Après RealGuitar, MusicLab présente RealStrat, une émulation du célèbre modèle Fender dans un instrument virtuel utilisant samples et technologie maison.
Après RealGuitar, MusicLab présente RealStrat, une émulation du célèbre modèle Fender dans un instrument virtuel utilisant samples et technologie maison.
L’ergonomie et la relation ‘jeu au clavier/jeu de guitare’ ont posé et posent encore des problèmes quant à la programmation de parties de guitare réalistes. Parmi les solutions disponibles, on notera l’utilisation de boucles (Acid, Rex ou Apple Loops) ou de fichiers audio avec des softs tels Melodyne, quand le logiciel n’est pas inclus dans un instrument (Liquid Instrument de Ueberschall). On peut aussi réaliser des parties en temps réel ou offline avec des banques pour sampleurs (Prominy, Vienna, Sonic Implants, etc.) de plus en plus convaincantes grâce aux possibilités offertes par les scripts (Kontakt de Native). Autre méthode, l’emploi d’instruments virtuels comme Virtual Guitarist, Slayer, ManyGuitar, Strum Acoustic GS-1, Acoustic Legends HD, DirectGuitar 2.0, Chris Hein-Guitars ou RealGuitar.
Ce dernier a été un précurseur, embarquant la technologie Rhythm’n’Chords, qui permet de créer des rythmiques réalistes en associant reconnaissance d’accords joués au clavier, fichiers Midi et samples. Real Strat est le deuxième instrument basé sur ces principes.
Présentation
Un simple DVD contient l’installeur, une version démo de Real Guitar et Amplitube 2 Duo, une version OEM du logiciel d’IK Multimedia, offrant 2 amplis, 2 préamps et EQ, 2 baffles, 2 pédales (Wah et overdrive) et autres, en plug et standalone, de quoi triturer le son de RealStrat. L’installation est simple (il faudra télécharger un patch si l’on est sous Leopard). En fin de processus, on paramètre le Bank Manager de façon à ce qu’il installe la banque de samples en fonction du ou des taux d’échantillonnage que l’on sélectionne. On dispose d’une période d’essai d’un mois au terme de laquelle il faudra s’enregistrer. L’éditeur enverra un fichier (rlst.key) qui fait office de clé ainsi que le numéro de série d’Amplitube Duo.
Le logiciel compte trois fenêtres, la première dédiée à l’instrument, la deuxième à la bibliothèque de patterns (bouton PM), la dernière aux réglages et programmations des Keyswitches (bouton KS). Les fonctions sont accessibles par menus déroulants ou pop-up. La fenêtre instrument se divise en deux parties : au-dessus du manche de guitare, l’accès à divers paramètres et sous-fenêtres. En dessous, le réglage des fonctions Midi, l’accès aux patterns et keyswitches et autres options d’utilisation.
Première chose à faire, assigner cartes son et Midi dans les préférences. Ensuite, dans la partie supérieure gauche, Output permet de régler le niveau de sortie et d’appliquer une EQ (Low & High). Si l’ajustement du volume peut être utile, ne touchez pas aux EQ. Tune permet de régler l’accord du plug, ainsi que Modulation (avec Sync possible) en réponse à la molette de… modulation. Setup joue sur divers paramètres, le plus important étant le temps de détection d’accord. À chacun d’essayer diverses solutions en fonction de son jeu (notamment dans les enchaînements). À droite, on trouve le Mixer et les volumes respectifs des bruits et sons ajoutant au réalisme de l’instrument (bruits de frettes, de release, de médiator, mutes, etc.). Même chose du côté du FX Mixer, avec les bruits d’étouffement, les harmoniques, etc.
RealStrat offre aussi une Wah-Wah, bien conçue et implémentée. Quatre modes de contrôle, via Midi CC, mode Auto (positif ou négatif) et modulation, avec ajustement de la fréquence pivot, du numéro de contrôleur, de la pente du filtre, de la modulation (en Hz), etc. Si on l’assigne à la molette ou mieux à une pédale de volume ou d’expression, ça fonctionne tout de suite.
En dessous on trouve les réglages de vitesse de strumming, d’attaque et de release. Au centre, en plus des infos sur les accords et les paramètres en cours et leur valeur, on dispose de deux boutons, Hold (tenue de l’accord) et Auto (active le positionnement automatique du capodastre virtuel). Enfin à gauche se situent les réglages d’Accent (seuil de déclenchement des samples suivant différentes vélocités) et Alter, qui permet de définir le nombre de samples différents déclenchés lors de répétition de note, empêchant ainsi un rendu artificiel (l’effet mitraillette).
