Jamais 2 sans 3 ! Après Virtual Guitarist et Groove Agent, Steinberg complète sa section rythmique avec un pote bassiste qui annonce pas moins d'une trentaine de styles de jeu dans les doigts, et s'amène avec un ampli et un rack de 6 effets. De quoi ranger définitivement son vieil Ampeg ?
S’il est vrai que les absents ont toujours tort, Steinberg peut se targuer d’avoir toujours eu raison dans le domaine des musiciens virtuels.
L’éditeur allemand (maintenant japonais ???) avait en effet défrayé la chronique il y a déjà bientôt 5 ans avec, grande première, la sortie d’un guitariste soft capable de jouer des parties complètes d’accompagnements acoustiques ou électriques de 6 cordes, pour le plus grand bonheur des manches du clavier qui découvrirent, sans être obligés de déchoir en s’offrant un clavier arrangeur à 25 mille boules, les joies du picking, du strumming ou de la cocotte ultra funky, obtenus vite fait bien fait grâce à un simple babillage sur 2 ou trois touches blanches et noires.
Convaincant, facile à utiliser, surtout dans un domaine où une génération entière de sampling s’était cassée les dents, Virtual Guitarist avait alors fait immédiatement nombre d’émules, même parmi les pros de la gratte, heureux de pouvoir habiller leurs pré-prods (et même leur defs !) sans être obligé de sortir le Marshall, le rack d’effet, l’accordeur et le flight de micros. Fier de ce succès mérité, Steinberg s’était donc empressé d’enfoncer le clou avec un petit frère, entièrement dédié à l’électrique quant à lui, aussi réussi et très complémentaire, le « Virtual Guitarist Electric Edition ».
Après une tentative un peu moins concluante du côté du drumming virtuel avec un Groove Agent de conception également très ergonomique mais un peu moins swing (que d’ailleurs la version 2, désormais disponible, est chargée d’épauler en bonne et due forme), il ne manquait plus qu’un troisième larron pour parfaire l’indispensable trilogie rythmique.
C’est désormais chose faite, avec l’arrivée tant attendue d’un bassiste 100% électrique (les amateurs de contrebasse devront attendre une éventuelle suite au prochain numéro), qui se colle, pour notre plus grand plaisir et enthousiasme, aux fondamentales. Voyons donc si ce nouveau requin de studio steinbergeois sera à la hauteur pour faire ronfler les caissons de basses lors de nos prochaines séances.
Installons-nous bien…
Comme les temps ont changé ! A l’heure où les DFH et autres Colossus proposent des flopées de DVD de données nécessitant des Go et des Go d’espace libre sur le disque dur, on se retrouve tout bête devant ce tout petit CD-Rom contenant à peine 580 Mo ! Presque incroyable, une telle sveltesse à l’heure de la surcharge pondérale généralisée…
L’avantage, c’est que l’installation de ce gracile bassiste se réalise en clin d’œil. Un petit tour par le site de Steinberg pour télécharger sur le dongle une licence valide, et c’est parti. Notons cependant que celui-ci, se présentant sous la forme d’une clé USB « Steinberg Key », n’est pas fourni, l’éditeur faisant le pari que nous utilisons bien sûr (!) Cubase ou Nuendo, et que nous possédons de ce fait déjà ladite clé (on peut utiliser la même pour tous les logiciels Steinberg). Dans le cas contraire, il faudra compter un petit supplément (environ 30 euros) pour acquérir la clé qui permet d’utiliser le logiciel.
Mais revenons à nos disques durs où crèche désormais notre cher bassiste, au format VSTi, DXi, AU, ou en standalone. Avec son interface élégante arborant en page principale (la page « Play ») une belle et voluptueuse basse au graphisme éclatant, le logiciel permettant d’effectuer rapidement quelques réglages de base, comme dans la vraie vie. Quatre potars, labellisés Volume, Tone, Attack et Damping permettent d’abord de régler le niveau de sortie général, de couper les fréquences aigues, de choisir le type d’attaque des cordes (doigt ou mediator), et de réaliser des effets percussifs particulièrement réalistes, comme lorsque bassiste joue tout en étouffant les cordes avec sa main.
Un sélecteur permet ensuite de passer en mode 4 cordes ou 5 cordes, et le bloc micro peut être déplacé à la souris vers le chevalet pour obtenir un son plus agressif, ou vers le manche pour plus de moelleux. On s’en rend compte tout de suite, avec seulement quelques bidouilles, on obtient déjà une large palette de couleurs intéressantes.
