Quand le papa du POD s’attaque aux interfaces audionumériques, cela donne le TonePort, véritable trousse à outils pour home studiste. C’est aujourd’hui la version intégrant huit préamplis micros, l’UX 8, qui est passée au crible...
Non content d’avoir réussi sa percée dans le petit monde des home studistes avec ses TonePort UX1 et UX2, Line 6 remet le couvert et complète sa gamme avec l’UX8, qui combine 8 entrées ligne / micro préamplifiées, 2 entrées/sorties S/PDIF, 2 entrées instruments et une connectique USB. De quoi ravir les guitaristes souhaitant enregistrer leur ami batteur ! Car comme dirait maître Yoda : ‘pour enregistrer une batterie acoustique, beaucoup d’entrées micro il te faudra’.
Une fois le carton de l’UX8 ouvert, on se retrouve nez à nez avec une interface au format rack d’une hauteur de 2 unités. L’ensemble est plutôt joli et même si les potentiomètres font un peu ‘toc’ et plastique, l’aspect général de la bête fait plus pro et sérieux que le reste de la série TonePort. Grâce au châssis métallique, le côté ‘jouet’ qui généralement caractérise bon nombre de produits estampillés Line 6, a disparu ici pour notre plus grand plaisir.
Côté pile
La première chose qui saute aux yeux est la présence de deux VU-mètres éclairés, qui, par défaut, indiquent le niveau des entrées 1 et 2. On pourra cependant les assigner à n’importe quelle entrée ou sortie de l’UX8. Une led rouge nous avertira quand le signal atteindra 0 dBfs. Si ces deux petits Vu-mètres sont jolis tout plein, ils restent assez imprécis et par conséquent, peu utiles.
Pour le reste, c’est plus classique avec les deux entrées instruments (pour y brancher guitare et basse) et leur pad d’atténuation de –20 dB respectifs, les huit potentiomètres de gain ( de 0 à 45 dB) pour les entrées micro avec un coupe bas à 75 Hz, un pad de – 20 dB et deux switchs pour enclencher l’alimentation fantôme par groupe de 4 (entrées 1–4 et 5–8).
Au niveau de l’étage de sortie, on retrouve deux sorties casques avec chacune leur propre volume de sortie. Ceci est une très bonne initiative de la part de Line 6 car beaucoup d’home studistes n’ont pas de cabine et lorsqu’il faut enregistrer un chanteur(euse), cela permet à ce dernier et à l’apprenti ingé son d’avoir un casque et de pouvoir couper les moniteurs pour éviter la repisse dans le micro. Enfin, le potard de volume général accompagné de son switch ‘mute’, pratique quand on oublie justement de couper les moniteurs et que le micro est branché…
Côté face
Quand on retourne l’UX8, on retrouve les 8 sorties symétriques au format jack 6,35 mm, l’entrée / sortie S/PDIF au format coaxial, la prise USB, deux prises au format jack pour footswitchs et une pour la pédale d’expression. Ces entrées serviront à brancher des contrôleurs pour Gearbox, le simulateur d’amplis software livré avec l’UX8. Au niveau des entrées analogiques, on retrouve derrière 8 prises XLR pour y brancher des micros, et des entrées ligne au format Jack 6,35 mm (asymétriques). Petit détail qui peut avoir son importance : le rack ne peut être seulement alimenté par la prise USB et nécessite obligatoirement d’être branché sur le secteur pour fonctionner, avis aux utilisateurs nomades…
Drivers
Voyons maintenant la partie logicielle de l’UX8. Tout d’abord, comme avec tous les produits Line 6, l’interface est compatible avec Monkey, qui vous permettra de vérifier que votre configuration est bien à jour, pratique ! En effet, ce petit bout de soft vérifie que la version du driver de l’UX8 que vous utilisez est bien la dernière et vous aurez aussi la possibilité d’acheter des packs de sons supplémentaires (plus orientés ‘métal’ par exemple). En ce qui concerne le driver lui-même, on reste dans le classique avec réglage du taux d’échantillonnage (jusqu’à 24 bits / 96 kHz) et la taille du buffer (128 samples minimum). Avec ma configuration (Intel Core 2 Duo à 2,4 GHz / 2 Go de RAM) et la latence au minimum, le système ne montre aucun signe de faiblesse ni craquement. Un bon point !
