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L'Orgue à tuyaux et l'Organiste

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Sujet de la discussion L'Orgue à tuyaux et l'Organiste


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ci-dessus: l'orgue de Dole (Jura)



Venez à la découverte de cet instrument secret et si particulier... un instrument très différent des autres, tant par son histoire et sa littérature, que par le rapport inhabituel qu'entretient son musicien avec lui, et puis sa situation si singulière, au cœur d'un bâtiment (c'est vrai surtout en France) très... connoté.

C'est ici le topic réservé à tous ceux qui veulent découvrir cet instrument.

Je vais tenter de vous ouvrir à lui. Vous dévoiler ses mille secrets. Faire voler en éclats les a-priori et les préjugés qui lui collent aux tuyaux : non, l'orgue n'est pas qu'un pousseur d'alléluias! Oui, on joue autre chose que des messes dessus! Et oui, c'est l'instrument le plus difficile au monde...
On n'est pas ici entre élitistes de l'instrument, entre vieux barbons.
Ce lieu est ouvert à tous.
Puissé-je vous intéresser au monde fabuleux qui se cache derrière ces austères rangées de hauts tuyaux (cela, qu'on appelle véritablement "les orgues" au féminin pluriel) et ce monumental buffet en bois massif, qui trône au-dessus de l'entrée, en hauteur, dominant la nef comme la passerelle de commandement domine le pont du navire...

Tè, bé, venez avec moi! Empruntez à ma suite le petit escalier dérobé au fond de l'église, en colimaçon, et montons à la tribune, cette petite place réservée au commandant de bord... Pour ouvrir le débat de manière surprenante et ma foi, plutôt agréable, je laisse la place à une commandante: miss Carol Williams, dans un morceau classique très, très connu: le Vol du Bourdon de Rimski-Korsakov.
L'occasion, peut-être, pour certains d'entre vous, de voir pour la première fois un organiste en action à sa tribune. L'occasion, probablement, d'en prendre également plein la gueule: admirez le jeu de jambes de madame et songez à la diabolique précision de ses pieds... nous reparlerons de tout ça, juste après.

(PS) Je sais: sa petite oeillade assassine à 00:08 a fait trembler tous les matous du forum. http://laurent.tarrisse.perso.sfr.fr/test_gif/loving.gif
Avez-vous aimé ce premier argument en faveur de mon instrument chéri ?
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2131
Je n'avais jamais entendu parler de ce monsieur Barker, qui est cependant un véritable bienfaiteur de l'orgue à tuyaux. C'est vraiment une triste histoire.
2132
Pour réveiller les fans des tuyaux, Bach joué par une robuste hollandaise avec pêche et détermination :

Il ne me semble pas que ce morceau soit ultra joué, ni que les organistes de métier comptent trop de femmes. Certes il y avait Marie Claire Alain mais elle n'a dirait-on pas fait trop d'émules...
2133
Joli, oui! :bravo: Je pense que ce BWV544 est joué, quand même. En tous cas, je l'ai déjà entendu.
2134
Si si, c'est un des préludes les plus joués de Bach. Il y a pas mal de femmes organistes, certes moins que d'hommes mais pas si rares qu'on le pense.
2135
En tous cas celle-ci a une sacré gestuelle, la voir jouer est un ravissement :bravo:

Putain Walter mais qu'est-ce que le Vietnam vient foutre là-dedans ?

2136
Citation de Nicolas :
Citation de Will :
Tiens, en regardant la vidéo sur le Cavaillé-Coll, je me demandais combien de temps ça prend pour un organiste d'explorer tous les jeux d'un tel orgue, puis un nombre important de combinaisons, rien que pour en maîtriser le son et le jeu idoine.

Je dirais 30min en prenant le temps. Le nombre de jeux ne signifie pas grand chose. Un organiste connait les jeux typiques d'un orgue, suivant son époque. En s'installant devant un nouvel orgue, il va surtout écouter la qualité sonore des jeux.

Vu ce que tu dis, est-ce que ça ne signifie pas que la plupart des organistes utilisent toujours plus ou moins les même schémas de combinaisons et de registres ?
Quand on voit le nombre de combinaisons qu'offrent les orgues, il me semble qu'il y a matière à exploration et à créer des sons d'une grande variété.
Certes, j'ai bien compris au travers de ce sujet que toutes les combinaisons ne peuvent pas fonctionner, qu'il y a des registres qui ne vont pas bien sonner ensemble (encore que je pense qu'en musique actuelle, on peut à peu près tout utiliser pour peu que la pièce soit écrite en conséquence).

Pour faire un parallèle, ça me fait un peu penser à un clavieriste qui se retrouverait devant un synthé ou une workstation avec des centaines de sons et qui sélectionnerait rapidement 4 ou 5 sons qui lui conviennent et se contenterait de ça.

Après, je comprends bien qu'un concertiste qui voyage et arrive pour faire une date n'ait pas le temps d'explorer en profondeur et ait besoin de repérer les quelques sons dont il va avoir besoin pour les oeuvres qu'il est venu exécuter. Comme notre clavieriste s'il doit assurer un remplacement dans un groupe ou un orchestre n'a probablement d'entrer dans la synthèse pour créer une palette de sons originaux.

