Décidément, les petits développeurs de logiciels fourmillent de bonnes idées et de bons produits. Après Artillery, Unique, Wow, Vogue et Robotronic, l’éditeur Sugar Bytes sort Effectrix, présenté comme ‘the effect sequencer’. De quoi s’agit-il ?
Décidément, les petits développeurs de logiciels fourmillent de bonnes idées et de bons produits. Après Artillery, Unique, Wow, Vogue et Robotronic, l’éditeur Sugar Bytes sort Effectrix, présenté comme ‘the effect sequencer’. De quoi s’agit-il ?
Présentation
Ceux qui ont déjà essayé ou pratiqué Glitch de dblue, Major Malfunction de Defective Records ou DM de Devine Machine ont une petite idée de ce dont il s’agit. Sugar Bytes propose avec Effectrix un plug-in contenant un séquenceur 32 pas, qui peut piloter simultanément 14 effets, avec deux pistes d’automation de paramètres par effet, le tout activé par Midi, tout comme les 12 patterns par preset (via Midi Note ou automation de l’hôte). Très alléchant, d’autant que le plug est compatible Mac et PC, disponible en VST et AU, utilisable à partir de Mac OS 10.4 et Windows XP et se prête aussi bien à une utilisation live que studio.
Le plug peut être téléchargé du site de l’éditeur dans une version démo, il en coûtera 99 € de l’autoriser. Le manuel (en .html) se trouve dans le dossier (arborescence Manual/Effectrix/Sugar Bytes) installé dans les Applications (Mac OSX) et peut être appelé directement de l’interface du plug.
Au menu donc, un séquenceur 32 pas, proposant 6 résolutions, du 1/32e au 1/4e, soit de la quadruple croche à la noire, donc une grille qui court de 2 temps à 8 mesures (tout le monde suit ?) en synchro avec le tempo de l’hôte. On peut raccourcir la durée de la boucle et déplacer son point de départ, par exemple boucler de 1 à 9, puis déplacer la boucle entière à 11 : la lecture aura alors lieu de 11 à 19. Les effets sont dotés d’un code couleur qui permet de facilement repérer leur activation ou leur action sur la grille du séquenceur.
Sous l’accès aux presets (80 d’usine), le traditionnel ‘à propos de’ et le Bypass, on trouve quelques paramètres fondamentaux quant à l’utilisation de Effectrix. Tout d’abord le déclenchement par note Midi, quelle qu’elle soit (activation non générale, c’est-à-dire qu’à chaque changement de preset, il faut la réactiver). On joue une note sur un contrôleur Midi, le plug se met en route, on lâche la note, le plug s’arrête, il n’y a pas plus simple.
Ensuite les 12 sous-patterns, répartis sur une octave de clavier. L’activation simultanée de la reconnaissance de note Midi et de cette section permet d’appeler par note Midi une des variations d’un preset. Les touches C et P correspondent à Copy et Paste, les informations concernant les pistes de modulation étant ignorées (voir plus bas). Un bouton permet de doter l’écran de la matrice d’une légère coloration correspondant à chaque effet. Init réassigne les valeurs par défaut à l’ensemble des réglages du plug. Derniers réglages communs, le Master Level et Master Mix (balance Dry/Wet globale), dont la courbe peut être linéaire ou bien EPL (Equal Power Law), ce qui garantit un volume à peu près égal sur toute sa course.
Loopings en tout genre
Chaque effet dispose de son propre Bypass, d’une remise à zéro des éléments posés sur la grille du séquenceur et de deux pistes de modulation/automation (A ou B). Quand on sélectionne un effet, ses paramètres apparaissent dans la partie inférieure du plug. Chacune des pistes pourra être assignée à un (et un seul) des paramètres alors disponibles (menu déroulant). Il suffit d’appuyer sur la touche Rec du plug, de lancer la lecture et de bouger le potard concerné. Automatiquement, les informations seront enregistrées et restituées lors du prochain passage. Un bouton RND permet de générer des modulations aléatoires, et le réglage Smooth permet d’adoucir la transition entre le pas du séquenceur.
Les effets sont plus ou moins regroupés par famille : les loopers et dérivés, les distos et filtres, les effets de modulation et temporels. Chaque effet propose un ensemble de réglages qui sont propres aux fonctions de l’effet, et trois boutons invariables, Attack, Release et Wet/Mix Level. Juste au-dessus se trouve un menu déroulant offrant des préréglages. Je me servirai de deux loops, celui-ci et celui-là, plus rapide, pour les démonstrations des effets du plug.
