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Pédago

Préparation du set

Faire ses premiers concerts : le set (I)

Setlist, playlist, programme... quel que soit le nom qu'on lui donne, le contenu de ce qu'on va jouer doit être soigneusement préparé. Rien de très compliqué, mais quelques recettes simples peuvent faire une belle différence dans la dynamique de votre concert. Nous verrons qu'il y a des dogmes qu'il n'est pas toujours bon de suivre.

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Sur scène, vous serez dans des condi­tions radi­ca­le­ment diffé­rentes de la répé­ti­tion. La dispo­si­tion des musi­ciens, le son, la façon dont vous vous enten­drez et enten­drez les autres, les éclai­ra­ges… tout sera très diffé­rent. Sans comp­ter la présence du public (on espère). Entre cette situa­tion désta­bi­li­sante et l’adré­na­line géné­rée par le trac qui va vous propul­ser vers de sommets, vous allez vivre une expé­rience à part et, pour la plupart des musi­ciens, parti­cu­liè­re­ment jouis­sive. Pour que tout se passe pour le mieux, un des points essen­tiels est d’être bien préparé. Et notam­ment côté enchaî­ne­ment des morceaux. Pour cela il va falloir…

Sélec­tion­ner les morceaux

Setlist

Avant de déter­mi­ner l’ordre dans lequel on va les jouer, il faut choi­sir les morceaux. À condi­tion d’avoir un réper­toire suffi­sam­ment étendu pour pouvoir consti­tuer un set complet sans tout utili­ser. Si ce n’est pas le cas, allez-vous forcé­ment tout jouer ? Non. Car il faudra se résoudre à lais­ser de côté les titres qui ne sont pas suffi­sam­ment maîtri­sés.

La première sélec­tion se fait donc sur la base de la maîtrise des morceaux (voir le volet 1). En effet, sur scène, un des points essen­tiels est que le groupe joue carré (voir les dossiers précé­dents et notam­ment « bien travailler en répé­ti­tion »). Si vous avez un morceau que vous aimez beau­coup, mais qui est mal maîtrisé, mettez-le de côté. Cela ne veut pas dire que vous ne le joue­rez pas, mais vous allez le garder pour la fin du concert, ou mieux encore, pour le(s) rappel(s).

Vous avez fait la liste des morceaux que vous maîtri­sez ? Parfait. Attri­buez à chacun une petite note indiquant la maîtrise et la diffi­culté. Des étoiles suffisent large­ment : 2 pour les morceaux que vous savez sur le bout des doigts, qui glissent tout seul, zéro pour les morceaux un peu limites ou compor­tant des diffi­cul­tés qui génèrent parfois des plan­tages. Si votre liste est trop courte, ne vous inquié­tez pas et n’y ajou­tez pas de titres que vous aviez d’abord écar­tés, on y revien­dra. Créez un tableau avec un logi­ciel de tableur (type Excel ou mieux, OpenOf­fice). Dans la première colonne, le nom des morceaux et dans la seconde, la note attri­buée.

S’adap­ter aux contraintes tech­niques

Nous allons d’abord consi­dé­rer la ques­tion des instru­ments. Dans la plupart des groupes, les choses sont assez simples : un musi­cien = un instru­ment. Encore que, même ainsi, il n’est pas rare que le ou les guita­ristes aient à chan­ger de guitare. Mais il arrive que le set-up soit plus compliqué avec pas mal de chan­ge­ments d’ins­tru­ments.

Setlist

Si vous avez d’im­por­tants chan­ge­ments entre chaque morceau du concert, je vous prédis l’en­fer ! À moins que vous n’ayez une grande maîtrise scénique et au moins un membre du groupe capable de meubler avec talent, tout le monde risque de stres­ser par la néces­sité de faire vite et le public va se lasser. D’au­tant que les chan­ge­ments d’ins­tru­ments sont rare­ment très élégants scénique­ment. Et même si vous vous en sortez bien, vous risquez de faire à bais­ser l’in­ten­sité que vous avez géné­rée pendant le jeu. Ne lais­sez pas au public le temps de se décon­cen­trer, de sortir de l’uni­vers dans lequel vous l’avez emmené.

