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Test de Intuitive Instruments Exquis - Exquise surprise !

8/10

Avec l’Exquis, Intuitive Instruments mise sur un MPE simple, fun et expressif. Un contrôleur expressif, made in France, qui promet une nouvelle façon de jouer et qui permet dans la dernière version du firmware de prendre le contrôle de votre DAW.

Test de Intuitive Instruments Exquis : Exquise surprise !

Sous ce titre un peu facile, il faut le concé­der, nous abor­dons aujour­d’hui le cas de l’In­tui­tive Instru­ments Exquis. Il y a dans l’his­toire de la musique élec­tro­nique des instru­ments qui marquent un tour­nant, non pas parce qu’ils ajoutent une énième fonc­tion, mais parce qu’ils repensent le rapport même entre le geste et le son. L’Exquis d’In­tui­tive Instru­ments appar­tient à cette caté­go­rie. Ce contrô­leur MPE, conçu et fabriqué en France, ne cherche pas simple­ment à repro­duire les codes du clavier tradi­tion­nel. Il propose une autre manière de penser le jeu, qui se veut plus intui­tive.. 

L’époque est propice à ce type d’in­no­va­tions. Les musi­ciens élec­tro­niques cherchent depuis plusieurs années à sortir du couple clavier/souris ou du sempi­ter­nel duo clavier/pad. Le MPE (MIDI Poly­pho­nic Expres­sion) a ouvert la voie à une inter­ac­tion beau­coup plus fine, permet­tant à chaque note d’être modu­lée indé­pen­dam­ment selon la pres­sion, le glissé, ou le mouve­ment du doigt. Plusieurs fabri­cants, de Roli à LinnS­tru­ment, se sont engouf­frés dans cette brèche. Mais avec l’Exquis, Intui­tive Instru­ments pousse le concept un peu plus loin : en plus de pilo­ter des instru­ments compa­tibles MPE (ou pas, d’ailleurs), il peut aussi prendre le contrôle de DAW. L’Exquis se veut à la fois simple, expres­sif et profon­dé­ment musi­cal. 

Présen­ta­tion de l’In­tui­tive Instru­ments Exquis : surface MPE hexa­go­nale et dispo­si­tion isomor­phique

Exquis 1bÀ première vue, l’Exquis intrigue. On découvre une surface plane compo­sée de 61 cellules hexa­go­nales rétroé­clai­rées, chacune sensible à la pres­sion et aux mouve­ments dans plusieurs direc­tions. Contrai­re­ment à un clavier tradi­tion­nel, ces « touches » ne sont pas dispo­sées en rangées de touches blanches et noires, mais selon une logique isomor­phique, les inter­valles restent constants, quelle que soit la tona­lité. Ce choix rend les sché­mas d’ac­cords et de gammes cohé­rents et faciles à mémo­ri­ser. Jouer un accord en do majeur ou en sol bémol revient à repro­duire exac­te­ment le même geste, simple­ment déplacé sur la grille. Cette dispo­si­tion vise à libé­rer le musi­cien des contraintes tonales du clavier clas­sique pour lui permettre de raison­ner en formes plutôt qu’en notes.

Si le châs­sis de l’Exquis est en plas­tique de qualité moyenne, l’ins­tru­ment béné­fi­cie d’une belle présen­ta­tion géné­rale, rehaus­sée dans la version DeLuxe testée ici par des flancs en bois clair qui lui confèrent une touche élégante. À ce sujet, la boutique du fabri­cant propose plusieurs choix de couleur et de maté­riau (bois, liège ou alumi­nium) pour ces flancs. Il est égale­ment possible de les acqué­rir ulté­rieu­re­ment si vous avez choisi dans un premier temps la version de base, appe­lée Pure. Les cellules hexa­go­nales, recou­vertes d’un sili­cone légè­re­ment texturé, offrent une résis­tance subtile à la pres­sion. Les LED RGB qui illu­minent chaque cellule ne sont pas seule­ment déco­ra­tives : elles servent à indiquer la gamme sélec­tion­née, les zones actives, ou encore le degré de la note dans une échelle donnée. Cette visua­li­sa­tion rend le rapport à la théo­rie musi­cale très ludique. Signa­lons tout de même, petit détail, que les pads prennent faci­le­ment les poils, inter­dic­tion au chat d’ap­pro­cher de l’Exquis ;).

Sur le plan de la connec­tique, en plus de l’USB-C pour la connexion et l’ali­men­ta­tion, il dispose d’en­trée/sortie MIDI sur mini-jack (adap­ta­teurs four­nis) et de trois sorties CV (gate, pitch, mod) pour pilo­ter direc­te­ment du maté­riel modu­laire. Ce souci d’ou­ver­ture est bien­venu : l’Exquis ne s’en­ferme pas dans le monde logi­ciel, il permet au contraire un rôle de passe­relle entre univers analo­gique et numé­rique. En plus du câble USB-C vers A et des adap­teurs MIDI, une pochette de trans­port est four­nie, sympa.

