Pour le féminisme
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Dr Pouet
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Sujet de la discussion Posté le 30/10/2019 à 22:30:16Pour le féminisme
Bon il paraît que ce serait mal d’être sérieux dans Bingo Point macho. Du coup on peut faire les débats et discussion ici.
Et du coup pour faire un message pas trop vide, je remets cette vidéo de Charlie à propos du sexisme dans les jeux vidéos :
Et du coup pour faire un message pas trop vide, je remets cette vidéo de Charlie à propos du sexisme dans les jeux vidéos :
Dr Pouet
52037
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21 Posté le 22/12/2019 à 12:58:53
Citation :
A Hollywood, le sexe sous haute surveillance durant les scènes de tournage
Ils sont coordinateurs d’intimité. Leur mission : planifier et encadrer les scènes de sexe pendant les tournages, en s’assurant que la dignité des actrices est respectée. Nombreux sont ceux qui, dans une industrie traumatisée par l’affaire Weinstein, ne veulent plus s’en passer.
Elles ne sont ni cascadeuses ni maquilleuses. Pas plus productrices, réalisatrices ou régisseuses plateaux. Mais depuis quelque temps, sur les tournages hollywoodiens, elles sont de plus en plus nombreuses. Les équipes techniques se sont habituées à leur présence à leurs côtés, à les voir vérifier que tout se passe comme prévu dans le script. « Lorsqu’un réalisateur dit : “Et là, il lui attrape les nichons”, je suis là pour lui rappeler que nous sommes au travail, explique l’une d’entre elles, Alicia Rodis. Quand j’entends : “Il la baise”, j’encourage l’équipe à reformuler et à préciser, pour que les acteurs sachent exactement où ils vont. »
Cette grande blonde originaire de l’Ohio a travaillé sur les séries The Deuce, Crashing, Watchmen et, plus récemment, sur le téléfilm Deadwood. Son métier ? Coordinatrice d’intimité. Une profession très en vogue à Hollywood, majoritairement féminine, dans une industrie traumatisée par l’affaire Weinstein. Le secteur s’est mis à relire l’histoire du cinéma, à l’exemple de la fameuse scène de sodomie subie par Maria Schneider sur le tournage du Dernier Tango à Paris, de Bernardo Bertolucci. Ce qui avait pu passer pour le coup de génie d’un réalisateur excentrique se révélait être du harcèlement sexuel, autorisé par la promesse d’une scène d’anthologie.
Le cinéma des années 1970 n’est pas le seul coupable. En novembre, l’une des stars de Games of Thrones, Emilia Clarke (alias Daenerys Targaryen), évoquait, dans le podcast « Armchair Expert » des acteurs Dax Shepard et Monica Padman, les pressions qu’elle avait subies sur le tournage de la première saison de la série. « Je me suis retrouvée complètement nue devant tous ces gens sans savoir ce que j’étais supposée faire », confiait-elle. Par la suite, l’actrice a appris à dire non, au prix de disputes avec la production qui lui glissait qu’elle risquait de « décevoires fans ». « Je leur ai dit d’aller se faire foutre », concluait-elle, bravache.
Malaise en coulisses
Même lorsque aucune menace n’est proférée, le tournage peut être un lieu de malaise. Gabrielle Carteris, comédienne connue pour son rôle d’Andrea Zuckerman dans la série Beverly Hills 90210, préside aujourd’hui le SAG-Aftra, le principal syndicat d’acteurs d’Hollywood, fort de 160 000 adhérents. Elle confirme avoir vécu ce genre de pression : « S’il est écrit “ils s’embrassent” dans le scénario et qu’en arrivant sur le plateau on s’aperçoit que la scène a été modifiée, il est très difficile de dire non devant toute l’équipe, explique-t-elle. Vous voulez être pro. En plus, on vous met la pression en vous disant : “Tout le monde le fait.” Or, être pro, c’est souvent faire le job sans poser de question. C’est donc formidable d’avoir quelqu’un sur place qui vous soutient et qui peut porter votre voix auprès du réalisateur si besoin. »
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2019/12/20/a-hollywood-le-sexe-desormais-sous-la-surveillance-attentive-des-coordinateurs-d-intimite_6023528_4500055.html
Dr Pouet
52037
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22 Posté le 22/12/2019 à 13:05:20
Citation :
Marie, victime de violences sexuelles devenue policière: «On va enfin me croire»
Victime d’attouchements lorsqu’elle était mineure, Marie a attendu d’intégrer la police pour dénoncer son agresseur. Elle témoigne de la difficulté à se livrer à la justice, des insuffisances de l’accompagnement des victimes, mais aussi du poids de ses orientations de carrière pour que son témoignage soit jugé crédible.
Spoiler - Cliquer ici pour lire la suite«Bonjour Melissa, maintenant je parle. » À l’autre bout du téléphone, Marie a pris l’une des décisions les plus importantes de sa vie : après des années de silence, elle va témoigner des attouchements dont elle a été victime entre 14 ans et 16 ans de la part de son entraîneur de motocross, Michel Mérel, une star du milieu. Le coach qu’elle partageait avec Melissa. Cette dernière a été violée à plusieurs reprises par Michel Mérel entre 15 et 16 ans, ainsi que l’a reconnu, en décembre 2018, la cour d’assises des Côtes-d’Armor au terme d’un long processus judiciaire (lire notre Boîte noire).