Un peu d’harmonie…
Sur la partie droite de la page « Play », à côté de la représentation graphique de la basse, on accède à une seconde série de paramètres, dédiés plus particulièrement aux modes de jeu.
Tout d’abord, une fenêtre affiche le nom de l’accord ou de la note jouée. Virtual Bassist permet en effet de choisir entre un mode « Note » qui permettra de jouer ses propres lignes de basses, comme avec un simple échantillonneur, mais sur la tessiture une peu restreinte d’une seule octave, et le mode « Chord », qui déclinera automatiquement arpèges et notes de passages pour créer des lignes de basses les plus réalistes possibles, en fonction des styles choisis.
Précisons que dans ce second mode, on peut jouer les accords sur le clavier avec seulement une touche (la fondamentale) pour un accord majeur, et une combinaison de 2 touches pour les accords de 7ème, les accords mineurs, et les accords mineur 7ème.
Virtual Bassist, dans certains styles, permet de suivre des grilles plus complexes, utilisant des accords chiffrés maj7, 6, dim, m 7 5b, 7sus4, m6…), mais il faut alors jouer les 4 notes caractéristiques de l’accord sur le clavier, en utilisant n’importe quel renversement, sauf pour les accords pouvant prêter à confusion, comme les diminués ou les accords de quinte augmentée pour lesquels la fondamentale doit être placée à la basse, si l’on veut que le logiciel les interprète correctement.
Concernant le timing des changements d’accord, le mode « Latch » offre la possibilité de faire jouer, en mode « Chord », la ligne de façon continue même si on relâche la touche du clavier, jusqu’à ce qu’une nouvelle touche soit jouée, et le mode « Retrigger » permet, paralèllement, de reprendre la lecture de la boucle à son début à chaque changement d’accord. Si ce mode est désactivé, le pattern (certains sont programmés sur plusieurs mesures, jusqu’à 4) sera continué, en tenant compte bien entendu du changement des notes du nouvel accord. Enfin un réglage » Speed " permet d’exécuter les phrases à la moitié ou au double du tempo du séquenceur hôte.
Du toucher virtuel
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Viennent ensuite différents réglages destinés à personnaliser le caractère du bassiste. Un potar « Swing » va permettre de ternairiser l’interprétation des croches, comme le font la plupart des séquenceurs, un potar « Early/Late » déterminera si les notes sont jouées plutôt au fond du temps ou si au contraire la basse va tirer le groove en avant (très efficace !), et un dernier potar « Variance » nous offre le luxe d’avoir avec nous un musicien plus humain, qui joue plus ou moins bien en place et en changeant légèrement le son (l’attaque) des notes, pour obtenir des lignes plus réalistes : un must !
On peut alors revenir au modelage du timbre de la basse grâce à un potar permettant de choisir entre une basse moderne ou une basse vintage, en passant par des modes intermédiaires, plus neutres, remontant ainsi le cours du temps.
Un bon plan pour troquer une vieille Fender aux purs accents Motown pour un modèle à micros actif, beaucoup plus agressif et précis, le tout en ajoutant à volonté, grâce à deux switchs à 3 positions, un léger bruit de frisé des cordes, comme avec un manche mal réglé, ainsi qu’un bruit de glissement des doigts sur les frets !
Enfin, trois paramètres directement liés à la section FX sont là pour un accès rapide à la compression, au niveau de drive et à la section master de l’ampli.
Des Styles à Parts
Un double browser sert à sélectionner les styles et leurs variations. Les 30 presets surfent sur la biographie de la musique électrique des 2 dernières générations avant autant de nonchalance, mais beaucoup plus d’efficacité que Brice de Nice, offrant un panorama complet des différents genres, depuis la disco des seventies, en passant par le reggae, le blues, la salsa, le rock, le métal, la pop (qu’est-ce que c’est ?), la Soul, etc, etc…
Certes, ces dénominations sont bien entendues plus qu’approximatives, surtout après 20 ans de sampling et de mélange des genres, mais grâce à une ergonomie particulièrement bien conçue au niveau du contrôle des variations, le soft évite élégamment la pénible récitation d’histoire pour nous fournir tout un arsenal de grooves, réussis pour le plus grand nombre, et grâce auxquels on pourra se tirer d’affaire dans la plupart des projets.
En effet, une fois le style choisi, on va passer en mode « Part » et contrôler en temps réel l’interprétation et les modes de jeu des différents patterns.
