Cousine pas si éloignée de la fameuse Soundgear, la SRX a été originalement créée pour s’attaquer à un répertoire musical plus agressif. Oui Madame, c’est écrit sur le papier.
Pourtant il n’y a pas longtemps, l’accro au lèche-vitrine que je suis a croisé son chemin et s’est quelque peu familiarisé avec ce membre de la grande famille Ibanez. Et j’ai bien des choses à raconter sur cette modeste quatre cordes qui s’offre en-dessous de cinq cents euros. Vous me direz, cinq billets bien verts c’est déjà un budget en soi. Et vous aurez raison. Mais si je vous disais qu’une basse polyvalente peut aussi faire preuve d’un sacré caractère et qu’il n’est pas nécessaire de se couper le bras gauche pour se l’offrir, je suis certain de faire lever quelques sourcils sur ce site.
Force et discrétion
Les séries SRX reprennent les contours des séries Soundgear, avec quelques personnalisations qui donnent un design presque original à ce modèle : la table est plate, un chanfrein permet d’assurer le confort de l’avant-bras droit qui ne se retrouve pas scié par le contour de l’instrument qui présente un angle droit. Le dos de l’instrument est aussi aménagé pour mettre a bien l’estomac du bassiste, que l’on prévoit proéminent, avec l’emploi d’un second chanfrein. L’éclisse quant à elle dispose d’un binding de couleur blanche, apportant une touche assez classique à l’ensemble, soulignée par un Sunburst marron en deux tons.
À considérer les finitions ultérieures de cette basse, comme celle du modèle d’entrée de gamme (la SRX 360), on sent comme une volonté de la marque d’assagir cette dernière version. La SRX a-t-elle été recyclée en basse pour papa ? Pas vraiment, mais visuellement, c’est presque l’impression que cela donne. La configuration des micros PFR désignés pour la niaque, assurant les qualités vociférantes de deux doubles bobinages, est restée sauve sur cette version. Seul l’alignement des potards a été revu pour descendre au plus près de l’éclisse et ne pas gêner le jeu musclé de la main droite d’un rockeur nonchalant. En guise de contrôles, on profite d’un volume, d’une balance, d’une bande grave et de sa pareille au contrôle des aigus. Rien de bien fantaisiste au programme, on se passera même de l’actif/passif jugé accessoire : la SRX donnera tout ou rien !
Le corps est en frêne, dans une essence des plus légères pour ce bois dont la densité varie en fonction des espèces qui composent cette grande famille d’arbres, étendue sur quatre continents.
Parlons du manche maintenant, que l’on comparera avec ce que l’on connaît le mieux chez la marque : celui d’une Soundgear. Vous n’êtes pas sans savoir, amis lecteurs avertis, que le manche de la Soundgear est une référence en matière de finesse et de jouabilité. Conservant le diapason long de 34 pouces couvrant deux octaves, le manche de la SRX prend du galbe sur toute sa longueur, pour le bonheur des pognes plus hargneuses et afin d’assurer une prise musclée. Comme sur une SR, le sillet mesure 38mm, mais la douzième frette est plus large de deux millimètres. On a donc un profil plus évasé de la touche en palissandre. L’épaisseur du dos du manche, composé de trois parties en érable, a aussi pris un demi-millimètre de la première à la dernière frette. Des proportions qui conservent une finesse certaine, tout en apportant de la consistance sous la main gauche et augmentant, par la même, l’intervalle entre les cordes. On notera l’accès facile à la tige de réglage du manche, dissimulé sous une plaque à tiroir, aussi pratique qu’esthétique (pas de vis à perdre). Pesant à peine plus de trois kilos et demi, la SRX se porte sans souci et s’équilibre parfaitement, debout comme assis. Cet instrument à la finition correcte est d’origine indonésienne.
J’ajouterai à ce descriptif deux mentions spéciales, la première concernant l’ergonomie de l’instrument : regardez attentivement les photos, au niveau des cache-micros. Vous remarquerez que ces derniers disposent d’un chanfrein pour pouvoir y poser le pouce. Voilà une bien belle attention de la marque envers sa clientèle bassiste. Non vraiment, si tous les fabricants de guitares pouvaient penser à nous de la même manière, la vie serait tellement plus belle. Passons aux louanges d’un chevalet qui trône fièrement au bout de la table pour recevoir les cordes. Voilà une belle pièce d’accastillage, fort massive et plutôt bien foutue : une seule vis par pontet suffit pour régler leur hauteur et le chargement des cordes et rapide : on est dispensé de faire coulisser la corde sur toute sa longueur au travers d’un œillet de rétention. La corde se charge directement dans le cordier par une double encoche, un peu à la manière d’un cordier de Warwick. Avec un chevalet comme ça et des micros de cet acabit, on peut espérer avoir un son « testiculaire », pour rester poli. Le verdict, ci-dessous.