La raison du déclic de Marie en ce jour d’octobre 2014 ? La jeune femme vient d’entrer, à 19 ans, en école de police. Elle ne veut plus se taire. « On va enfin me croire », espère-t-elle. Il est facile de réduire à néant le témoignage d’une jeune femme. Beaucoup moins lorsqu’il s’agit d’une future fonctionnaire de police.
Jusque-là, Marie n’avait jamais imaginé dénoncer son agresseur. Et pour cause : ses parents n’ont pas cru le récit de leur fille, ou pas voulu y croire, et l’ont dissuadée d’en parler.
En janvier 2011, Marie s’ouvre à sa mère du comportement de son entraîneur lors de ses stages de motocross depuis deux ans. Le soir même, le sujet fait l’objet d’une violente dispute avec son père. On ne touche pas au coach Mérel, un sexagénaire qui pèse beaucoup dans le milieu.
« Je suis seule, j’ai 16 ans, je ne vais pas aller à la gendarmerie à pied. Pourquoi aller porter plainte ? Qui va me croire alors que mes parents eux-mêmes ne me croyaient pas ? » Marie ne bouge plus, son secret, et sentiment de culpabilité, tellement bien enfouis qu’elle n’en parle même pas à sa sœur aînée.
Même lorsque Melissa l’invite à se confier une première fois, elle reste coite. Nous sommes au printemps 2011. Soutenue par son compagnon, ses parents et sa sophrologue, Melissa vient de porter de plainte contre son entraîneur pour plusieurs viols et attouchements survenus en 2007 et 2008.
L’adolescente, grand espoir de sa discipline, s’attaque seule à une montagne : Michel Mérel, l’un des plus célèbres coachs de France, est fermement soutenu par la Fédération de motocyclisme (FFM) avec toute la bienveillance de fonctionnaires du ministère des sports (lire notre enquête ici).
Melissa contacte par message d’autres habituées du circuit de Michel Mérel en Loire-Atlantique – dont Marie – pour savoir si, elles aussi, n’auraient pas eu à subir ses agissements. Marie refuse de témoigner : « Ça sert à rien, c’est un coup d’épée dans l’eau, le mec est hyper important, on est des gamines, qui va nous croire ? » Les deux amies se brouillent. « Melissa m’en a beaucoup voulu d’avoir gardé le silence… », se remémore Marie.
« Je n’ai pas déposé plainte pour moi, j’étais d’ailleurs bien incapable de penser à moi à ce moment-là. Je souhaitais juste qu’on arrête d’envoyer des jeunes filles chez Mérel », se souvient Melissa, fragilisée par le suicide de sa mère juste après le début de l’affaire.
Marie emprunte, elle, un chemin différent : elle décide d’intégrer la police pour « rendre justice aux autres » : « Je me suis dit : “Je vais mettre mon expérience personnelle, certes malheureuse, au profit des autres. Je croirai les victimes, je saurai les comprendre, les soutenir dès le début et les accompagner lorsque je serai policière.” »
Son arrivée, en 2014, sur les bancs de l’école de police provoque un tout autre effet. Son histoire personnelle rejaillit dès les premières semaines d’apprentissage. « Un jour, on étudie les différentes peines pour les violences sexuelles. À ce moment, je mesure la gravité pénale de ce que j’ai vécu. Je découvre aussi qu’il existe des circonstances aggravantes relatives à la minorité de la victime ou à la qualité de l’auteur. Dans ma tête, les années de prison s’additionnent. » Un autre cours marque Marie : « On étudie les délais de prescription. Je fais immédiatement le calcul : dans mon cas, les faits ne sont pas prescrits. »
La future fonctionnaire saute le pas. Elle rappelle son amie (« Bonjour Melissa, maintenant je parle »), sollicite son avocat et se constitue partie civile pour des faits d’agressions.
Elles sont désormais deux à affronter la justice, ses codes, sa lenteur, mais aussi sa violence. « Vous n’avez pas idée de la difficulté à faire face à une telle procédure judiciaire », dit Melissa, qui a voulu jeter l’éponge à plusieurs reprises. « Mon avocate m’a répondu : “Tu ne peux plus faire machine arrière…” »
Les victimes recensent tous les obstacles qu’elles ont dû franchir : ces récits intimes qu’il faut répéter, préciser et préciser encore sur des pages de PV, ces audiences repoussées parce que le prévenu n’est tout simplement pas « disponible », les années d’attente avant la tenue d’un procès, les absences de proposition d’accompagnement, ou encore les aléas des expertises psychiatriques (relire ici l’expertise contestée de Sand Van Roy, plaignante de l’affaire Besson).
« J’ai eu peur de ne pas réussir à faire comprendre mes émotions sur ce que j’avais vécu. Mais, au final, le résultat de l’expertise était conforme à ce que j’avais ressenti », se souvient Marie.
Pour Melissa, c’est tout l’inverse : « La psychiatre ne me considérait pas, elle était très froide. J’étais jeune et en état dépressif. Du coup, je suis restée sur la défensive, sans parvenir à me livrer. » Une nouvelle expertise constatera plus tard la mise en place d’un « mécanisme de clivage » au moment des faits et dans les années qui ont suivi permettant à la victime de ne pas « s’effondrer psychiquement ».
