Consacrons ce deuxième épisode de notre série dédiée au difficile art qu’est le mixage à un premier conseil qui, tout transversal qu’il soit, vaut pourtant son pesant d’or : dans la mesure du possible, faites mixer vos compositions et/ou enregistrements par quelqu’un d’autre !
Le pourquoi…
Si cette recommandation est valable dans le cas du mastering, elle l’est d’autant plus en situation de mixage. En effet, sans parler du recul ou du regard neuf que cela peut apporter, il sera beaucoup plus facile à quelqu’un d’extérieur de triturer, torturer, voire carrément supprimer un élément du titre à travailler si la situation l’impose. Car soyons honnêtes, il est toujours douloureux de tailler dans le vif la ligne mélodique entêtante, le riff ravageur ou la rythmique bondissante que l’on a patiemment composé, ou joué, ou enregistré, quand ce n’est pas les trois à la fois, et ce, même si c’est pour le bien du morceau dans sa globalité.
Pour la petite histoire, à titre personnel, je suis ingénieur du son depuis une bonne douzaine d’années et en tant que tel, j’ai travaillé sur pas mal d’albums dont je n’ai pas à rougir en ce qui concerne la qualité du mixage. Pourtant, lorsque je reprenais la casquette de musicien et que je bossais sur mes propres compositions, le résultat n’était jamais à la hauteur de mes attentes… C’est seulement le jour où j’ai réussi à mettre mon orgueil de côté et à me dire qu’un autre pourrait peut-être réussir là où j’avais systématiquement échoué que j’ai enfin obtenu quelque chose de probant au niveau sonore. Depuis, dès que j’en ai la possibilité, je n’hésite plus une seconde à faire appel à l’un de mes contacts pour qu’il extirpe le fameux son que j’ai dans la tête et qui reste pour moi hors de portée tant je suis englué jusqu’aux épaules dans les affres de mes propres chansons.
Le comment…
Trouver « Ze » personne à qui confier votre bébé peut paraître difficile. Mais n’oubliez pas où vous êtes ! La communauté Audiofanzine est extrêmement active, donc en passant par les forums, cela ne devrait pas être trop dur de trouver chaussure à votre pied en proposant, par exemple, un échange de service : tu mixes ma chanson, je mixe la tienne.
Assurez-vous bien entendu que vous ayez à peu près des compétences équivalentes en matière de mixage en vous faisant écouter vos faits d’armes réciproques de façon à ce qu’aucun des protagonistes ne se retrouve lésé à l’arrivée.
D’autre part, au-delà des considérations purement techniques, il semble primordial d’être plus ou moins sur la même longueur d’onde du point de vue de l’esthétique musicale afin d’éviter toute déconvenue au moment de l’écoute du résultat final. En effet, comme je l’ai déjà illustré avec la métaphore culinaire de l’article précédent, il est évident que la personne qui mixera votre titre imprimera une bonne part de sa personnalité à votre œuvre, alors autant s’assurer à l’avance que cela peut coller.
Un bémol cependant à cette dernière remarque, il peut être tout à fait surprenant, dans le bon sens du terme, de faire mixer l’un de vos titres par quelqu’un étant complètement à l’opposé de votre spectre musical. Par exemple, un morceau de reggae mixé par un métalleux, ou vice versa, donnera à coup sûr une originalité hors-norme à votre composition. C’est une éventualité qui vaut la peine d’être prise en considération.
Pour que cette collaboration se passe au mieux, je vous recommande de prendre le temps de beaucoup discuter avec votre nouveau comparse. Parlez de vos influences, musicales et autres, de vos aspirations en ce qui concerne votre morceau, de quoi il est censé parler, du sentiment ou de l’atmosphère que vous souhaitez qu’il dégage, des éventuels éléments que vous souhaiteriez voir mis en avant à tel ou tel moment, de la « progression dramatique » que vous aviez en tête lors de sa composition ainsi que de votre état d’esprit lorsque vous y pensez, etc. Toutes ces informations permettront à votre nouvel ingénieur du son attitré de mieux cerner vos attentes et donc, à terme, de vous donner entière satisfaction.
D’un point de vue plus pragmatique, pensez à livrer à votre acolyte des fichiers sources propres, bien organisés, bien synchronisés et à une résolution audio minimum de 24-bit/44.1 kHz. Il pourra ainsi s’atteler à la tâche sous les meilleurs auspices, sans se faire des nœuds au cerveau pour résoudre des problèmes qui n’ont rien à voir avec le mixage.
Enfin, tant qu’à y être, conseillez à cette personne de jeter un œil à cette série d’articles, cela peut toujours être utile !
Sur ce, rendez-vous la semaine prochaine pour de nouvelles aventures !