On commence avec Loop, un looper pourvu de fonctionnalités de base, Size (la durée de la partie échantillonnée, de 1/128T à 1/1), X-Fade (qui adoucit les bouclages), Speed (qui ralentit la lecture de la partie échantillonnée) et Decay qui permet de raccourcir l’enveloppe pour des effets plus hachés. Voici un premier exemple utilisant trois patterns déclenchés par Midi. On reprend exactement les mêmes réglages et patterns, en appliquant cette fois une modulation sur la taille, grâce à l’une des deux pistes internes Modulator.
Autre looper, X-Loop reprend toutes les fonctions de Loop, en remplaçant Decay par Pitch Change. Un premier exemple, suivi des mêmes réglages avec automation sur le Pitch. On continue avec Scratch Looper qui, comme son nom l’indique rajoute des effets de scratch au bouclage, avec réglages ‘mouvement avant-mouvement arrière’. Voici un exemple utilisant le preset d’effet Good One.
Reverse est un efficace outil de lecture inversée, qui offre les réglages Time, Fade et Decay, permettant d’avoir des effets très marqués et abrupts ou des inversions plus discrètes, qui peuvent être intégrées au sein d’une boucle comme partie constituante (grâce au réglage Mix). Ce qui est d’ailleurs le cas de tous les effets, et l’un des grands intérêts du plug : les effets peuvent intervenir de façon très prononcée, per se, ou être part d’une construction de boucles.
Stretch à Crush
Viennent ensuite les outils d’altération et détérioration du son. Stretch, tout d’abord, qui permet de ralentir le son, de façon proportionnelle au tempo ou non, grâce à ses réglages Time et Tempo-Relative. Grainsize définit la taille d’analyse / déconstruction / restitution du signal audio et Fade adoucit les passages entre les fragments audio résultant du ralentissement. Voici un exemple à un tempo ralenti de moitié par rapport à celui de l’original, avec une granulation moyenne. Bien sûr le résultat n’est pas comparable avec celui obtenu avec les spécialistes du genre, mais le stretch ici proposé est à prendre en tant qu’effet, non en tant que solution de gestion du tempo. D’ailleurs, vu son principe d’utilisation temps réel (sans pré-analyse), il est impossible d’accélérer l’audio.
Vinyl est un effet de scratch très simplifié, sans tous les réglages d’aller-retour et le bouclage de Scratchloop. Un paramètre Time (subdivision du temps), un Size (pour la taille des échantillons modifiés) et Slope (profondeur de l’effet) produisent les effets habituels ; ici, une automation a été ajoutée, toujours en interne, sur Size et Slope pour donner une variation à l’effet. Un bouton Stop permet aussi de simuler l’arrêt de la platine. Dommage que ce bouton ne puisse être automatisé, ni par l’automation de l’hôte ni par celle du plug-in, ni gardé en mémoire dans l’un des patterns. Bizarrement, le bouton Time se règle à l’inverse de ceux des autres effets.
Tonal Delay est un effet assez original, puisqu’il s’agit d’un écho court qui permet de resynthétiser le signal entrant et lui assigner une note, un contenu harmonique. Tune permet de fixer la hauteur de la note, Feedback renforce le son obtenu, Width joue sur la largeur stéréo et HighPass remplit son rôle de filtre. Level règle le niveau de l’effet, indépendamment du Mix et Master Mix. Avec une automation, on peut très bien reconstruire une mélodie, ajouter une séquence à un groove de batterie, etc. Le premier exemple utilise une note fixe sur deux patterns, et le deuxième reprend les mêmes patterns, avec une modulation du paramètre Feedback.
Stutter propose le fameux effet de hachage, grâce à deux mini-séquenceurs 8 pas, l’un dédié au volume, l’autre au Pan (bipolaire, donc). On dispose bien sûr de réglages de tempo, d’Attack et de Decay. Hors les classiques effets de fade à la BT, on peut aussi se débrouiller pour l’utiliser comme un Transient Designer du pauvre, et changer complètement l’esprit d’un groove. Pour finir, Crush associe un Bitcrusher (en pourcentage), un modificateur de taux d’échantillonnage, Samplerate (qui varie en fonction du taux du projet, de 6 à 48 kHz en 48 kHz, par exemple) et une Distorsion. Les réglages peuvent aller du plus destructeur à un usage plus subtil, pour légèrement infléchir le contenu d’un groove, grâce aux deux pistes de modulation.
Effets classiques
On termine par une série d’effets plus classiques, Phaser, Chorus, Delay et Reverb, plus un Filter doté des meilleurs filtres de issus de WOW, dont le Vowel Mode. Voyons d’abord les premiers.
Phaser et Chorus offrent de nombreux réglages, Rate, Stages (Phaser seulement, de 0 à 8), Depth, Feedback et Width. Efficaces, manquant peut-être un peu de woosh pour le Phaser. L’exemple suivant fait entendre le Phaser sur les deux premières mesures puis les Chorus sur les deux dernières.
