Rassurons de suite notre lectorat : ce titre n’est pas un vibrant hommage à la période New age de la variété française, ni un clin d’œil aux supporters de l’AC de milan. On ne fera pas, non plus, l’étude de l’œuvre de Stendhal ; j’ai déjà donné à l’âge de passer le BAC et je préfère de loin écrire sur la basse !
Certains l’auront déjà compris, il s’agit bien des deux robes dans lesquelles la nouvelle BTB se propose au catalogue de la marque.
Faut-il encore présenter la compagnie Ibanez ?
Question rhétorique : Ne l’ayant jamais fait sur ce site, je ne me priverai pas de jouer l’historien pour vous.
Six ans avant la première guerre mondiale, en plein milieu du pays des samouraïs, la société HOSHINO SHOTEN voit le jour. La compagnie vend alors des partitions et du papier à musique, « Shoten » se traduisant par librairie en japonais. Durant les années qui suivront, son créateur et son successeur (respectivement Matsujiro et Yoshitaro HOSHINO) feront évoluer l’activité de leur entreprise vers l’importation d’instruments de musique. En 1929, la société HOSHINO GAKKI (traduire instrument de musique) est créée à cette fin et fait venir d’Espagne les guitares SALVADOR IBANEZ (du nom du luthier qui créa l’atelier ainsi que la première guitare double manche). Peu de temps après, une nouvelle guerre, cette fois civile, ravage le pays des castagnettes. L’atelier des deux fils de Salvador est détruit et une partie de son personnel tué lors d’un affrontement violent dans les rues de Valence. Cette tragédie privant l’importateur de son principal fournisseur, la marque est alors rachetée pour être fabriquée directement au Japon (dans la ville de Nagoya). En 1962, le fils de Yoshitaro (Junpei de son prénom) reprend le flambeau familial et inaugure une nouvelle manufacture baptisée Tama Seisakusho factory. On y produit des guitares et des batteries jusqu’en 1966. À partir de cette année, la compagnie sous-traitera la majeure partie de la fabrication de ses guitares pour ne fabriquer que des percussions (sous la marque STAR qui deviendra plus tard TAMA).
Se cantonnant à l’origine aux influences européennes, de la six cordes espagnole aux répliques de guitares EKO et autres HAGSTRÖM, la marque IBANEZ suit la tendance des instruments américains pour produire des copies GIBSON et FENDER. Les affaires prospèrent jusqu’à la fin des années 70, où il faudra affronter un lourd procès avec une compagnie parente de GIBSON. Mais ce retour de bâton a du bon puisqu’il aboutira aux premiers modèles dits « modernes » de la marque : L’Iceman et la Roadstar (déclinées toutes deux en basse électrique). Fort de son succès, IBANEZ s’appuie alors sur des designs originaux et des concepts neufs (Manches conducteurs fins, touches à deux octaves, électroniques actives), pour devenir la référence que l’on connaît aujourd’hui.
La petite boutique des slappeurs
La BTB (acronyme de BouTique Bass) représente une des neuf familles de basses IBANEZ. Elle a été conçue pour reprendre les attributs d’un instrument dit « artisanal » à un prix restant accessible au grand public. Cette nouvelle BTB reprend les traits de son aïeule tout en proposant une électronique différente. Ni japonaise, ni coréenne, elle est fabriquée en Indonésie, le pays des orangs-outans et de la Javanaise.
J’ai toujours aimé les manches Ibanez, c’est pour moi l’un des ingrédients principaux du succès de la compagnie. Je commencerai donc par ce point en établissant une petite comparaison avec le manche d’une SR, un grand classique pour les connaisseurs de la marque.
Première chose à noter, dans la série BTB, tous les manches sont conducteurs. Le monobloc, on aime ou pas : c’est avant tout une question de choix. La conception mise donc sur le sustain en proposant un manche en 5 parties (3 plis d’érable pour deux de bubinga). Quelques mesures ont été revues légèrement à la hausse, quant au restre de la BTB :
- Le Diapason (35 pouces au lieu des 34 pouces de la SR)
- La largeur de la touche au sillet (41 mm pour 38 mm sur la SR)
- La largeur à la dernière frette (64mm pour 60mm sur SR)
De manière opposée, on remarque que l’épaisseur du manche est légèrement moindre. Le dos est un peu moins bombé que sur une Soundgear, on perd ainsi un demi-millimètre aussi bien à la première frette, qu’à la douzième. C’est ténu, mais pourtant tangible. Donc 24 frettes, soit une touche à deux octaves avec un petit détail sur la jonction manche/corps : La dernière case est découpée pour ne laisser sur la touche que le Sol et le Ré. Bon c’est joli, mais en toute franchise, je n’en vois pas vraiment l’utilité. Voilà beaucoup d’efforts pour condamner deux notes sur quatre (je parle bien sur du La et du Mi à la dernière octave) qui ne demandaient rien à personne.
