Si Beethoven a pu composer malgré sa surdité, on sait à quel point bien entendre est essentiel pour bien jouer. C'est un des grands problèmes sur scène : comment prendre du plaisir et préserver sa fragile audition dans ce lieu bruyant ? La réponse vient peut-être des in-ears monitors, à l'instar du système EW 300 IEM G2 de Sennheiser.
Si Beethoven a pu composer malgré sa surdité, on sait à quel point bien entendre est essentiel pour bien jouer. C’est un des grands problèmes sur scène : comment prendre du plaisir et préserver sa fragile audition dans ce lieu bruyant ? La réponse vient peut-être des in-ears monitors, à l’instar du système EW 300 IEM G2 de Sennheiser.
In-ears signifie littéralement « dans l’oreille ». Contrairement à des écouteurs de type walkman qui se mettent à l’entrée de l’oreille sans obstruer celle-ci, les in-ears monitors sont conçus de façon à en fermer le pavillon pour isoler des bruits extérieurs. On pourrait en quelque sorte les comparer à des bouchons antibruit munis d’un casque audio.
Les modèles d’entrée de gamme se présentent un peu comme des casques de baladeurs qui s’enfonceraient dans le pavillon de l’oreille. Ils comportent des enveloppes en mousse ou en caoutchouc qui assurent l’isolation. Généralement, plusieurs tailles d’enveloppes sont fournies pour offrir à l’utilisateur le choix le plus adapté à sa morphologie.
Les modèles plus haut de gamme sont, eux, moulés (par un audioprothésiste) à la morphologie de l’artiste. Généralement, ils comportent une enveloppe plus importante qui couvre en grande partie le creux de la partie externe de l’oreille, renforçant l’isolation phonique. Par ailleurs, ils sont munis d’une sorte de branche en plastique qui vient se mettre derrière l’oreille, assurant une parfaite tenue en place du système.
Voilà pour le casque. Celui-ci se branche ensuite généralement dans un récepteur sans fil porté à la ceinture qui reçoit des signaux d’un émetteur connecté à un canal de retour. À noter que rien n’oblige à fonctionner avec un système HF. Par exemple, rien n’empêche un musicien qui ne bouge pas sur scène (comme un violoncelliste ou un contrebassiste, ou encore un clavier) de brancher directement son in-ears sur un ampli casque classique.
Description du produit
Pour ceux désireux d’avoir tous les détails techniques, nous vous invitons à consulter la fiche sur le site de Sennheiser.
En résumé, nous avons :
- Modulation FM MPX stéréo.
- Gamme de fréquences de 518 à 866 MHz
- 1440 fréquences réglables par pas de 25 kHz
- Rapport signal-bruit de 91 dB(A)
- Distorsion harmonique (DHT) inférieure à 0,9 %
- Prise casque : 100mW (32 Ohm)
- Récepteur 82 × 64 × 24 mm, 170 g
Comme le système est un appareil professionnel, il ne semble pas soumis à la norme des 100 dB maxi. En tout cas, aucune indication à ce sujet ne figure dans la documentation, mais celle-ci rappelle en plusieurs points de faire très attention à une éventuelle utilisation à fort niveau. Par contre, le récepteur comporte une fonction limiteur permettant de limiter le volume de sortie à un seuil défini par l’utilisateur. Parfait pour éviter tout accident sur scène lorsque l’ingé son retour fait ses réglages.
Au niveau des fréquences, le système fonctionne avec des banques de canaux. On a 8 banques de 12 fréquences préréglées et une banque user de 12 fréquences réglables. On dispose d’une fonction scan permettant de vérifier que la banque que l’on souhaite utiliser comprend des canaux libres. Un scan bloque les canaux déjà utilisés et le résultat d’un scan peut être transmis à un ensemble d’émetteurs et récepteurs. On dispose de nombreuses autres fonctions comme un réglage de sensibilité d’entrée, du squelch (réduction de bruit), utilisation mono, stéréo ou « focus » (stéréo transformée en mono).
Le système HDX est un réducteur de bruit qui consiste à compresser le signal à 2:1 à l’émission et à « l’expanser » d’autant à la réception. L’intérêt est d’augmenter la dynamique disponible en limitant la présence d’interférences HF dans le signal.
