Que vous utilisiez une réverbération algorithmique ou une réverbération à convolution, il y a de fortes chances pour que votre plug-in propose différents types de réverbération.
Or, le choix de tel ou tel type est à mon sens primordial pour obtenir le résultat escompté. Malheureusement, ce choix est bien trop souvent fait au petit bonheur la chance par le néophyte, ce qui complique donc grandement l’affaire. C’est pourquoi je vous propose aujourd’hui de passer en revue les principales familles de réverbération ainsi que leurs usages potentiels.
Comme d’habitude, ces exemples d’utilisation ne sont pas des règles absolues. Cependant, je vous conseille de vous y tenir, tout du moins au début, afin de plus facilement vous familiariser avec la chose. Avec le temps, l’expérience nourrira votre imaginaire et vous invitera certainement à l’expérimentation d’une façon beaucoup plus saine qu’en tapant au hasard dans une longue liste de présets.
Les réverbes à ressort (Spring reverb)
Commençons par les réverbérations à ressorts, ou « Spring Reverb » en anglais. À l’origine, ce type d’appareil utilisait un dispositif électromécanique constitué de ressorts (entre 1 et 3) pour simuler tant bien que mal une réverbération « naturelle ». Le principe de fonctionnement était relativement simple : on envoyait le son via un transducteur à l’une des extrémités des ressorts, ce qui les faisait vibrer, et l’on enregistrait la résultante à l’autre extrémité, toujours par l’intermédiaire d’un transducteur.
Si le rendu sonore de ces appareils est très loin d’être réaliste, il n’en demeure pas moins que la présence de réverbes à ressorts sur de nombreux amplis guitares, depuis les années 60 jusqu’à nos jours, a profondément ancré ce son dans notre inconscient collectif. Ainsi, il n’est pas rare d’entendre encore la pâte sonore si caractéristique de ces réverbérations sur des productions actuelles. Bien sûr, il n’est pas question de les employer pour simuler un espace sonore réaliste. En revanche, elles peuvent très bien être utilisées afin de donner à un instrument une patine surannée plus ou moins marquée.
Comme vous devez vous en douter, les « Spring Reverb » font des merveilles sur les sons de guitare électrique, mais pas que ! Elles peuvent aussi servir sur les sons de type orgue. D’ailleurs, il me semble bien qu’historiquement parlant, la première réverbération à ressorts se trouvait sur un orgue Hammond. D’autre part, les voix ainsi que les bois sont des cibles de choix pour les « Springs ». En revanche, je vous déconseille fortement l’usage d’une telle réverbe sur tout élément percussif. Pourquoi ? Eh bien tout simplement parce que c’est moche à souhait. Essayez donc si vous ne me croyez pas, mais je vous aurai prévenu.
Pour finir, un petit mot quant aux réglages propres à ces réverbérations. Sachez tout d’abord que plus il y a de ressorts, plus la réverbération produite sera dense. De plus, la tension et la longueur des ressorts influent grandement sur le rendu spectral. Pour un résultat plus « brillant », mais également plus « cheap », préférez des ressorts courts et bien tendus. À l’inverse, des ressorts longs et plus lâches produiront un son plus « sombre » et bien moins « low-cost » dans l’esprit, si vous voyez ce que je veux dire.
Les réverbes de type Plate
La réverbe de type « Plate », ou réverbération à plaque, est apparue à la fin des années 50 avec la célèbre EMT 140. Son principe de fonctionnement est sensiblement le même que celui des réverbérations à ressorts, sauf que cette fois-ci, et comme son nom le laisse supposer, le son voyage au travers d’une plaque métallique. Le résultat sonore, en revanche, est autrement plus complexe et donc, plus réaliste – toute proportion gardée. De plus, le rendu est toujours assez typé pour être représentatif d’une époque. En effet, il ne doit pas y avoir beaucoup d’enregistrements datant des 60's / 70's où la « Plate » n’a pas laissé son empreinte sonore.
Typiquement, les « Plates » sont beaucoup utilisées sur les voix où leur musicalité, à défaut d’autre terme, apporte véritablement un supplément de vie aux prises. La caisse claire est aussi un instrument de prédilection pour ce type de réverbération. Avec un temps suffisamment court pour ne pas « polluer » le rythme, la « Plate » complétera à merveille la caisse claire en y ajoutant du mordant tout en accentuant son relief. Dans un tout autre registre, sachez que les cuivres s’accommodent également très bien à la sauce « Plate ». Enfin, les sons synthétiques de la famille des pads peuvent eux aussi profiter de certaines réverbérations à plaque.