Banque de sons
À l’ouverture, la banque de samples se charge automatiquement (la banque complète pèse 948 Mo en 48 kHz). On peut choisir entre 15 “pick positions”, une sorte de compromis entre les différentes sonorités du sélecteur de micro de l’originale et de position du médiator virtuel. La fonction semble être un mélange de samples et de filtres/EQ, Sergey Egorov, créateur de RealStrat, n’ayant pas voulu nous révéler ses secrets de fabrication… La banque est néanmoins de bonne qualité, chaque note ayant été échantillonnée par frette et corde. Le fameux “twang” est bien présent, et on retrouve les caractéristiques particulières du son Strat, même si la banque ne pourra rivaliser avec des produits comme la SC Electric Guitar de Prominy, par exemple (64 Go de samples…). Mais le propos n’est pas non plus le même.
En mode Direct, on joue les différents samples, du Full Sound aux Mutes, Bridge Mutes, Harmonics et Pinch Harmonics et différents bruits (Slap, Scrapes, Release et Fret) en passant d’un canal Midi à l’autre. Si l’on peut paramétrer un multi-instrument dans son séquenceur, cela permet d’accéder rapidement aux sons, sans avoir à charger X fois le même plug sur différentes tranches, en procédant par enregistrements successifs sur les différents canaux.
Tous les modes ont en commun un partage du clavier maître, avec reconnaissance d’accord et accès aux six cordes, aux notes alternatives, aux strums, aux mutes, etc. Chacun mode offre un zone Main (entre E1 et B4) qui servira à la reconnaissance des accords et au jeu chromatique et deux zones de commandes (de C0 à D#1 et de D#5 à G6 sur le plug, mais de C-2 à D#1 et D#5 à C7 en réalité). Ces dernières permettent de jouer les accords reconnus, soit en aller-retour, soit en arpèges, avec versions alternatives des notes, strumming plus ou moins complets selon la vélocité et mutes. En général, les notes blanches sont des notes Repeat (qui redéclenchent les notes ou accords joués), et les noires des Mutes. Ultime souci de réalisme, presque deux octaves (de C-2 à A#-1, nommées Strokes) commandent des techniques de jeu : aller-retour à différentes vitesses, autres types de mutes, enchaînement par chromatismes, etc. Il suffit d’enregistrer la grille de son morceau et d’y appliquer ensuite (ou en même temps) les commandes générées par les touches.
Sur la droite se situent les paramètres de réponse aux commandes Midi courantes : courbe de réponse à la vélocité, Pitch Bend, Mod Wheel et aftertouch. Ces assignations changent suivant le mode sélectionné. Parmi les plus intéressantes, notons le Mono Bend du Pitch ou de la Mod Wheel, où seule la note basse d’un accord sera modifiée (de 1/8 de ton à une octave), et le Feedbacker de l’aftertouch, qui rajoute la même note ou sa quinte (sample, synthèse ?) sur deux octaves (3 pour la quinte). Très efficace quand on l’utilise avec un simulateur d’ampli. Ou encore l’assignation à la pédale de la wah-wah, des Open strings ou des Chucka (accords de quarte mutés, pour un effet de rythmique).
Particularités
Passons aux commandes spécifiques à chaque mode : en Solo, on peut accéder par un réglage de plage de vélocité à deux sons différents (harmoniques, mutes, mutes de la main droite, tremolo, slide, wah, violoning, chuka, répétition, etc.), paramétrer le jeu legato par intervalles de demi-tons et tons, déclencher un son par une pédale (Sustain ou interrupteur), spécifier la zone permettant le jeu en basses alternées…
En mode Harmony, on sélectionne le type d’intervalle rajouté à la note jouée (octave, deux octaves, quinte supérieure, quarte inférieure, Power Chord 1 ou 2), avec choix d’un effet déclenché par la vélocité (Slide Up ou Down de un à trois demi-tons).
En mode Chords, on sélectionne le renversement désiré (I à IV) ou une interprétation de ce qui est joué sur le clavier (bouton Kbd), ce qui occasionne parfois des sauts de manche irréalistes. On détermine sur combien de cordes ces accords seront joués (de 1 à 6) et l’on a toujours le choix d’un effet déclenché par la vélocité (Strum ou Slide). En mode Bass & Chord, on retrouve ces renversements sur cinq cordes max, la sixième étant réservée à la basse. Alter Bass permet d’alterner fondamentale et quinte en rejouant juste une des notes de l’accord plaqué et Bass Mono empêche que deux notes soient jouées sur la même corde. En mode Bass & Pick, on retrouve les réglages de Bass & Chord, à l’exception du nombre de cordes.
