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Test de la Red Ripper de Tech 21 - Profil d’une tueuse

Aujourd’hui je ne ferai pas dans la dentelle : mettons à mort les bisounours ; jetons la croix de bois des petits chanteurs au feu, pour faire place aux tourments du Dieu saturation.

Je sais, je sais, vous lisez une colonne gisant au sein de la rubrique basse et pour­tant il va être ques­tion de disto, qui pour le profane serait l’apa­nage de nos cousins guita­ristes à six cordes. Mais cela revien­drait à igno­rer, le plus injus­te­ment du monde, des décen­nies de lignes de basse satu­rées. Alors évidem­ment, je me fais un peu l’avo­cat du diable, moi qui n’ai pas vrai­ment usé de cet effet. Excepté pendant un couple d’an­nées où j’ai pu expier mon reste de jeunesse, avant de rejoindre le rang des vieux cons. Cepen­dant j’ac­cep­te­rai hardi­ment de tester pour vous la distor­sion version Tech 21 : une Fuzz qui dans l’ouest, se fait appe­ler Red Ripper.

 

Quand le fortuit fait son effet…

 

Je n’ai pas trouvé grand-chose de bien révé­la­teur au sujet de l’his­toire de Tech 21, mis à part le fait que B.Andrew Barta, son fonda­teur, fut le premier inven­teur de “l’am­pli-pédale”. Une boîte de DI magique capable de repro­duire le son d’un ampli tout lampes (avec ses enceintes), à bran­cher direc­te­ment dans une console appa­raît sur le marché en 1989. Cette pédale jaune et noire bapti­sée Sansamp devient un succès immé­diat. Depuis, la compa­gnie new-yorkaise s’em­ploie à commer­cia­li­ser divers effets et déve­loppe un cata­logue d’Am­pli­fi­ca­teurs, du combo aux deux corps. Précur­seurs sur le marché de la modé­li­sa­tion, les concepts de la marque se déve­loppent exclu­si­ve­ment sur l’ana­lo­gique pour lais­ser le digi­tal à la concur­rence. Une belle prise de posi­tion, à l’heure où simu­ler revient, la plupart du temps, à passer par un DSP !

 

Tech21 Red Ripper

Voilà pour le corpo­rate, d’ha­bi­tude je fais des bios un peu plus longues, mais je préfère m’in­té­res­ser à l’his­toire de la distor­sion, fondée d’anec­dotes impro­bables et pour­tant véri­diques. Werh­ner Von Braun, le concep­teur des fusées nazies V2 devenu le respon­sable du projet Apollo pour les Améri­cains, disait de son métier de cher­cheur : « La décou­verte, c’est ce que je fais quand je ne sais pas ce que je suis en train de faire ». Cette phrase résume parfai­te­ment les circons­tances inopi­nées qui entourent l’ap­pa­ri­tion de cet effet en musique. Car à l’ins­tar de la péni­cil­line, le four à micros ondes, les rayons X et le conti­nent Améri­cain, la distor­sion à tout d’une décou­verte fortuite. Non content de pouvoir débusquer le premier musi­cien ou ingé­nieur du son à avoir fait gerber un ampli par hasard, je suis toute­fois en mesure de vous dire quelles ont été les premières distor­sions enre­gis­trées sur un disque et les condi­tions qui se rattachent à ces événe­ments. C’est donc une histoire à la fois touchante et passion­nante que je m’ap­prête à vous narrer, vous qui usez peut-être de ce genre d’ef­fet voci­fé­rant, sans être conscient de votre bonne fortune !

 

Tout commence en 1951, Ike Turner (qui n’a pas encore rencon­tré Tina) est au studio Sun Records pour l’en­re­gis­tre­ment de son premier tube : Rocket 88. Lui et son groupe (The Kings of Rhythm) s’ap­prêtent à enre­gis­trer et alors que les prépa­ra­tifs s’en­chaînent, l’am­pli du guita­riste Willie Kizart attend paisi­ble­ment sur le toit d’une voiture, encore occu­pée par un des musi­ciens. Au moment où ce dernier en sort pour claquer la porte, le combo glisse du toit et se retrouve au sol, avec un haut-parleur bien amoché par l’ac­ci­dent. Réparé avec du scotch et du papier, cet ampli sera utilisé pour l’en­re­gis­tre­ment et posera le premier jalon de l’ère de la satu­ra­tion. Rocket 88 est aussi consi­déré comme l’un des premiers morceaux de Rock and Roll de l’his­toire. L’am­pli mythique est toujours exposé dans l’en­ceinte du studio.

