Sur scène comme en studio, le musicien a souvent besoin d'un processeur d’effets simple et efficace. Le M300 de TC Electronic se veut être la réponse à cette demande : c'est un multi-effet complet, sans menu ni fioriture inutiles. Le tout pour un prix particulièrement serré.
Dans un rack 1 unité, le M300 est un double effet compact et léger. L’arrière de la machine contient l’essentiel d’une connectique ouverte : au niveau audio, des entrées sorties analogiques sont bien sûr présentes, qui commutent automatiquement en symétrique / asymétrique en fonction du type de connecteurs branchés. Les convertisseurs du M300 affichent une résolution de 24 bits en 44,1 KHz (à cette fréquence, les conversions analogique numérique et numérique analogique ainsi que le traitement audio engendrent une latence d’environ 1,5 ms).
Les entrées analogiques sont accompagnées d’entrées/sorties numériques coaxiales. Ceci s’avère pratique si l’on veut utiliser le M300 dans une chaîne purement numérique au travers d’une carte son possédant des entrées / sorties S/PDIF, par exemple. En cas d’utilisation purement numérique, la fréquence de travail peut monter à 48 KHz.
Point intéressant, une entrée/sortie Midi permet de contrôler les paramètres du M300 via le séquenceur ou bien via des contrôleurs Midi. Ce point m’a plu, car la possibilité de changer les paramètres des effets en temps réel donne de nouveaux horizons en matière de créativité (nous verrons ceci plus loin). De plus, l’implémentation Midi permet une sauvegarde simple des presets faits maison via un Dump Midi (tous les potentiomètre à l’ « allure analogique » contrôlent en fait des données numériques).
Une entrée pour pédale permet de bypasser d’un « coup de pied » les effets du M300, ou, autre application agréable, de définir le tempo du délai en battant le rythme au pied.
L’alimentation du M300 est intégrée au rack, une bonne chose pour des raisons de qualité sonore (moins de risque de buzz notamment) et de durée de vie : les adaptateurs n’aiment pas être emmenés régulièrement sur scène.
Toujours à l’arrière de la machine, un switch permet de choisir une configuration des effets en série ou en parallèle. Il aurait été plus judicieux que TC Electronic place ce bouton à l’avant de la machine : en l’état actuel des choses, comment changer la configuration aisément si l’on visse le module en rack ? Dommage. Le fonctionnement des configurations en série et parallèle est détaillé dans l’encart du chapitre « Utilisation ».
Qualité sonore
Le M300 cumule deux effets (qu’il est possible de mettre en série ou en parallèle). Le premier type d’effet est à choisir dans une liste variée, tandis que le deuxième effet est nécessairement une réverbération. En cas d’utilisation en parallèle, chaque entrée se transforme en canal monophonique et indépendant. L’entrée gauche devient alors la source du multi-effet et l’entrée droite celle de la réverbération. On pourra donc utiliser ce mode pour appliquer des effets différents, via une table de mixage. La sortie du M300 mixe alors les deux effets dans la sortie audio stéréophonique.
Parlons à présent des effets disponibles sur le M300 et voyons de quoi le module est capable.
Partie Multieffet
Tous les effets de la partie multieffet sont accessibles grâce à un gros potentiomètre rotatif. Leurs paramètres principaux, limités volontairement à deux, peuvent être modifiés grâce à deux petits potentiomètres. Pourquoi « limités volontairement » ? Parce que le M300 se veut avant tout un multieffet prêt à l’emploi, simple et efficace. Son édition est donc forcément un peu limitée pour atteindre un compromis adapté au néophyte ou à l’amateur. Quelque soit son niveau, l’utilisateur profitera de cette simplicité d’utilisation.
Parmi les types d’effets, on trouve naturellement des délais (un bon paquet, même) de toutes sortes :
- Dynamic Delay : il s’agit certainement de l’un des effets les plus intéressants du module. Celui-ci ne fait pas office de délai classique puisque son gain augmente lorsque la source cesse de jouer (il redescend dès que le niveau sonore de la source est dépasse un certain seuil). L’effet est assez intéressant ! Pour la petite histoire, cet effet avait été créé pour la première fois, il y a fort longtemps, dans le module TC 2290. Cet effet reste d’actualité, à en écouter la démo… A savoir que Benny Benassi semble utiliser dans Satisfaction une technique équivalente : compresser l’effet en prenant comme modulant la source audio, à la différence qu’il utilise une réverbération.
