La marque américaine Strymon a récemment actualisé certaines pédales populaires de son catalogue. De grands classiques font peau neuve telle que la réverbe « blueSky » que nous avons eu le plaisir de tester.
MIDI à quatorze heures
L’incontournable « blueSky » fait partie des pédales que la marque a décidé de réactualiser pour lui donner un petit coup de jeune, ce qui devrait ravir les habitués, mais pas seulement, des produits de Strymon. Vous allez le voir, ce dépoussiérage est loin d’être anecdotique. Ainsi, au déballage on découvre une « blueSky », à la couleur de son nom, dans un boitier en aluminium aux dimensions inchangées de 11.4 cm x 10.2 cm x 4.4 cm. La face principale se voit légèrement modifiée avec notamment un potentiomètre « SHIMMER » supplémentaire en plus d’un remaniement des potentiomètres indispensables pour le réglage d’un effet de réverb : DECAY, PRE-DELAY, LOW, HIGH, MIX. Les deux petits switchs déjà présents sur le modèle précédent sont toujours là, mais la logique d’utilisation change quelque peu. Nous avons toujours le choix entre trois types de réverbes : plate, room et spring. On pourra travailler sur la texture sonore de ces différentes réverbes avec, entre autres, trois modes : off, light et deep. La pédale garde ses deux footswitchs « ON » et « FAV », ce dernier permet d’avoir un preset sauvegardé directement accessible. Ils sont accompagnés de deux LEDs dont le code couleur pourra changer lors de certaines manipulations liées aux réglages internes de la pédale.
Le côté supérieur de cette nouvelle « blueSky », consacré à la connectique, bénéficie d’ajouts qui feront clairement des heureux. La pédale se voit dorénavant équipée d’un switch permettant de choisir le type d’entrée mono ou stéréo que l’on compte utiliser. Néanmoins, la grande nouveauté, et pas des moindres, est que l’on dispose maintenant d’une entrée TRS « EXP/MIDI » et d’un port USB-C, pour lequel le câble n’est toutefois pas fourni. L’entrée EXP/MIDI pourra accueillir une pédale d’expression pour contrôler des paramètres en temps réel, un footswitch supplémentaire pour rappeler un preset ou tout simplement un contrôleur MIDI. Le port USB-C sert à mettre à jour le firmware de la pédale et à faire transiter le protocole MIDI. Ceci ouvre bien entendu le champ des possibles, dont l’accès à 300 presets répartis sur trois banques que l’on pourra rappeler à l’aide d’un contrôleur MIDI.
Le circuit interne a également été revu et corrigé avec notamment une entrée désormais équipée d’un nouveau préampli Class A JFET. Dans l’idée, cela doit améliorer la dynamique et la réponse de la pédale, c’est en tout cas ce que promet Strymon. Le DSP a lui aussi été actualisé pour un modèle qui serait plus puissant et davantage optimisé. La « blueSky » première du nom étant déjà une pédale proposant de bonnes prestations techniques, il sera bien entendu un peu délicat de pouvoir estimer totalement l’optimisation qu’apportent ces mises à jour matérielles. En revanche, elles sont les bienvenues et permettent d’avoir un appareil en phase avec les standards technologiques actuels.
Strymon a aussi intégré une multitude d’options supplémentaires à cette « blueSky » auxquelles on a accès à l’aide de différentes combinaisons entre les footswitchs et les potentiomètres. Ainsi, il est possible de modifier le niveau de sortie de plus ou moins 3 décibels. On peut aussi changer le niveau d’entrée qui est par défaut réglé sur un mode « instrument ». On pourra de cette manière basculer sur un niveau « ligne » qui sera indispensable si l’on souhaite utiliser cette pédale avec autre chose qu’une guitare ou une basse. Il est aussi possible de désactiver le mode « True Bypass » pour bénéficier du buffer intégré tout comme il est possible d’activer le « Spillover » afin d’avoir des transitions douces et naturelles entre les changements de presets.
L’alimentation de la pédale, dont le bloc est fourni, demande 9 V DC et pas moins de 300 mA, ce qui reste tout à fait standard pour ce type d’effet numérique et on pourra très facilement alimenter la pédale avec un bon bloc tiers intégré à un pedalboard.
Enfin, cette Strymon est conçue et fabriquée à la main aux États-Unis. Bien entendu, toutes ces prestations nous amènent à un positionnement tarifaire plutôt « premium » avec un prix constaté d’environ 430 euros au moment de la rédaction de ce test. C’est une centaine d’euros de plus que sa petite sœur.
Ça raisonne un peu non ?
