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Test du synthétiseur virtuel modulaire Moog Modular V - Test Arturia Moog Modular V

8/10

Le Moog Modular V ("V" pour virtuel) est la réplique des synthétiseurs analogiques modulaires Moog Modular 3c et Moog 55, produits par une firme dont le son est particulièrement à la mode en ce moment (s'agit-il vraiment d'une mode, ou bien le son Moog est-il immortel ?). Voyons donc si ce synthétiseur virtuel est à la hauteur de ses homologues analogiques.

Le MMV (c’est son dimi­nu­tif) se compose de trois grandes parties :

  • Le synthé­ti­seur
  • Le mini séquen­ceur et effets
  • Le clavier maître

Prise en main

Le manuel en français de près de 150 pages ne se contente pas d’ex­pliquer le fonc­tion­ne­ment du synthé­ti­seur virtuel, mais reprend égale­ment les bases de la synthèse sous­trac­tive. On peut égale­ment trou­ver des exemples concrets de créa­tion de patches pour se fami­lia­ri­ser avec la philo­so­phie de l’ins­tru­ment. Artu­ria conti­nue donc la démarche péda­go­gique que l’on trou­vait déjà dans leur premier logi­ciel, Storm.

Les 15 premières pages du manuel sont dédiées à la compa­rai­son entre la tech­no­lo­gie TAE (True Analog Emula­tion) et celles des concur­rents… On peut s’éton­ner que cette rubrique soit présente sur le manuel, car si manuel il y a, c’est que le musi­cien a déjà fait l’acte d’achat, il ne s’agit plus de le convain­cre… Je ne rentre­rai pas dans des consi­dé­ra­tions marke­ting et fais réso­lu­ment le choix de ne pas vous parler des argu­ments «  offi­ciels  » (TAE, absence d’alia­sing etc.) pour savoir si oui ou non le Moog Modu­lar sonne. Je préfère écou­ter par moi-même ce qu’il en est réel­le­ment, tech­no­lo­gie nova­trice ou pas, et vous en donner le résul­tat «  prag­ma­tique  ».

Je vous l’avoue, lorsque je découvre un logi­ciel, je suis d’un natu­rel bidouilleur… Alors plutôt que de lire immé­dia­te­ment le tuto­riel sur le patching dispo­nible dans le manuel, j’ai tout de suite pris un preset que j’ai trafiqué de manière empi­rique, au niveau des connexions et des para­mètres, jusqu’à trou­ver un son complè­te­ment nouveau. L’édi­tion s’avère très intui­tive (à condi­tion bien sûr de connaître les bases de la synthèse sous­trac­tive) et on retrouve en grande partie le plai­sir que l’on peut avoir avec un vrai synthé­ti­seur modu­laire (les nœuds dans les câbles en moins, puisque les fils sont virtuels). Très bon point pour Artu­ria !

Faci­lité d’uti­li­sa­tion

L’en­semble est plutôt bien pensé. Par exemple lorsque l’on clique sur une entrée ou sortie jack, toutes les prises jack suscep­tibles d’ac­cep­ter une connexion avec cette entrée ou sortie sont mises en valeur par un cadre. Cela rend le patching encore plus intui­tif, notam­ment si on va un peu « au hasard » au sein des modules.

Notons un détail esthé­tique assez remarquable: les fils bougent lorsqu’on les survole avec la souris. Cette fonc­tion­na­lité peut paraître super­flue, mais en fait elle sert égale­ment à pous­ser un fil lorsque l’on veut lire les inscrip­tions qui se trouvent derrière. Bien vu ! Pour ne pas s’ar­rê­ter là, il est égale­ment possible de régler la « tension » des fils, si bien qu’ils pendent plus ou moins…

Ces détails ont pour consé­quence une faci­lité d’uti­li­sa­tion du logi­ciel, même pour l’ama­teur. Et la simpli­cité d’uti­li­sa­tion est un point plus impor­tant qu’il n’y paraît. Car si l’on ne maîtrise pas son instru­ment, on ne peut rien en faire sinon écou­ter les presets. Ici, c’est tout le contraire, on rentre rapi­de­ment dans l’uni­vers du sound design.