Par ailleurs, ce système est muni d’une « porteuse squelch ». Pour tout récepteur radio, lorsqu’il n’y a plus d’émission, on entend de forts parasites. C’était le cas sur les anciens tuners radio entre deux stations. Ici, l’émetteur envoie un signal sans la présence duquel la sortie audio du récepteur se coupe, ce qui évite de se prendre un gros bruit dans les oreilles si l’émetteur est malencontreusement coupé ou si l’on sort de la zone de réception. C’est ce même signal qui permet à l’émetteur et au récepteur de dialoguer.
Le casque
Le casque est plutôt d’entrée de gamme pour de l’in-ears. Il n’inspire pas au départ une confiance extrême : les fils sont très fins et l’ensemble paraît délicat, voire fragile. À l’usage, on ne constatera cependant pas de dégradation, même après une utilisation assez intensive et quelques accidents d’accrochage du câble. De toute façon, un casque in-ears qui se doit d’être discret ne peut afficher la solidité d’un casque de studio ! Mais celui-ci tient bien le choc et se remplace le cas échéant à un tarif raisonnable (62 € TTC). C’est un modèle à oreillettes caoutchouc. Il est fourni avec des caoutchoucs de taille différente très faciles à changer (il suffit de les tirer), mais qui tiennent bien en place sur le casque. L’intérêt du caoutchouc sur la mousse est qu’il est simple de le passer sous l’eau pour le nettoyer.
Contrairement à la photographie sur l’emballage, il n’est pas possible de mettre les oreillettes de telle façon à ce que les fils remontent derrière l’oreille. En tout cas, cette position n’a apporté à aucun des testeurs un confort, une isolation et une tenue satisfaisants. Il faut donc placer les petites pattes de sortie du fil vers le bas de l’oreille, comme pour un casque de type Walkman. On pourra ensuite faire remonter les fils au-dessus de l’oreille, mais cette solution manque d’élégance et nuit plutôt à la tenue qu’elle ne la renforce. Tenue par ailleurs sans reproche une fois le casque en place. On peut regretter que ce casque ne soit pas un peu mieux fichu. Il remplit convenablement sa fonction, mais compte tenu du prix de l’ensemble, on pouvait attendre mieux.
L’émetteur et le récepteur
L’émetteur est impeccable. Il respire la qualité de fabrication et de finition et la robustesse. De format rack, il est livré avec ses cornières de rackage. Deux points sont un peu regrettables : l’entrée audio se fait sur prises XLR uniquement et l’alimentation est un transformateur externe. Les prises XLR sont logiques dans le cadre d’un usage en sonorisation conséquente. Par contre, cela s’avère peu pratique en petite sonorisation où les sorties auxiliaires des petites consoles de live sont souvent en jack. Dommage de ne pas avoir mis des prises combo jack/XLR. En petite configuration, il faudra en passer par des adaptateurs. Quant à l’alimentation par transfo externe, ceci est peu commode lorsque l’appareil n’est pas destiné à être racké.
Tout ceci reste relativement anecdotique en regard des qualités montrées par l’émetteur. Son afficheur est très clair et lisible. Il indique le niveau de signal entrant et les éventuelles saturations. Les touches, agréables et précises, sont rétroéclairées et la couleur indique l’état de l’appareil. Outre la touche d’allumage, la touche set et une touche haut/bas permettant le réglage, on dispose d’une sortie casque munie d’un bouton de volume. Idéal pour contrôler le signal fourni à l’émetteur sans courir après l’artiste qui est muni du récepteur, par exemple. Accessoirement, en petite configuration scénique, l’émetteur pourra servir de second ampli casque pour un musicien ne bougeant pas (clavier, contrebassiste…), mais celui-ci aura le même mixage que celui du récepteur.