Autre détail, qui n’en est pas vraiment un : pour sa confrontation avec Michel Mérel, moment crucial de l’enquête, Melissa « n’a pas été prévenue [qu’elle pouvait] venir avec un avocat ». Elle découvre sur place que Michel Mérel sera, lui, accompagné de son conseil. « J’ai donc eu un avocat commis d’office, avec qui je n’ai pas pu suffisamment me préparer », regrette-t-elle.
« On a voulu me faire passer pour une menteuse »
Depuis qu’elles ont définitivement été reconnues comme victimes, en décembre 2018, le combat judiciaire ne s’est pas arrêté. Les deux femmes bataillent pour être indemnisées, près d’un an après le jugement de la cour d’assises des Côtes-d’Armor. Melissa, éducatrice sportive, est dans l’attente des 50 000 euros de dédommagements qui lui ont été octroyés. « Je rembourse par contre tous les mois ma banque pour les 23 000 euros de frais d’avocats ».
Marie, la policière, a quant à elle engagé un huissier pour toucher ses 8 000 euros d’indemnités. « Du coup, 700 euros de frais ont été directement prélevés sur mes dommages et intérêts. C’est à moi de payer les frais d’huissiers pour une infraction dont j’ai été la victime. C’est le monde à l’envers ! », déplore-t-elle.
Mais le plus rude reste de ne pas avoir été reconnues comme des victimes potentielles pendant tant d’années. « Tout au long de l’instruction, on a l’impression d’être traitée comme l’auteur des faits », explique Marie. « On a voulu me faire passer pour une menteuse pendant des années », reprend Melissa.
Cette dernière se souvient de ces auditions où elle était poussée dans ses retranchements, par les gendarmes en charge de l’enquête, pour dénicher la moindre incohérence. « Cela va au-delà du respect de la personne. Chaque mot est décortiqué et il suffit d’inverser l’ordre des choses pour que tout mon propos soit décrédibilisé », dénonce la jeune femme de 26 ans.
Pendant l’enquête, elle se fait très précise sur certains détails : la crème Nivea utilisée pour les pénétrations, cette cicatrice sur un testicule de son agresseur… En revanche, traumatisme oblige, elle reste floue sur certaines dates. « En interrogatoire, je dis que je ne me souviens plus de l’heure exacte, que je suis désolée mais que j’ai chassé ces moments douloureux. On me répond : “Ah ben alors, ça veut dire que ça n’a pas existé” », témoigne-t-elle.
Pendant toute la procédure judiciaire, un élément clé joue néanmoins en faveur des deux victimes : la profession de Marie, qui de son propre aveu « crédibilise » irrémédiablement son témoignage.
En première instance, en 2015, devant la cour d’assises de Loire-Atlantique, la présidente demande à la jeune femme de se présenter. « Profession ? Fonctionnaire de police. » « Je sens que les jurés me regardent attentivement et se disent : elle est policière, elle ne mentirait pas sur des faits aussi graves », explique Marie.
Melissa, qui enchaîne, elle, les périodes de chômage et de petits boulots, est aussi marquée par ce moment : « Les jurés l’ont tous fixée. Elle était plus crédible. Même pour les avocats de la défense et la procureure. »
Avant le début du procès (sur quatre jours), le 15 septembre 2015, un fonctionnaire fait visiter à Melissa la salle d’audience avec son avocate : « Le greffier me demande : “Il y a une autre victime ? Que fait-elle ?” Je réponds : “Oui, elle est policière.”. Il me dit : “Ah ben, c’est bon.” »
Au cours des débats, Michel Mérel finit par reconnaître, après l’avoir contesté lors de l’instruction, qu’il pouvait se retrouver seul avec Marie nue et qu’il lui avait pratiqué des massages qui « ont pu toucher ses fesses et éventuellement ses seins ». Il continue en revanche à contester les viols sur Melissa.
L’entraîneur est condamné à quatre ans de prison avec sursis mais partiellement relaxé au bénéfice du doute sur les faits les plus graves. Son club de moto reste ouvert, il continue d’être promu par la fédération, reçoit des jeunes et renouvelle avec le ministère des sports le label lui permettant d’accueillir des élèves en « sport études » à partir de 14 ans.
« Je suis effondrée pour Melissa, se souvient Marie. On se dit qu’on n’a pas été comprises. C’est terrible de se dire qu’il faut repartir se battre, que la justice est toujours du mauvais côté. » Les plaignantes et le parquet font appel.
En décembre 2018, près de huit ans après le dépôt de la première plainte, Michel Mérel est finalement reconnu coupable en appel de viols et d’agressions à la majorité absolue des voix. Condamné à huit ans de prison, il est immédiatement incarcéré.
« En appel, nous avons été respectées », estime Marie, qui se souvient de ce procureur qui « en imposait » : « Il a mis Mérel face à ses contradictions, il maîtrisait le dossier, en connaissait tous les détails par cœur. »
Juste après la décision, les deux amies éclatent en sanglots : « Ça y est, c’est fini, enfin on a été écoutées. » « Chacun est définitivement reconnu dans son rôle : lui est coupable, nous nous sommes victimes. » Pour Marie, cette condamnation claire signe la fin d’un « sentiment de culpabilité » : « J’ai d’ailleurs attendu que ce chapitre se ferme pour m’occuper de moi. »
Melissa travaille aussi activement à sa reconstruction. « Mais si c’était à refaire, je ne sais pas si je le referais, dit-elle. Ça a été un enfer. La seule raison pour laquelle j’y retournerais, c’est pour empêcher qu’il fasse d’autres victimes », explique la jeune femme, qui dit « comprendre toutes celles qui renoncent à porter plainte » (voir ici le témoignage de l’actrice Adèle Haenel, qui n’a pas voulu saisir la justice). L’ancienne athlète fait aussi valoir le fait que sa procédure n’a eu aucune conséquence sur le fonctionnement de la Fédération de motocyclisme (voir notre Boîte noire).
