Premier volet de notre dossier « Quelle guitare dreadnought (s’)offrir pour Noël entre 150 et 200 € ?»
Entrons tout de suite dans le vif du sujet avec une référence en la matière. En effet, bien que Yamaha soit devenu un immense consortium exportant à travers le monde des choses aussi différentes que des amplis hifi ou des motos, la firme japonaise a débuté par la fabrication d’orgues et continue d’être un des acteurs majeurs dans pratiquement tous les domaines de la musique et celui des guitares en particulier.
The girl in black
La couleur de l’exemplaire testé est bien réussie, mais que les puristes se rassurent, une version « naturelle » existe. Le seul réel inconvénient de cette finition est que les moindres particules de poussières sont visibles, ce qui obligera son utilisateur à jouer du chiffon doux très fréquemment.
Continuons d’observer la petite asiatique pour saluer l’efficace sobriété de l’ensemble. Un petit détail trahit malgré tout son prix bas : la colle appliquée entre le manche et la caisse semble avoir été posée à la truelle, ce qui se remarque d’autant plus que le vernis brillant fait ressortir le blanc de la colle. Pas de panique cependant, car cela n’affecte en rien les qualités sonores de l’instrument, ni sa longévité. Mieux vaut trop de colle que pas assez !
Les essences choisies sont pragmatiques : du classique épicéa (contreplaqué) utilisé pour la table d’harmonie, au nato (alternative low cost à l’acajou) choisi pour les éclisses, le dos et le manche, en passant par le palissandre constituant le chevalet et la touche. Les sillets sont en plastique comme sur l’immense majorité des entrées de gamme et celui du chevalet n’est pas compensé. Pour autant, aucun problème de justesse n’est à signaler.
Que ce soit la rosace, la tête, le chevalet ou encore la plaque tortue, cette folk est sobre et sans fioritures. Yamaha a préféré se concentrer sur l’essentiel et a choisi de doter la tête de sa F370 de mécaniques die cast de chez Gotoh. Une excellente surprise pour le prix. Elles se sont d’ailleurs révélées assez agréables à l’usage, bien que d’autres à bain d’huile les surpassent en termes de douceur d’utilisation.
Petit bémol côté pratique : ceux qui jouent debout ne seront pas à la fête car aucune attache courroie n’est prévue. Vous pourrez toujours utiliser une sangle à lacets qui se noue sur la tête entre le sillet et les mécaniques. C’est tout aussi efficace, certains préférant même ce type d’attache, mais laisser le choix au guitariste n’aurait pas fait monter le prix de la guitare de manière démesurée.
Place aux mimines
Avec un diapason légèrement raccourci à 634 mm, elle promet une facilité de jeu accrue car à tirant égal, la tension des cordes est amoindrie. En pratique, le ressenti n’est pas flagrant, et pour bien faire, il aurait fallu comparer avec un autre modèle équipé des mêmes cordes d’origine. La touche est équipée de 20 frettes correctement posées, on ne se fera donc pas mal à la main gauche en glissant sur le manche. Sous celle-ci, vous pourrez trouver la tige de réglage du manche accessible par la rosace.
En route donc, sur un manche assez neutre, autorisant tous les types de jeux. Les grands débutants seront rassurés par la présence des points de repère entre les frettes et pas uniquement sur le bord de la touche. Le vernis procure une sensation agréable à mi-chemin entre un vernis épais « collant » et un vernis satiné plus glissant. Aucune anicroche donc pour le manche, un tout petit peu gros en épaisseur à mon goût, mais cela reste de l’ordre du chipotage. Et de toute façon, rien ne vaut un essai personnel pour savoir si le manche peut vous convenir, même si vous ne connaissez que quatre accords.
Quid du (diapa) son ?
Les cordes étant, comme souvent, de piètre qualité, il vous faudra les changer dès que possible. Il faut donc émettre de grandes réserves quant aux sons enregistrés, le potentiel réel de la guitare ne pouvant être déterminé qu’une fois dotée de bronzes de qualité. Test en magasin oblige, les extraits choisis sont ceux où la pollution sonore environnante était la plus faible, au détriment de la qualité du jeu.
Vous l’aurez remarqué, et c’était encore plus flagrant lors de l’essai lui-même : cette guitare brille. Beaucoup, voire trop quand on attaque fort au médiator. Bien sûr, en changeant les cordes d’origine, cette brillance extrême devrait s’atténuer pour laisser place à des aigus plus raisonnables.
Subjectivement, je dirais que le nato n’apporte pas la chaleur que peut procurer l’acajou, même bas de gamme. Pour autant, cette Yamaha ne manque de rien, les graves sont assez profonds et la présence sonore de l’instrument est tout à fait correcte. Le sustain lui aussi est correct, sans être renversant.
Pas très flatteuse donc, mais très efficace pour apprendre à jouer proprement.
Là encore, beaucoup d’aigus sont au rendez-vous. Il en ressort un constat à double tranchant : le bon équilibre en graves et médiums donne un son précis et neutre, mais la « pulpe » se trouve déplacée vers les médiums aigus plus que vers les bas médiums. Mais à 150 €, c’est déjà (très) bien de pouvoir compter sur un son propre et défini !
Même en finger picking, les aigus sont toujours sacrément présents. On distingue ainsi les moindres détails, mais aussi les « pains » (comme vous pouvez constater les miens). Yamaha est réputé pour ses guitares classiques d’étude et on retrouve ce savoir-faire très clairement dans ce modèle.
Les graves profonds prennent ici toute leur ampleur et le manque de chaleur précédemment décrit s’estompe au fur et à mesure que l’on module son jeu en attaquant moins fort.
Yam à moi ?
Yamaha joue parfaitement le jeu de la guitare d’étude pour folkeux fauchés, avec une neutralité et une précision bienvenue pour les débutants. Le manque de chaleur ne sera réellement handicapant que pour ceux qui veulent strummer au moulinet ou qui cherchent un son « roots ». Je la conseillerais donc plus volontiers aux perfectionnistes qui jouiront avec elle d’un son précis. Dans tous les cas, pour à peine plus de 1000 balles, on en a pour son argent.
Merci à Paul Beuscher de nous avoir accueillis dans leur magasin.