Les « Parts »
Et c’est ici que l’on commence vraiment à s’amuser ! En effet, Virtual Bassist réserve la partie gauche du clavier à différentes commandes de jeu, qui permettent d’altérer les lignes de basses en les compliquant à souhait, en leur ajoutant des fills, des glissandos, des stops, des accents. Pour ce faire, une touche est assignée à chaque effet de jeu, ou « Part »…
Bref, on les fait vivre en Live, sans se prendre la tête et avec une efficacité qui ravira certainement tous les néophytes dans le domaine de la basse. On peut d’ailleurs séquencer les accords et se concentrer ensuite uniquement sur les variations de jeu pour se concocter en temps réels des dizaines de versions différentes de l’accompagnement de basse, avec une souplesse et un réalisme souvent saisissant.
Groove under Control
Une seconde page donne accès à l’édition des patterns de base. Profitant de la programmation MIDI du logiciel (même si les lignes sont véritablement jouées), celle-ci se présente en fait tout simplement sous la forme d’une sorte de piano roll qui permet d’adapter les figures rythmiques des patterns en fonction des besoins précis d’un morceau.
Place et longueur des notes (mais pas la hauteur) peuvent donc être changées avec plus ou moins de précision grâce à deux modes : Macro et Micro. Le tout se fait à la souris sur une grille horizontale de quantification dont la valeur de magnétisme peut être fixée (8, 16, 16t…).
Ajoutez à cela quelques moteurs de modifications automatiques qui permettent d’effectuer des changements rapides mais efficaces (ne garder que les noires, les croches, les afterbeats, les fondamentales, ou encore générer un dawa frénétique…), et vous imaginez aisément les nuits de folies en perspectives, d’autant que l’on peut ensuite assigner chacun des patterns édité à une touche du clavier pour un contrôle en temps réel…
Il est temps de racker…
La troisième page d’édition est consacrée à la section ampli et au rack d’effets de Virtual Bassist. Notons ici que cette section peut être utilisée comme un plug-in de traitement indépendant en VST ou en DX dans n’importe quel hôte compatible.
La partie amplification se compose, en bon instrument modélisé, d’une tête d’ampli et d’un émulateur de caisson. L’ampli propose 2 types : transistor ou lampe. On ne va pas se lancer dans la polémique, mais signalons tout de même que l’option lampe donne un velouté des basses particulièrement agréable, surtout si on pousse un peu sur le potar « Drive », pour faire chauffer le bouzin. A côté de ce dernier, on trouve d’un côté un égaliseur aigu, medium (avec sélecteur de fréquence) et grave et de l’autre 3 switchs destinés à paramétrer le chaînage des effets, permettant par exemple de mélanger un signal clair passé par une boîte de direct avec le son saturé capté à partir du caisson, ou de placer la compression en fin de chaîne, avant ou après l’EQ, etc.
La partie caisson permet de choisir parmi plusieurs configurations (1 × 15'', 4 × 10'', 8 × 10''…), ainsi que parmi plusieurs types de prise avec micro (condensateur ou dynamique, dans l’axe ou vertical). Enfin un switch permet de passer simplement par une boîte de direct, pour un son plus limpide.
Côté rack d’effet, on est paré, avec 6 pédales, dont une Wah-Wah synchronisable au tempo (avec réglage de résonance) et particulièrement réussie, une fuzzbox (drive et tone), un compresseur (réglage des fréquences, quantité, temps de réponse), un octaver (quantité, tone), un chorus/flanger (vitesse, profondeur, feedback) et un tremolo lui aussi synchronisable (rate et depth).
Bref un vrai petit couteau Suisse, avec des algorithmes de qualité dont chaque paramètre peut bien sûr être affecté à un contrôleur Midi via le clic droit de la souris : un régal ! De plus, de nombreux presets fournis par le soft sont là pour démarrer en douceur sans se prendre la tête.
Conclusion
Bien plus qu’une simple béquille pour compositeurs débutants (ou fainéant !), Virtual Bassist s’avère rapidement un excellent outil de travail, dans la grande lignée de son prédécesseur Virtual Guitarist.
Facile à utiliser, très réaliste au niveau des grooves proposés et des sons de basse, flexible au niveau des changements de tempo, mais en même temps offrant des fonctions sophistiquées d’édition des patterns ou de modelage des sonorités, il rendra incontestablement de fiers services quels que soient les styles de musique abordés. Au delà de cet usage qui ravira plus d’un Home Studiste, il sera aussi éventuellement un excellent pédagogue, faisant profiter de son « expérience » dans l’art de faire tourner ! Bref, un nouveau R2-D2 très sympathique pour notre band virtuel…