Après nous avoir régalés avec de belles boîtes à rythmes et une batterie au gros caractère, UVI s’intéresse aux percussions avec Percussion Factory. Allons voir de quel bois se chauffent ses peaux !
Les batteurs comme les arrangeurs le savent : la percussion, c’est ce petit détail qui peut faire toute la différence lorsqu’il s’agit d’emballer un morceau tout en lui donnant une couleur, une identité… On n’est donc pas mécontent de voir UVI s’y intéresser même s’il y a déjà pas mal de monde sur ce marché. Reconnaissons-le toutefois : aucune solution ne fait vraiment autorité comme Toontrack peut le faire dans le monde de la batterie et vu que le papa d’EZdrummer semble ne pas s’intéresser plus que ça à ce marché, on se retrouve à piocher ça et là des banques dédiées à telles ou telles percus sans avoir de solution vraiment globale. Bref, il y a un coup à jouer et c’est à UVI de se frotter à l’exercice avec cette Percussion Factory rassemblant 1,46 Go de sons compressés en 678,6 Mo pour un total de plus de 1000 sons agencés en 500 presets…
Précisons-le d’emblée : les percussions chromatiques ne sont pas concernée. Ici, on parle de tambours et tambourins divers et variés, de bongos, djembés et autres congas, mais encore de triangles, de claves, etc. La bonne nouvelle, c’est qu’aucun continent n’a été oublié : Afrique et Amérique du Sud évidemment, mais aussi Asie, Europe, Amérique du Nord, Océanie. Un beau petit tour du monde de la frappe en somme…
Reste à parler de ce qui va vraiment faire la différence, à savoir l’interface permettant de programmer tout cela et les fonctionnalités avancées de la bête.
Percquisition
La fenêtre qui nous accueille fait montre d’une grande clarté : dans le bandeau supérieur, le gestionnaire de présets, le volume de sortie, l’accès aux trois panneaux (Main qui nous accueille donc, Edit et FX dont les libellés se passent de commentaires) et trois icônes : une pour annuler la dernière manip, une pour générer un nouveau préset, et une pour verrouiller les sons lors de la génération d’un nouveau preset (seules les séquences changent alors).
En dessous, 8 pads se présentent dans des cercles de couleurs, dont le pourtour est parsemé de plus petits cercles : nous y reviendrons. On trouve aussi le nom de la percussion chargé sur le pad, un visuel la représentant, des fonctions Mute et Solo, une icône pour verrouiller la percussion (sa séquence ne sera pas concernée par une nouvelle génération de préset) et un raccourci pour l’afficher dans le panneau Edit.
En cliquant sur le centre du pad : on accède au navigateur de son qui permet de changer la percu utilisée… Dans ce dernier, on peut choisir la famille de l’instrument (Hand Drums, Shaken, Metal, Friction et Wood), puis l’instrument et enfin une de ses articulations. Un petit moteur de recherche et un système de favoris n’auraient pas été de trop mais tout demeure assez clair pour qu’on se passe de ce genre d’outil…
Bienvenue dans la Factory !
Venons-en maintenant au panneau Edit qui vous donne une vue d’ensemble sur les huit instruments et les séquences qui sont associés à chacun. On pourra ici aussi, pour chaque percussion, éditer son volume, son panoramique, mais aussi la vitesse à laquelle tourne sa séquence et plus important, le nombre de pas de cette séquence. C’est en effet la première bonne nouvelle de ce test : Percussion Factory permet de faire de la polyrythmie en offrant la possibilité de mélanger des séquences se jouant sur 16 pas, d’autres sur 13 ou 15, d’autres encore sur 8, 7 ou 3… Dans le sillage de cette fonction, le potard Decimate permet de désactiver plus de pas de la séquence à mesure que sa course progresse : une bien bonne idée qui permet d’obtenir des variations de patterns sans pour autant changer complètement de groove. Quatre icônes sont encore à noter : l’une qui permet de charger un son au hasard sur le pad, l’autre qui permet de générer une séquence au hasard pour le son, et les deux dernières qui permettent d’accéder à l’édition avancée du pad, soit du son qu’on y a chargé, soit de la séquence.