Utili­sa­tion et ergo­no­mie de l’Exquis : jeu MPE, prise en main et usage studio/live

Exquis 2La première rencontre avec l’Exquis peut être désta­bi­li­sante, surtout pour un clavié­riste tradi­tion­nel. Les repères visuels sont boule­ver­sés, plus de touches blanches et noires, plus de hiérar­chie visible entre dièses et bémols. Pour­tant, au bout de quelques minutes, une logique nouvelle s’ins­talle. On comprend que les accords, les gammes, les progres­sions harmo­niques s’or­ga­nisent selon des formes géomé­triques simples. La répé­ti­tion isomor­phique rend l’ap­pren­tis­sage très rapide, un accord de septième ou un arpège parti­cu­lier s’étend sous les doigts avec la même cohé­rence, quelle que soit la tona­lité. C’est un chan­ge­ment de para­digme.

Sur le plan tactile, la surface est très réus­sie. Les touches répondent avec une préci­sion impres­sion­nante aux moindres varia­tions de pres­sion. La détec­tion de la vélo­cité s’ef­fec­tue de manière progres­sive et le capteur capte aussi bien les mouve­ments hori­zon­taux que verti­caux, permet­tant des effets subtils : vibrato natu­rel, glis­sando progres­sif, modu­la­tion douce. La gestuelle devient expres­sive au sens physique du terme. À l’usage, comme pour d’autres instru­ments de ce type, on comprend vite la liberté qu’offre le MPE. L’ex­pres­si­vité qu’il permet devient alors une compo­sante essen­tielle du jeu, voire même de la compo­si­tion.
L’er­go­no­mie géné­rale est bien pensée. L’ins­tru­ment est compact, mais suffi­sam­ment large pour être joué à deux mains, même si la petite taille des pads demande un peu de dexté­rité. Les enco­deurs rota­tifs et les boutons rétroé­clai­rés ajoutent une couche de contrôle supplé­men­taire, utile par exemple pour le mix ou la navi­ga­tion dans un projet. Le slider capa­ci­tif, divisé en zones, offre un accès rapide à des fonc­tions de morphing, de pitch ou de filtre. Tout semble à portée de main et semble logique.
En studio, l’Exquis se révèle extrê­me­ment inspi­rant. On l’uti­lise autant pour l’en­re­gis­tre­ment que pour la recherche sonore. Son système de gammes inté­grées permet d’ex­plo­rer des modes inha­bi­tuels : penta­to­niques, byzan­tins, japo­nais, lydiens ou alté­rés. Cette ouver­ture théo­rique incite à sortir des sentiers battus et à abor­der la compo­si­tion sous un angle plus expé­ri­men­tal. 

Exquis 4Sur scène, l’Exquis prend une autre dimen­sion. Sa surface lumi­neuse, avec inten­sité réglable, attire le regard, et la nature expres­sive du jeu rend la perfor­mance visuelle. L’ins­tru­ment, compact et léger, s’in­tègre faci­le­ment dans un setup live, mais on regret­tera simple­ment que le boîtier, tout en plas­tique, puisse donner cette impres­sion de fragi­lité, il faudra le mani­pu­ler avec précau­tion lors des dépla­ce­ments.

Enfin, la compa­ti­bi­lité CV ouvre la porte à un dialogue avec le monde modu­laire.

En termes de courbe d’ap­pren­tis­sage, l’Exquis est para­doxal. Il se veut intui­tif, et il l’est, on comprend vite comment produire un son expres­sif. Mais pour en tirer le meilleur, il faut accep­ter d’ap­prendre un nouveau langage gestuel. Les musi­ciens curieux y verront une source d’ins­pi­ra­tion sans limite, tandis que d’autres pour­ront se sentir dérou­tés par cette absence de repères fami­liers.

Logi­ciel Exquis : appli­ca­tion macOS/Windows, gestion des gammes et plugins MPE

Exquis LogicielL’Exquis s’ac­com­pagne en plus d’une appli­ca­tion logi­cielle dédiée, dispo­nible sur macOS et Windows. Cette appli­ca­tion est bien plus qu’un simple utili­taire de confi­gu­ra­tion. Elle joue le rôle d’un véri­table envi­ron­ne­ment de créa­tion. Elle permet de choi­sir les gammes, de person­na­li­ser la dispo­si­tion des touches, d’ajus­ter les courbes de sensi­bi­lité, mais aussi d’en­re­gis­trer des boucles, de super­po­ser des pistes et d’hé­ber­ger direc­te­ment des plugins VST ou AU. L’in­ter­face logi­cielle est claire et visuelle : les gammes sont affi­chées sur la grille, les zones actives se colorent selon les modes choi­sis, et les courbes de réponse peuvent être modi­fiées à la volée.
Ce lien entre le contrô­leur et le logi­ciel renforce l’idée d’un instru­ment complet et quasi auto­nome. On peut imagi­ner un setup mini­ma­liste composé unique­ment de l’Exquis et d’un ordi­na­teur portable, sans clavier, sans pad, sans autre contrô­leur. 