 

En 1956, Johnny Burnette, guita­riste de Rocka­billy et boxeur dans l’âme, enre­gistre avec son trio le titre The train kept a rollin. Pour cela, le guita­riste lead (Paul Burli­son) utilise son ampli de scène, dont une des lampes endom­ma­gée produit un son clai­re­ment distordu qui subjugue le public. L’en­re­gis­tre­ment qui mêle deux pistes de guitare, dont l’une est claire et l’autre satu­rée, rentrera à son tour dans la légende.

 

Tech 21 Red Ripper

Link Wray, l’in­ven­teur du power-chord, a aussi pris l’ha­bi­tude de jouer en concert sur un ampli dont l’une des lampe a été acci­den­tel­le­ment déchaus­sée, afin salir ses solos. En 1958, il enre­gistre le légen­daire Rumble et pour se rappro­cher au maxi­mum du son qu’il a en concert, il décide de percer quelques trous dans les haut-parleurs de son ampli. Ce son de guitare qui mêle savam­ment satu­ra­tion et trémolo devien­dra une réfé­rence en la matière. Tout comme lui, Dave Davis des Kinks s’em­ploiera à sabo­ter les haut-parleurs de son ampli à coup de lame de rasoir et de punaises enfon­cées pour enre­gis­trer le célèbre You really got me de 1964. C’est aussi un préam­pli défec­tueux de table de mixage qui sera respon­sable, en 1961, de la satu­ra­tion de piste de guitare du tube de Marty Robbins Don’t Worry. À un niveau de distor­sion jusque-là jamais entendu. Ce son, que l’on consi­dère encore comme la première Fuzz créera de nombreux émules parmi les groupes contem­po­rains de cette époque. Au sein de ces conver­tis, se trouvent les Ventures, qui en 1962 demandent à leur ami Red Rhodes, joueur de laps­teel et élec­tro­ni­cien émérite, le moyen de repro­duire ce son. Et l’homme créa pour ses potes la première pédale Fuzz. La première du genre à être commer­cia­li­sée sera la Fuzz Tone FZ-1 de Maes­tro, qui connaî­tra un succès immé­diat après la sortie de Satis­fac­tion, des Stones.

 

Suivront la Fuzz­rite de Mosrite, la Fuzz face (utili­sée par Jimy Hendrix), la célèbre BigMuff d’Elec­tro Harmo­nix et le Tone Bender de Vox. Ce dernier sera utilisé par Paul McCart­ney en 1965 pour enre­gis­trer la première basse satu­rée de l’his­toire du disque, sur le morceau de George Harri­son :  Think for Your­self . Une première qui confirme plei­ne­ment le statut d’in­no­va­teur du Lord. Suivant cet exemple, de nombreux bassistes adop­te­ront le son saturé. On peut citer pêle-mêle et parce que je les aime : Mel Stacker du groupe Grand Funk Rail­road, Tony Levin de King Crim­son, Bootsy Collins, Les Clay­pool de Primus, Rex de Pantera ou Tim Commer­ford de Rage Against The Machine. La liste est longue et vous pouvez à loisir remplir les commen­taires avec vos propres réfé­rences. En France la basse satu­rée est bien repré­sen­tée par Philippe BUSSO­NET, l’un des bassistes de Magma, le groupe légen­daire de Chris­tian VANDER.

 

Sur le marché actuel, il existe plus d’une tren­taine de réfé­rences de pédales de disto spéci­fiques aux bassistes, sans comp­ter celles qui ont été adop­tées par ces derniers alors qu’elles étaient desti­nées aux guita­ristes. À tous ceux qui cherchent une bonne satu­ra­tion ou mieux la Fuzz idéale, je conseille­rai de commen­cer par rele­ver leurs manches avant d’al­ler passer quelques heures en boutique. Et de commen­cer leur quête en lisant ce qui va suivre, cela va de soi !