Le mode Solo est un mode polyphonique (amusant, non ?), qui permet de jouer accords ou mélodies. Les accords seront joués tels que plaqués sur le clavier, mais plus ou moins remis en “forme” guitaristique si l’on se sert des touches de commande pour les arpéger. En assignant les divers jeux de samples à des Keyswitches et en les activant (petite Led jaune), ainsi qu’en activant le mode (bouton KS), on arrive à émuler des parties solo réalistes. Pratique : pour s’y retrouver facilement, si un Keyswitch est activé, la note correspondante sur le clavier du plug se dote d’une Led témoin et la touche devient bleue quand le Keyswitch est en action. Attention, les KeySwitches ne sont disponibles qu’en mode Solo.
Trois modes de déclenchement sont disponibles : Toggle (le Keyswitch reste actif même si la note est relâchée), Through qui permet à la touche de garder simultanément sa fonction d’origine et Sustain qui rajoute une fonction de sustain. L’éditeur a fait fort, car on peut très bien activer les trois modes à la fois et l’implémentation tient compte des contraintes réelles : pas question de faire un bend sur une corde à vide ou un slide d’une note à l’autre sur des cordes différentes.
Un autre point fort est la fonction Floating Fret Position. On peut placer un capodastre virtuel sur les cinq premières frettes (clic droit sur le manche), ce qui donne accès à des octaves inaccessibles sur un clavier maître de petite taille, par exemple. On peut aussi enclencher ce placement automatiquement (bouton Auto). Son activation manuelle (bouton Auto sur Off) empêche de jouer sous la limite du capo (sauf corde de Mi grave).
Jeu en accords
Mais si Solo et Harmony permettent de créer des parties assez réalistes, le plug est particulièrement efficace quand il s’agit de jouer en accord. En effet, l’éditeur a inclus trois modes de reconnaissance et interprétations d’accords, Chords, Bass & Chords et Bass & Pick. RealStrat interprète les accords joués sur le clavier et surtout les “place” sur la guitare à la façon d’un guitariste et non pas d’un pianiste. Ce qui garantit un “jeu” authentique, avec les renversements, répétitions et omissions de notes typiques. RealStrat reconnaît vingt-six types d’accords, détaillés dans le manuel en .pdf, avec indications des notes indispensables et facultatives pour une reconnaissance correcte.
Même si tous les accords ne sont pas reconnus, on s’en tire très facilement avec des substitutions, en limitant le nombre de cordes afin d’éviter les notes indésirables. Ça fonctionne très bien, et la visualisation des accords et le placement des notes sur le manche (gros ronds verts) aident à une meilleure connaissance de l’instrument réel. Dans Chords, RealStrat peut jouer quatre renversements différents, grâce à Chord Position (de I à IV) en plus de l’option Kbd. Une fois l’accord reconnu, on le joue via les notes Repeat dont la vélocité détermine le nombre de cordes jouées. Avec un réglage correct de l’aftertouch, de la modulation, et des KeySwitches, on arrive à des rythmiques étonnantes de réalisme, d’autant que, tous les paramètres étant automatisables, on peut changer en temps réel tous les réglages, ce qui permettra de couvrir tous les cas de figure (passer de la position II à la IV, par exemple).
Les deux autres modes gèrent séparément basse et autres notes et extensions de l’accord. Dans Bass & Chords, les touches Repeat jouent les accords (sur cinq cordes) et on peut alterner les basses. Dans Bass & Pick, les touches blanches de E5 à C6 correspondent aux cordes de la guitare et permettent d’égrener les arpèges, les noires servant à déclencher un Unison (sample différent) ou un chromatisme inférieur. On peut ainsi réaliser des parties folk ou country ou n’importe quelle figure rythmique rapide qui serait difficilement exécutable et peu convaincante si on la jouait directement au clavier. Là, avec les touches Repeat et Unison, ça fonctionne tout de suite.
Bibliothèque de grooves
Un des gros atouts de RealStrat est la bibliothèque de patterns rythmiques, couvrant la plupart des styles musicaux. Ce sont des fichers Midi, d’une durée d’une à huit mesures, qui envoient des suites de notes aux zones Strokes, Repeat et Mutes, formant ainsi des rythmiques complètes (strum, mute, arpège, etc.). Depuis RealGuitar2, la banque est incluse dans l’interface du plug, ce qui permet non seulement de chercher le fichier adéquat, mais aussi de l’utiliser directement, même si l’on est en standalone.
