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Jouer fort avec peu : l’art de la débrouille version live - 4 conseils pour réussir vos concerts malgré un système de sonorisation sous-dimensionné

Que faire lorsque le système de sonorisation proposé par l’organisateur d’un concert ou par la salle qui vous accueille est insuffisant ? Vous êtes derrière la console, le master est à fond et pourtant le groupe reste à peine audible ? Cet article vous expliquera comment gagner quelques précieux dB.

4 conseils pour réussir vos concerts malgré un système de sonorisation sous-dimensionné : Jouer fort avec peu : l’art de la débrouille version live

Avant le concert : comment anti­ci­per un système sono trop léger

Dans un monde parfait, chaque groupe joue­rait chaque concert avec le maté­riel sono idéal, mais dans la réalité pour des raisons pratiques et budgé­taires, c’est rare­ment le cas. Il est donc crucial de préci­ser en amont de l’évè­ne­ment le système son dont vous auriez besoin et d’ex­pliquer pourquoi cette confi­gu­ra­tion est requise. Ainsi votre premier outil de prédi­lec­tion sera le rider tech­nique.

Le rider tech­nique est un docu­ment trans­mis par l’en­tou­rage d’un groupe de musique à la salle de spec­tacle qui l’ac­cueille et qui liste toutes les exigences et tous les besoins tech­niques à satis­faire lors d’un concert.

RIDER TECHNIQUE.001Dans de nombreux riders tech­niques, on retrouve la mention très floue : « L’or­ga­ni­sa­teur four­nit une sono­ri­sa­tion profes­sion­nelle adap­tée au lieu ». Or, l’in­ter­pré­ta­tion de cette phrase peut varier consi­dé­ra­ble­ment. C’est pourquoi il est essen­tiel de contac­ter les orga­ni­sa­teurs et les pres­ta­taires tech­niques en amont pour connaître les condi­tions exactes dans lesquelles vous vous produi­rez (taille de la salle, limi­ta­tion en pres­sion acous­tique, type de maté­riel dispo­nible, etc).

Si vous consta­tez que l’équi­pe­ment prévu est insuf­fi­sant, discu­tez-en immé­dia­te­ment avec les orga­ni­sa­teurs. Préci­sez aussi le genre musi­cal que vous allez repré­sen­ter, si le groupe joue du métal, de la trap, du doom­core ou tout autre style de musique néces­si­tant une puis­sance sonore impor­tante, un pres­ta­taire expé­ri­menté (et il y en a beau­coup) saura ajus­ter l’équi­pe­ment en consé­quence.

Pensons à nos confrères pres­ta­taires de loca­tion de maté­riel sono : si le maté­riel est inadapté, il risque d’être malmené, voire endom­magé. Mieux vaut prévoir une légère marge de manœuvre que de subir un abus de limi­teur et d’éga­li­sa­tion à outrance pouvant ruiner la perfor­mance, l’ex­pé­rience du public et le maté­riel en ques­tion.

Réglages avant les balances : tirer le maxi­mum d’un petit système

Le conseil numéro un est de posi­tion­ner le système de sono­ri­sa­tion de manière opti­male par rapport au public. Regrou­pez les cais­sons de basse au centre de la scène pour maxi­mi­ser leur effi­ca­cité et éviter les problèmes de phase trop impor­tants. Suréle­vez les enceintes prin­ci­pales (satel­lites) en les plaçant sur des supports solides afin d’amé­lio­rer leur projec­tion dans l’es­pace. Ces ajus­te­ments très simples peuvent déjà à eux seuls faire une énorme diffé­rence en termes de couver­ture sonore.

Selon le style musi­cal, entre 50 et 75 % de la puis­sance de sortie de l’am­pli­fi­ca­teur est consom­mée par les basses fréquences. Une bonne gestion de ces fréquences permet donc de récu­pé­rer quelques précieux déci­bels :FILTRE D'ENCEINTE

Montez la fréquence de coupure du filtre coupe bas des cais­sons de basse (de 35 Hz à 45 Hz par exemple) afin d’éviter de gaspiller de l’éner­gie sur des fréquences inutiles.

Contrô­lez l’envoi des basses fréquences vers l’am­pli­fi­ca­teur des cais­sons via un bus auxi­liaire plutôt que via la piste master de la console. Ainsi seuls les signaux tran­si­tant via l’auxi­liaire seront envoyés aux cais­sons de basse : la grosse caisse, la basse et les toms.

Montez la fréquence de coupure entre les cais­sons de basse et les satel­lites (de 80 Hz à 105 Hz par exemple) pour allé­ger la charge des satel­lites.

Bien que ce ne soit pas parfai­te­ment idéal d’un point de vue théo­rique, ces réglages permettent de libé­rer de la puis­sance sans compro­mettre le rendu sonore. Pensez vos réglages comme un puzzle dans lequel chaque élément doit avoir une place qui lui est propre.

