Si 2018 est clairement l’année du renouvellement de l’entrée de gamme chez ADAM avec la série T venant remplacer la F (bientôt en test sur votre site préféré), 2017 fut l’année du haut de gamme, avec une série S remise au goût du jour. Au menu : nouveaux boomers, nouveau DSP et du numérique. Et c’est la version 7 pouces qui nous intéresse aujourd’hui !
Sortie en 2009, la série « SX » avait apporté son lot de nouveautés par rapport aux anciennes « SA », avec notamment un nouveau tweeter à ruban. Huit ans plus tard, la série SV débarque avec encore plus de modifications, à l’intérieur comme à l’extérieur de la boite.
Côté transducteurs, on retrouve un nouveau boomer ELE (Extended Linear Excursion) à longue excursion, plus léger et doté d’un cône très rigide, une nouvelle version du fameux tweeter à ruban S-ART et un nouveau guide d’ondes HPS. Pour alimenter tout ça, ADAM a intégré un biampli en classe A/B de 300 + 50 W, avec une fréquence de crossover fixée à 3 kHz.
À l’arrière, on aperçoit aussi pas mal de nouveautés, à commencer par une connectique numérique AES3 (entrée et sortie en XLR) en plus de la classique entrée analogique XLR. Petite surprise encore en découvrant un petit écran et son contrôleur rotatif cranté permettant de naviguer dans les menus de la bête. Et des menus il va en falloir, car la S2V propose, en plus des deux filtres en plateau placés aux extrémités du spectre, un égaliseur paramétrique de six bandes, un délai allant jusqu’à 5 ms et cinq presets mémoire.
Pour les mensurations, l’enceinte reste assez imposante pour une sept pouces, 346 × 222 × 338 mm, pour un poids de 11 kg. À noter que les évents bass reflex sont situés à l’avant et que le constructeur conseille de laisser au moins 40 cm entre les enceintes et le mur le plus proche.
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V for victory
Pour une enceinte de monitoring, nous avons été assez impressionnés par les réglages disponibles : entre l’égaliseur paramétrique de six bandes (avec réglage de la largeur de bande), les filtre en plateau et les presets, on devrait pouvoir affronter n’importe quelle situation. En revanche, accéder à ces paramètres via l’encodeur et le petit écran situé à l’arrière, c’est une autre histoire. Entre les clics longs et courts, les menus et sous-menus, les réglages qui se perdent car on n’a pas cliqué au bon endroit… On peut vite perdre patience.
Heureusement, ADAM a doté ses enceintes d’une prise USB de type maître et d’une appli (tournant sous Mac OS ou Windows) afin de les relier à son ordinateur. ADAM Audio S Control, petit nom usuel de l’application, permet d’y voir beaucoup plus clair dans les réglages de l’enceinte. Tous les paramètres sont visibles dans une seule et même fenêtre et tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes si les modifications avaient une répercussion instantanée. Malheureusement, ce n’est pas le cas. Il faudra appliquer chaque modification via le bouton « store » et attendre quelques secondes que l’enceinte « reboot », on pourra ensuite rappeler un preset via le bouton « load ». De même, on ne pourra régler en USB qu’une seule enceinte à la fois, même si on me souffle à l’oreille que le constructeur se penche déjà sur ce problème. ADAM a encore du boulot pour soigner un peu l’ergonomie de sa partie logicielle, mais c’est une première pour la marque allemande et on ne désespère pas qu’une mise à jour soit mise à disposition un de ces quatre. C’est aussi ça l’avantage de la solution logicielle !
soft
Au niveau des presets, il y en a trois utilisateur, modifiables à volonté et deux constructeur permettant de rappeler une correction plate (Pure) et une correction made in ADAM (UNR) censée avoir un rendu plus naturel. Comme le constructeur ne donne pas plus d’informations là-dessus, nous avons fait une mesure afin de comprendre le rôle de ce mode. Voici le résultat :
Comme on peut le voir, le mode UNR ne fait que rajouter des basses et des aigus avec deux filtres en plateau d’environ +2 dB agissant sous 400 Hz et au-dessus de 6 kHz. On pourrait appeler ça l’écoute « client », une peu plus flatteuse que le mode Pure.
Écoute
Pour être transparents, nous n’avons malheureusement pas chez Audiofanzine d’enceintes du même prix à mettre en face des S2V. Parmi la concurrence directe, on pourra citer PSI ou encore Genelec, mais nous n’avons pu les comparer qu’avec nos LYD7 de Dynaudio dont le prix reste trois fois moins élevé que l’enceinte ADAM testée aujourd’hui. Malgré tout, cela pourra répondre à certaines interrogations, notamment celle de savoir si la différence de performances audio entre une enceinte de moyenne gamme et haut de gamme justifie l’écart de prix. Alors c’est parti !
Pour faire cette écoute comparative, nous avons placé les enceintes en quinconce, afin de ne favoriser l’image stéréo sur aucune des deux. Nous les avons reliées à notre Apollo 8 d’Universal Audio nous permettant de passer rapidement d’une paire à l’autre, et, après avoir fait les niveaux, nous avons écouté des fichiers non compressés.
