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Test des FOCAL SM9 - Maousse Costaud

8/10

Attention les yeux! La marque française bien connue pour ses enceintes de monitoring mid-field a présenté l'année dernière un nouveau système d'écoute destiné aux utilisateurs les plus exigeants. Disponibles depuis quelques mois maintenant, il nous était impossible de passer à côté de ces nouvelles enceintes Focal SM9 et de voir (enfin, écouter !) ce qu'elles ont à nous raconter.

Cela fait près de 30 ans que la marque Focal-JM Lab offi­cie dans le monde des enceintes, aussi bien d’un point de vue profes­sion­nel (moni­to­ring de studio, home-studio mais aussi systèmes d’écoute pour l’au­to­mo­bile) que d’un point de vue domes­tique, avec des enceintes haute-fidé­lité recon­nues dans le monde entier. Mais ça n’est que depuis quelques années que la marque française a établi sa noto­riété dans le monde des studios profes­sion­nels, faisant d’elle une des valeurs sûres d’aujour­d’hui. Alors forcé­ment, quand elle décide de propo­ser une nouvelle paire d’en­ceintes clai­re­ment desti­nées aux profes­sion­nels, celles-ci ne passent pas inaperçues… Connais­sant quelque peu les deux autres modèles de la marque, que l’on retrouve dans bon nombre de studios (notam­ment les Solo6 Be et les Twin6 Be), on ne pouvait qu’at­tendre de pied ferme un nouveau système 3 voies, avec cette fois-ci la volonté d’of­frir un système à cheval entre le mid-field et le main system (système d’écoute prin­ci­pal).

Focal SM9

Et cette volonté se confirme rapi­de­ment à l’ou­ver­ture du carton ! Chaque enceinte affiche des dimen­sions plutôt impo­santes : 320 × 490 × 390 mm. Mais c’est surtout dans le poids que se situe le nerf de la guerre : chacune des enceintes pèse tout de même dans les 35kg ! Autant vous dire qu’avant de les sortir au grand jour, mieux vaut s’as­su­rer d’avoir bien fait ses exer­cices muscu­laires aupa­ra­vant… ou d’être aidé d’un ami !

À ce sujet – et le manuel va dans mon sens – le choix du support pour ces enceintes est impor­tant et mieux vaut prévoir d’em­blée des supports de bonne qualité. Pour ma part – dans ma cabine – j’ai utilisé des stands de moni­to­ring Zaor qui remplissent parfai­te­ment leur fonc­tion. Mais, pour ceux qui auraient l’au­dace de vouloir les placer sur le spea­ker-shelf (le support d’en­ceintes) de leur console favo­rite, je leur décon­seille­rais forte­ment cette dernière option, aussi bien pour des raisons liées aux dimen­sions de l’en­ceinte qu’au niveau de son poids. Je dis cela, surtout si vous tenez à votre console ! Une fois instal­lée, on découvre un bien bel objet très élégant qui donne envie d’être écouté.

En effet, bien que la fini­tion noire soit d’une sobriété fina­le­ment rare chez notre construc­teur français, le flanc supé­rieur laisse appa­raître un bois légè­re­ment nervuré du plus bel effet. À la vue comme au toucher, l’en­ceinte est vrai­ment agréable. La fini­tion est impec­cable à tout point de vue. En termes de fabri­ca­tion, on peut le dire : la qualité est vrai­ment au rendez-vous.

front side

Le twee­ter dôme inversé en béryl­lium

Le twee­ter à dôme inversé en béryl­lium est une tech­no­lo­gie adop­tée par Focal – que l’on retrouve égale­ment sur les modèles Solo6 et Twin 6 Be – du fait de l’ex­trême rigi­dité de ce maté­riau. Ce système repose sur le fait que c’est toute la membrane qui est mise en mouve­ment par une bobine fixée à la moitié de sa hauteur, censée repro­duire la dyna­mique avec une plus grande préci­sion et ayant des proprié­tés de diffu­sion peu direc­tives. Le béryl­lium est égale­ment un maté­riau pouvant compor­ter des proprié­tés toxiques pour l’être humain s’il y est exposé à grande échelle. Si les dangers liés à l’uti­li­sa­tion de ce maté­riau dans la fabri­ca­tion de twee­ters ne semble que très rela­tifs, Focal, conscient de la problé­ma­tique, assure un parfait suivi vis-à-vis de ses clients, aussi bien via les précau­tions d’uti­li­sa­tion des enceintes (expliquées dans le manuel) qu’à travers une « mail hotline » qu’ils ont prévu à cet effet (beryl­lium@­fo­cal.com)