Notez donc bien chaque morceau qui implique une dispo­si­tion parti­cu­lière, un chan­ge­ment d’ins­tru­ment, ou tout autre élément pouvant allon­ger l’en­chaî­ne­ment. Quand on va déter­mi­ner l’ordre des morceaux, il faudra grou­per au maxi­mum les confi­gu­ra­tions simi­laires pour limi­ter le nombre de chan­ge­ments tech­niques sur scène. Bien sûr, cela n’a rien de figé. Il n’est pas rare qu’un chan­teur prenne ou pose une guitare à chaque morceau, par exemple. Vous pouvez consi­dé­rer que vous avez quelques dizaines de secondes le temps des applau­dis­se­ments. De petits chan­ge­ments sont donc possibles, prévoyez la dispo­si­tion scénique en consé­quence avec des instru­ments faci­le­ment acces­sibles, pas de jacks qui s’em­mêlent, etc. Il faut aussi penser, si vous en utili­sez, à la confi­gu­ra­tion des machines, synthés et éven­tuels logi­ciels et surfaces de contrôle. Les musi­ciens qui utilisent de tels instru­ments doivent orga­ni­ser leurs patchs pour que la tran­si­tion entre les morceaux soit fluide. Mais ceci a des limites et il y a souvent un temps mini­mum néces­saire qu’il faut prendre en compte.

Repre­nons notre tableau et ajou­tons une colonne dans laquelle nous allons donc noter les aspects tech­niques évoqués. Faites bref, mais clair. Si vous avez pas mal de chan­ge­ments, n’hé­si­tez pas à faire une colonne pour chaque musi­cien. Notez éven­tuel­le­ment le temps approxi­ma­tif néces­saire que vous aurez évidem­ment chro­no­mé­tré en répé­ti­tion (en y ajou­tant une bonne marge).

Style des morceaux et progres­sion

« Un concert doit démar­rer tranquille­ment, évoluer progres­si­ve­ment pour termi­ner en apothéose ». Quand je parlais de dogmes auxquels tordre le cou, en voici un. Cette formule, répé­tée à l’en­vie au point d’être pratique­ment érigée en règle, est pour moi loin d’être une vérité abso­lue. Si elle s’ap­plique bien aux stars qui jouent devant une salle pleine d’un public impa­tient de la voir, elle est rare­ment oppor­tune pour le groupe inconnu face à un public atten­tiste. Le début de votre concert sera proba­ble­ment un round d’ob­ser­va­tion avec de la part des spec­ta­teurs une curio­sité bien­veillante ou suspi­cieuse selon les condi­tions de concert. Proba­ble­ment bien­veillante si vous jouez dans un bar ou pub, parfois suspi­cieuse si vous faites la première partie d’un groupe un peu connu (le public est surtout pressé de voir ses idoles). Et si vous faites une scène en plein air, beau­coup de gens vont passer, s’ar­rê­ter « juste un peu, pour voir… », s’ap­prê­tant surtout à repar­tir vaquer à leurs occu­pa­tions. Il faut donc accro­cher tout ce beau monde tout de suite. Ajou­tons qu’il y a aussi votre propre état d’es­prit. Premiers concerts signi­fie souvent grands moments de trac, voire trouille monu­men­tale. Et ne croyez pas que cela dépend du nombre de spec­ta­teurs. Je me rappelle, même après pas mal d’an­nées d’ex­pé­rience, m’être tapé des petits moments de flip intense au moment d’at­taquer devant un public de quelques personnes. Allez comprendre !

Déroulement

Un des points essen­tiels est de bien gérer l’in­ten­sité des morceaux au long du concert.

