Je vous l'accorde, les techniques vues la semaine dernière s'éloignent sensiblement des méthodes pour débutant. Ceci étant, il me semble qu'elles permettent d'obtenir des résultats largement à la hauteur du mal de crâne que la conception du "routing" nécessaire à la manoeuvre peut engendrer de prime abord. En guise d'argumentation, je vous propose aujourd'hui de voir un cas concret d'utilisation…
In situ
Commençons par planter le décor. Le riff de guitare qui nous servira aujourd’hui d’illustration a été composé à la base au travers d’une chaîne d’effets comprenant une pédale de delay, l’Electro-Harmonix Memory Boy. Cette dernière ne dispose pas d’une fonction Tap Tempo, par conséquent, je règle le temps de retard à l’oreille au plus proche de ce que je souhaite lorsque je joue le morceau dont est extrait ce riff. Ainsi, si j’enregistre cette partie de guitare de façon « classique » sans me faire de noeuds au cerveau avec un simple micro placé devant la gamelle de l’ampli j’obtiens quelque chose comme ça :
Le rendu n’a rien de rédhibitoire et correspond en tout point à l’arrangement « live » du morceau. Cependant, dans le cadre de la production phonographique de ce titre, j’aimerais aller un peu plus loin tout en conservant la « couleur » de cette pédale si chère à mon coeur. Tout d’abord, il me semble après coup que le temps de retard est justement un poil trop en retard. De plus, la ligne retardée est peut-être également un peu trop présente et « floute » le riff principal. Enfin, contrairement à l’arrangement pour la scène, le son de cette guitare s’intégrerait mieux au sein de la production s’il se développait sur la largeur stéréo plutôt qu’en profondeur. Bref, avec cette prise, il ne m’est pas vraiment possible de corriger le tir comme je l’entends. Heureusement, j’avais pris la peine de « splitter » le signal juste avant la Memory Boy et j’ai donc pu réutiliser ce signal « sain » pour apporter les modifications souhaités en un tournemain !
Sur cet extrait, vous pouvez entendre plusieurs choses. Tout d’abord, le détail de taille se résume aux enregistrements séparés du riff source et du riff retardé (merci le reamping !), ce qui m’a permis de répartir chacun d’eux de part et d’autre du champ stéréo afin de développer le son sur l’axe horizontal plutôt qu’en profondeur. J’ai également pu ajuster le temps de retard pour qu’il soit un peu moins à la traîne. Pour finir, il m’a été possible de baisser le niveau de feedback et j’ai à présent à tout moment la main sur la balance « dry/wet » via le fader de volume de la piste ne contenant que l’enregistrement su signal retardé. Elle n’est pas belle la vie ? Et la cerise sur le gâteau, c’est qu’au moment du mixage avec ce genre de manipulation, vous aurez une flexibilité de travail accrue ! Écoutez ceci par exemple :
Ici, j’ai accentué la distinction entre le riff original et le riff retardé grâce à des égalisations complémentaires. J’ai également profité de l’occasion pour adoucir les attaques du signal retardé via un processeur de transitoires afin de donner un léger groove chaloupé droite/gauche à l’ensemble. Et ce n’est que la partie émergée de l’iceberg, vous imaginez bien que les possibilités sont alors quasiment infinies.
Voilà, c’est tout pour aujourd’hui. J’espère qu’à travers cet exemple vous aurez compris tout l’intérêt qu’il peut parfois y avoir à se décarcasser la cafetière lors de la prise. Sur ce, rendez-vous la semaine prochaine pour de nouvelles aventures !
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