Yamaha sort le grand jeu avec ses pads TCS de confection révolutionnaire et souhaite convertir un grand nombre de batteurs récalcitrants à l’électronique via un produit bien marketé. Possesseur d’une DTXPress et ancien utilisateur très régulier, je reprends contact avec cet univers par le biais du DTX540K, telle une brebis égarée sur les chemins de l’acoustique. C’est donc rempli d’une grande curiosité doublée d’attentes importantes (voire démesurées ?) que j’ai testé le kit. Satisfaction en demie teinte.
La fin d’une polémique ?
Cela se voit rapidement : Yamaha a progressé ces dernières années avec pour objectif avoué de faire évoluer ses kits électroniques autrefois marginaux et peu réalistes vers des instruments à part entière. Dès la genèse de la percussion électronique, les pads principalement ont été la cible de critiques virulentes de nombreux batteurs car jugés mauvais pour les poignets, de taille médiocre et à des années-lumière des performances des fûts acoustiques.
Yamaha a pris note du mécontentement général et revient sur le devant de la scène avec des pads nouvelle génération. Le DTX540K de la série DTX500 (dont le dénominateur commun est le module), embarque ces sauveurs de la batterie électronique : pour les toms et la caisse claire des pads TCS (pour « Textured Cellular Silicone ») alliant silicone et bulles d’air, pour les cymbales des pads 3 zones offrant au batteur des possibilités étendues. Autrefois instruments d’étude pratiques pour un musicien en appartement, les kits prennent des allures sexy et semblent dorénavant, selon Yamaha, posséder le potentiel qui leur faisait défaut pour marcher sans honte sur les plates-bandes de la concurrence et encore plus encore de la sacro-sainte batterie acoustique…
Déménageur de l’extrême
Passée l’épreuve du transport, un des sports préférés du batteur (un Scenic passé en break aura tout juste suffi), il est temps pour moi de déballer la bête. L’ensemble des éléments est extrêmement bien protégé dans 4 cartons distincts. Le carton contenant le rack RS500 est titanesque, mais une fois celui-ci sorti de sa protection, je m’aperçois qu’il est déjà monté. On pardonne alors instantanément la mise en place du convoi exceptionnel. De lointains souvenirs d’un montage cauchemardesque du rack de ma DTXPress me reviennent en mémoire. Yamaha a grandement simplifié les choses et l’opération est enfantine : les deux montants principaux du rack doivent simplement être déployés et les supports de toms et perchettes redressés. Les 3 cartons restants sont bien organisés et compartimentés, ainsi le montage ne se transforme nullement en calvaire et le kit prend forme tranquillement.
Fixation béton
Il n’y a pas à lésiner, le rack RS500 rempli parfaitement ses fonctions en termes d’envergure et de stabilité. Pleinement déployé, il se rapproche de la largeur d’un kit acoustique.
Le pad de caisse claire se fixe quant à lui sur une attache de tom à rotule communément utilisée sur les modèles acoustiques de Yamaha. C’est un très grand avantage, car je peux positionner et incliner au millimètre l’élément central de la batterie sans effort. Les autres toms n’ont pas bénéficié du même système et il faudra monter en gamme pour qu’ils en soient équipés (DTX750K). Néanmoins les attaches de toms se révèlent tout à fait correctes bien que moins précises.
Les pads de cymbales sont eux maintenus sur leurs perchettes par une sorte de baïonnette centrale les empêchant de tourner sur leur axe afin d’éviter des débranchements intempestifs. C’est certes ingénieux, mais à mon sens quelque peu dommageable pour le balancement naturel de la cymbale.
Le contrôleur de charley et le pad de grosse caisse se posent simplement à même le sol. Le pad de grosse caisse nécessite tout de même un assemblage rapide de la butée avec le socle.