Bref, si comme c’est probable (et comme je vous le souhaite) vous avez le trac, attaquer par du cool risque de vous para­ly­ser. Le trac est une sensa­tion de stress qui peut être très désa­gréable s’il est intense (Jacques Brel, une vraie bête de scène, avait telle­ment la trouille avant de monter sur scène qu’il en vomis­sait !) Mais il génère aussi une dose d’adré­na­line qui va vous trans­cen­der et parfois, vous faire faire sur scène des choses que vous n’ose­riez pas faire autre­ment. Le trac, bien géré, va vous mettre un formi­dable coup de pied au cul qui va vous propul­ser face au public avec une éner­gie décu­plée.

Reve­nons donc à nos morceaux. Gros trac + morceau cool = risque de para­ly­sie. Attaquer avec un morceau bien pêchu vous permet de trans­for­mer le stress en éner­gie et vous lancer sur les bons rails pour tout le concert. Vous allez démar­rer avec une pêche qui risque d’ac­cro­cher le public et de le chauf­fer, et donc de le conser­ver. Cela ne veut pas forcé­ment dire rentrer bruta­le­ment dans le lard du spec­ta­teur. À moins que le concept de votre groupe soit basé sur la violence et la provo­ca­tion, auquel cas il est excellent d’an­non­cer tout de suite la couleur. Sinon, n’at­taquez pas par un morceau trop diffi­cile d’ac­cès, mais par un de vos morceaux les plus « mains­tream » (qui risque de plaire au maxi­mum de gens). Nous allons donc ajou­ter une colonne à notre tableau et noter pour chaque morceau s’il est cool, groovy, vif, speed, violent, etc. De tous les critères qui vont entrer en contre pour l’ordre des morceaux, celui-ci sera déter­mi­nant.

Atten­tion : lorsqu’on parle d’in­ten­sité, on ne parle pas seule­ment de tempo. D’autres critères rentrent en compte : l’émo­tion géné­rée par le morceau, sa « pèche » qui n’est pas forcé­ment liée à sa vitesse de jeu, mais aussi tout le contenu : si vous faites du rock, vous savez qu’un morceau avec des sons très satu­rés sera souvent plus intense qu’un morceau avec surtout des sons clairs. Et puis, il y a tout simple­ment la qualité de la compo (à moins que vous n’ayez que des morceaux géniaux, auquel cas je vous demande de bien vouloir me réser­ver un backs­tage lors de votre passage à Bercy dans un an).

Varia­tions d’in­ten­sité

SetlistPhoto : Eric Laforge

Dans les conseils souvent répé­tés, vous aurez certai­ne­ment entendu qu’il ne faut pas qu’un concert soit linéaire. Affir­ma­tion parfai­te­ment juste. Il faut jouer avec les émotions du public, mais aussi le ména­ger. Trop de morceaux éner­vés où il braillera et bougera beau­coup va l’épui­ser, surtout si le concert est long (bar). Trop de cool et il va s’en­dor­mir. Intro­dui­sez des ruptures, des respi­ra­tions, mais atten­tion aux chan­ge­ments trop brutaux. Mettre après une balade tranquille susci­tant beau­coup d’émo­tions un morceau violent va la plupart du temps être désa­gréable pour tout le monde. Il faut remon­ter en douceur. Pas ques­tion non plus de jouer au yoyo genre un morceau cool, un morceau speed, un cool, un speed. Vous allez désta­bi­li­ser le public, perdre à chaque fois la pêche que vous avez commencé à lui trans­mettre et la répé­ti­ti­vité va finir par se voir. Vous pouvez enchaî­ner plusieurs morceaux cools, surtout si vous en avez pas mal. Mais ne lais­sez pas retom­ber la mayon­naise et n’en­dor­mez pas le public. Deux morceaux cool à suivre suffisent et on repart sur du plus vif.

Dans la seconde partie, nous verrons l’or­ga­ni­sa­tion des sets, que faire des morceaux écar­tés, la ques­tion des rappels et la fina­li­sa­tion de la play­list sur papier. À suivre…

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