De la patate sur un tapis de velours
La basse est directement connectée à mon interface Novation pour les extraits qui vont suivre, avec le gain d’entrée à zéro. Je vous propose des enregistrements de chaque micro, dans leur style respectif, puis une prise de l’ensemble aux doigts et en slap. Enfin, on écoutera ce que donnent les percussions et le chant du plectre sur cette Ibanez au gros gain de sortie. J’ai joué un peu des deux bandes, sans forcer le ton.
La SRX, une basse pour jouer du rock ? Certes, c’est une bonne quatre cordes pour tous les genres qui demandent du caractère et de la dynamique. Les doubles ont du punch, l’électronique permet de passer très vite d’un son creux à une version plus médium, tout en se passant d’une troisième bande. C’est peut-être un peu propre pour jouer du punk, mais il est plus facile de salir un son que de l’affiner. En bref, je confirme : la SRX est bien une basse musclée. Mais ça n’est pas tout. Comme vous allez l’entendre, je ne me suis pas exclusivement penché sur un registre rock pour les prises. Non pas que je ne sois pas un rockeur dans l’âme, mais parce que cette basse m’inspire plus que cela. On pourrait presque la considérer comme un couteau suisse.
- Micro aigu 00:20
- Micro grave 00:30
- Deux micros 00:20
La première chose qui m’a marqué sur cet instrument, c’est le côté autonome de ses micros. Chaque double bobinage fournit un signal assez large pour donner le change dans les hautes fréquences, comme les plus basses. C’est assez évident quand on écoute les prises individuelles. Sur la première, les harmoniques sont bien assises sur les graves et les bas médiums. Le son du micro aigu n’est jamais sec. Sur la seconde, on constate que même si le signal est très bas, on n’en perd pas pour autant une bonne réserve d’aigus, qu’un accent de la main droite permettra de libérer au besoin. Le micro grave reste bien précis. Si les deux pôles fonctionnent indépendamment, leur emploi simultané donne le change sur le gain et offre un joli grain bien balancé. C’est agréable cet équilibre sur un instrument de ce coût qui surprend par sa polyvalence. Car je voulais surtout en venir là depuis le début de ce test : la SRX passe vraiment partout, avec une aisance assez déconcertante. Une Belle surprise qui n’est pas sans rappeler le ramage d’une Yamaha TRB, pour ce côté efficace.
- Slapislapo 00:51
- Mediator 00:14
Quelques mesures de Slap, du tapping, puis un riff nostalgique de mon adolescence et joué aussi mal qu’à mes seize ans. Cette prise au médiator frise un peu, mea culpa, j’ai désaccordé la corde de Mi, sans passer par la case réglage. D’ailleurs, je profite de ce test pour suggérer le montage d’un jeu de cordes au tirant plus fort. Le manche supportera sans problème et je suis certain que cela profitera au jeu comme au son. Les percussions passent sans problème, en haut (Slap) comme en bas du manche (Tapping). Je n’ai pas du tout l’habitude des deux octaves, mais je m’y suis assez vite fait, l’accès aux notes aiguës est aisé. Le jeu est facile, j’ai quand même tendance à générer des petites vibrations à vide à cause de mon habitude à jouer sur une Jazz Bass. Mais je ne doute pas qu’avec un peu de temps d’adaptation, ce défaut personnel s’estomperait. En fait c’est bête à écrire, mais ce manche est une autoroute presque trop confortable pour moi !
Si je devais citer un défaut (pour n’en citer qu’un, car c’est là tout ce que j’ai trouvé et cela n’a rien d’irréversible) : les potards crachent un peu autour de leur cran central. On ne s’affolera pas, ça se soigne très bien avec un petit coup de bombe à lubrifiant pour contact électronique. Voilà, trois fois rien, juste pour dire.
Allez hop !
Tiens, un Award parce que j’aime bien être surpris et que celui-là est bien mérité. Un super rapport qualité/prix et un gros potentiel pour cette basse qui s’offre aux alentours de 450 euros. Essayez-en une lors d’un passage en boutique. Vous me direz ce que vous en pensez.
La SRX m’a séduit là où je ne l’attendais pas, c’est une basse qui peut attirer un jeune bassiste amateur de musique musclée ; elle lui permettra aussi de goûter à tous les styles quand le besoin s’en fera sentir. Pour ma part, je serais curieux de voir une version un peu plus luxueuse de la SRX, une série Premium ou pourquoi pas Prestige. Après tout, le concept est bon et déclinable à la hausse, alors si un prototype sort de l’usine japonaise, je veux bien me dévouer en avant-première.