Après avoir ôté les protec­tions prévues à cet effet, on retrouve la tech­no­lo­gie chère à Focal : un twee­ter à dôme inversé en béryl­lium de 1" et deux boomers à membrane compo­site sand­wich « W », le premier de 6,5" et le second de 8,5". Mais la grosse diffé­rence sur ce nouveau modèle est la présence d’un radia­teur passif, dont la membrane de 11" (égale­ment en compo­site sand­wich « W ») se situe sur la joue supé­rieure de l’en­ceinte. (voir encart)

Théo­rique­ment, la présence du radia­teur passif étend la réponse en fréquence de l’en­ceinte jusqu’à 30Hz (en mode 3 voies) dans le registre grave, et jusqu’à 40 kHz dans le registre aigu grâce au twee­ter en béryl­lium, censé offrir des réponses tran­si­toires et des harmo­niques aiguës avec beau­coup plus de préci­sion. La SM9 délivre un niveau maxi­mum de 116 db SPL (toujours en mode 3 voies). L’en­ceinte comporte 3 ampli­fi­ca­teurs de classe AB, d’une puis­sance de 400W pour le subwoo­fer et 100W pour le twee­ter et le midrange.

La membrane compo­site sand­wich W

La membrane en sand­wich W (pour « Verre sur Verre ») est en réalité une membrane compo­sée de feuilles de fibre de verre posées entou­rant un corps central en mousse struc­tu­rale, assu­rant à la fois une certaine légè­reté au système (appa­rem­ment infé­rieure aux autres maté­riaux type Kevlar) et la rigi­dité néces­saire à une trans­mis­sion du signal homo­gène et fidèle.

 

Back side

Du point de vue des réglages, Focal a fait fort. En effet, outre un filtre coupe-bas (40, 60 et 90 Hz avec une pente de –12 dB/octave), on retrouve à l’ar­rière de l’en­ceinte deux filtres shelf, un premier pour le registre grave (de 30 à 250 Hz) et un second pour l’aigu (de 4,5 à 40 kHz). Chaque filtre offre la possi­bi­lité d’aug­men­ter ou atté­nuer le gain de + ou – 3 dB (par pas de 0,5 dB).

Focal SM9

Mais on a égale­ment la possi­bi­lité d’ajus­ter le gain de la même manière sur 3 bandes de fréquences diffé­rentes : à 50, 140 et 1000 Hz. Plus serait insup­por­table !

Si ce nouveau système d’écoute est impli­ci­te­ment destiné aux profes­sion­nels, Focal a quand même pensé aux autres utili­sa­teurs en leur offrant la possi­bi­lité de sélec­tion­ner un niveau d’en­trée entre + 4dBu et –10 dBu par le biais d’un sélec­teur 2 posi­tions…

Outre l’in­ter­rup­teur de mise sous tension, on retrouve enfin la prise d’ali­men­ta­tion, alimen­ta­tion qui peut être choi­sie entre 110 et 230V.

Stay Focus

Focal SM9

Mais ce qui attire l’oeil à première vue (humour toujours), c’est la petite plaque métal­lique située sur le côté de l’en­ceinte qui regroupe 3 sélec­teurs, chacun doté d’une petite LED. Le premier active le mode Standby/On qui suit la mise sous tension de l’en­ceinte active. Le troi­sième sélec­teur – Direct – permet de désac­ti­ver l’éga­li­seur filtrant la réponse de l’en­ceinte. Mais c’est surtout le sélec­teur Focus qui inter­pelle. En effet, celui-ci permet de faire bascu­ler l’en­ceinte en mode « 2 voies », s’af­fran­chis­sant ainsi du subwoo­fer et, par consé­quent, du radia­teur passif ! La SM9 délivre une réponse en fréquence moins éten­due – de 90 à 20 kHz – pour un niveau maxi­mum admis­sible de 106 dB SPL.