Delay propose un classique délai, avec réglages de Time, Feedback, Diffusion et Width ainsi qu’un Dry Level. L’effet reproduit plus ou moins les artefacts que l’on obtient avec un délai analogique lorsqu’on modifie en temps réel le paramètre Time. L’exemple audio fait entendre une automation sur ce paramètre. Réverbe offre un effet allant d’un Room très petite à un Hall, avec réglages Decay, Width, HighPass, et DryLevel. Grâce aux différentes options d’automation, en interne ou par l’hôte, on peut poser des effets de réverbe où l’on veut, créant aussi bien des gates très prononcés que des effets moins définis.
Dernier élément, le filtre, qui propose un CombFilter, un HP, un BP et un LP, tous trois en 24 dB/oct. CutOff et Reso sont de la partie, et pour faire vivre ce filtre, on trouve un réglage d’Attack et un de Decay, qui seront utilisés quand le paramètre Env Typ sera sur Envelope et un Env Peak qui détermine la valeur supérieure atteinte par la modulation. L’autre choix d’Env Typ est un Envelope Follower, auquel cas le filtre sera modulé en fonction du signal entrant. On y ajoute le Vowel Mode qui offre selon les réglages différentes voyelles. Le filtre est la véritable marque de fabrique de Sugar Bytes, et là encore, même si l’on ne trouve pas la richesse de réglages de WOW ou encore de Unique, il se comporte très bien, avec une excellente qualité sonore. Voici un très simple exemple de changement de voyelles provoquées par la modulation du CutOff (qui détermine la voyelle en mode Vowel Mode), modulation effectuée par le signal entrant grâce à l’Envelope Follower.
On finit avec quelques exemples de presets utilisant plusieurs effets, qui montrent un certain nombre des possibilités du plug : Bassline Basher, Crazy Scratch, Disko Gargle, Drummers Lab 5, Ending Soon, Totally Strange, X Looped et Yps.
En conclusion
Original, créatif, Effectrix a beaucoup d’atouts. Ses effets tout d’abord, de bonne voire très bonne qualité, comme les loopers, le Tonal Delay, Vinyl, Crush, les filtres, le chorus. Et puis le séquenceur et ses deux lignes de modulation par effet. On apprécie aussi de pouvoir générer des modulations de façon aléatoire ou d’enregistrer les mouvements d’un potard.
L’ergonomie est simple, la prise en main très rapide, et les commandes en temps réel permettent le travail en live sans aucun souci, d’autant que chaque paramètre peut être assigné à un contrôleur via Midi Learn (control+clic sur le réglage suivi du déplacement du contrôleur physique). Les douze patterns à l’intérieur d’un même preset sont une très bonne idée, et leur construction par copier-coller ainsi que leur commande via note Midi en font des alliés de poids lors de prestations live. Le déclenchement par note Midi permet tous les effets de redémarrage, de stop, de stutter et autres effets possibles et imaginables.
L’utilisation plus traditionnelle en tant qu’effet au sein d’un séquenceur est aussi riche de possibilités, puisqu’outre le Midi Learn, le plug offre une automation très complète. Quelques reproches quand même : d’abord dans le but d’une utilisation live, il est dommage, même si la plupart des hôtes proposent cette fonction, de ne pas avoir un Tap Tempo. Il n’y a pas moyen de remettre à zéro les deux lignes de modulation autrement qu’en redessinant une courbe, ce qui n’est pas du plus pratique. Le bouton Stop de Vinyl ne peut être automatisé, c’est aussi dommage. En chipotant un peu, la possibilité de choisir des résolutions différentes par effet serait un plus et le fait de pouvoir placer plus librement les éléments sur la grille serait aussi appréciable. Mais c’est toujours pareil, quand les choses sont réussies, on en voudrait encore plus !
Bref, Sugar Bytes réussit encore une fois un très bon produit, spécialisé certes, mais après tout pourquoi sortir un énième EQ ou chorus, alors que le marché semble plus que saturé ? S’il se destine plus particulièrement aux créateurs de musiques électroniques, aux DJs, aux musiciens live, Effectrix pourra aussi bien compléter un ensemble de plugs, en apportant une touche d’étrangeté ou d’effets plus typiques d’un genre au compositeur plus traditionnel. Le sound designer y trouvera aussi grand intérêt, puisque la création d’éléments rythmiques y gagne en variété et en originalité, un simple loop pouvant se transformer en entité moins clairement identifiable. Encore une fois, une démo téléchargeable et utilisable pendant 30 jours (30 minutes d’affilée) permettra de se faire une idée.