Saisir des partitions Guitare dont la qualité soit digne des magazines spécialisés et des songbooks du commerce : voici ni plus ni moins ce que propose Sibelius G7.
Incontournable référence en matière d’édition de partition, Sibelius 3 a les défaut de ses qualités.
Parce qu’à l’instar de son grand rival Finale, il joue la carte de l’exhaustivité, il propose en effet tant de fonctionnalités qu’il s’avère un peu trop touffu pour la plupart des musiciens.
Au nombre des ces derniers, les guitaristes n’ont pas forcément besoin de la kyrielle d’outils proposés par la version standard. De ce constat est né le Sibelius G7 qui nous occupe aujourd’hui : un Sibelius pensé exclusivement pour la guitare et autres instruments à cordes et à manche (banjo, basse, luth, ukulélé, etc.)
High Score
Outre le CD d’installation, la boîte contient un guide utilisateur de 192 pages, très clair et informatif, permettant de ne jamais se retrouver désarmé face aux nombreuses possibilités de G7, ainsi qu’une brochure d’assistance technique.
Les docs comme le logiciel sont en anglais mais sachez qu’une traduction est à l’étude, pour le plus grand bonheur de ceux qui sont fâchés avec le patois grand breton…
L’installation se déroule sans aucun problème : il suffit d’appliquer bêtement la marche à suivre jusqu’à l’enregistrement client en ligne, puis de double cliquer sur l’icône pour lancer le soft.
Dès le lancement surgit des enceintes un jingle annonçant la couleur : une guitare cinglante que n’aurait pas renié The Edge vient flatter nos oreilles. Voilà qui donne envie d’en voir plus.
Et côté visuel, on n’est pas déçu : l’apparence graphique du logiciel est des plus élégante tout en restant très sobre. En haut de la fenêtre se trouve une barre d’outil, donnant accès aux fonctions les plus essentielles du logiciel : création/ouverture/suppression d’un document, impression, zoom, lecture de la partition en cours, fonctions d’annulation (undo / redo) et, plus original, un bouton 'Scan’ et un accès au « Guitar guide » (voir encadré).
Le reste des outils et icônes est réparti en plusieurs palettes flottantes, qu’on affichera, déplacera ou masquera selon les besoins.
Petit détail appréciable, il est possible d’activer une transparence pour les fenêtres, comme cela se fait sur MacOS X : c’est vraiment utile pour afficher toutes les palettes sans avoir l’impression de manquer de place à l’écran. Accessoirement, cela contraste agréablement avec l’aspect 'Usine à gaz’ de bien des logiciels de notation…
Petit passage en revue des différentes palettes flottantes :
« Navigator » permet, à la manière du Navigateur de Photoshop, de visualiser l’ensemble des pages du score, et de se déplacer rapidement sur la portée.
« Fretboard » propose la représentation d’un manche de guitare. Loin d’être un gadget dédié à la seule visualisation des notes et accords, cette dernière pourra servir à la saisie des notes sur la partition, par simple clic sur les cases.
« Properties » permet de régler les paramètres typographiques des signes sur la portée.
« Mixer » donne accès à la gestion du volume et du panoramique de chaque partie/piste MIDI et permet de rendre une piste muette ou de l’écouter en solo.
« Kontakt Player » permet de paramétrer le lecteur de samples fourni avec le logiciel.
Véritable organe central du logiciel, « Keypad » est enfin une commande à cinq niveaux qui correspond au pavé numérique du clavier et qui donne accès à tous les types de notes, silences et accidents proposé par le logiciel.
En pressant la touche '+', on accède ainsi au valeurs rythmiques, altérations, accents, indication techniques (sens des coups de médiator, liaisons), appogiatures, trilles, etc. La chose fonctionne extrêmement bien une fois qu’on s’est familiarisé avec les touches…
Dernière petite précision concernant le rendu visuel : il est possible de choisir plusieurs textures pour le bureau de travail, l’apparence du « papier virtuel », et la calligraphie (standard, manuscrite, façon « real book »). De quoi travailler dans une ambiance de confort…
Un couteau suisse géant
Il est possible d’éditer toutes sortes de tablatures, de 4 à 8 cordes, et de choisir un accordage parmi 50 open tunings différents (sans compter ceux que vous pouvez définir vous-même). Du coup, si le logiciel cible en majorité des guitaristes, il s’avère pleinement pertinent pour générer des partitions de banjo, de luth, de mandoline, de ukulélé ou autres instruments à cordes et à manche.
Concernant la saisie des notes sur la partition, on dispose de quatre méthodes principales :
1 – Après avoir sélectionné une valeur rythmique sur le 'Keypad’, on peut placer les notes sur la portée à la souris, ce qui représente l’idéal pour les musiciens « lettrés » qui pourront piocher sur le Keypad les diverses altérations, les staccato et autres piqués, les accents. Pour sortir de ce mode, il suffit de cliquer escape sur votre clavier d’ordinateur.
Notons que pour la tablature, le chiffre 0 (cordes à vide) s’affichera forcément. Lorsque le 0 est en surbrillance, il suffit de changer le numéro de frette, soit à l’aide du Fretboard, soit avec les chiffres en haut du clavier.
2 – La seconde méthode, plus fastidieuse, consiste à entrer le nom des notes à l’aide du clavier, selon les appellation anglo-saxonnes : C, D, E, F etc., ou bien avec les chiffres du haut du clavier pour la tablature. En gros, on choisit sa valeur rythmique sur le Keypad, une croche par exemple, pour la faire apparaître en surbrillance, en on tape le nom de la note voulue.