Pour finir, notez qu’à l’instar des réverbes à ressorts, les « Plates » ne sont clairement pas des réverbérations destinées à se faire discrètes. Du coup, elles sont plus volontiers utilisées en guise d’effet plutôt qu’en tant que générateur d’espace – bien qu’en combinant une « Plate » à un delay à bande on puisse obtenir quelque chose d’exploitable mais qui sonnera toujours « daté ». D’autre part, sachez que ce type de réverbe a parfois une fâcheuse tendance à sonner « métallique » du fait de sa conception même. N’hésitez donc pas à égaliser le signal en sortie afin de minimiser cet effet secondaire si d’aventure il devenait trop gênant.
Les réverbes de type Hall
La famille des « Halls » s’évertue pour sa part à reproduire le son des salles de concert dans le sens classique du terme. Cela se traduit en règle générale par des réverbérations relativement longues avec une accumulation des réflexions lentes, un bas du spectre robuste, et une séparation moins marquée entre les premières réflexions et le champ diffus. Au niveau des sensations sonores, cela sonne riche, spacieux, profond, chaud, réaliste, etc.
Naturellement, ce type de réverbération fera la joie de vos arrangements de cordes, bois, cuivres, etc. Bref, tout instrumental plus ou moins classique profitera des bienfaits d’une « Hall ». Les voix peuvent également bénéficier de l’immensité grandiloquente des « Halls », surtout sur des morceaux au tempo lent où la longueur de la réverbe comblera habilement les vides. En revanche, je déconseille fortement son usage pour les instruments percussifs. En effet, les transitoires trop marquées s’accordent mal avec ce genre d’algorithme, sans parler du regain d’énergie dans le grave qui aura vite fait de tout envahir. Enfin, à dose homéopathique et en égalisant consciencieusement le bas du spectre, sachez qu’une « Hall » peut subtilement ajouter une notion de profondeur à vos mix. Attention cependant, je parle ici d’un dosage à ce point fin que la réverbération n’est pas réellement entendue mais plutôt ressentie.
Les réverbes de type Chamber
La catégorie des réverbérations « Chamber » simule un autre vieux concept très largement utilisé en studio. Le principe est simple : on place une ou plusieurs enceintes dans une pièce pour y diffuser le son à traiter et l’on enregistre la réverbération produite grâce à un ou plusieurs micros judicieusement placés dans cet espace.
Le type de pièce est ici prépondérant en regard du son obtenu. Il peut tout aussi bien s’agir d’une cage d’escalier que d’un couloir, ou d’une jolie pièce spécialement conçue à cet effet, comme la fameuse chambre réverbérante des studios Abbey Road. Au niveau sonore, la palette est extrêmement large et dépend de la taille – généralement petite à moyenne – de la pièce mais surtout des matériaux la constituant (panneaux de bois, vitre, béton, etc.). Ainsi, une petite pièce boisée conviendra parfaitement à une formation de musique de chambre alors qu’une cage d’escalier donnera à une batterie un son à la Led Zep façon When the Levee Breaks.
Les réverbes « Chamber » peuvent donc être utilisées sur pas mal de types de sources : instruments percussifs, orchestre intimiste, sons synthétiques, chant, etc. Cependant, gardez à l’esprit que du fait de son concept même, le son produit n’est pas d’un réalisme à toute épreuve. En effet, la captation de la réverbération d’une pièce « excitée » par une diffusion via enceintes ne reproduira jamais la complexité et le raffinement que pourrait donner un véritable musicien placé dans ce même espace. Ainsi, l’usage de ce type de réverbe se limitera aux instruments et/ou productions nécessitant une sensation d’espace plutôt qu’une localisation spatiale bien définie.
Les réverbes de type Ambiance
Comme leur nom le suggère, les réverbérations du type « Ambience » servent à créer l’illusion de l’ambiance sonore d’une pièce. Il faut entendre par là, non pas une réelle notion spatiale précise ou naturelle, mais plutôt un certain sens de la cohésion sonore émanant d’instruments jouant dans un même lieu. Généralement très courtes et discrètes, les « Ambiences » sont une solution idéale pour obtenir le fameux effet « glue » sur la totalité d’un mix en dosant finement l’envoi de chacun des éléments du mixage vers le ou les bus de ces réverbérations. Il est également très fréquent de ne s’en servir que pour un sous-ensemble de pistes, comme les éléments d’un kit de batterie. Par contre, il est très rare d’utiliser ce type d’algorithme sur un seul instrument, contrairement aux familles précédemment évoquées. Notez que les « Ambiences » font particulièrement bon ménage avec les sons purement synthétiques. En effet, elles permettent de rendre les synthés plus « vivants » en leur apportant ce fameux effet « glue » qui les reliera entre eux, mais également avec les éventuels autres éléments issus de prises acoustiques, sans pour autant les engluer ou les faire reculer en fond de mixage.