Johnny Cash – Hurt
Dès l’intro de guitare acoustique, on entend que l’équilibre est très différent sur les deux enceintes. La LYD7 de Dynaudio favorise clairement les bas médiums, avec la caisse de l’instrument en avant, tandis que les ADAM S2V offrent un rendu moins boueux et un peu plus brillant. On le sait, les LYD7 sont des enceintes avec des aigus un peu ternes, et ici la différence saute aux oreilles. Quand la voix arrive, le rendu est aussi très différent, avec plus de son provenant du torse et du nez sur les LYD7 et plus de bouche et de sibilances sur les ADAM, sans pour autant que ces dernières ne soient agressives. Le passage aux S2V nous donne un peu l’impression d’ouvrir une boite dans laquelle seraient placées les enceintes. Le son s’ouvre grâce à un meilleur équilibre des bas médiums par rapport aux hauts médiums. Le tout donne la sensation d’une plus grande clarté et d’une meilleure précision. Il est intéressant de noter que le piano ne perd pas de profondeur sur les ADAM, avec des résonances qui descendent malgré tout assez bas dans le spectre.
Michael Jackson – Liberian Girl
L’introduction à base de nappes et de bruit est toujours aussi intéressante, car elle nous permet de constater que les hauts médiums (à partir de 3 kHz environ) sont légèrement plus en avant sur les ADAM, tandis que ces dernières favorisent les fréquences du milieu du spectre (1 kHz). Lorsque la basse et la grosse caisse arrivent, on ressent clairement le boost situé entre 100 et 400 Hz des LYD7, mais il est intéressant de constater que ces dernières ne descendent pas plus bas pour autant. Le timbre de la voix est certes plus clair sur les S2V, mais aussi plus naturel et équilibré. On constate que les LYD7 favorisent un peu trop les médiums et bas médiums, ce qui a tendance à rendre le tout plus boueux, comme sur la chanson précédente, et du coup un peu moins précis. C’est un peu comme si on avait un effet de proximité sur la voix. Une dernière chose, le nouveau guide d’onde permet d’avoir sur les S2V un sweet spot assez large. On a beau bouger la tête latéralement, le rendu ne se détimbre pas, ce qui est une très bonne chose. Côté stéréo et dynamique, rien à signaler, c’est parfait.
Gorillaz – Feel Good Inc.
Sur ce morceau, le mix est vraiment différent, il sonne plus clair et moins surchargé sur les ADAM, et sur la LYD7, les fréquences situées autour de 100 Hz donnent beaucoup plus de place à la grosse caisse, quitte à la mettre un peu trop en avant par rapport aux autres instruments. La voix avec l’effet radio nous renseigne sur l’empreinte des moyennes fréquences, avec plus de nasalité sur les LYD7 et plus de bouche sur les S2V.
Pour résumer l’écoute, les S2V sont sans conteste plus équilibrées et détaillées que les LYD7, qui sont d’excellentes enceintes de moyenne gamme, mais qui n’arrivent clairement pas à tenir tête au très haut de gamme représenté par les ADAM. Le prix est trois fois supérieur, et pour ceux qui se posaient la question, il existe bien une différence nette dans le rendu sonore. Ce dernier n’est peut-être pas trois fois meilleur, car la montée en gamme du matériel audio obéit le plus souvent à l’échelle logarithmique. Si vous prenez la fonction f(x)=ln(x), avec le prix sur l’axe des abscisses et les performances sur l’axe des ordonnées, il faut beaucoup plus d’argent pour un saut qualitatif légèrement meilleur. Qui népérien, n’a rien.
Mesures
Nous avons ensuite fait quelques mesures comparatives avec notre micro de mesure :
En rouge, la LYD7 de Dynaudio et en bleu, l’ADAM. Le résultat est sans appel, la S2V surclasse la LYD7 dans toutes les parties du spectre et garde une réponse en fréquences très peu accidentée. Et pourtant, on l’aime bien notre LYD7…
Nous avons voulu ensuite corriger la réponse en fréquences de la S2V via les réglages internes, en nous munissant d’un micro de mesure, d’un MacBook, du logiciel ADAM et d’un câble USB. Après quelques minutes de tâtonnement, nous arrivons à un résultat très satisfaisant en utilisant cinq des six bandes disponibles en plus des deux filtres en plateau. Voici les mesures avant correction (bleu) et après corrections (vert).
On constate que l’égaliseur paramétrique permet de corriger tous les accidents sans trop de problèmes, on aurait pu même peaufiner le résultat avec la sixième bande inutilisée. À l’écoute, le rendu dans notre pièce d’écoute nous parait encore plus équilibré, il n’y a plus grand-chose à redire !
Pour finir, voici la mesure de la LYD7 face à la mesure de la S2V après correction :
Le résultat est impressionnant. Ça fonctionne tellement bien qu’on pourrait imaginer un mode automatique comme on l’a déjà vu chez JBL : on branche le micro de mesure directement sur l’enceinte, elle fait sa tambouille et l’égaliseur est ajusté automatiquement. Bonne idée, non ?
Conclusion
La S2V est venue, elle a vu, elle a vaincu. Même sans parler des derniers ajouts par rapport à la gamme SX, l’enceinte offre des performances audio de premier ordre, avec notamment une neutralité exceptionnelle. Si on ajoute à cela l’entrée numérique AES3, l’application Mac/Windows et surtout l’égaliseur paramétrique de six bandes (en plus des deux filtres en plateau) permettant de corriger la réponse en fréquences en fonction de votre pièce, on obtient une enceinte proche de la perfection. Certes le prix est en conséquence et ADAM peut encore progresser sur la partie logicielle, mais difficile de faire la fine bouche devant un tel niveau de qualité.