Une fois l’ensemble des pads fixé au rack, j’installe le module DTX500. Le câblage est facilité par le câble serpentin et s’effectue très rapidement. Ce câble d’un seul tenant et possédant de multiples ramifications permet, telle une guirlande de sapin de Noël, de faire le tour du kit et de relier les pads au module sans aucune difficulté. De plus, chaque prise jack partant d’une sortie du module est baguée avec le nom de l’élément correspondant, ce qui accélère le processus. C’est un petit plus, mais qui a une réelle importance quand on est amené à démonter régulièrement son kit. Les jacks ne s’emmêlent plus et l’on gagne de précieuses minutes.
J’ai mis un peu plus de deux heures de temps à monter le kit sans me presser outre mesure. Et ce qui en consomme le plus, c’est retirer les plastiques de protection ! Un très bon point donc pour ce montage simple et efficace et une fois assis devant le drum set, je ressens une réelle impression de confort et de finition soignée. Un peu fébrile, je suis prêt à donner mes premiers coups de baguettes et enfin voir la Lumière.
Sensations à froid
C’est indéniable, les pads de toms XP70 et de caisse claire XP80 en silicone cellulaire texturé interpellent instantanément par leur réalisme. Les nervures sur la partie frappe leur donnent un aspect peau sablée, le toucher à la main et aux baguettes est vraiment agréable. Le son produit par la frappe est infime, ce qui plaira aux batteurs en appartement ainsi qu’à leurs proches et voisins. Finies les vibrations extrêmes dans le béton armé de l’immeuble ! De mon point de vue, le rebond sur les pads XP80 et XP70 est quelque peu excessif. Je me retrouve subitement à passer des triples croches sans aucune difficulté. Après ma séance d’entrainement, le retour à un kit acoustique est sans pitié, car là où je passais avec brio des patterns hallucinants sur le kit électronique, cela devient subitement beaucoup moins évident… Le pad de caisse claire comporte trois zones distinctes permettant le maximum de nuances et se rapprochant par là même d’une véritable caisse claire. Il est possible de jouer en rimshot, cross stick et sur la peau uniquement. Le confort de jeu est réellement accentué par le diamètre supérieur de la caisse claire (8 pouces contre 7 pour les toms).
Le pad de grosse caisse KP65 est alléchant au toucher. Une membrane en caoutchouc assez souple semble annoncer une pénétration réaliste de la batte de la pédale, mais j’ai relevé des vibrations assez désagréables dans le pied droit, le pad s’avérant en définitive vraiment rigide, mais aussi très bruyant. Là où le volume sonore diminuait sensiblement avec les pads TCS, le pad de grosse caisse le rehausse singulièrement. La zone de frappe est quant à elle suffisamment large pour pouvoir accueillir les deux battes d’une double pédale. Il faudra lorgner vers la gamme DTX900 pour bénéficier d’un kick plus souple. Prévoyez donc un tapis bien épais si vous jouez en appartement pour éviter de vous retrouver chez votre voisin du dessous !
Le contrôleur de charley HH65 rempli ses fonctions honorablement même s’il manque de fermeté au pied. Pour les non-initiés à l’électronique, l’absence de tige reliant le pad à la pédale peut dérouter mais l’on s’y fait rapidement. À nouveau, Yamaha propose un charley complet à partir de la série DTX700.
Concernant les cymbales deux modèles distincts font partie de la configuration DTX540K. Les pads PCY100 et PCY135 offrent chacun trois zones de jeu. Utilisé en crash, le PCY100 peut être joué sur la tranche, la cloche, et le corps, ce qui permet les nuances. J’ai trouvé les PCY100 trop petits et trop rigides à mon goût et très figés quand on les attaque. Et malheureusement cette rigidité et immobilité se ressentent dans les mains. Ce sentiment négatif s’explique peut-être par un plaisir éprouvé beaucoup plus important en jouant le PCY135. Bien plus grand que le PCY100 (13 pouces contre 10), joué sur la tranche, l’attaque est pénétrante et sans retour désagréable dans les paumes, sur le corps, on dispose d’un espace élargi, le balancement de la cymbale est réaliste, la cloche l’est tout autant. Mis en comparaison sur le même kit, les différences entre le PCY100 et le PCY135 sont flagrantes. J’ai positionné tour à tour le PCY135 sur la perchette de charley et sur celle de la crash, et à l’instar de ce que j’ai ressenti sur la ride, les sensations sont bien meilleures.