- Tape Delay : un délai plus doux que les délais numériques classiques, censé émuler les échos à bande. Techniquement, il s’agit d’un simple passe bas couplé au délai, supprimant les harmoniques « agressives ».
- Studio Delay : un classique délai numérique. Ici, le filtre passe bas est toujours présent mais possède une fréquence de coupure suffisamment haute pour que le son du délai reste brillant.
- Delay : idem sans filtre.
- Ping Pong Delay : encore un grand classique qui a la particularité d’alterner la panoramique du délai à droite et à gauche.
- Slapback Delay : un délai très court et avec peu de feedback, permettant de grossir le son tout en restant discret, là où un délai classique a plus pour vocation de faire partie de la mélodie en ajoutant des notes à la mélodie d’origine.
Quelque soit le délai choisi, on peut en modifier la durée et le feedback. La durée du délai peut être changée via le potentiomètre prévu à cet effet, mais surtout via le bouton « tap tempo ». Le principe de celui-ci est d’appuyer sur le bouton en rythme. Ensuite, le potentiomètre permettra de choisir un facteur multiplicatif par rapport au tempo donné par le bouton Tap Tempo. Prenons un exemple. Vous enfoncez le bouton au rythme de 120 [def]BPM[/def] à la noire. Le délai correspondant est alors de 500 ms. Ensuite, si vous tournez le potentiomètre de délai au minimum, sa durée sera de 250 ms. Si vous tournez ce potentiomètre complètement à droite, vous aurez un délai de 2000 ms.
Pour finir sur les délais, je ne peux omettre de dire à quel point je me suis amusé à faire tourner une boucle à l’infini sur le M300. Le principe est le suivant : on met un délai assez long, le feedback à 100%, puis on parle ou bien on fait des bruits dans le microphone, qui s’ajoutent à chaque cycle de la boucle au son d’origine. L’ambiance louche et psychédélique qui en résulte est impressionnante ! Après cela, il suffit de jouer avec les paramètres de la réverbération pour ramollir la boucle de temps à autre, ou encore de passer brièvement le microphone devant l’enceinte pour émettre le début d’un [def]larsen[/def]. Les possibilités de ce délai infini sont multiples !
Les autres effets disponibles sur le M300 sont également de grands classiques :
- Vintage Phaser : pour rappel, le principe du phaser est d’utiliser un [def]filtre en peigne[/def] sur le signal, puis d’ajouter ce signal filtré au signal d’origine pour générer un effet de phase. Pour obtenir un effet de phase très marqué, le Vintage Phaser regroupe de 4 filtres [def]passe-tout[/def].
- Phaser : celui-ci fonctionne grâce à 12 filtres [def]passe-tout[/def] au lieu de 4 pour le Vintage Phaser. J’ai trouvé ce Phaser plus agressif et moins naturel que le Phaser Vintage. J’avoue ne pas avoir trop accroché sur cet effet, qui sonne davantage comme un résonateur et fait un peu « cheap ».
- Trémolo : il existe en deux versions, « hard » et « soft ». La différence entre les deux est simplement le type de modulateur, une onde triangulaire dans un cas, donnant un son sautillant avec volupté, et une onde carrée de l’autre côté, marquant beaucoup plus la modulation sur le signal. Cet effet peut paraître un peu désuet, mais en le combinant avec une réverbération par exemple, il peut devenir intéressant, même en musique électronique (voir notre démo en MP3) La vitesse et l’amplitude du trémolo peuvent être modifiés via les deux potentiomètres de paramétrage.
- Chorus et Flangers : des effets classiques que nous ne détaillerons pas ici. Deux Flangers sont disponibles. Peu de choses diffèrent dans les deux versions, à savoir le taux de feedback et la fréquence de coupure du filtre passe-bas, plus élevée dans le Flanger II. La vitesse du Chorus et la profondeur du feedback peuvent être changés via les deux potentiomètres de paramétrage.
Là où TC Electronic se démarque de pas mal de multieffets, c’est en intégrant un compresseur de dynamique et un [def]déesseur[/def] à son module. Dommage que la volonté de TC et les questions coût ne donnent accès qu’à deux paramètres, le « drive » (plus il est élevé, et plus le seuil du compresseur est bas) et le ratio (taux de compression). Ni l’attaque ni le relâchement ne sont réglables, ce qui limite un peu les possibilités d’utilisation du compresseur. Le [def]déesseur[/def], couplage d’un compresseur et d’un filtre passe-bande, propose quant à lui de maîtriser la fréquence du filtre et le taux de réduction du gain. En pratique leur utilisation n’est pas aussi polyvalente qu’on pourrait le désirer, et on préfèrera un compresseur de dynamique dédié pour ce type d’utilisation.