Un autre aspect remarquable est la richesse harmo­nique offerte par le logi­ciel. L’Exquis intègre plus de 350 gammes et modes diffé­rents, dont certains rare­ment présents dans les instru­ments occi­den­taux. On passe en un clic d’une gamme majeure clas­sique à une échelle orien­tale micro­to­nale, et la surface s’adapte instan­ta­né­ment, redes­si­nant les inter­valles et les couleurs. Cette approche éduca­tive fait de l’Exquis un outil aussi utile pour la créa­tion que pour l’ap­pren­tis­sage de la théo­rie musi­cale.

Que ce soit au niveau du logi­ciel ou du firm­ware de l’Exquis, il n’y a pas de réel problème de stabi­lité. On sent toute­fois que le firm­ware reste encore un peu jeune, avec quelques légers ralen­tis­se­ments (un seul constaté lors du test). Les mises à jour logi­cielles régu­lières témoignent cepen­dant d’un suivi atten­tif de la part du fabri­cant. Intui­tive Instru­ments améliore régu­liè­re­ment la sensi­bi­lité des capteurs, la stabi­lité du proto­cole MPE et la compa­ti­bi­lité avec les prin­ci­paux DAW du marché. 

Contrôle de DAW avec l’Exquis : scripts pour Able­ton Live, Bitwig, Reaper, Logic et Cubase

Exquis 11Un autre atout majeur du Intui­tive Instru­ments Exquis réside dans son inté­gra­tion au sein des DAW. Grâce à une mise à jour récente de son firm­ware, la marque propose des scripts compa­tibles pour Able­ton Live 12, Bitwig Studio et Reaper (en plus de Logic Pro et Cubase 14), ce qui permet de trans­for­mer l’Exquis en véri­table contrô­leur de session. Il devient alors possible de lancer et arrê­ter des clips ou des scènes, d’ar­mer, déclen­cher ou solo/mute des pistes, d’ajus­ter volumes, pano­ra­miques ou envois aux effets, le tout depuis les boutons, enco­deurs et la surface du contrô­leur. L’in­té­gra­tion DAW ne se limite pas au contrôle du trans­port ou des pistes, elle exploite égale­ment sa surface hexa­go­nale et ses capteurs MPE pour mode­ler le son en temps réel tout en navi­guant dans la session. Autre­ment dit, l’Exquis ne se contente pas d’en­voyer des notes, il peut égale­ment pilo­ter les fonc­tions et le flux de produc­tion tout entier. Pour qui utilise Able­ton Live ou Bitwig, cette capa­cité de pilo­tage renforce énor­mé­ment l’in­té­rêt de l’ins­tru­ment, puisqu’il allie jeu expres­sif et gestion complète du projet musi­cal. En plus de cette appli­ca­tion, l’Exquis est livré avec plusieurs logi­ciels tiers. Parmi eux, on trouve des synthé­ti­seurs comme Surge XT, Klev­grand SyndtS­phere et d’autres plugins compa­tibles MPE. 

  • Exquis 13
  • Exquis 11
  • Exquis 14
  • Exquis 5
  • Exquis 6
  • Exquis 7
  • Exquis 8
  • Exquis 12
  • Exquis 3
  • Exquis 9b

 

Notre avis : 8/10

L’Exquis d’In­tui­tive Instru­ments se posi­tionne presque comme un instru­ment à part entière, plutôt qu’un simple contrô­leur MIDI. Il combine une surface MPE expres­sive, capable de traduire la pres­sion, le glissé et l’in­cli­nai­son du doigt en nuances sonores subtiles, avec une dispo­si­tion isomor­phique qui rend l’ap­pren­tis­sage des accords et des gammes à la fois rapide et intui­tif. Sa compa­ti­bi­lité avec les prin­ci­paux DAW et la possi­bi­lité de pilo­ter pistes, scènes et effets depuis sa surface en font un outil poly­va­lent aussi bien pour la compo­si­tion que pour la perfor­mance live. L’ap­pli­ca­tion dédiée renforce cette impres­sion en offrant un suivi visuel clair des gammes et des dispo­si­tions de touches, ainsi que l’hé­ber­ge­ment de plugins.

Parmi les griefs, le châs­sis, en plas­tique de qualité moyenne, peut donner une impres­sion de fragi­lité, tandis que certaines fonc­tions avan­cées demandent encore une confi­gu­ra­tion logi­cielle et une période d’adap­ta­tion. Le jeu à deux mains ou les glis­san­dos larges peuvent égale­ment se heur­ter à l’es­pace réduit des touches, et le firm­ware, semble encore un peu jeune

Malgré ces limites, l’Exquis demeure extrê­me­ment sédui­sant par son expres­si­vité, sa flexi­bi­lité et son rapport qualité/prix. Il s’adresse avant tout aux musi­ciens curieux, aux compo­si­teurs et aux perfor­mers dési­reux de repen­ser leur inter­ac­tion avec le son.

  • Surface MPE très expressive
  • Disposition isomorphique intuitive
  • Contrôle DAW
  • Prix concurrentiel

  • Touches assez rapprochées
  • Châssis en plastique
  • Demande un temps d’adaptation pour les claviéristes traditionnels
  • Firmware encore jeune
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