Après le dégraissage du bas du spectre, passons au nettoyage du bas/médium. Vous remarquerez que j’écris bas/médium et non pas bas-médium. Pourquoi ça ? Tout simplement parce qu’ici nous allons travailler sur les fréquences situées entre 100 Hz et 500 Hz, ce qui constitue une zone à cheval entre les graves et le bas-médium tels qu’ils sont définis la plupart du temps.
Pourquoi ?
Cette zone que j’appelle bas/médium est particulièrement importante pour plusieurs raisons. Tout d’abord, en jetant un œil sur le tableau des fréquences que je vous ai déjà indiqué la semaine dernière, vous constaterez que 99 % des instruments ont leurs fondamentales qui se baladent dans cette zone. De fait, il y a fort à parier que le morceau sur lequel vous travaillez soit particulièrement chargé dans cette région du spectre. D’où la nécessité d’y porter une attention toute particulière.
D’autre part, il se trouve que les enregistrements se font de plus en plus souvent avec des micros cardioïdes en « close miking », et c’est d’autant plus vrai en home studio. Si elle offre certains avantages, cette technique de prise de son a tout de même un inconvénient majeur dont vous avez certainement déjà entendu parler : l’effet de proximité. Le fait de placer un micro cardioïde très – voire souvent trop – près de la source sonore génère un surplus dans le bas et le bas-médium du spectre qui n’a rien de musical. Le travail que nous avons effectué sur les graves la semaine dernière a déjà atténué ce phénomène, mais cela n’est certainement pas suffisant et il convient donc de terminer le boulot aujourd’hui en s’attaquant à notre fameuse zone comprise entre 100 et 500 Hz.
Enfin, sachez que si cette région du spectre est particulièrement sensible, c’est aussi parce qu’elle influe grandement sur notre perception subjective du son. Ainsi, lorsque cette zone est équilibrée, on parle du corps d’un instrument, de la sensation de chaleur d’un enregistrement, alors qu’un excès rendra le son confus, comme s’il était embourbé. En creusant dans cette zone, nous obtenons une sensation de clarté, mais si l’on n’y prend garde, on peut très vite sonner trop « fin ».
Bref, vous l’aurez compris, ce n’est pas le travail qui manque, alors attelons-nous à la tâche !
Comment ?
Comme d’habitude, il n’y a pas de règle. Il m’est effectivement impossible d’affirmer que pour tel ou tel instrument il faut impérativement baisser de x dB à telle ou telle fréquence, tout simplement parce que je n’ai absolument aucune information sur les instruments se trouvant dans votre morceau, sur la façon dont ils ont été enregistrés, et encore moins du son que vous souhaitez atteindre. Moralité, c’est à vous de partir à la chasse aux fréquences indésirables pour chacune des pistes. Pour ce faire, nous allons appliquer une méthode vieille comme le monde : le balayage fréquentiel, ou « frequency sweep » en anglais.
Cette technique est très simple à mettre en œuvre, il suffit d’utiliser un filtre en cloche avec une largeur de bande relativement étroite (facteur Q supérieur à 4). Appliquez alors dans un premier temps une amplification exagérée (entre 6 et 9 dB, mais gare aux oreilles !) et balayez notre fameuse zone située entre 100 et 500 Hz. Avec un tel filtre, rien ne devrait sonner comme il faut. Cependant, vous remarquerez certainement une région que cette amplification rend particulièrement désagréable. Bingo ! Vous venez de trouver la zone à atténuer. Attention toutefois de ne pas y aller à la hache afin de conserver le naturel de votre enregistrement. Il convient d’enlever de 1 à 3 dB grand maximum avec un facteur Q situé entre 2 et 4, sachant que plus vous atténuez, plus le facteur Q doit être élevé.
À l’écoute, il est fort possible que vous n’entendiez pas distinctement la différence induite par une atténuation aussi modérée sur un seul instrument. Mais appliquez donc cette technique à chacune de vos pistes et faites alors une écoute comparative avant/après en « bypassant » d’un coup l’ensemble des égaliseurs… Cette fois-ci, entre le travail effectué précédemment sur le bas du spectre et le nettoyage du bas/médium d’aujourd’hui, vous devriez constater une amélioration flagrante. Les pièces du puzzle commencent à se mettre en place !
La semaine prochaine, nous verrons ce qu’il convient de faire pour le reste des médiums et le haut du spectre.