Partie réverbération
TC Electronic n’en est pas à sa première réverbération… A tel point que les ingénieurs de la firme danoise n’ont pas hésité à appeler l’une de leurs réverbérations « Classic Hall TC », simulant une salle assez grande de type « Hall ». Ici, point de surprise, nous avons affaire à une réverbération de qualité très honorable issue des grandes sœurs du M300. Le son est assez précis et détaillé, même s’il ne rivalise pas, en toute logique, avec le très haut de gamme. La « Concert Hall » donne un son volontairement plus diffus et moelleux que la précédente. Trois réverbes de type [def]Room[/def] complètent l’ensemble. Enfin, deux réverbes « drum » (drum box et drum room) simulent la pièce dédiée à l’enregistrement de la batterie dans les studios (taille de pièce moyenne, grande hauteur sous plafond). Les réflexions primaires sont par conséquent accentuées dans ce type de réverbe.
Utilisation
Un potentiomètre permet de choisir le dosage son direct / effets, de telle sorte que l’on peut utiliser le M300 en direct (en branchant la source à l’entrée du module) ou via les entrées/sorties auxiliaires d’une table de mixage. Dans ce dernier cas, il faudra tourner le potentiomètre de mix au maximum (sur « wet ») pour éviter les éventuels effets de phase.
Les deux effets utilisés simultanément (effet + réverbération) peuvent être dosés grâce à un second potentiomètre. Pour éviter d’avoir une saturation sur le signal, un vu-mètre minimaliste sous forme d’une simple LED tricolore indique si le signal est présent et s’il atteint 0 dB. Il faudra donc veiller avant tout enregistrement à ce que le signal maximal de la source ne sature pas l’entrée du M300.
Détail étrange et un peu gênant, le potentiomètre de mix réagit avec une certaine latence. Moi qui voulait m’amuser à faire des variations rapides d’intensité de l’effet lors d’un mix à la Infected Mushroom (pour les connaisseurs de ce style de musique), j’ai trouvé ceci un peu dommage. Dans les autres types d’utilisation, en revanche, ce point de devrait pas être gênant.
Ergonomie
Fonctionnement série, double départ et Bypass
Le M300 peut être utilisé de deux manières : en série ou en parallèle.
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L’un des points forts du M300 est certainement son ergonomie de type « instrument analogique ». Entendez par là que tout ou presque se fait grâce à des potentiomètres, sans nécessité de naviguer dans un menu. Cela a plusieurs conséquences appréciables, notamment en live : les changements d’un preset ou d’un paramètre se font rapidement et avec peu de risque d’erreur, là où un menu aurait rendu impossible ce type d’utilisation. Seul l’afficheur LCD est numérique et indique le numéro du preset. Minimaliste et pragmatique.
Lors d’une utilisation en numérique, une « protection » permet de passer automatiquement sur les entrées analogiques en cas d’absence de signal numérique, ce jusqu’à ce qu’un signal numérique soit à nouveau présent. Pratique.
Pour finir sur l’ergonomie, notons que le manuel en français est assez détaillé pour rentre l’utilisation simple au néophyte. Certains configurations types sont schématisées (branchement d’une guitare, d’un clavier, d’une carte audionumérique, en série et en parallèle) et tous les effets sont détaillés.
Contrôle en Midi
Pour des raisons de timing, je complèterai cette partie la semaine prochaine.
Conclusion
TC Electronic est arrivé à son but : proposer un outil simple et efficace pour le musicien peu fortuné et désirant un produit prêt à l’emploi. Le bidouilleur en herbe sera en revanche un peu frustré à cause de la limitation de l’édition des paramètres. Cependant, celui-ci (j’en fais partie !) devrait être séduit par les possibilités créatives de certains des effets comme le Dynamic Delay ou encore l’utilisation évolutive des paramètres lors d’un jeu en boucle d’un son (via le délai). Bref, une petite bécane qui devrait faire le bonheur de nombreux musiciens, d’autant plus que son prix a subi une baisse récente considérable (350 € lors de sa sortie, 200 € aujourd’hui…).