À l’écoute

Avant de commen­cer l’écoute de ces enceintes, nous avons décidé avec Red Led du Comité d’In­ter­ven­tion Rédac­tion­nel d’AF de placer un micro­phone de mesure (Beyer­dy­na­mic MM1) au milieu du point d’écoute de ma cabine (dont l’acous­tique a été réali­sée par Michel Deluc) afin d’avoir une idée – toute rela­tive, bien entendu – de la courbe de réponse de l’en­ceinte dans ma cabine, à 1m de distance et à hauteur d’écoute.

Focal SM9

La courbe rouge repré­sente l’en­ceinte en mode normal et en orange le mode Focus. En théo­rie, la docu­men­ta­tion tech­nique ne ment pas : le twee­ter en béryl­lium offre une réponse quasi linéaire et trans­pa­rente. Le creux dans le registre grave, vers 100 Hz, est normal dans ma pièce : j’ai déjà pu l’ob­ser­ver avec d’autres enceintes.

Mais rien de mieux qu’une bonne séance d’écoute pour se faire un avis, et j’ai choisi des titres bien diffé­rents pour cela.

Réponse en fréquence avec le filtre en bleu et sans en rouge  Réponse en fréquence des Focal SM9 (en rouge) et des Eve SC307 (en violet)

 

Beck – Paper Tiger

Le radia­teur passif

La radia­teur passif est un procédé quelque peu diffé­rent du système bass-reflex, puisqu’il utilise un système haut-parleur passif (c’est-à-dire dépourvu de système bobi­ne+ai­mant) pour les basses fréquences en lieu et place d’un évent. L’avan­tage de ce système est qu’une fréquence de réso­nance plus basse peut se réali­ser sans problème indé­pen­dam­ment des dimen­sions de l’en­ceinte (là où une enceinte bass-reflex néces­si­te­rait des dimen­sions en fonc­tion de la fréquence de réso­nance et par consé­quent la taille de l’évent).

La présence de la voix est resti­tuée en toute fidé­lité. Le souffle lié au support d’en­re­gis­tre­ment ressort de manière assez flagrante mais les détails de reverb (notam­ment sur les cordes) aussi ; on perçoit bien les dimen­sions de la pièce, ainsi que le « frotté » des cordes. Les basses sont profondes mais ont assez peu de « punch » dans le bas (mais pas le sub). Chaque élément est bien placé dans l’es­pace stéréo­pho­nique, le titre gagne en « présence ».

Miles Davis – Seven Steps to Heaven

Idem que précé­dem­ment. La trom­pette de Miles ressort bien, le son est précis. La batte­rie à gauche laisse ressor­tir la ride un peu + que les fûts. Le piano offre un son un peu « medium ». Le son géné­ral est plutôt clair et encore une fois, précis.

Green Day – Ameri­can Idiot

Le côté « rentre-dedans » du titre est vrai­ment bien retrans­crit mais les attaques de la caisse claire et des toms rendent les tran­si­toires légè­re­ment agres­sives. Les guitares sont tran­chantes et l’on ne retrouve pas forcé­ment le « moel­leux » de la basse ni le « rebond » dans le bas de la grosse caisse. Le titre est précis mais la ryth­mique s’est endur­cie.

Gorillaz – Feel Good Inc.

Bonne préci­sion dans le couple grosse caisse/caisse claire. Les samples ressortent avec beau­coup de carac­tère. Les voix gardent leur détail malgré une basse bien ruti­lante pour le coup ! Le titre « claque » bien.

Focal SM9

J’ai égale­ment écouté de nombreux autres titres et projets sur lesquels j’étais en train de travailler et ai utilisé ces enceintes en séance. À chaque fois, j’ai commencé à écou­ter les SM9 en mode Direct, pour écou­ter l’en­ceinte elle-même, puis en jouant sur l’éga­li­sa­tion et le mode (2 ou 3 voies).