Marie « comprend » aussi les victimes qui renoncent à saisir la justice : « Je ne les pousse pas à porter plainte parce que c’est une décision personnelle, et je sais à quel point il est compliqué d’agir, mon expérience en a été la preuve », explique la policière, qui regrette que ses collègues ne soient pas assez formés sur la thématique des violences sexuelles.
« On a très peu de cours là-dessus en école de police : quels mots il faut employer, comment bien rédiger la plainte, etc. Ce genre de plainte est très spécifique. S’il y a une lacune au début, que la victime n’est pas considérée, ça a des conséquences directes. Or, chaque situation est différente selon la personnalité de la victime, de l’auteur, les circonstances des faits… », ajoute-t-elle, en pointant aussi le manque de moyens humains. Malgré ces manques, elle fait valoir le même argument que Mélissa pour porter plainte : « Je dis aux femmes que c’est important pour empêcher que les agresseurs fassent d’autres victimes. » Comme un sacrifice pour les autres.
https://www.mediapart.fr/journal/france/181119/marie-victime-de-violences-sexuelles-devenue-policiere-va-enfin-me-croire?onglet=full
Si vous avez des informations à nous communiquer, vous pouvez nous contacter à l’adresse enquete@mediapart.fr. Si vous souhaitez adresser des documents en passant par une plateforme hautement sécurisée, vous pouvez vous connecter au site frenchleaks.fr.
Dr Pouet
52037
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23 Posté le 23/12/2019 à 12:06:44
Citation :
« Les temps ont changé, il est devenu indéfendable » : dans un contexte post-#metoo, le malaise Gabriel Matzneff
La parution du livre « Le Consentement » crée une secousse dans le monde littéraire. L’auteure Vanessa Springora y raconte sa relation traumatisante, à 14 ans, avec cet homme de trente-six ans son aîné. Cet écrivain aux pratiques pédophiles assumées a longtemps bénéficié d’une vraie complaisance qui se mue aujourd’hui en omerta.
Le livre est à la fois cru et subtil. « À quatorze ans, on n’est pas censée être attendue par un homme de cinquante ans à la sortie de son collège, on n’est pas supposée vivre à l’hôtel avec lui, ni se retrouver dans son lit, sa verge dans la bouche à l’heure du goûter. (…) De cette anormalité, j’ai fait en quelque sorte ma nouvelle identité. À l’inverse, quand personne ne s’étonne de ma situation, j’ai tout de même l’intuition que le monde autour de moi ne tourne pas rond. » Dans Le Consentement (Grasset), Vanessa Springora raconte tout, la rencontre avec G. en 1985, à l’âge de 13 ans, la fascination, l’amour qu’elle dit avoir éprouvé, l’emprise, la séparation, la chute, avec crises d’angoisse et épisode psychotique, puis les années pour s’en remettre. Il lui aura fallu trente ans pour livrer sa version de l’histoire. Jusque-là, en littérature, elle n’était que Vanessa, une des multiples conquêtes de « l’homme à la sortie du collège », un écrivain qui a eu son heure de gloire, mais que les moins de 50 ans ne connaissent guère : Gabriel Matzneff.
« Le Consentement » pousse à remonter le temps, jusqu’à ces années 1970 et 1980, quand le milieu littéraire et certains médias encensaient le dandy parisien, sans questionner les conséquences de ses attirances sexuelles.
Ce récit, qui sort le 2 janvier, est une première. Jamais les enfants et les adolescentes ayant eu une relation avec cet écrivain n’avaient pris la parole. Devenus adultes, aucun n’était sorti du silence. À 47 ans, Vanessa Springora, nouvelle directrice des éditions Julliard, se lance et couvre de ses mots ceux d’un homme de 83 ans, qui a toujours revendiqué son désir pour les mineurs – il ne dit pas pédophile mais « philopède », même si le verlan n’est pas son style. Récit littéraire, personnel et très fort, Le Consentement est aussi un ouvrage qui interroge la société. Il pousse à remonter le temps, jusqu’à ces années 1970 et 1980, quand le milieu littéraire et certains médias encensaient le dandy parisien, sans questionner les conséquences de ses attirances sexuelles.
Aujourd’hui, Gabriel Matzneff parle à ses amis de « retour du puritanisme » mais refuse de s’exprimer – « Je sors de chez le médecin, je n’ai pas la tête à ça, ce n’est pas du tout par désobligeance, croyez-le bien », répond-il, très courtois. Dans un contexte post-#metoo de remise en cause de la domination masculine et peu après le témoignage de l’actrice Adèle Haenel, il sait que l’époque ne lui est plus favorable.
