est un marché de niche, et ne concerne pas les "Connexion", "Boulanger" et autres "Darty".

Pour la grande majorité des autres, les conditions d'écoutes ne se sont pas dégradées, c'est un faux argument et une excuse facile qui ne tient pas l'analyse plus d'une minute.

JM

[ Dernière édition du message le 29/12/2011 à 21:28:22 ]

23
Alors, j'ai investigué ce point, et tous les ingés de mastering m'ont dit qu'ils n'anticipaient pas vraiment le fait que ça allait passer sur mp3, chaine Hi-Fi ou autre. Ils font ce que le client veut, ou ce qu'ils croient que le client veut, mais la question de l'écoute ne semble effectivement pas être un critère déterminant...

Si je n'en ai pas parlé, c'est qu'il n'y avait pratiquement rien à dire sur le sujet. J'ai calé ma logique d'explication sur la logique des acteurs que j'ai interrogé, et si ça n'apparait pas chez moi c'est que ça n'est pas apparu dans l'enquête...
24
Citation de Lv :
J'ai commencé à lire....
Petite phrase incompréhensible en 8-3

Citation :
Moi : à ton niveau, est-ce qu'il y a, fin, toi c'est important le volume ou c'est un truc
que t'as jamais vraiment fait gaffe.


Ce n'est pas incompréhensible, c'est juste du discours parlé retranscrit mot pour mot, et donc par écrit, et sans intonation, ça peut paraître bizarre parfois :)
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Il y a aujourd'hui de très bons systèmes audio, la technique a progressé et la question n'est pas là. Mais l'auditeur moyen, celui qui fait qu'un album est vendu en masse, écoute la musique plutôt en nomade, que sagement assis dans son salon.
De plus je trouve que si "loudness war" est un terme vendeur, l'expression ne reflète mal la réalité. Le fait est que le niveau moyen des productions n'a cessé d'augmenter depuis l'apparition du numérique. Mais cela n'est pas toujours au détriment de la qualité audio. Il y a seulement des masterings plus ou moins réussis. Le niveau RMS d'un morceau ou sa plage dynamique ne disent rien de sa qualité de sonore. Les mêmes chiffre peuvent correspondre à des rendus bien différents.

[ Dernière édition du message le 29/12/2011 à 21:48:21 ]