Cette semaine, je vous propose de clôturer le chapitre consacré à l’automation par une petite liste fourre-tout de conseils et autres remarques concernant ce sujet et que je n’ai pas réussi à caser ailleurs mais qui me semblent toutefois diablement utiles.
La musique moderne reposant souvent sur une structure bien identifiable, il peut être très utile d’aborder l’automation en se basant sur ce découpage. En effet, réaliser une automation par partie (intro/couplet/refrain/break/solo/outro) permet de facilement accentuer la distinction entre lesdites parties. De plus, si vous évoluez de proche en proche, par exemple du refrain vers le couplet suivant, cela facilite également le maintien d’une certaine cohésion entre les parties malgré leurs différences. Notez qu’il est préférable de ne pas travailler de façon linéaire (intro vers couplet, vers refrain, etc.) sous peine de se retrouver à l’étroit lors des passages les plus chargés de l’œuvre. Il est beaucoup plus simple de justement commencer par le climax du morceau, puis d’enchaîner de proche en proche dans un sens ou dans l’autre. Enfin, sachez qu’il peut être pratique de regrouper au sein d’un même bus les instruments relatifs à telle ou telle partie lorsque l’arrangement du titre le permet. Cette façon d’opérer offre une certaine souplesse dans la gestion de l’articulation entre les parties, car il est alors possible de modifier le volume, la couleur sonore globale, la largeur stéréo, etc. de façon indépendante via chacun de ces bus.
L’avènement du mixage « in the box » a été une bénédiction en termes d’automation. Toutes les STAN modernes possèdent une ribambelle de fonctions qui facilitent grandement la vie de l’ingénieur du son à ce niveau-là. Malheureusement, ces fonctions sont bien souvent spécifiques à chaque logiciel et il m’est donc impossible de vous en dresser une liste exhaustive ici. Pensez donc à jeter un œil aux possibilités de votre séquenceur audio en la matière, cela pourrait vous éviter pas mal de trituration de ciboulot et vous économiser un temps précieux. Histoire de vous donner une idée de ce dont il est ici question, voici un aperçu des fonctions du genre.
Les principales fonctions d’automation dans les STAN
La plupart des STAN disposent d’une fonction de copier/coller de tout ou partie d’une ligne d’automation. Or, comme nous venons tout juste de le voir, la musique moderne repose souvent sur une structure en blocs bien définissables, mais surtout ces blocs peuvent se répéter tout au long du morceau ! Il peut donc être utile de réaliser l’automation d’une occurrence de l’un de ces blocs et de la copier pour l’appliquer aux blocs similaires. Attention cependant, afin de préserver l’intérêt de l’auditeur sur la durée, je vous conseille tout de même d’introduire certaines variations d’automation, ce qui n’est vraiment pas la mer à boire lorsque l’automation du bloc source sert de base.
La fonction VCA n’est malheureusement pas présente dans tous les séquenceurs, mais si c’est le cas pour le vôtre, je vous invite à vous pencher dessus tant cet outil est puissant.
Autre fonction intéressante : le groupement de certains paramètres entre plusieurs pistes. Les STAN qui en disposent permettent de lier les paramètres tels que le volume, le mute, le solo, ou le panoramique de plusieurs pistes. Mine de rien, cela peut s’avérer diablement pratique lors de l’automation en temps réel, surtout si vous ne disposez pas d’une surface de contrôle digne de ce nom.
Dernier exemple d’outil bien pratique : la modulation de paramètres en fonction du signal de la piste à automatiser, voire d’une autre piste. Imaginez un peu, le niveau dry/wet d’une réverbération qui s’ajuste en fonction du niveau du signal de la voix, ou bien encore une égalisation sur un instrument qui s’enclenche uniquement lorsqu’un autre instrument est présent ; et tout ça de façon automatique, sans avoir à réaliser une quelconque automation. En voilà une fonction puissante ! Bref, vous l’aurez compris, une lecture du chapitre « Automation » du manuel de votre STAN n’est pas forcément inutile.
Automation pour masquer les pains
Malgré tous vos efforts lors des phases d’enregistrement ou d’édition, il est possible que certaines erreurs d’interprétation subsistent. Or, il se trouve que l’automation est un excellent cache-misère pour ce genre de cas ! En effet, s’il n’est pas rare que tout le monde se « trompe » exactement au même moment en situation live, ce n’est pas souvent le cas lors d’un enregistrement effectué en piste par piste. Du coup, lorsque vous avez affaire à un « pain » pour un instrument donné, utiliser l’automation pour mettre en avant un autre instrument qui, pour sa part, est irréprochable à ce moment-là masquera habilement le forfait. Seule une oreille experte pourra découvrir le subterfuge, et encore, sous couvert d’être dans des conditions d’écoute optimales et en étant parfaitement « aware » comme dirait JCVD. Le principe en action est somme toute le même que celui utilisé par les prestidigitateurs lors d’un tour de magie : détourner l’attention du spectateur le temps nécessaire à sa mystification. Et nous savons tous à quel point cela peut être efficace.
Faire une partition pour son automation
Concernant l’écriture de l’automation en temps réel, j’ai récemment croisé un collègue qui utilisait une méthode à laquelle je n’avais jamais pensé. Ce dernier commence par coucher sur papier une sorte de partition de l’automation à réaliser. Puis, il enchaîne avec quelques « répétitions » en essayant de suivre au mieux la fameuse partition pour enfin écrire l’automation en temps réels comme une véritable performance artistique. Je me suis personnellement essayé à la chose par la suite et je dois avouer que suivre une partition d’automation à quelque chose de confortable tout en donnant de bons résultats.
Les limites de l’automation
Pour finir, vous devez certainement croire après la lecture de tous ces articles que je suis un partisan de l’automation à tous les étages. S’il est vrai que je considère cet aspect du mixage comme le plus important de tous, je ne suis tout de même pas complètement buté et, à mon sens, ce qui doit primer avant tout est le ratio qualité du résultat/temps passé à l’obtenir. Ainsi, je vous invite à cultiver votre esprit critique et votre sens pratique. Lorsqu’un élément nécessite une automation trop lourde, il est souvent beaucoup plus judicieux de le dupliquer et d’appliquer les nouveaux réglages pour n’avoir plus qu’à automatiser le passage de l’un à l’autre via un seul paramètre. Cette remarque est valable pour les pistes d’instruments comme pour les bus auxiliaires, ou même les effets en eux-mêmes. Après tout, nos STAN ne sont limitées que par la puissance de notre bécane alors pourquoi s’en priver si la manœuvre ne fait pas trembler des genoux votre ordinateur. Je tiens tout de même à nuancer ce propos… Il serait fort dommageable d’appliquer cette méthode de façon systématique dès qu’il y a une paire de paramètres à automatiser car non seulement votre machine de guerre finirait par jeter les armes, mais votre session de mixage enflerait également plus que de raison et cela deviendrait vite ingérable. Bref, il faut savoir raison garder !