Pour finir, sachez que les réverbérations de cette famille peuvent être remplacées par des delays très courts. Pourquoi choisir l’un plutôt que l’autre ? En réalité, il n’y a pas de véritable bonne raison, c’est surtout une histoire de goût, voire d’habitude. D’ailleurs, à titre personnel, j’utilise plutôt des delays car c’est comme cela que j’ai appris et que maintenant, cela fait partie intégrante de mon « workflow ». Mais en toute honnêteté, je suis certain que je pourrais obtenir le même style de résultat avec des « Ambiences », cela me prendrait juste un peu plus de temps pour m’habituer à la chose.
Les réverbes de type Room
Comme leur nom le laisse supposer, les réverbérations du type « Room » tendent à reproduire le son d’une prise réalisée dans une pièce avec le plus de naturel possible. En règle générale, il s’agit d’espaces de petite taille dont le temps de réverbération est, de fait, relativement court, de 0.2 à 1 seconde grosso modo. Les « Rooms » ont par nature une séparation beaucoup plus marquée entre les réflexions primaires et le champ diffus que les autres réverbes. De plus, elles induisent souvent une coloration ostensible en regard du type de pièce simulée. D’autre part, il s’agit de réverbes que je qualifierais de « rapides », ce qui n’est pas sans avantages puisque cela évitera souvent d’engluer le mixage.
Avec leur naturel, les « Rooms » constituent la famille idéale lorsqu’il s’agit de reconstituer un espace tridimensionnel réaliste et cohérent pour l’ensemble des éléments du mix. Il est également habituel d’avoir recours à l’une d’entre elles afin de combattre les méfaits des prises acoustiques réalisées en « close miking », ou bien encore pour donner un aspect vivant aux enregistrements effectués via des boitiers de direct (synthés, basses, guitares électro-acoustiques, etc.). Bien entendu, les instruments virtuels bénéficieront aussi largement des bienfaits de ce type de réverbération. D’autre part, leur « vélocité » fait qu’elles sont particulièrement à l’aise sur des instruments percussifs à qui elles donneront une belle sensation d’espace réaliste sans pour autant interférer avec le groove, aussi endiablé soit-il.
Comme je vous le disais en introduction, la famille des « Rooms » est extrêmement vaste… Et cet état de fait n’est pas sans poser quelques problèmes, car toutes les « Rooms » ne se valent pas. Tout d’abord, il s’agit d’algorithmes excessivement compliqués, et donc très difficiles à réaliser. Du coup, la finesse des « Rooms » d’un plug-in à l’autre est particulièrement variable et une « Room » de piètre qualité fera plus de mal que de bien à votre mix. Soyez donc vigilant sur ce point et si vous n’avez pas suffisamment confiance en vous pour déterminer si tel ou tel plug-in est capable de vous donner satisfaction, referez-vous à l’avis d’utilisateurs plus aguerris que vous ne l’êtes en la matière – sur les forums d’Audiofanzine par exemple !
Ensuite, par leur nature même, les « Rooms » sont loin d’être linéaires d’un point de vue fréquentiel. En effet, dans une pièce, la réverbération entraîne des creux et des bosses dans le spectre sonore. La reproduction de ce comportement contribue grandement au réalisme des algorithmes. Cependant, suivant l’instrument traité et la pièce simulée, le mariage peut ne pas être des plus heureux. Attention donc au choix de la « Room » en fonction de la source sur laquelle vous allez l’appliquer. Il n’y a malheureusement pas de règle absolue en la matière et, par exemple, une « Room » qui fera merveille sur une guitare Stratocaster jouée à fond sur un ampli Marshall pourra être totalement hors de propos avec une Telecaster jouée en son clair sur un ampli Fender. De l’expérience seule viendra votre salut, désolé…
Enfin, sachez que l’abus de certaines « Rooms » a une fâcheuse tendance à trop reculer dans le mix l’instrument ainsi malmené, tout en le faisant sonner « petit bras ». Heureusement, il existe des solutions, comme par exemple jouer avec le paramètre de pré-delay et/ou égaliser la réverbération. Mais nous en reparlerons…