Une autre époque
Crâne rasé, chemise grande ouverte sur torse bronzé, pantalon pattes d’éph, Gabriel Matzneff a 39 ans. Costume vert amande, chemise rose pâle et cravate bariolée, Bernard Pivot n’a pas un cheveu blanc. Nous sommes le 12 septembre 1975, sur Antenne 2. Présenté comme l’ami de Montherlant, l’écrivain est invité pour son essai Les Moins de seize ans (Julliard), sorti un an plus tôt. Déjà, il révèle ce qui fera tout son succès, ses airs d’aristocrate, son amour des interdits, son besoin de scandaliser. Déjà, ses propos sont limpides : « Je pense que les adolescents, les jeunes enfants, disons entre 10 et 16 ans, sont peut-être à l’âge où les pulsions d’affectivités, les pulsions sexuelles également, sont les plus fortes parce que les plus neuves. Et je crois que rien ne peut arriver de plus beau et de plus fécond à un adolescent ou une adolescente que de vivre un amour. Soit avec quelqu’un de son âge (…), mais aussi peut-être avec un adulte qui l’aide à se découvrir soi-même, à découvrir la beauté du monde créé, la beauté des choses. » Il enchaîne sur l’éveil, Bouddha, le Christ, les stoïciens.
Pédophile certes, mais pédophile mystique. « Est-ce que vous avez été choqué par le livre ? », interroge Pivot. Deux invités s’avouent gênés. Une professeure de lycée parle « d’attentat à la dignité de l’enfant » et un universitaire interroge l’écrivain, à propos « des petits garçons qu’il drague » : « Vous les avez peut-être traumatisés pour la vie ? » Matzneff ne se démonte pas : « Je vous dirais qu’il y a beaucoup d’autres façons de pourrir un enfant que de coucher avec. » Fin du débat. « Le livre n’a pas soulevé de vagues de protestation, se remémore Bernard Pivot. Ce sont les époques qui diffèrent. » Lui-même n’a aucun souvenir de cet essai. Il réinvitera l’écrivain à cinq reprises.
« Bernard Pivot invite systématiquement Matzneff, “Le Monde” ne dit jamais de mal de l’écrivain pendant les années 1970 et “Libération” en parle peu mais soutient le mouvement pro-pédophile. » Anne-Claude Ambroise-Rendu, universitaire
Une autre époque en effet. Une période difficile à juger avec les critères actuels. « Bernard Pivot invite systématiquement Matzneff, Le Monde ne dit jamais de mal de l’écrivain pendant les années 1970 et Libération en parle peu mais soutient le mouvement pro-pédophile, raconte l’universitaire Anne-Claude Ambroise-Rendu, auteur d’Histoire de la pédophilie : XIXe-XXe siècles (Fayard). Aux côtés de l’écrivain Tony Duvert et du philosophe René Schérer, il est la tête de proue de la défense de ce qu’il répugne à appeler la pédophilie, avec des arguments très structurés et ce qu’il faut de mauvaise foi. Le Monde et Libération y voient un discours de défense de la liberté, une cause plus que transgressive, révolutionnaire. Les seuls à critiquer Matzneff, au nom de la morale, sont des titres conservateurs, comme France Soir, ou d’extrême droite comme Minute. Le partage des médias est très politique. » À partir de 1977, l’écrivain tient une chronique hebdomadaire au Monde. Le journal y mettra fin en 1982 quand Gabriel Matzneff sera soupçonné de pédophilie, finalement à tort, dans l’affaire du Coral, un centre éducatif dans le Gard. Sa voix est reconnue, ses romans sont lus. Un de ses plus grands succès, Ivre du vin perdu, sort en 1981 et se vendra au fil des ans à 20 000 exemplaires.
(...)
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2019/12/23/les-temps-ont-change-il-est-devenu-indefendable-dans-un-contexte-post-metoo-le-malaise-gabriel-matzneff_6023870_4500055.html
Assez dingue quand même :
https://www.dailymotion.com/video/x3ykex7
Citation :
Le cocktail qui suit est tendu, les olives passent mal. « C’était affreux, se souvient depuis Montréal, Denise Bombardier, 78 ans aujourd’hui. Les gens faisaient cercle autour de Matzneff, je ne suis restée que cinq minutes. » Bernard Pivot est alors le premier étonné : « Parfois j’organisais des conflits, mais là ce n’était pas le cas. Gabriel Matzneff avait le prestige de l’écrivain qui a une belle écriture. Ce qu’il racontait, on ne le trouvait pas dans d’autres livres, c’était original, osé, aventureux. À ceux qui pensaient qu’il bluffait, ses proches confirmaient que tout était vrai. Mais cela n’indignait pas comme aujourd’hui. » Sauf à venir d’un autre continent.
Après l’émission, les critiques ne visent pas l’homme mis en cause… Mais la femme qui a cassé l’ambiance. « Connasse ! », s’énerve Philippe Sollers, l’éditeur de Matzneff, le 19 mars, sur France 3. Dans Le Monde du 30 mars, Josyane Savigneau encense l’écrivain, qui « ne viole personne », et tacle la Canadienne : « Denise Bombardier a eu la sottise d’appeler quasiment à l’arrestation de Matzneff, au nom des “jeunes filles flêtries” par lui… Découvrir en 1990 que des jeunes filles de 15 et 16 ans font l’amour à des hommes de trente ans de plus qu’elles, la belle affaire ! [ni l’ex-responsable du Monde des livres, ni Philippe Sollers n’ont souhaité nous parler] ». Dans Le Nouvel Observateur, Guy Sitbon est un des rares à écrire un article au vitriol contre l’écrivain « qui ne recule devant aucune goujaterie ».