Nous l’avons vu précédemment, cette seconde édition de la « blueSky » propose trois types de réverbes, comme cela était déjà le cas par le passé. Toutefois, l’algorithme du mode « spring » a bénéficié d’une mise à jour. Pour chacune des trois réverbes, on pourra activer ou non un effet de modulation plus ou moins marqué grâce au switch « off/light/deep ». À cela s’ajoute dorénavant un potentiomètre « SHIMMER » dont la réaction sera différente selon le type de réverb que l’on utilise. Ainsi, sur le mode « plate » ce potentiomètre va générer des notes dans les octaves supérieures. Le mode « room » se verra embelli d’octaves ainsi que de quintes. Enfin, sur le mode « spring », on pourra entendre des octaves inférieures dont on pourra gérer la vitesse du LFO. Nous allons le voir dans les exemples audios, mais la possibilité de doser cet effet en plus du switch « mod » permet de générer de très belles textures et ouvre la voie à l’expérimentation.
Je vous propose d’écouter quelques extraits dans lesquels je teste différentes configurations. Bien entendu, les possibilités sont immenses, pour ne pas dire infinies, et il serait difficile d’en faire totalement le tour.
- 1 – Plate – MOD off – Shimmer off00:34
- 2 – Plate – MOD light – Shimmer 400:47
- 3 – Plate – MOD deep – Shimmer 600:28
- 4 – Room – MOD off – Shimmer off00:46
- 5 – Room – MOD light – Shimmer 500:24
- 6 – Room – MOD deep – Shimmer 800:52
- 7 – Room – MOD off – Shimmer 4 – Mix 1000:45
- 8 – Spring – MOD off – Shimmer off00:22
- 9 – Spring – MOD light – Shimmer 400:36
- 10 – Spring – MOD deep – Shimmer 10 – Pre-delay 0 – Mix 1000:30
La première impression est que cette nouvelle mouture se montre aussi convaincante que la précédente génération. Le son a quelque chose d’organique et d’envoutant dans pratiquement toutes les configurations. Dans le premier exemple, j’ai réglé la pédale de sorte à simplement donner un peu d’air et de naturel au son de guitare. Une utilisation assez standard et courante qui ne pose aucun problème à cette « blueSky ». Le coup de cœur est cependant arrivé au moment de passer sur le mode « room », sans aucune modulation et sans activer l’effet de shimmer, comme sur l’exemple numéro 4. Le son est chaud, profond et reste très naturel. En jouant en stéréo et avec un peu de volume dans la pièce, c’est un régal !
Le switch qui active une modulation « light » ou « deep » permet de texturer la réverbération de manière plus ou moins prononcée. Lorsque l’on combine ces deux options avec le potentiomètre « DECAY » exagérément poussé avec un peu d’effet shimmer et, par gourmandise, un mix poussé autour des 70/100 %, on se retrouve avec des effets très créatifs, un peu comme sur les exemples 7 et 10.
Ce qu’il y a de bien, c’est que la « blueSky » est constante au niveau de la qualité sonore qu’elle délivre sur la totalité des modes disponibles. On est en présence d’une pédale qui sait pratiquement tout faire et qui saura trouver sa place dans des configurations autres que celles des pedalboards des guitaristes ou des bassistes. C’est d’autant plus vrai avec l’ajout du protocole MIDI. À ce propos, il est possible de contrôler absolument tous les paramètres de la « blueSky » à l’aide des « Control Change » et des « Program Change ». La pédale a par ailleurs été immédiatement reconnue dans mes périphériques MIDI sous Cubase Pro 12.
Si l’on est très heureux de voir ce protocole dorénavant disponible dans cette nouvelle génération, j’ai trouvé la prise en main un peu délicate, dans un premier temps tout du moins, du fait de l’absence d’un écran, même minimaliste, pour nous informer des paramètres sur lesquels on opère. Bien entendu, Strymon a prévu des changements de couleurs des deux LEDs présentes sur la pédale lors des différentes manipulations, mais il faudra se familiariser avec le code couleur pour pouvoir se passer du manuel. De la même manière, il n’y a pour l’heure aucune application de disponible permettant de régler certains paramètres de la pédale et de gérer les presets sur son ordinateur. Si vous pensez aux applications Librarian et Nixie pour cet usage, il a été impossible de les faire fonctionner avec la pédale au moment du test. N’oublions pas que la pédale permet de stocker jusqu’à 300 presets dans trois banques différentes. La « blueSky » est en quelque sorte « aveugle » et c’est probablement le seul vrai défaut de cette pédale. Néanmoins, on peut imaginer que cette situation évolue un jour grâce au port USB-C disponible à l’arrière de la pédale.
En conclusion
Strymon a eu raison de mettre à jour certaines de ses pédales car dorénavant en plus d’avoir le son, on a les fonctionnalités. La possibilité d’utiliser une pédale d’expression et le protocole MIDI en fait une réverbe qui trouvera sa place aussi bien sur un pedalboard épuré que dans une configuration studio complexe. La qualité des différentes réverbes est excellente et la « blueSky » sait se montrer polyvalente en offrant un panel de sonorités très large. Elle pourra sans problème fonctionner comme une réverbe légère et décorative ou comme un outil d’expérimentation permettant de créer des textures originales, des nappes et autres sons ambiants. En revanche, il faudra prendre en compte un prix qui classe cette pédale dans le rang des réverbes « premium », certes, non sans arguments.