Le kit joué à nu sans module offre des résultats contrastés. Certains éléments sont très agréables à jouer (je pense aux pads TCS) d’autres perturbent l’harmonie du jeu (le pad de grosse caisse ou encore les cymbales PCY100). Il est temps pour moi de faire vivre le drum set en allumant le module.
Modulons nos propos
Le module DTX500 brille par sa sobriété. Une fois positionné sur le rack, l’accès à l’intégralité des commandes se fait par le dessus, le bouton du volume mis à part. En effet, le potentiomètre est vraiment petit et peu pratique, dissimulé derrière le boîtier au niveau des sorties alors que c’est l’un des boutons que l’on est amené à manipuler le plus souvent. Toutefois, l’ergonomie de l’appareil est remarquable et sa prise en main intuitive. Il a été pensé pour qu’avec seulement deux doigts, l’ensemble des fonctionnalités puisse être commandé. Durant mes phases de jeu, je pouvais utiliser sans lâcher mes baguettes l’ensemble des fonctionnalités.
8 boutons se répartissent dans une parfaite symétrie en deux groupes de 4 à droite et à gauche d’une molette de sélection et d’un petit écran divisé en deux parties. Toutes les sorties sont consignées en haut du module pour un accès plus rapide. Le BPM du métronome bénéficie d’un large affichage, plaçant le tempo au centre des préoccupations. Des sorties L/R et MIDI complètent le boîtier ainsi qu’une entrée AUX permettant de s’accompagner en musique, et bien sur l’inévitable prise casque. Un bémol néanmoins : de par sa légèreté, le boîtier tout en plastique ne semble pas très solide, attention donc à ne pas l’endommager. Il est également possible de rajouter 3 pads de toms supplémentaires au kit en utilisant les entrées de toms du module via un câble en Y, les pads de toms étant mono. Un autre pad mono peut également être connecté via le kick KP65 afin d’agrémenter son kit. Yamaha a construit un tableau de correspondance pour le raccord de pads d’autres séries de la marque (DTXREME, DTXPRESS, DTXPLORER).
Une pression sur le bouton DRUM KIT me dirige vers les 50 kits préenregistrés par Yamaha. Tous les styles sont passés en revue (rock, métal, électro, cubain, reggae, jazz et autres SNI – sonorités non identifiées !). Ces kits peuvent également servir de point de départ pour programmer des ensembles personnalisés (jusqu’à 20 kits personnalisés peuvent être enregistrés sur le module). La palette est conséquente quand on passe en revue les éléments pouvant être configurés. 78 éléments de caisses claires peuvent être utilisés, 41 grosses caisses, 50 toms, 46 éléments de cymbales ou encore 41 éléments de charley. S’ajoutent à cela des réglages de tonalité et de volume des fûts, de positionnement panoramique stéréo de l’élément, de sustain, le niveau et type de réverbération comme celle d’une salle, d’un stade, d’une scène et même d’un tunnel (il ne manque que la piscine de Sigur Ros !) ou encore « l’effet caisse claire » correspondant à la taille du timbre de caisse claire. Un équaliseur général permet également de régler les fréquences graves et aiguës en sortie pour chacun des pads. Des réglages pour les voix en sortie sur un périphérique MIDI sont également disponibles. Bref, on peut s’amuser pendant des heures à créer son propre ensemble, mais les résultats des manipulations multiples ne sont pas toujours à la hauteur de nos espérances ! À réserver aux rois de la customisation.