Impunité des artistes
Des années plus tard, le 18 mars 1999, à l’occasion de la critique d’un livre, le chroniqueur Pierre Marcelle pourfendra encore, dans Libération, les « glapissements torquemadesques » de la journaliste (en référence au grand inquisiteur espagnol Tomás de Torquemada) et écrira que « déjà Christine Boutin pointait sous Bombardier ». « Je me suis fait traiter de mégère et de mal-baisée, raconte celle-ci. Matzneff était protégé par une partie du milieu littéraire et des médias, complètement complaisants à son égard. Ils ont justifié l’injustifiable au nom de la littérature. » Aujourd’hui, Vanessa Springora s’étonne aussi de l’impunité des artistes. « Tout autre individu, qui (…) se vanterait de sa collection de maîtresses de 14 ans, aurait affaire à la justice », écrit-elle dans son récit.
Mais l’émission reste dans les mémoires et sonne la progressive mise au ban de l’écrivain. Tout le monde réalise que la pédophilie transforme l’enfant en simple objet de jouissance. Les années 1990 sont aussi celles de l’affaire Dutroux. Le pédophile n’a plus rien de libertaire, il devient un monstre. Pour son livre L’Enfant interdit, comment la pédophilie est devenue scandaleuse (Armand Colin, 2013), le sociologue Pierre Verdrager a étudié de près le parcours de l’écrivain. Il a une théorie cocasse : « Le journal de Matzneff est à la pédophilie ce que les carottes glacières sont à la climatologie. » Plus précisément, « les changements dans les mœurs se réfléchissent dans sa mauvaise humeur ». Ces années-là, l’écrivain au crâne rasé est bougon. Il est de moins en moins invité par les médias. Et quand il l’est, constate Verdrager, c’est moins pour la qualité de ses livres que pour le caractère sulfureux de sa vie.
[ Dernière édition du message le 23/12/2019 à 12:36:25 ]
Silverfish Imperatrix
6599
Je poste, donc je suis
Membre depuis 6 ans
24 Posté le 23/12/2019 à 16:32:57
Flag.
Merci Pouet pour ce thread utile.
Je me rends compte depuis quelques années du nombre démesuré de cas de femmes victimes de violences sexuelles. Mon ex-femme (par son père). mes nièces et ma cousine (par 1 oncle "respectable") 1 ex petite amie (attouchements par son frère qui avait violé leur soeur), 1 amie de ma fille (par un ami de sa famille), la collègue de ma femme (son père), et je crois que j'en oublie. Je précise que dans mes exemples, parmi ces hommes, il y a un ouvrier, un agriculteur et un CSP++.
En vertu de ça, et veux pas la ramener ici, je sais que certaines de mes prises de positions en ulcèrent plus d'un, mais si vous avez un seul truc à écouter de moi, croyez moi sur parole, c'est vraiment de protéger au mieux vos enfants et de ne pas penser que ça n'arrive qu'aux autres: jamais, jamais les laisser avec quelqu'un que vous ne connaissez pas, sur qui vous avez le moindre doute, qui a pu avoir un comportement déplacé ne serait-ce qu'une fois, même si c'est la proche famille, pas de sieste avec grand-père ou ce genre de conneries.
Merci Pouet pour ce thread utile.
Je me rends compte depuis quelques années du nombre démesuré de cas de femmes victimes de violences sexuelles. Mon ex-femme (par son père). mes nièces et ma cousine (par 1 oncle "respectable") 1 ex petite amie (attouchements par son frère qui avait violé leur soeur), 1 amie de ma fille (par un ami de sa famille), la collègue de ma femme (son père), et je crois que j'en oublie. Je précise que dans mes exemples, parmi ces hommes, il y a un ouvrier, un agriculteur et un CSP++.
En vertu de ça, et veux pas la ramener ici, je sais que certaines de mes prises de positions en ulcèrent plus d'un, mais si vous avez un seul truc à écouter de moi, croyez moi sur parole, c'est vraiment de protéger au mieux vos enfants et de ne pas penser que ça n'arrive qu'aux autres: jamais, jamais les laisser avec quelqu'un que vous ne connaissez pas, sur qui vous avez le moindre doute, qui a pu avoir un comportement déplacé ne serait-ce qu'une fois, même si c'est la proche famille, pas de sieste avec grand-père ou ce genre de conneries.
Mon thread sur le jazz, principalement bop et post bop:
[ Dernière édition du message le 23/12/2019 à 16:34:36 ]
Dr Pouet
52037
Membre d’honneur
Membre depuis 20 ans
25 Posté le 23/12/2019 à 17:02:08
Le but de ce thread est d’éviter de trop plomber « Bingo point macho ». Mais lire ces témoignages remet un peu les idées en place et les pendules à l’heure...
Dr Pouet
52037
Membre d’honneur
Membre depuis 20 ans
26 Posté le 30/12/2019 à 12:04:11
Rions un peu avec la quéquette à Gaby :
Dr Pouet
52037
Membre d’honneur
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27 Posté le 31/12/2019 à 20:25:58
Bernard Pivot exprime ses regrets sur son accueil de Gabriel Matzneff à Apostrophes :
https://www.lemonde.fr/culture/article/2019/12/31/affaire-gabriel-matzneff-les-regrets-de-bernard-pivot_6024444_3246.html
Et Christine Angot répond au message dans lequel Matzneff s’est plaint de « l’ouvrage hostile à son encontre » :
https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/12/31/christine-angot-gabriel-matzneff-vous-et-les-autres_6024437_3232.html
C’est vrai que ça aurait été dommage d’être privé d’une si belle poésie :
Citation :
L’ex-animateur de télévision Bernard Pivot, accusé de complaisance avec l’écrivain Gabirel Matzneff, qui affichait ouvertement son attirance pour les adolescents, a fait état lundi de ses « regrets » estimant n’avoir pas eu à l’époque « les mots qu’il fallait ».