En passant sur l’onglet des entrées, on peut choisir pour chacune d’entre elles son niveau : ligne, micro ou même instrument pour les deux premières. On peut même faire des paires stéréo pour les entrées 1 et 2, 3 et 4, etc. Attention, vous ne pourrez brancher un micro et une source niveau ligne (CD, synthé…) sur la même entrée. Reste l’horloge qui peut être réglée en interne ou en externe.
Dans l’onglet ‘Output & monitoring’, on peut assigner une sortie aux deux Vu-mètres du rack et surtout régler le volume et la panoramique du ‘direct monitoring’ de chaque entrée, et ce, pour chacune des sorties. Cela permet de faire plusieurs mixes différents et de les affecter à des sorties physiques (de 1 à 8). Très pratique quand le chanteur veut plus de guitare dans son casque ou le batteur plus de basse : à chacun sa sortie et son mix, tout le monde est content ! Vu que l’UX8 a une deuxième prise casque (sorties 3 & 4), il est vraiment très facile de faire un mix alternatif pour le musicien qui vient enregistrer chez vous.
Le logiciel de simulation d’ampli Gearbox a lui aussi ses réglages de panoramique et de volume. Justement, en parlant de Gearbox…
Gearbox
Le gros point fort des interfaces audio de Line 6, et donc de l’UX8, est le logiciel de simulation d’ampli fourni dans la boite, j’ai nommé Gearbox ! Le talent du constructeur dans l’élaboration d’algorithmes recréant le son d’amplis célèbre n’est plus à démontrer et le succès du POD est la preuve que Line 6 reste leader dans le domaine. La marque nous offre donc une sorte de haricot rouge virtuel sous forme de programme ‘stand-alone’ (qui peut fonctionner seul) et sous forme de plug-in utilisable avec la plupart des séquenceurs du marché.
L’interface de la bête ne dépaysera pas nos amis guitaristes : l’ampli ressemble à un ampli et le chaînage des pédales est directement visible sur la page principale. Au premier abord, on trouve ça plus simple que d’autres logiciels comme Guitar Rig de Native Instrument ou Amplitube de IK Multimedia. En cliquant sur une pédale, on arrive à ses réglages, on l’active et la désactive en un clin d’oeil, bref, c’est très simple à utiliser, surtout pour un possesseur de POD. Mais alors me direz-vous, quel est l’avantage par rapport au fameux haricot ? C’est à ce moment-là que je vous réponds : re-amping !
Quoi ? C’est une méthode permettant de passer une guitare dans un ampli (ou une simulation d’ampli!) après l’avoir enregistré. Une fois que le stress de la prise est passé, vous pouvez régler votre son aux petits oignons, changer d’ampli… En gros, tout est permis ! Pour faire cela avec un vrai ampli il faut acheter une boite de re-amping (sans blague !) qui s’occupera d’adapter le niveau qui sort de votre carte son ou console au niveau de l’entrée instrument en façade de l’ampli. Avec Gearbox, aucun câblage n’est nécessaire : lancez le plug-in dans votre séquenceur préféré et insérez-le dans une piste. Votre interface audio enregistrera le son direct de votre guitare (non traité) et il passera ensuite dans le simulateur d’ampli. Seul bémol : cela occupera des ressources processeur lors du mixage de votre morceau, car le son n’est pas figé. Si vous appliquez Gearbox directement à la prise, le son ne pourra plus être changé par la suite, mais vous pourrez désactiver le simulateur une fois la prise faite. Finalement, vous avez le choix et c’est bien ça le principal ! Pour ce qui est des amplis simulés, vous trouverez sûrement votre bonheur parmi les 18 disponible, les 24 cabinets, les 5 modèles d’amplis basse, les 29 pédales et les 6 préamplis micros.