Balances : opti­mi­ser le mix pour compen­ser les limites du système

En tant qu’in­gé­nieur du son, le temps d’un soir, vous êtes un membre du groupe à part entière (sauf que votre instru­ment à vous c’est la sono) et comme mentionné précé­dem­ment : la majo­rité de la puis­sance de l’am­pli­fi­ca­teur est consa­crée aux basses fréquences. Ainsi, si le bassiste de votre groupe dispose d’un ampli puis­sant, inutile de trop ampli­fier la basse via la sono par exemple, il en va de même pour un ampli guitare surpuis­sant. Le public profi­tera autant des vibra­tions et du son de l’am­pli des musi­ciens que de celles et ceux de vos cais­sons de basse. Dans ce cas, mieux vaudra concen­trer l’am­pli­fi­ca­tion sur la grosse caisse par exemple, qui en aura davan­tage besoin pour trou­ver sa place dans le mix. Si la sono­ri­sa­tion est insuf­fi­sante, il peut aussi être utile de conce­voir son mix comme celui d’un concert de jazz ou de musique clas­sique, en d’autres termes d’adop­ter une approche plus acous­tique de la pres­ta­tion.

La façon dont vous confi­gu­rez votre mix est cruciale. Plusieurs para­mètres peuvent être ajus­tés pour augmen­ter la puis­sance utile. D’une part, il s’agit de mixer en utili­sant le moins de ressources possibles, et d’autre part, d’ef­fec­tuer un trai­te­ment dyna­mique ciblé.

GATE:EXPANDEURUtili­sez le gate et/ou l’ex­pan­deur pour augmen­ter la dyna­mique globale tout en suppri­mant la repisse (et donc l’éner­gie sonore inutile) entre les micros et en évitant au maxi­mum les problèmes de phase. Soyez méti­cu­leux dans vos choix, et utili­sez ces outils à bon escient. Par exemple, vous pour­rez aisé­ment utili­ser un gate sur les micros des toms mais ce serait une très mauvaise idée sur les overheads de batte­rie, car cela nuirait à la cohé­rence d’en­semble du kit. Vous pour­rez aussi utili­ser un gate sur les micros des chœurs afin d’évi­ter qu’ils restent ouverts inuti­le­ment. Vous pour­rez encore utili­ser un expan­deur sur la piste micro de la chan­teuse soliste, surtout si elle aime se dépla­cer sur scène, afin d’évi­ter la repisse et les risques de larsen etc. C’est à vous de faire les bons choix en fonc­tion de l’esthé­tique musi­cale du groupe en ques­tion.

Filtrez les fréquences inutiles, dans cette situa­tion une basse aura rare­ment besoin de fréquences trop aiguës, et inver­se­ment, une voix n’aura pas besoin de fréquences infra-basses. La logique ici est de travailler moins pour gagner plus (sans mauvais jeu de mots), ou plutôt de moins faire travailler votre système sono pour gagner plus de volume et de couver­ture sonore. N’ou­bliez pas que vous combat­tez les déci­bels inutiles pour sauver les déci­bels utiles.

ÉGALISEUR

Privi­lé­giez une égali­sa­tion sous­trac­tive afin de redi­ri­ger l’éner­gie aux bons endroits et de rendre le mix encore plus agréable à l’oreille. Cher­chez à élimi­ner les réso­nances trop appuyées qui vien­draient ternir le rendu sonore de chaque instru­ment. Encore une fois, utili­sez ces outils à bon escient pour ne pas défi­gu­rer la tessi­ture de chaque instru­ment ou voix. La méta­phore du puzzle est toujours plus que valable ici.

Il est égale­ment recom­mandé de rendre la bande passante (le fameux facteur Q) des boosts (ou égali­sa­tion addi­tive) plus étroite que large. En géné­ral, les boosts larges offrent un son plus musi­cal, mais consomment énor­mé­ment d’éner­gie en termes de déci­bels. Et les égali­seurs de qualité moyenne ont tendance à créer des effets de phase qui ne sont pas souhai­tables. Encore une fois, dosez vos boosts très subti­le­ment afin de faire ressor­tir cette petite touche essen­tielle à chaque instru­ment ou voix. En bref, une égali­sa­tion plus précise permet­tra d’évi­ter les fréquences inutiles au lieu d’aug­men­ter massi­ve­ment les graves comme c’est malheu­reu­se­ment trop souvent le cas.

Chaque système de sono­ri­sa­tion est de toute façon limité par ses carac­té­ris­tiques tech­niques propres. Lorsqu’un signal dépasse le seuil d’un limi­teur, la sono ne peut plus monter en volume. Vous avez proba­ble­ment déjà remarqué qu’un DJ paraît toujours plus fort qu’un groupe live. Cela s’ex­plique par le fait que la dyna­mique d’un groupe est nette­ment plus impor­tante que celle d’un morceau de techno maste­risé avec 3 dB de headroom.