Cette édition se présente en effet en trois onglets : dans Sound, vous gérez le sampling proprement dit : Pitch, dynamique, enveloppe ADSR, courbe de vélocité MIDI et Smooth, un filtre passe-haut avec une pente douce de 6 dB par octave pour atténuer gentiment les aigus qui peuvent très présents sur certaines percus… En vis-à-vis de ce dernier, on dispose aussi d’un filtre moins utilitaire et plus créatif puisqu’il s’agit d’un multimode résonnant doté lui aussi de sa propre enveloppe. À noter que les deux enveloppes de volume comme du filtre disposent de réglages pour jouer sur les courbes d’attaque, de déclin et de relâchement : bref, c’est bien complet…
Passons à l’onglet FX où nous attendent quatre effets en insert (distorsion, flanger, frequency shifter et EQ paramétrique 3 bandes) et les départs vers les deux bus d’effets que propose le logiciel, lesquels sont assignés à un delay et une réverbe. Pour régler ces derniers, on se rendra dans la section d’effet globale du logiciel où l’on découvrira encore d’autres choses : une saturation, un maximiseur et un EQ ainsi que nos deux effets pour les bus auxiliaires. Si le delay se passe de commentaires, il est à noter que la réverbe est en fait un processeur à convolution proposée avec de nombreuses réponses impulsionnelles allant bien au-delà de la réverbe et s’aventurant en terre soundesignesque…
Bref, la section d’effets est intéressante, même si l’on aurait aimé disposer d’un petit bitcrusher/downsampler, d’un résonateur, voire d’un Unison comme en propose Melda, ce qui permettrait à de simuler des ensembles de percussions…
Revenons toutefois à notre édition de pad pour découvrir le dernier onglet Seq où nous attend un séquenceur à pas à 5 étages : le premier pour la vélocité, le second pour subdiviser le pas en un maximum de quatre parties, le troisième pour définir le pitch du pas, le quatrième pour gérer son Gate et enfin le dernier pour définir sa probabilité d’être lu, ce qui vous assure qu’une même séquence pourra évoluer aléatoirement à chaque lecture…
Quatre commandes sont disponibles en regard de tout cela : une pour remettre à zéro la séquence, une pour générer une séquence au hasard, une pour décaler l’offset de la séquence en millisecondes (ce qui aura un grand impact sur l’allant du groove en jouant plus ou moins au fond ou en avant du temps) et enfin Auto-align qui mérite un commentaire.
UVI s’est en effet échiné à définir pour chaque sample le temps fort de ce dernier car contrairement à ce qu’on observe sur un piano, ce n’est pas au début de son que réside le hit sur la plupart des percussions. Sur un tambourin par exemple, les cymbales de l’instrument résonnent avant même que la frappe intervienne. Et c’est cette dernière que la fonction Auto-align cale sur le temps, pour s’assurer que le groove soit naturel, ce qui est indispensable pour un instrument à percussion.
D’autres choses à dire sur cette interface ? Oui ! Qu’elle permet évidemment de jouer chaque pad isolément, chaque séquence isolément ou l’ensemble de tout cela via les keyswitches du clavier, qu’un réglage Swing global vous permet de choisir entre différentes quantifications pour adapter un groove trop carré à un shuffle particulier, que tout cela sortira en stéréo ou sur des sorties dédiées à chaque pad, et que la page Main est bien plus riche que nous avons voulu le dire plus haut.