On s’éton­nera à première vue que les deux LFOs soient à des endroits diffé­rents du module. Les raisons en sont simples. Réponse de l’er­go­nome de chez Artu­ria : «  premiè­re­ment, le graphisme déjà chargé de boutons néces­si­tait de placer le second LFO là où il restait de la place [NDLR : raison suffi­sante !]. C’est aussi pour faire comme dans l’ori­gi­nal. Enfin, cela suit la logique d’uti­li­ser a priori un LFO sur les oscil­la­teurs et l’autre sur les filtres. La posi­tion actuelle des LFO permet donc d’évi­ter que les fils traversent tout l’écran.  ». Comme quoi, les choses ne sont pas faites au hasard.

Passons donc au plus impor­tant : le son !

Qualité sonore

Au niveau du son, ce que l’on peut dire en tous les cas c’est que les graves ne manquent pas, notam­ment dans le spectre aux alen­tours de 20–100 Hz. Les sons de basses sont effec­ti­ve­ment « pleins » et les membranes des enceintes en font les frais (elles vibrent d’une lente oscil­la­tion à vue d’oeil). Ce ne sont que des petites Tannoy Reveal, qui descendent peu dans les graves, et pour­tant, elles ont du encais­ser des basses mons­trueuses avec le Moog Modu­lar V ! A ce propos, veillez à utili­ser un filtre passe haut à 20–30 Hz sur votre sortie géné­rale pour éviter d’abî­mer vos enceintes à trop fort volume.

La qualité des presets est miti­gée (certains sont excel­lents et d’autres très basiques). C’est assez éton­nant que les auteurs de ces patches – souvent des sound desi­gners et musi­ciens renom­més – aient parfois fait se côtoyer des sons de qualité et d’ori­gi­na­lité si diffé­rentes. Doit-on en déduire que le Moog Modu­lar n’est pas capable de créer de gros sons ? Certai­ne­ment pas ! Certains patches sont d’ex­cel­lente facture, comme vous pour­rez l’en­tendre dans notre rubrique «  démos en MP3  ». Et là où vous allez certai­ne­ment vous réga­ler, c’est lors de la créa­tion de vos propres patches (c’était mon cas, j’ai passé une jour­née entière à en program­mer) !

Pour résu­mer les domaines de prédi­lec­tion du Moog Modu­lar V, on peut raison­na­ble­ment dire que les basses ont une très bonne attaque et un grain dans le grave extrême digne du Moog origi­nal, chose que l’on trouve rare­ment dans les plug-ins qui sonnent géné­ra­le­ment plus brillants que «  gras  ». Il semble­rait en revanche plus diffi­cile de faire des nappes convain­cantes avec ce synthé virtuel.

Les 9 (!) oscil­la­teurs, grou­pés par 3 (à l’image du Moog origi­nal) peuvent servir soit à géné­rer du son, soit à contrô­ler d’autres para­mètres (à la manière de LFOs). Ils peuvent être synchro­ni­sés entre eux. En pratique, cela donne des gros sons, évolu­tifs et très convain­cants.

On trouve les filtres inspi­rés par le synthé origi­nal de chez Moog (passe-bas 24 dB, passe-haut 24 dB, passe-bande, coupe-bande), plus un filtre multi­mode compor­tant 7 types de filtres (voir fiche tech­nique). La pléthore d’en­ve­loppes (8 au total) permet une multi­tude d’évo­lu­tions du signal.


Effets

On notera de bonnes possi­bi­li­tés de routing des effets. Par exemple, il est possible de ne mettre le chorus (assez gros, mais «  ramo­lis­sant  » pas mal le son) que sur le [def]VCA[/def] 1 et aucun effet sur le [def]VCA[/def] 2, pour créer des sons spatia­le­ment inté­res­sants… Dans ce cas, en effet, le [def]VCA[/def] 2 donne un son précis, mono­pho­nique et dont l’at­taque est très rapide et le [def]VCA[/def] 1 ajoute un grand espace sonore. Pour vous en convaincre, écou­tez les deux sons de notre rubrique « MP3 ».

Les effets de base sont un peu légers (délai, chorus, égali­seur multi­bandes etc.) ce qui explique en partie que les presets sonnent souvent «  dry  ». A vrai dire, ce n’est pas ce que l’on recherche sur ce type d’ap­pa­reil. En effet, les synthé­ti­seurs modu­laires sont avant tout faits pour créer un son « dry » (sans effet), auquel on peut ensuite ajou­ter des effets via des proces­seurs ou plug-in externes.