 

 

Tourne les boutons, les boutons tout ronds…

 

Tech 21 Red Ripper

Pour ce qui est de l’em­bal­lage, Tech 21 sort le grand jeu et cède la pédale dans un bel écrin métal­lique noir. Classe, sobre et presque inutile. On pourra à loisir recy­cler cette boîte pour : cacher ses petits secrets, ranger le tabac à pipe de grand Papa ou confec­tion­ner un cercueil pour le hamster de sa petite sœur qui vient de lâcher son dernier souffle sous le large posté­rieur de Tata. Un joli coffret, un bel auto­col­lant, une notice, un peu de plas­tique et pas de pile, ni de trans­for­ma­teur. Cher­chez l’er­reur, on a déjà trouvé Char­lie…

 

La pédale en elle-même présente une façade irré­pro­chable. Le boîtier est solide, fait d’un épais alliage métal­lique. Les potards, comme le foots­witch, affichent une fiabi­lité à toute épreuve. Là-dessus, rien à redire, c’est du sérieux made in USA. Avec, en prime, une jolie pein­ture déco­ra­tive annonçant de manière assez peu subtile le carac­tère sanglant de la bête.

 

Sur le tableau de bord se trouvent six contrôles rota­tifs et deux inter­rup­teurs :  Un niveau de sortie, un égali­seur trois bandes, le niveau de satu­ra­tion, un filtre passe-bas et enfin le foots­witch certi­fié “Buffe­red bypass”. Ajou­tons à cette liste un dernier contrôle, qui n’est pas des moindres, car il permet de modu­ler direc­te­ment la tranche des harmo­niques affec­tée par la distor­sion : Le RIP.

 

Tech 21 Red Ripper

Son fonc­tion­ne­ment est complé­men­taire au potard du Drive, il est donc néces­saire de modu­ler l’un en fonc­tion de l’autre. Toute rota­tion du R.I.P, aussi infime soit elle, ne fait pas qu’in­cré­men­ter ou dimi­nuer l’ef­fet obtenu. Elle fait passer la modu­la­tion d’un monde à l’autre : réglé au mini­mum, le grain conserve le carac­tère stan­dard d’une bonne vieille Fuzz. Pous­sez-le un peu et la distor­sion se creuse pour se rappro­cher d’un son synthé-bass clai­re­ment bluf­fant. Abusez tout à fait de ce contrôle et vous passe­rez en mode “Mort aux voisins”, qui voit la tona­lité sortir de ses gonds pour explo­ser n’im­porte quel tympan à portée de Jack (disons du six mètres…). Ce potard n’ayant rien de typique sur une Fuzz, il deman­dera une certaine expé­rience pour s’adap­ter à son usage et en jouir tota­le­ment. Mais voilà un petit plus qui fait la diffé­rence avec la concur­rence, car il permet d’user de la Red Ripper dans des styles qui ne trempent pas néces­sai­re­ment dans le Métal ni le Rock. Je pense là à tous les façon­neurs d’ins­tru­men­taux Hip-Hop, comme aux incon­di­tion­nels de grosse Funk bardée de lignes de synthé Moog. Oui chers amis, ce produit peut aussi vous inté­res­ser !

 

La Red Ripper, dispose d’un seuil de déclen­che­ment ; un peu à la manière d’une Enve­loppe Filter, sans pour autant modi­fier le volume de sortie (ah !) : la dyna­mique de jeu de l’uti­li­sa­teur agira direc­te­ment sur la distor­sion et la courbe des harmo­niques. Plus on bastonne, plus le son est crade et perché dans les aigus. Plus vous joue­rez sage­ment, moins l’ef­fet Fuzz se fera ressen­tir alors que la tona­lité restera terre-à-terre, au raz des basses. Le filtre passe-bas quant à lui, permet de condam­ner une bonne tranche des aigus pour se concen­trer sur un signal plus grave et éviter, au passage, de faire friser les tympans du public quand on emploie une grosse corne d’aigu sur son enceinte.