Axiome d’Euclide…
Au bas de cette dernière, on dispose de six potards permettant de faire grandement évoluer, en temps réel, le préset en cours d’utilisation sans avoir à mettre les mains dans le moteur, ce qui sera très pratique pour une utilisation en live. Outre le réglage Swing dont nous venons de parler, on y trouve Room pour doser la réverbe, Tone pour aller vers un son global plus brillant ou plus sombre, et surtout trois contrôles pour les séquences : Decimate qui supprime des pas dans ces dernières, Intensity qui joue sur les courbes de vélocité (pratique pour faire des moments plus calmes ou au contraire explosifs au cours d’un arrangement) et enfin Steps qui réduit le nombre de pas de tout le monde, ce qui donne l’occasion de comprendre que les cercles dont nous avions parlé plus haut sont en fait une représentation euclidienne des séquences. À mesure qu’on réduit le nombre de pas des séquences, on voit ainsi les cercles se changer en polygones avec toujours moins de côtés jusqu’à arriver au carré, au triangle et à la simple ligne…
Visuellement, c’est tellement plus parlant et efficace qu’un séquenceur à pas classique pour faire des polyrythmies qu’il est incompréhensible que cette ergonomie ne soit pas plus souvent présente dans nos logiciels comme dans nos matériels. Et c’est peut-être sur ce point qu’on adressera le plus grand reproche à UVI qui n’est pas allé au bout de son excellente idée : on aimerait dès l’onglet Main pouvoir agir sur le nombre de pas de chaque pad isolément et pas globalement, activer ou non un pas sur le pourtour de la forme juste en cliquant dessus. Hélas, sitôt qu’on clique sur ces formes, on se retrouve un peu frustré dans l’interface de chargement de sample. C’est dommage vraiment !
Pour se faire pardonner, UVI nous propose toutefois la petite fonction qui tue : vous pouvez importer vos propres samples dans Percussion Factory via un single cliqué-glissé. Merci d’y avoir pensé ! Là encore, le terrain de jeu s’agrandit…
Et le son me direz-vous ? Eh bien, à la faveur de tous ces outils, il n’y a aucun reproche à faire de ce côté, avec des presets bien foutus et la possibilité d’obtenir très vite des rythmes complexes et des parties organiques qui s’adapteront parfaitement à tous les contextes, notamment grâce au paramètre swing. Les samples embarqués comme les effets permettent en outre de s’aventurer bien au-delà des percussions traditionnelles et de réaliser des grooves qui raviront autant les musiciens électroniques que ceux qui font de la musique à l’image. Seul petit bémol peut-être : on aurait aimé disposer dans la banque de samples de quoi faire des percussions de larges ensembles, qu’elles soient orchestrales ou ethniques. Impossible de faire des tambours de guerre en l’état actuel, alors que même sans proposer de samples de cela, un effet similaire au MUnison de Melda aurait encore permis d’étendre la polyvalence de la Factory…
Écoutez toutefois ce que ça donne sur différents presets pour vous faire une idée de la variété de choses qu’on peut obtenir :
- berwali00:04
- fullpalette00:04
- goldenmoon00:04
- lastofus00:09
- manden00:04
- marching00:04
- neptunetabla00:04
- reflexion00:09
- reframe00:09
- roots00:04
- rumba00:04
- snorring00:09
- snowsledge00:04
- supercrush00:09
Voyez qu’on peut tout aborder : de la musique africaine, latine, mais aussi du sound design plus barré, de sorte que quel que soit votre genre musical de prédilection, vous devriez trouver votre bonheur dans cette Factory, que ce soit en studio ou en live… Et cela est d’autant plus vrai que vous pouvez importer vos propres samples. Voyez ce que ça donne avec quelques sons de beatbox enregistrées vite fait :
- crash00:01
- bell00:00
- hat00:00
- kick00:00
- snare00:00
- triangle00:01
- beatbox00:08
Et la mini compo du test pour finir :
Conclusion
À n’en pas douter, UVI fait très fort avec cette Percussion Factory qui sonne bien, s’avère extrêmement polyvalente et dispose de tous les outils pour devenir LA référence en matière de percussions sur le marché. Trois choses manquent seulement pour en faire l’instrument parfait : des samples d’ensembles de percussion, orchestraux comme ethniques ou alors inclure un effet Unison, quelques autres effets encore (bitscrusher, résonateur) et surtout un usage plus poussé de la représentation visuelle du séquenceur euclidien. Mais ce sera peut-être pour une mise à jour ou une V2… Quoi qu’il en soit, on tient là un bien beau champion qui ne devrait pas décevoir grand monde. Bravo !