On clique sur PM pour ouvrir la fenêtre du Manager, et sur Pattern si l’on veut activer la lecture de pattern (le fichier Midi est lancé dès que l’on joue). 19 familles sont sensées répondre à la plupart des besoins, chacune proposant entre trois et neuf sous-familles, elles-mêmes incluant plusieurs variations : la bibliothèque propose 1250 fichiers. Ces fichiers peuvent être utilisés dans tous les modes de RealStrat, leurs informations étant des commandes de jeu, qui ne bougent pas d’un mode à l’autre. Le résultat sera bien entendu différent selon que l’on soit en Solo (les patterns jouent les renversements tels que joués sur le clavier) ou Chords (les patterns jouent les renversements tels qu’interprétés à la manière d’un guitariste).
L’interface du Pattern Manager permet de jouer les fichiers à vitesse normale, double ou divisée par deux, d’ajuster la vélocité de manière fixe ou au contraire de prendre en compte celle avec laquelle l’accord est joué sur le clavier, de l’assigner à la molette de Pitch pour des changements en continu, ou de paramétrer plusieurs réglages de façon à provoquer un rendu aléatoire. La qualité et le réalisme des fichiers sont variables, mais le principe fonctionne parfaitement, certaines rythmiques étant carrément bluffantes. En règle générale, on peut cependant reprocher une quantisation trop forte, qui nécessitera un travail d’ajustement des notes de commandes.
Car l’intérêt est bien sûr de pouvoir utiliser cette banque dans son séquenceur favori. Là, tout est possible. On exporte d’abord le fichier par un simple drag’n’drop (les réglages de vélocité sont pris en compte). On peut ensuite tout modifier, de la vélocité au placement, de la quantisation aux techniques de jeu. De même, on peut très bien créer ses propres rythmiques en combinant touches Repeat, Mutes et Strokes puis les importer dans le Pattern Manager (par sauvegarde dans le dossier idoine) pour une utilisation ultérieure. Le manuel fournit le tableau complet des Strokes et des paramètres disponibles pour l’automation.
La conception de cette banque, le nombre de fichiers et la possibilité de tout modifier en font un des outils de rythmique les plus puissants actuellement, voire le plus puissant, car il n’y a aucune limite à la création de nouvelles formes, ce de façon extrêmement simple.
Conclusion
Le travail effectué sur l’échantillonnage d’un Strat, même s’il ne peut prétendre rivaliser avec les banques gigantesques, permet néanmoins de répondre à pratiquement tous les cas de figure, que l’on cherche à créer des rythmiques ou des soli. La grande force du plug est sans contexte la souplesse de jeu qu’apporte le principe de zones de commandes. En effet, les bend, mutes, répétitions, slides, glissés et autres sont parfaitement implémentés ou déclenchés. La souplesse de la banque de patterns permet aussi de rapidement choisir une rythmique dans le style de ce que l’on recherche, puis d’apporter toutes les modifications nécessaires en très peu de temps, avec une palette de commandes et de variations sans égale. Le point fort du plug reste de toute façon la création de rythmiques. Pour une fois, pas de démos, mais le lien vers celles de l’éditeur (vidéo et audio).
Difficile de trouver quelque chose à reprocher : concept et réalisation technique n’appellent aucune critique. Tout ce que RealStrat est sensé faire, il le fait parfaitement, sans autre bug que celui dans Logic (sacrément ennuyeux, quand même), sans craquements… La banque de samples peut sembler un peu froide, ce qui nécessitera de la traiter avec un simulateur d’ampli. Ça tombe bien, MusicLab en fournit un. On gagnera à expérimenter diverses combinaisons de plugs, pour varier le grain, les échantillons étant vraiment bruts. Et il faut quand même du travail pour arriver à programmer (ou jouer en direct) une partie vraiment réaliste.
Avant de conclure, une mise au point : loin de nous d’affirmer que RealStrat remplacera la sensibilité, l’invention et les défauts d’un musicien s’exprimant avec une guitare… Cela dit, RealStrat est sans conteste le meilleur instrument virtuel dédié à la guitare électrique (de type Strat…). C’est un véritable instrument, jouable, modifiable, et non pas un lecteur de boucles ou une simple bibliothèque d’échantillons. On l’utilisera sans aucun problème et très rapidement pour coucher des idées, poser de rythmiques de fond, voire pour des réalisations complètes si l’on prend le temps de peaufiner ses programmations.