 

 

Flamme fatale

 

Tech 21 Red Ripper

Sous les doigts et dans les oreilles, cette pédale fait son effet. Première chose, l’iso­la­tion du circuit est appré­ciable. J’ai testé la pédale alimen­tée par transfo mais aussi par pile : aucun souci de para­site. Pour cet enre­gis­tre­ment, la Red Ripper est bran­chée direc­te­ment dans la carte son et dans un ampli TC Elec­tro­nic Rebel­Head 450 asso­cié à un Torpedo VB-101. L’ins­tru­ment utilisé est une Fender Jazz Bass Ameri­can Special.

 

J’ai laissé quelques percus­sions impor­tunes dans la ligne, vous pour­rez ainsi vous rendre compte que l’usage d’une telle pédale demande une incon­tes­table rigueur dans le jeu. Notam­ment en ce qui concerne le contrôle de votre main gauche. Une distor­sion pareille ne lais­sera rien passer et le moindre défaut sera ampli­fié avec le reste. D’où le conseil du construc­teur visant l’em­ploi de la paume pour étouf­fer les cordes. Un aver­tis­se­ment à prendre au sérieux pour gagner en préci­sion. Le premier enre­gis­tre­ment révèle le son en mode bypass. Le second présente une égali­sa­tion neutre avec le potard de RIP à zéro et le drive poussé  aux deux tiers de sa course, pour abou­tir sur un son Fuzz “clas­sique”.

 

Pour le troi­sième extrait, j’ai poussé les graves et baissé les médiums, tout élevant le R.I.P. au même niveau que le Drive (aux deux-tiers). La quatrième conserve les mêmes réglages, mais avec le RIP ouvert à fond. Dès la première note, vous pour­rez entendre la diffé­rence dans l’at­taque et le renfort d’har­mo­niques dans les hautes fréquences. Et enfin les deux derniers extraits qui présentent des réglages simi­laires : Le Drive à fond, médiums et graves aux deux-tiers et le RIP au tiers. Le premier des deux utilise le filtre passe-bas, le second s’en passe. Voilà de quoi se donner une idée de ce que la Red Ripper vous propose, sachant qu’il est clai­re­ment possible de régler la chose mieux que moi et d’ac­cé­der à une plage de rendus très large.

 

 

DI – Reglage 1
00:0000:39
  • DI – Reglage 100:39
  • DI – Reglage 200:20
  • DI – Reglage 300:34
  • DI – Reglage 400:36
  • DI – Reglage 4 + lo-pass00:33
  • DI – Bypass00:38

 

Conquis malgré moi

 

Oui, comme je l’ai écrit précé­dem­ment ; la disto et moi ça fait trois et demi. Cepen­dant à l’époque où j’étais vendeur en boutique, j’en ai vu et entendu passer par cartons entiers ; toutes caté­go­ries et prix confon­dus. Je suis donc en mesure d’af­fir­mer que cette jolie pédale rouge sang propose un concept et une réali­sa­tion tout à fait abou­tis. Son emploi s’adresse à un large public qui ne se canton­nera pas à jouer du bour­rin au média­tor (ce qui est toujours appré­ciable). En esti­mant vite fait le marché, le prix de la Red Ripper  (indi­ca­tif de 189 € TTC) se trouve dans la moyenne. Consi­dé­rant le plan­cher des tarifs pour une Fuzz à 38 € et leur plafond à 379 €. Person­nel­le­ment, je mettrai la Red Ripper dans le haut du panier. Je vous invite donc à tester le matos par vous-même et signer un pacte ébou­rif­fant avec le diable, surtout n’ou­bliez pas de mettre un peu de gel, vous risquez d’être décoif­fés !

 

  • Buffered Bypass
  • Simule l’effet enveloppe (seuil de déclenchement) sans affecter le niveau de sortie
  • Solide boîtier
  • Emballage
  • Pas de bruits parasites
  • Footswich silencieux
  • Contrôle R.I.P
  • Égaliseur intégré
  • Filtre passe-bas
  • Qualité des composants
  • Vendu sans pile
  • La décoration du boîtier risque de faire peur à Mamie

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