« Animateur d’émissions littéraires à la télévision, il m’aurait fallu beaucoup de lucidité et une grande force de caractère pour me soustraire aux dérives d’une liberté dont s’accommodaient tout autant mes confrères de la presse écrite et des radios », explique Bernard Pivot dans un texte adressé au JDD, où il tient une chronique.
« Ces qualités, je ne les ai pas eues. Je le regrette évidemment, ayant de surcroît le sentiment de n’avoir pas eu les mots qu’il fallait », ajoute l’ancien animateur d’« Apostrophes ».
https://www.lemonde.fr/culture/article/2019/12/31/affaire-gabriel-matzneff-les-regrets-de-bernard-pivot_6024444_3246.html
Et Christine Angot répond au message dans lequel Matzneff s’est plaint de « l’ouvrage hostile à son encontre » :
Citation :
En réaction au livre de Vanessa Springora, « Le Consentement » [Grasset, 216 pages, 18 euros], vous écrivez dans L’Obs : « Apprendre que le livre que Vanessa a décidé d’écrire de mon vivant n’est nullement le récit de nos lumineuses et brûlantes amours, mais un ouvrage hostile, méchant, dénigrant, destiné à me nuire, un triste mixte de réquisitoire de procureur et de diagnostic concocté dans le cabinet d’un psychanalyste, provoque en moi une tristesse qui me suffoque. »
« Apprendre que le livre que Vanessa… » Vous l’appelez Vanessa ? Vous pensez pouvoir vous autoriser à l’appeler par son prénom, alors qu’elle vient de publier ce livre ? Vous prétendez encore à cette intimité ? Vous pensez avoir ce genre de droits ? Elle est toujours, pour vous, la petite fille que vous avez rencontrée dans un dîner où elle accompagnait sa mère, attachée de presse dans l’édition ? A l’époque, vous étiez important dans ce milieu. Vous comptiez. Vous vendiez des livres. Vous aviez des fans. J’en ai fait partie quelque temps. J’avais une vingtaine d’années. Je vous lisais. Je n’avais pas encore été dans le cabinet d’un psychanalyste. Je commençais à avoir des insomnies, des difficultés dans ma sexualité, mais je n’étais pas encore prête à me dire, à admettre, que mon père s’était autorisé à commettre un inceste sur moi parce qu’il ne m’avait jamais aimée, qu’il n’avait aimé que lui-même, son bon plaisir, sa propre autorité, au mépris total de mon avenir, de ma vie amoureuse future, de ma vie sexuelle, notamment.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/12/31/christine-angot-gabriel-matzneff-vous-et-les-autres_6024437_3232.html
C’est vrai que ça aurait été dommage d’être privé d’une si belle poésie :
[ Dernière édition du message le 08/01/2020 à 21:50:07 ]
Dr Pouet
52037
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28 Posté le 14/01/2020 à 22:18:29
Deux vidéos sur des mouvements et des discours :
Dr Pouet
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29 Posté le 04/02/2020 à 14:41:00
Citation :
Le « si long silence » de Sarah Abitbol
L’ancienne championne de patinage artistique publie un livre témoignage dans lequel elle accuse l’un de ses anciens entraîneurs de l’avoir violée à 15 ans.
Par Maxime Goldbaum
« Monsieur O., vous étiez mon entraîneur. Je venais d’avoir 15 ans. Et vous m’avez violée. » Briser l’omerta et sortir d’un « silence assassin » qui aura duré trente ans. L’ancienne championne de patinage artistique Sarah Abitbol révèle dans un témoignage poignant et éprouvant les sévices sexuels dont elle aurait été victime de la part d’un entraîneur qui, en dépit des soupçons qui pesaient sur lui et d’une enquête menée au tournant des années 2000, a pu continuer à diriger de jeunes patineuses. En toute impunité.
Monsieur O., c’est Gilles Beyer, champion de France en 1978, entraîneur de renom, tout-puissant dans le milieu du patinage français. Un coach qu’elle ne peut nommer en raison de la prescription des faits. Dans son témoignage, recueilli par la journaliste de L’Obs Emmanuelle Anizon (Un si long silence, Plon, 198 pages, 17 euros), Sarah Abitbol décrit les viols qu’elle aurait subis entre 1990 et 1992, son long processus de reconstruction et le profond mal-être qui l’habite encore aujourd’hui.
« Pourquoi est-ce moi qui souffre, à 44 ans, alors que vous, vous vivez tranquille dans votre patinoire ? »
Spoiler - Cliquer ici pour lire la suiteLes antidépresseurs et les anxiolytiques sont devenus ses « fidèles compagnons de vie. » « Au fond de moi, je ne vis pas, je ne respire pas. Et cela est injuste. Pourquoi est-ce moi qui souffre, à 44 ans, alors que vous, vous vivez tranquille dans votre patinoire ? », s’indigne Sarah Abitbol, désormais mère d’une petite fille de 8 ans et qui partage sa vie entre la France et les Etats-Unis. L’ancienne athlète couche les mots avec douleur.