Quel que soit le style musi­cal, on constate une réponse en fréquence précise, parti­cu­liè­re­ment dans le médium aigu, une « signa­ture sonore » que je retrouve dans les Solo6 et Twin6… à diffé­rente échelle bien sûr. La présence du radia­teur passif offre une préci­sion accrue dans le registre extrême grave, a priori un peu trop pronon­cée dans ma (petite ?) cabine. Pour être à mon aise, j’ai donc eu recours à l’uti­li­sa­tion du filtre coupe-bas; à 40 Hz, cela change déjà pas mal de choses, et un petit boost à 140 Hz pour gagner un peu de confort dans le registre grave. Le Sub m’a semblé un peu trop présent – au détri­ment du grave – et ces petits réglages ont pu corri­ger ce ressenti. Néan­moins, tout ceci n’en­gage que moi… et les proprié­tés acous­tiques de ma pièce !

L’image stéréo­pho­nique est très bonne, les diffé­rentes sources sonores se placent là encore avec préci­sion dans l’es­pace. Les tran­si­toires sont elles aussi resti­tuées avec préci­sion… Le twee­ter à dôme inversé béryl­lium n’y est certai­ne­ment pas pour rien.

Focal SM9

D’un point de vue géné­ral, les SM9 révèlent une très grande qualité de fabri­ca­tion et de concep­tion. Comme je l’ai dit plus haut, la fini­tion – aussi sobre soit-elle – est très bien réali­sée, sans fiori­tures mais élégante. La qualité des éléments compo­sant l’en­ceinte est égale­ment élevée ; des poten­tio­mètres aux haut-parleurs, rien n’a été laissé au hasard.

D’un point de vue de l’uti­li­sa­tion, Focal a conçu une enceinte facile à appri­voi­ser malgré ses nombreux réglages possibles. J’ai trouvé que le mode Focus était parti­cu­liè­re­ment utile pour contrô­ler le rendu des mixages sur des systèmes bien moins lotis et permet­trait presque – de manière rela­tive – de retrou­ver le son des Solo6 par exemple (dimen­sions de l’en­ceinte mises à part). Une fonc­tion qui devrait rapi­de­ment être reprise par d’autres construc­teurs de main moni­tors…

Focal SM9

D’un point de vue sonore, j’au­rais aimé obte­nir par défaut (en mode Direct) une réponse dans le grave un peu plus « confor­table », réponse que j’ai déjà obte­nue avec d’autres systèmes mais que j’ai rapi­de­ment pu retrou­ver grâce au filtrage et à l’éga­li­sa­tion. Il faut dire que sur ces SM9, rien ne « bave » ! J’ai écouté ces enceintes dans d’autres régies et mon ressenti n’était pas aussi radi­cal que dans ma cabine; il faudra donc un peu de temps peut-être pour accom­mo­der ces enceintes avec son espace (plutôt large, si possible, si vous voulez en profi­ter plei­ne­ment !). Via ses choix tech­no­lo­giques, les SM9 sont d’une préci­sion redou­table, qui peut à certains égards sembler un tanti­net agres­sif ou « sec » selon les musiques (et la façon dont elles ont été mixées). Mais ceci reste une affaire de goût. On ne va tout de même pas repro­cher à une enceinte de bien faire son travail !

Conclu­sion

Focal fait un retour en force avec une paire d’en­ceintes desti­née aux utili­sa­teurs exigeants dont les besoins impliquent un système d’écoute fiable, précis et bien conçu. Les SM9 répondent en tout point à ces critères et sédui­ront les habi­tués de la marque comme les autres, qui au travers des nombreux réglages possibles, trou­ve­ront forcé­ment leurs marques. Même si le tarif affi­ché reste très élevé pour une paire d’en­ceintes (5400 € TTC la paire, prix public géné­ra­le­ment constaté), il faut recon­naître que c’est le prix à payer pour un système de cette qualité-là.

Merci à Red Led pour ses mesures d’une préci­sion alsa­cienne.

Photos par Fabien Napoli – the Rock n’Roll Eye.

Notre avis : 8/10

  • La qualité générale
  • La précision dans le médium aigu
  • L’image stéréophonique
  • L'égaliseur
  • Le radiateur passif et par conséquent, le registre extrême grave
  • Les modes Focus et Direct
  • Manque de "punch" naturel dans le bas en mode Direct, comparé aux autres registres fréquentiels
  • Le poids !
  • Le prix... mais c'est justifié !

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