3 – Il est aussi possible de rentrer les notes sur la partition à l’aide d’un clavier midi ou, plus intéressant, d’une guitare équipée d’un capteur midi, et ce en temps réel grâce à la technologie Flexitime de Sibelius G7.
4 – Toujours via un instrument midi, on peut également saisir une partition note par note en mode pas à pas. Si la chose sera forcément plus longue, elle pourra s’avérer pratique pour ceux qui ont l’imagination de Steve Vai mais les doigts d’Yves Duteil…
Notez qu’il est possible, enfin, d’importer une partition créée avec un autre programme, qu’il s’agisse de tablatures en format ASCII, ou de fichiers midi (en glissant simplement le fichier sur le bureau de G7). Grâce au programme Photoscore Lite fournit avec le CD d’installation, on pourra enfin scanner une partition et la transformer en notation Sibelius G7 en quelques clic…
Pour éditer la tablature à partir des notes, il suffit de sélectionner le solfège, de le copier (Ctrl + C) puis de se positionner dans la tablature pour le coller (Ctrl + V). Les notes se traduiront automatiquement en tablature. Le petit plus, c’est que Sibelius G7 propose de véritables doigtés, cohérents et jouables. Si ces derniers ne vous conviennent pas, vous pourrez accéder à d’autres possibilités via « Guitar tab fingering options » dans le menu Notes. Pour peaufiner davantage, chaque note peut évidemment être retravaillée individuellement.
Hiéroglyphes et pattes de mouche
Entrons dans le vif du sujet : Sibelius G7 offre des fonctions avancées pour annoter avec une facilitée déconcertante tous les effets que nous utilisons couramment (bend, pré bend, glissé, vibrato, hammer on, pull off, harmonique sifflantes etc.).
Voyons comment la chose se passe avec l’un des plus compliqué : le bend.
On entre une note – un ré par exemple, sur la partition (celle qui sera frettée).
On tape J sur le clavier, de façon à faire apparaître un petit « chapeau chinois ».
On entre la seconde note qui sera créée par le bend, un Fa# par exemple. Le » chapeau chinois " relie maintenant les deux notes.
Copiez/collez le solfège dans la tablature, et observez : une flèche ascendante par du Ré 3ème case sur la corde de Si, avec, au dessus de la pointe, le chiffre 2, indiquant que l’on tire la note de deux tons.
Mais l’on peut évidemment partir de la tablature : Entrez 3 dans cette dernière sur la corde de Si, et tapez J sur le clavier. Une flèche s’affiche. Entrez ensuite 7 sur la même corde. Un petit 2 s’affichera au dessus de la pointe. Copiez/collez ensuite dans le solfège. Le bend d’un ton s’affiche avec l’indication « Full ».
Pour les micros bend, on sélectionnera la pointe de la flèche qu’on rapprochera de la note frettée. L’indication ¼ apparaîtra alors. Avouez que la chose est simplissime !
Hélas, certaines notations donneront tout de même un peu de fil à retordre au novice. Citons par exemple l’édition de figures rythmiques tels que les duolets, triolets, sextolets ou quintolets. Contrairement aux autres figures, leur écriture ne se réalise à l’aide du « keypad », mais en sélectionnant la note ou la valeur de départ, et en pressant en même temps Ctrl et la valeur numérique souhaitée sur le clavier principal. Pas très intuitif, d’autant que si l’onglet 'Help’ permet de trouver la solution à la plupart des problèmes, certaines lourdeurs subsistent.
Lorsque le score est terminé et que l’on veut se débarrasser des mesures vierges non utilisées, il faut cliquer dans la mesure que l’on souhaite supprimer en pressant Ctrl, et appuyer sur Suppr. Pourquoi pas ? Mais le manuel n’indique rien de très clair à ce sujet… Relativisons tout de même, ce genre de petits détails n’a rien de très gênant une fois qu’on a pris ses repères.
Sibelius G7 intègre aussi Kontakt player, une version limitée du célèbre sampler virtuel signé Native Instruments. Permettant de jouer jusqu’à huit sons simultanément, ce dernier est ici un bonus appréciable, sans pour autant compter parmi les points les plus intéressant du logiciel. S’il est intéressant d’avoir un retour son pour travailler ses partitions, le rendu offert par les samples n’a en effet rien de très crédible. La chose n’a cependant rien de rédhibitoire dans la mesure où, à ce jour, aucun éditeur de samples n’est jamais parvenu à proposer des banques crédibles en toutes circonstances (les bends ou les subtilités des attaques sonnent très artificiel)
Conclusion
Avec le G7, Sibelius place la barre assez haut et risque de convaincre bon nombre de guitaristes habitués à utiliser d’autres softs, tels que Guitar Pro ou Power Tab. Vendu sous la barre des 200 €, G7 a su conserver les principales qualités de Sibelius 3 en les adaptant à l’univers des instruments à cordes pincées : que ce soit pour saisir des relevés complexes ou griffonner de simples idées façon 'bloc-notes’, les guitaristes trouveront en lui un outil mariant souplesse, richesse et puissance. Au prix d’une incontournable phase d’apprentissage, ces derniers ne devraient pas se sentir limité avant longtemps…
Ce qui s’avère aussi intéressant avec G7, c’est qu’il permet via le 'Guitar guide’ et l’écriture de solidifier les acquis théoriques tout en progressant sur l’instrument. Au bout de quelques semaines d’utilisation, le manche que l’on pensait connaître par cœur semble encore plus limpide. Et c’est peut-être là le plus beau compliment qu’on puisse faire à ce logiciel : il donne envie de jouer…