Le fait d’avoir une version plug-in de Gearbox vous permettra de lancer plusieurs instances simultanées et donc d’enregistrer deux guitares (ou une guitare et une basse) en même temps avec chacune leur propre son ! Le chanteur veut aussi utiliser sur sa voix une modélisation de préampli de Gearbox ? Pas de problème, on lance une troisième instance sur une autre piste du séquenceur, la seule limite sera la puissance de votre ordinateur. Testé et approuvé avec Los Teignos qui passait par là : chacun sa guitare, son réglage dans Gearbox et c’est parti pour un beauf enregistré !
Bon, c’est bien beau tout ça, mais ça sonne comment ce truc ?
Le son !
Commençons par Gearbox qui est, il faut le dire, un cousin du POD et ça se ressent quand on branche sa guitare dans l’UX8. Avec les mêmes avantages et les mêmes défauts : ça sonne propre, trop peut être dans certains cas ? Les adeptes de la six cordes habitués à vibrer au son de leur ampli à lampes peuvent être dépaysés et pour cause : on a affaire ici à un son simulant le timbre d’un ampli repris par un micro et donc prêt à être enregistré. C’est comme si on jouait près de la console dans un studio et que l’ampli était de l’autre côté de la vitre, dans la cabine de prise de son. On a plus ce rapport ‘physique’ du aux vibrations de son ampli chéri. C’est sans doute pour cela que certains sont déçus lorsqu’ils essaient un simulateur d’ampli pour la première fois. Le son est en effet beaucoup plus compressé et certaines nuances de jeu peuvent passer à la trappe. Mais rassurez-vous, cela vous aidera dans la plupart des cas à intégrer votre guitare dans le mix de votre morceau. Finalement, Gearbox est principalement un outil d’enregistrement.J’ai eu la chance d’avoir en ma possession un POD X3 et j’ai pu comparer la version software à la version hardware. En règle générale, le son m’a paru plus plat avec Gearbox qu’avec le POD X3 et la compression se faisait plus ressentir. La simulation matérielle chez Line 6 garde donc pour moi une longueur d’avance, mais on n’est jamais à l’abri d’une update (un des avantages du software!) qui permettra de rattraper ce léger retard. Au final, j’ai quand même pu tirer des sons très convaincants des deux interfaces et je suis sûr que chacun trouvera son bonheur dans l’offre pléthorique des amplis simulés.
Passons maintenant au côté hardware de l’UX8. J’ai fait une prise de guitare acoustique (Takamine EG-10) avec un micro statique large membrane (Audio-Technica 4040). Étant possesseur d’un Firepod de Presonus (interface audionumérique externe Firewire équipée elle aussi de huit entrées micro et située dans la même tranche de prix), j’ai pu comparer les deux bêtes. À l’écoute, l’UX8 s’en sort très bien : j’ai noté que peu de différences et aucune des deux n’est vraiment sortie du lot. Je suis très agréablement surpris par la qualité du préampli de l’UX8 qui, même s’il possède moins de headroom que celui de la Presonus, garde des qualités sonores indéniables. Méfiance tout de même avec des micros possédant un niveau de sortie faible : on arrive vite à bout de course du potentiomètre de gain du préampli micro. J’ai activé le coupe-bas sur l’UX8 pour m’assurer que celui fonctionnait bien, et en effet, il fonctionne bien ! Voici un petit graphique animé montrant une analyse spectrale des deux interfaces durant la prise de son de guitare acoustique :