Le récepteur montre la même qualité que l’émetteur et fait excellente impression : alimenté par deux piles LR6 1,5 Volt, il est peu encombrant et peu lourd. Son clip de ceinture est solide et pince fermement. Tellement qu’il n’est pas toujours facile de le clipper sur un gros jean, mais cela offre au moins la garantie qu’il restera bien en place, même sur un rockeur très énervé qui saute partout ! Il est muni d’une petite antenne semi-souple qui semble apte à subir sans dommage tous les tracas de la scène. On y trouve un bouton d’allumage et de volume facilement accessible, ainsi qu’un bouton up/down permettant entre autres le réglage de balance ou la sélection de banque de fréquences. On dispose également d’un écran pour les informations de fréquences, de signal, de paramétrage ainsi que deux LED, l’une affichant la mise en service et clignotant quand les piles faiblissent, l’autre indiquant une trop faible réception du signal. Derrière la trappe où l’on met les piles se trouvent les boutons SET pour entrer en mode paramétrage et valider les paramètres et ESC(ape) pour annuler les modifications. Rien à dire sur ce récepteur si ce n’est qu’on frise la perfection.
Sennheiser propose également des accus rechargeables NiMH pour remplacer les piles. C’est une bonne nouvelle de pouvoir utiliser cet appareil sur accus, tant d’un point de vue financier qu’écologique. Par contre, il est recommandé d’utiliser les accus spéciaux proposés en option. Ceux-ci sont en effet munis d’un capteur permettant d’assurer la bonne reconnaissance par le récepteur, notamment au niveau du contrôle de l’état de charge. L’autonomie annoncée est de 6 à 10 heures (piles). Je n’ai pas pu juger de la réalité de la chose, mais il me semble bien avoir obtenu une autonomie plus importante en utilisant, il est vrai, l’appareil à faible volume et à une relative proximité de l’émetteur.
Utilisation
Le système a été testé dans plusieurs conditions :
- en home studio pour le placement de micros dans une cabine
- en répétitions, sur petite scène et en plein air par un chanteur-clavier-bassiste (moi-même) dans le cadre d’un duo avec machines et instruments classiques
- sur petite scène et en plein air par les chanteur et bassiste d’un combo de reprises pop-rock (le groupe Joke-box)
Par ailleurs, le casque a beaucoup servi en usage « classique » (type écoute baladeur mp3).
Le casque
La qualité audio est assez bonne. À peu près du niveau d’un casque de baladeur correct. Pas extraordinaire, il offre cependant une écoute satisfaisante pour la plupart des conditions de scène. Les basses sont relativement présentes et le son est clair et distinct.
L’isolation est bonne, sans plus. Lors de l’utilisation en studio pour placer des micros sur une batterie, je n’ai pas pu obtenir une isolation suffisante pour masquer le son naturel de la batterie avec un volume raisonnable dans le casque. Bon, quand on voit combien de décibels envoie une batterie aux mains d’un batteur de rock…
J’ai effectué un autre test concernant l’insonorisation : je m’en suis servi à moto. Comme beaucoup de motards, afin de préserver mes oreilles, je mets des bouchons antibruit pour rouler. Il s’agit des bouchons coniques en mousse que l’on trouve en grande surface ou en pharmacie et qui fournissent un amortissement autour de –29 dB.
Lors de plusieurs trajets de plusieurs centaines de kilomètres, j’ai remplacé les bouchons par le casque Sennheiser relié à un baladeur mp3. Si l’isolation n’est pas tout à fait à la hauteur des bouchons en mousse, elle s’avère plus que satisfaisante. Avec un volume très raisonnable dans le casque (je déteste les forts niveaux et j’ai surtout une sainte trouille de me ruiner les oreilles), on peut écouter tous styles de musique, tout en percevant suffisamment le régime moteur. Moralité, moi qui n’aime pas emprunter les voies express et les autoroutes en moto (c’est d’un ennui !), je m’y suis risqué avec le in-ear et en écoutant de la musique, le pensum se transforme presque en plaisir.
Le confort du casque n’est jamais pris en défaut, même sous le casque moto. Là où les bouchons antibruit deviennent parfois inconfortables ou grattent au bout de quelques heures, le casque in-ear ne dérange absolument pas. La seule difficulté est qu’il est un peu délicat d’enfiler un casque intégral sans faire bouger le in-ears, mais une fois le tout en place, tout va bien. Et rares sont les musiciens qui jouent avec un casque intégral !
Ce casque peut, en dehors de tout contexte musical, faire un bon casque de baladeur pour écouter de la musique dans un environnement particulièrement sonore. Les motards et les usagers des transports en commun apprécieront. Peut-être aussi ceux qui travaillent dans des conditions très bruyantes nécessitant un casque antibruit (chantier, usine). Le in-ears, s’il ne suffit pas à l’amortissement sonore (et n’est pas estampillé aux normes de sécurité), doit sans problème se porter sous un casque isolant, notamment grâce à la finesse des fils et renforcera l’isolation.