COMPRESSEUR:LIMITEURUne utili­sa­tion exces­sive du compres­seur/limi­teur peut ampli­fier le bruit de fond et provoquer une distor­sion indé­si­rable. Encore une fois c’est le dosage qui fait la diffé­rence. L’objec­tif est donc de réduire légè­re­ment la dyna­mique pour maxi­mi­ser le contrôle sonore et amélio­rer le ressenti du public.

Compres­sez indi­vi­duel­le­ment les canaux sensibles avec des ratios légè­re­ment plus élevés que d’ha­bi­tude (5:1 ou 6:1 au lieu de 3:1 ou 4:1) et utili­sez la compres­sion paral­lèle si votre maté­riel le permet. Vous pouvez aussi appliquer un compres­seur sur le mix global, avec des réglages très modé­rés pour éviter d’écra­ser complè­te­ment les percus­sions (par exemple : attaque 20 ms, relâ­che­ment 100 ms, ratio 2:1, réduc­tion de gain de 3 dB maxi­mum).

Si cela ne suffit toujours pas à rendre le groupe audible pour tout le public, vous pour­rez ajou­ter un limi­teur à la suite du compres­seur sur la piste master, toujours avec des réglages très modé­rés en visant 1 à 3 dB de réduc­tion au maxi­mum, ce qui va vous permettre d’élimi­ner les derniers pics du mix et vous offrir une marge de gain global de 1 à 3 dB supplé­men­taires.

En live : gérer les impré­vus avec une sono sous-dimen­sion­née

La musique live s’ap­pré­cie pour sa grande dyna­mique. Les conseils prodi­gués ici ne doivent être consi­dé­rés que comme une solu­tion d’ur­gence pour opti­mi­ser votre système son si le groupe n’ar­rive pas à se faire entendre ou si des limi­ta­tions de volume rendent votre travail plus diffi­cile.

Les réglages du compres­seur/limi­teur mention­nés ci-dessus permettent dans une certaine mesure de remé­dier à cette situa­tion. Mais idéa­le­ment, assu­rez-vous d’avoir toujours une marge de 3 dB sans distor­sion pour garan­tir un mixage à la fois confor­table et effi­cace.

Quels que soient vos efforts, il arri­vera un jour où, en tant qu’in­gé­nieur du son, vous devrez faire de votre mieux pour rendre votre groupe audible avec une sono sous-dimen­sion­née. MJC, soirée privée, festi­val à petit budget … Tout y passe.

Exemples concrets :

Vous sono­ri­sez un festi­val en plein air où 400 spec­ta­teurs sont atten­dus. Un système son adapté a été prévu, mais contre toute attente, 1 500 personnes plutôt bruyantes finissent par se masser devant la scène.

Vous sono­ri­sez un concert dans une salle bondée et une partie du maté­riel vous lâche et cesse de fonc­tion­ner. Un ampli­fi­ca­teur qui fait des siennes ou bien encore une membrane d’en­ceinte qui grésille, et c’est tout le rendu sonore qui en pâtit.

N’ou­bliez pas qu’en tant qu’in­gé­nieur du son, et c’est peut-être la chose la plus impor­tante à rete­nir, vous êtes à la fois garant de la tranquillité d’es­prit du groupe qui se produit ce soir-là et surtout de la qualité de resti­tu­tion sonore pour le public présent. Donc face aux impré­vus, c’est à vous d’as­su­rer une expé­rience de jeu et d’écoute agréable pour tout le monde, peu importe le contexte.

Dans ces cas-là (et de nombreux autres), maxi­mi­ser chaque déci­bel de la plus belle des manières devient essen­tiel.

FAQ

Comment savoir si la sono est vrai­ment sous-dimen­sion­née ?

Lorsque le système atteint rapi­de­ment ses limites (clip­ping, satu­ra­tion, manque d’im­pact), ou si le groupe n’est pas audible au fond de la salle malgré un master à fond.

Faut-il toujours ajou­ter du matos si la sono est trop juste ?

Pas forcé­ment. Une bonne opti­mi­sa­tion du place­ment et un mix bien pensé permettent parfois d’évi­ter un suréqui­pe­ment inutile.

Quel est le rôle du rider tech­nique dans ce contexte ?

C’est un docu­ment-clé qui sert à préve­nir les mauvaises surprises. Plus il est précis, plus vous anti­ci­pez les besoins réels sur le terrain.

Peut-on compen­ser une mauvaise sono par du trai­te­ment numé­rique ?

Dans une certaine mesure, oui. Mais le trai­te­ment ne fait pas de miracles si la base maté­rielle est trop limi­tée.

Et si malgré tout, le public n’en­tend pas bien ?

Faites au mieux, commu­niquez avec le groupe, soyez réac­tif. Parfois, gérer l’ur­gence avec calme et méthode vaut mieux qu’un matos hors de prix.

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