Peut-être n'y a t-il que les titulaires qui ont réellement le temps d'explorer toutes les possibilités sonores d'un orgue ?
2137
Je pense surtout que lors d'un recital d'orgue, en théorie, repertoire joué et instrument à disposition doivent avoir un sens, l'un doit aller avec l'autre.

Je veux dire par là qu'il n'y aurait pas grand intérêt à jouer du Liszt sur un orgue du XVIième, comme il serait dommage d'interpréter des Ricercari de Frescobaldi sur un instrument du XXième.

A partir de là, en tout cas dans le répertoire classique pour orgue, il n'y a pas beaucoup de place à l'exubérance quant aux combinaisons de registres employés par l'organiste. C'est au bon interprète de rendre justice aux pieces jouées en respectant l'idée sonore du compositeur en "jouant sur les jeux" à disposition justement. Cette heure ou demi-heure de bidouille sert surtout à determiner quoi/où/quand modifier lors de l'exécution.

Le discours change en effet dans le répertoire contemporain ou la musique conceptuelle où la recherche de l'inattendu et de l'effet de surprise poussera a l'excentricité.

   moi, j'ai pas d'blé mais j'ai du son...

2138
Je ne suis pas sur de partager ta vision conservatrice (au sens propre du terme, hein, sans jugement de valeur) de l'interprétation du répertoire. Autant il me semble intéressant d'essayer de faire écouter les pièces "dans leur jus" (pour peu qu'on aie une idée assez précise de ce qu'était effectivement leur jus et l'intention du compositeur), autant il me semble qu'il y a de la place pour la réinterprétation, y compris avec des anachronismes sonores.

On a désormais une vision très figée, très conservatrice du répertoire là où il semble que les contemporains n'hésitaient pas à improviser. J'imagine que cela inclut l'aspect sonore.

Aujourd'hui, on a sacralisé ouvres et compositeurs, on les a érigés en monuments auxquels il ne faudrait pas toucher, comme on ne touche d'ailleurs pas à nos monuments historiques.
Pourtant, est-ce que Notre Dame ou le Mont-Saint-Michel ont souffert du travail de Violet-Leduc ?

Il y a quelques temps, je crois que c'est Traumax qui disait que le classique, ça le gonflait parce qu'il ne voyait pas l'intérêt de réécouter 100 fois la même oeuvre jouée exactement de la même façon avec le même son.
J'ai halluciné à ses propos, car je suis persuadé que chaque orchestre a un son et que chaque chef d'orchestre donne une interprétation propre de l'oeuvre.
Je suis donc allé, pour lui démontrer qu'il avait tort, chercher différentes interprétations de grands tubes classiques.
Eh bien j'en ai chié de chez chier. Effectivement, même en passant de Bernstein et Simon Rattle, la plupart des "grands airs" classique sonnent globalement de la même façon et il faut aller creuser et chercher dans les subtilités probablement accessibles aux seuls musiciens et mélomanes avertis pour trouver les nuances d'interprétation.

Les choses auraient peut-être été différentes si j'avais cherché en dehors de "tubes". Peut-être que là, chefs et orchestres se lâchent un peu plus.
Sauf que c'était un peu le but de ma démonstration : se baser sur des morceaux "grand public". Et c'est en grande partie raté.

Du coup, ça explique aussi beaucoup la situation du classique (et, partiellement, du baroque) : essentiellement une musique élitiste jouée par des musiciens majoritairement élitistes* pour un public bourgeois et conservateur.

Du coup, je comprends aussi mieux le succès d'un Glen Gould (auquel je n'ai jamais accroché) qui, lui, a pris un contrepied énorme pour son interprétation du répertoire. Il a au moins apporté quelque chose de neuf à l'interprétation du répertoire.

* certains ne le sont pas. Mais ils ont été formés par un système qui l'est. J'ai cependant entendu Simon Rattle déclarer son envie d'offrir la musique classique à tous. Mais il fonctionne à l'intérieur d'un système qui le permet fort peu.
2139
:boire:

On aurait pu prendre en écoutes comparées 20 versions des suites pour violoncelle seul de JS Bach. Là, on est plongé dans autants d'atmosphères sonores d'un interprète à l'autre. Parfois à ne plus reconnaître ou comprendre la musique imprimée...

Tu as raison, nous avons deux façons différentes de voir/entendre les choses.

On entend suffisamment de m...de sonore un peu partout, du StarAc' populaire.
On peut au moins laisser ceux qui savent et qui se donnent la peine, faire du travail méticuleux et pointu pour un public de connaisseurs qui adhèrent et en demandent toujours plus.

Prière de ne pas se rabaisser à faire du "pour tout l'monde" sous prétexte de vouloir intéresser un max de gens, moderniser pour moderniser, dépoussiérer pour dépoussiérer.

Alors, Leonardo, Michelangelo, Raffaello, Giotto et consort sont chiants et has been...?!
Trop conservateurs mon fils!!

   moi, j'ai pas d'blé mais j'ai du son...

2140
Je pense pour ma part que l'orgue est surtout compassé parce qu'il est dans un lieu qui est lui même compassé et figé dans l'immuabilité.
Il y aurait des orgues publics aux Galeries Lafayette ou dans le hall de la Gare de l'Est comme le pianodelagare que tout de suite ça ouvrirait plein d'horizons, tant en termes de répertoire que d'excentricité.