Dans le cadre de l’utilisation musicale, on retrouve ce même confort. Une fois le casque bien mis, on l’oublie presque et si l’on n’accroche pas le fil quelque part (généralement, on le passe dans le dos sous ses vêtements), il tient parfaitement en place.
L’ensemble du système
La qualité audio fournie par l’ensemble est très bonne. La communication HF (testée également avec d’autres casques) est claire, exempte de grésillements ou d’interférences. Le seul cas où l’on a pu constater quelques bruits curieux fut en répétition, en studio. J’ai cru que c’était dû à la présence de nombreux appareils en fonction autour de l’émetteur et le problème a été réglé simplement en changeant de banque de fréquence. Mais en fait, la documentation recommande tout bêtement une distance minimum de 5 m entre émetteur et récepteur pour ne pas saturer celui-ci et j’étais alors très proche du récepteur. En pratique, ça fonctionne très bien, même à moins de 5 m.
Deux des concerts tests ont été effectués dans le cadre du Festival Interceltique de Lorient. Là, on a beaucoup de scènes (souvent munies de nombreux HF) du in et du off dans un espace restreint, sans compter qu’on est dans un centre-ville cerné de bâtiments renvoyant allègrement les ondes et autour d’un port dont l’eau fait courir les ondes comme un sprinter de 100 m. De plus, dans ce cadre urbain et maritime en période de festival, on retrouve toutes les émissions radio possibles et imaginables : radios locales, faisceaux-presse, forces de sécurité (très présentes pendant le festival), bateaux de plaisance et de commerce, gendarmerie maritime, sans compter le port militaire à deux pas. Bref, un vrai enchevêtrement d’ondes. Le système HF n’a été pris en défaut à aucun moment, même en s’éloignant pas mal de la scène pour aller faire le show au milieu du public.
Le système in-ears HF apporte dans ce cas un excellent confort. En effet, lorsqu’on s’éloigne de la scène, il devient malaisé, voire difficile de jouer. Avec la faible vitesse de propagation du son dans l’air, on se retrouve avec de la latence. Disons pour résumer grossièrement que le son parcourant un mètre en 3 ms, on se retrouve avec environ 30 ms à seulement 10 m de la façade ! Dur. On n’a plus ce problème avec le système HF puisque l’électricité comme les ondes radio voyagent à la vitesse de la lumière.
Enfin, côté usage, quel bonheur de se passer de transporter et installer un retour, sans compter les questions de place qu’il peut parfois y avoir dans les bars et autres petits lieux. Et sur une plus grosse scène, le fait de ne pas voir celle-ci encombrée de retours est plus esthétique. La liberté de mouvement des musiciens est sans commune mesure, surtout si leurs instruments sont eux-mêmes branchés en HF.
Reste un cas où un système in-ears convient peu : le cabaret. Dans un spectacle où l’on travaille beaucoup en interaction avec le public tout proche, l’isolation procurée par le casque empêche pratiquement d’entendre les réactions du public et de jouer l’interactivité.
Quant à ce système en particulier, le casque s’avère sans doute un peu juste côté isolation pour un batteur qui veut un retour à niveau raisonnable, mais semble adéquat pour tout autre musicien. Sans compter que rien n’empêche de remplacer le casque par un meilleur modèle, notamment un qui soit moulé à son oreille.
Conclusion
Cet ensemble fait très bien son travail. Le casque s’avère meilleur qu’il ne le laisse penser au premier abord, mais sa hauteur de gamme est un peu décevante en regard de la qualité du système HF et on aurait aimé quelques dB de plus d’isolation. Rien n’empêche de prendre un meilleur casque avec ce système, mais celui-ci fait déjà très bien son travail et se révèle plus que satisfaisant y compris pour d’autres usages. Quant au système HF, les tests que nous avons effectués n’ont pas permis de le prendre en défaut, ni du point de vue de la qualité sonore, ni côté transmission. L’émetteur comme le récepteur respirent la solidité et la qualité de fabrication promettant sans problème de longues années d’utilisation.