Benchmark
Pour ce qui est des convertisseurs, j’ai fait quelques mesures avec le logiciel Right Mark Audio Analyser, et les résultats se sont avérés très convaincants. Voyez vous-même :
Testing device | Line 6 TonePort UX8 |
Sampling mode | 16-bit, 44 kHz |
Interface | DirectSound |
Testing chain | External loopback (line-out – line-in) |
RMAA Version | 6.0.6 |
20 Hz – 20 kHz filter | ON |
Normalize amplitude | ON |
Level change | 0.0 dB / –0.8 dB |
Mono mode | OFF |
Calibration singal, Hz | 1000 |
Polarity | inverted/inverted |
Summary
Frequency response (from 40 Hz to 15 kHz), dB |
+0.03, –0.12
|
Excellent
|
Noise level, dB (A) |
–96.4
|
Excellent
|
Dynamic range, dB (A) |
96.4
|
Excellent
|
THD, % |
0.015
|
Good
|
THD + Noise, dB (A) |
–74.2
|
Average
|
IMD + Noise, % |
0.018
|
Very good
|
Stereo crosstalk, dB |
–88.1
|
Excellent
|
IMD at 10 kHz, % |
0.048
|
Good
|
General performance |
|
Very good
|
Frequency response
From 20 Hz to 20 kHz, dB |
–0.45, +0.03
|
From 40 Hz to 15 kHz, dB |
–0.12, +0.03
|
Noise level
Left
|
Right
|
|
RMS power, dB |
–95.1
|
–93.4
|
RMS power (A-weighted), dB |
–96.2
|
–96.6
|
Peak level, dB FS |
–83.5
|
–81.6
|
DC offset, % |
+0.0
|
+0.0
|
Dynamic range
Left
|
Right
|
|
Dynamic range, dB |
+95.1
|
+93.5
|
Dynamic range (A-weighted), dB |
+96.2
|
+96.6
|
DC offset, % |
+0.00
|
+0.00
|
THD + Noise (at –3 dB FS)
Left
|
Right
|
|
THD, % |
+0.0145
|
+0.0150
|
THD + Noise, % |
+0.0149
|
+0.0157
|
THD + Noise (A-weighted), % |
+0.0191
|
+0.0198
|
Intermodulation distortion
Left
|
Right
|
|
IMD + Noise, % |
+0.0173
|
+0.0180
|
IMD + Noise (A-weighted), % |
+0.0137
|
+0.0136
|
Stereo crosstalk
Left
|
Right
|
|
Crosstalk at 100 Hz, dB |
–97
|
–96
|
Crosstalk at 1000 Hz, dB |
–90
|
–84
|
Crosstalk at 10000 Hz, dB |
–70
|
–66
|
IMD (swept tones)
Left
|
Right
|
|
IMD + Noise at 5000 Hz, |
0.0418
|
0.0398
|
IMD + Noise at 10000 Hz, |
0.0442
|
0.0419
|
IMD + Noise at 15000 Hz, |
0.0634
|
0.0595
|
Conclusion
L’UX8 a de quoi séduire les guitaristes désirant enregistrer tout le reste du groupe, y compris le batteur. Tant sur le plan logiciel, avec le très réussi Gearbox, que sur le plan matériel, avec une qualité sonore des préamplis et des convertisseurs plus que corrects pour le prix, Line 6 a mis le paquet et fera sûrement trembler la concurrence avec son prix agressif (549€ généralement constaté). Le petit bémol viendrait de l’aspect visuel de la bête qui ne plaira pas à tout le monde (en tout cas pas à moi) et ses potards fleurant le plastique cheap à dix mètres.Au final, l’UX8 est une solution très complète pour le guitariste / home studiste désirant rentrer à plein pied dans la production faite maison.
[+] Qualité sonore
[+] Efficacité de Gearbox
[+] 2 prises casque et 2 entrées instrument
[+] Prix
[-] Aspect un peu cheap
[-] Headroom des préamplis parfois un peu juste