« Honteux secret »
Elle dit se rappeler l’odeur d’alcool qui se dégageait de celui qui s’est introduit pour la première fois dans sa chambre lors d’un stage à La Roche-sur-Yon, les « caresses » sur son visage quand il « avait fini ses affaires » et l’emprise qu’il exerçait sur une jeune fille incapable de se défendre et de livrer son « honteux secret ».
Brisée physiquement et psychologiquement, le grand espoir du patinage français n’est plus que l’ombre d’elle-même sur la glace. Elle n’a que 17 ans. Elle choisit d’abandonner ses rêves de gloire d’une carrière en solo pour se lancer en couple et, ainsi, changer d’entraîneur. Elle rencontre alors Stéphane Bernadis, qui deviendra son compagnon sur la patinoire puis dans la vie. Sarah Abitbol n’est plus seule. Elle reprend goût à son sport et se met à gagner. Dix fois championne de France, multimédaillée européenne et troisième aux championnats du monde en couple en 2000.
L’ombre de Gilles Beyer « se dissipe jusqu’à disparaître totalement de [sa] vie ». La jeune femme refoule l’horreur dans le tréfonds de son âme. Elle souffre d’amnésie traumatique. Les souvenirs ne referont surface que quelques années plus tard, après son forfait pour les Jeux olympiques de 2002. Son compagnon d’alors l’incite à livrer son douloureux secret à ses proches. La parole se libère.
Elle sollicite le ministre des sports de l’époque, Jean-François Lamour, qui lui confirme qu’il a un dossier sur Beyer mais qu’il ne peut rien faire tant qu’elle ne porte pas plainte. Il lui aurait proposé son aide pour « décrocher des galas » mais lui aurait signifié que, « pour le reste, il vaut mieux en rester là ».
« Des dirigeants ont fermé les yeux »
En mars 2001, Gilles Beyer est démis de ses fonctions de conseiller technique sportif. Il reste néanmoins responsable des tournées de gala de l’équipe de France et retrouve un emploi comme entraîneur au sein du club parisien des Français volants. Il est décrit comme un homme influent au sein de sa fédération, lui qui était encore membre du bureau exécutif de la Fédération française des sports de glace de 2014 à 2018.
Trois autres patineuses, Hélène Godard, Anne Bruneteaux et Béatrice Dumur, ont finalement décidé de parler
« Beaucoup de gens ont gardé le silence. Le rompre, c’est casser des années de petits arrangements, c’est déséquilibrer tout un écosystème, écrit l’ancienne patineuse. Des dirigeants ont fermé les yeux. » Sarah Abitbol approche plusieurs patineuses qui ont été sous la coupe de Gilles Beyer, mais celles-ci ne souhaitent pas témoigner. « Je suis déçue, j’abandonne l’idée d’un front commun mais je comprends. » Trois autres patineuses, Hélène Godard, Anne Bruneteaux et Béatrice Dumur, décident finalement de parler : leurs témoignages ont été publiés dans L’Equipe et dans L’Obs mercredi 29 janvier, la veille de la publication du livre de Sarah Abitbol.
Hélène Godard, 54 ans, accuse Beyer d’avoir eu des rapports sexuels avec elle alors qu’elle avait 13 et 14 ans, et un autre entraîneur, Jean-Roland Racle, avant ses 18 ans. Anne Bruneteaux et Béatrice Dumur accusent, elles, un troisième coach, Michel Lotz, d’avoir abusé d’elles dans les années 1980 alors qu’elles avaient 13 ans. Dans un premier temps, contactés par L’Equipe, les trois entraîneurs ont soit nié les faits, soit refusé de répondre sur le sujet. Vendredi 31 janvier, Gilles Beyer a finalement reconnu avoir eu des « relations intimes (…) en tout état de cause inappropriées » et présenté ses « excuses » à Sarah Abitbol, tout en n’excluant pas de « s’exprimer sur sa version des faits ». Il a également été démis de ses fonctions d’entraîneur du club des Français volants.
Ce récit, pour autant, ne se veut pas une « vengeance ». Il n’est pas non plus un réquisitoire, même si, selon elle, « le viol sur mineur devrait être imprescriptible, comme l’est le crime contre l’humanité ». Depuis deux ans, elle assiste « avec bonheur à cette libération de la parole, partout dans le monde ». Des témoignages qui l’ont aidée à sortir de ce « si long silence ». Pour relever la tête et guérir, « passer du statut de victime honteuse à celui d’exemple, pour aider les autres ». Dans l’espoir que, désormais, les agresseurs « devront fuir, et non les victimes ».
https://www.lemonde.fr/sport/article/2020/02/01/le-si-long-silence-de-sarah-abitbol_6028072_3242.html
[ Dernière édition du message le 04/02/2020 à 14:42:33 ]
Silverfish Imperatrix
6599
Je poste, donc je suis
Membre depuis 6 ans
30 Posté le 04/02/2020 à 14:55:58
Ce qui est effrayant, c'est que la sonnette d'alarme n'est pas été déclenchée depuis longtemps, puisque comme avec les prêtres, on a une situation où des hommes ont autorité sur des enfants, avec en plus promiscuité. Toutes les conditions étaient remplies pour que ça arrive.
Mon thread sur le jazz, principalement bop et post bop:
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