 


Perfor­mances

Parlons à présent des ressources prises par le Moog Modu­lar V d’Ar­tu­ria : en tant qu’ins­tru­ment VST sous Cubase SX, il semble que notre confi­gu­ra­tion maté­riel­le* ne plaise pas trop au Moog Modu­lar V car il prend des ressources énormes (de l’ordre de 25 % du CPU par voix de poly­pho­nie instru­ment).

* Machine de test : PÏII 933, 512 Mo de RAM, disques durs UW SCSI.

Au passage, ne vous fiez pas à l’in­di­ca­teur en mode stand alone des ressources CPU. Sous Windows 2000, les ressources prises peuvent être visua­li­sées en temps réel en faisant un Control + Alt + Suppr… On découvre alors que, lorsque le Moog Modu­lar V indique 4 % de CPU utilisé, le système indique 12 %. Par consé­quent, si le Moog Modu­lar indique 70 %, méfiez-vous, le son risque de craquer.

Le point noir du Moog Modu­lar est donc la consom­ma­tion de CPU… Ceci s’ex­plique par le fait que les algo­rithmes utili­sés se veulent réalistes avant tout, par rapport à l’ori­gi­nal analo­gique. Un compro­mis, si vous avez un PC ou Mac peu puis­sant, est de bais­ser la valeur de notes en release. Ainsi vous ne dépas­se­rez jamais le nombre de notes simul­ta­nées provoquant des craque­ments par manque de ressources proces­seur. Dans tous les cas, on aurait aimé deux modes, dont l’un serait moins gour­mand en CPU. Cela permet­trait de compo­ser dans Cubase SX sans avoir les problèmes de ressources, puis d’ex­por­ter en audio le son généré par le MMV en haute qualité.

Conclu­sion

Astuces

Si vous avez une carte graphique Matrox G550, passez en 24 bits (en 32 bits, l’in­ter­face graphique du Moog Modu­lar V semble plan­ter très dange­reu­se­ment – vidage mémoire et reboot sous Windows 2000).

Comment régler le niveau d’en­trée lorsque l’on câble deux modules ?

Plutôt que de mettre un poten­tio­mètre devant chaque entrée « jack », ce qui aurait impliqué une tripo­tée de nouveaux éléments graphiques, l’équipe d’Ar­tu­ria a rusé en incluant le poten­tio­mètre sur le jack. Il est ainsi possible de régler le niveau d’en­trée, en posi­tif ou néga­tif.

Comment utili­ser les 9 oscil­la­teurs en même temps alors que l’on a seule­ment 2 VCA en sortie ?

En utili­sant la série de VCA en bas de l’écran et en les mixant grâce aux boutons « link ».

Le mixage des oscil­la­teurs se fait…
- Via une mixette de grande taille sur l’ori­gi­nal
- Via les 16 VCA sur le MMV, non présents sur l’ori­gi­nal

Après un premier logi­ciel «  tout en un  » (Storm) davan­tage grand public, Artu­ria cible désor­mais un éche­lon véri­ta­ble­ment profes­sion­nel avec un synthé­ti­seur virtuel qui n’a pas à rougir devant le modu­laire origi­nal produit par Moog. Quant à la faci­lité d’uti­li­sa­tion d’un modu­laire virtuel, il n’y a pas photo : les câbles virtuels, c’est quand même bien plus pratique que les nœuds !

A mon avis, le Moog Modu­lar, comme l’ori­gi­nal (le Moog 3c et une partie du Moog 55), excelle avant toute chose dans les sons de basses, grâce au fait que les harmo­niques du signal qu’il génère descendent très bas dans le spectre. Les sons médiums dans l’es­prit trance sont égale­ment au rendez-vous grâce aux 9 oscil­la­teurs qui, détu­nés, donnent un très gros son. Pour les sons de nappes, on pourra lui préfé­rer des plug-ins plus brillants (mais qui ont souvent moins de chaleur) en complé­ment. Person­nel­le­ment, je compte bien l’uti­li­ser pour ses sons de basses et les sons «  agres­sifs  » en complé­ment de mes autres plug-ins. Un régal de créa­tion sonore. 

 

 

Notre avis : 8/10

  • Intuitif
  • Côté pédagogique du modulaire
  • Flexibilité des modules
  • Qualité sonore, chaleur du son
  • Possibilités de patching
  • Beaucoup trop gourmand en temps de calcul
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