Globalement j’ai trouvé que les samples proposés au sein des kits n’étaient pas d’une qualité époustouflante alors que d’excellents échantillons de batterie existent sur le marché. Des samples de meilleure facture au sein du module permettraient grandement d’améliorer le confort de jeu et la qualité d’écoute. La fonction choke pour les cymbales me semble un peu trop gadget ou tout du moins s’éloigne trop des performances d’une véritable cymbale lors d’étouffées. Quand on étouffe le pad avec sa main, le cut provoqué met tout simplement fin de façon brutale au sample de batterie joué.
- Exemple 100:50
- Exemple 200:31
- Exemple 300:57
Au boulot !
Le click est un bon compagnon pour un batteur et permet d’apprivoiser et muscler son tempo. Le métronome est entièrement customisable et des jeux de clicks peuvent être sauvegardés sur le module. Une pression sur le bouton ON/OFF et le métronome est lancé. On peut régler tout simplement le tempo en tournant la molette centrale, ce qui est un vrai gain de temps. La fonction « Tap Tempo » me parait un très gros plus. En frappant simplement la mesure sur un pad, le DTX500 retranscrit la valeur du tempo (de 30 à 300 BPM). C’est un énorme avantage quand on ne connait pas le tempo exact de son morceau (et c’est très souvent mon cas !).
Une autre fonctionnalité permettant de travailler de façon ludique est la fonction groove check. Le module calcule la précision des frappes. Plus la frappe est précise, et plus le niveau de difficulté va en s’accroissant : la plage de tolérance par rapport au tempo choisi est alors de plus en plus limitée. Si la frappe est imprécise, on peut même décider que les notes en dehors de cette plage de tolérance ne soient pas jouées.
63 morceaux sont prédéfinis sur le module et il est possible de les accompagner. Le tempo est réglable sur simple activation de la molette. Il est également possible de « muter » la partie de batterie afin de ne garder que les autres instruments, ou pour encore plus d’efficacité, de travailler uniquement avec la basse pour bâtir une section rythmique carrée. À mon grand regret, les morceaux sonnent très « cheap » et je m’en suis lassé rapidement.
Le DTX500 permet également d’enregistrer ses performances, avec ou sans musique d’accompagnement. Ceci peut être pratique pour mesurer ses avancées, ou encore enregistrer ses idées. 19 plages peuvent être utilisées pour conserver son travail. La fonction quantification permet également des alignements des notes enregistrées sur le temps le plus proche en cas de tempo un peu trop fluctuant.
Conclusion
En définitive, le DTX540K est un vrai milieu de gamme avec ses avantages et ses inconvénients. Certains éléments sont impeccables comme le rack et les pads XP70, XP80 et PCY135 ou encore certaines fonctionnalités du module permettant de travailler au mieux son instrument. Mais les sons du module, les pads de cymbales PCY100 ou encore le kick KP65 ternissent l’ensemble. On navigue alors entre plaisir et frustration et l’on a tendance alors à lorgner vers des kits plus haut de gamme, qui apportent des solutions aux insatisfactions que l’on a pu rencontrer.
Le prix du kit me parait un peu élevé (le prix moyen sur Audiofanzine est de 1476€) et les pads nouvelle génération du DTX540K en sont certainement la raison. À titre de comparaison, le DTX520K a pour seul point de différence avec le DTX540K l’absence de pads XP70 pour les toms. Cette configuration différente crée un fossé de 500 euros entre les deux drum sets. Chez Roland, autre géant de la batterie électronique, à tarif équivalent il faudra considérer le TD 9 K2. Le système utilisé pour les pads est différent (peau maillée) et donc tout est affaire de sensations et de préférences. La guerre des pads fait rage et n’est pas prête de s’arrêter !
En tout cas, je vois cette Yamaha comme une bonne batterie d’étude grand public offrant à quelques bémols près un bon confort de travail. Mais elle ne m’a pas encore fourni les arguments pour l’emmener sur une scène et la substituer à une acoustique. Il faudra voir ce que les prochaines années nous réservent !