Le parti pris, s’il est esthétique, peu paraître ingrat. Mais à cette altitude du manche, mis à part quelques férus de chorus haut perchés, cela ne devrait pas gêner grand monde. Nous avons donc un manche un poil plus large et légèrement plus fin : ça laisse plus de place aux doigts pour s’exprimer sans peser trop dans le jeu de la main gauche. Une mention est à délivrer pour la largeur des pans coupés qui offrent un bel accès aux aigus. Le diapason un peu plus long ne pose pas de problèmes et au niveau de la facilité de jeu, je dois reconnaître que la BTB est tout à fait confortable pour ma pogne.
La tête de manche, coordonnée au corps, reprend la découpe de la fin de touche. Elle est équipée de mécanique de type Gotoh (j’ai bien dit de type), ce sont des bains d’huile assez basiques en soi. Pour être tout à fait honnête, je les trouve personnellement un peu loin d’un standing « boutique bass ». Rien à voir avec le chevalier cordier et ses quatre pontets indépendants, qui pour le coup mettent tout à fait en confiance. Le corps en frêne est joliment travaillé sur son éclisse, le chanfrein qui fait le tour du corps conforte l’avant-bras et l’essence utilisée rend cette basse légère pour un manche conducteur. Si la pose des frettes n’a rien de remarquable, elle reste néanmoins correcte. La basse est montée avec un jeu de corde Élixir, un partenariat qui profite à une grande partie des références de la marque.
Électronique de course
Après la lutherie, passons s’il vous plaît à l’équipement moteur de cet instrument, à savoir ses micros et ce qui les contrôle. Sur ce plan, Ibanez n’a pas lésiné puisque la BTB 700 se voit équipée d’une paire de pavés EMG commandés par un égaliseur 3 bandes. C’est la nouveauté de cette édition du modèle (l’ancienne proposant des micros Bartolini MK2), une petite mise à jour qui inclut les réjouissances d’un contrôle semi-paramétrique de la bande médium. On a donc un volume appairé à une balance surplombant deux potards doubles : La bande médium enchâssée dans le contrôle semi-paramétrique et la bande aigüe qui surplombe celle des graves. Ça peut paraître sophistiqué, mais une fois la chose acquise, même un métalleux de base saura exploiter ce système attractif, pour qui veut se modeler un son selon ses envies.
J’en vois déjà s’offusquer. Permets-moi donc de te rassurer ami bassiste au tempérament musical hargneux et aux cheveux longs (sinon très courts ou alors dressés en pic sur la tête). J’ai parfois la vanne facile et je cherche surtout à faire comprendre aux lecteurs que cet instrument se destine à tes tribulations musicales. C’est ce que m’inspire en tout cas l’allure de la belle et qui vient se confirmer par la liste des artistes endorsés sur cette série (ou ayant recours officiellement à ses services). Mais ne limitons pas notre jugement à un simple préjugé de visu ou à l’orientation de marché, parfois gauche, induite par un service marketing.
Revenons donc au chapitre de l’électronique pour parler plus amplement des micros employés depuis peu sur cette série. L’EMG 40 DC est un micro essentiellement actif, le préampli embarqué étant la spécificité des capteurs de la marque. C’est un double bobinage composé de deux barrettes en céramique montées en parallèle. Le truc en plus du 40 DC, c’est sa surface d’induction plus large (10,2 cm). Celle-ci pouvant tout à fait reprendre le SI grave d’une cinq cordes, elle sied parfaitement à l’espacement légèrement plus large des cordes de la BTB. J’ai toujours trouvé les performances des micros EMG remarquables en de nombreux points. Performant dans les rendus extrêmes (aigus cristallins et basses toujours bien fournies), les capteurs de la marque sont réputés pour leur qualité sonore.
Il y a pourtant un hic personnel : les basses qui sonnent de manière trop chirurgicale n’ont jamais été à mon goût. Et même si je sais apprécier les qualités intrinsèques des productions de ce grand fabricant de micros, je dois reconnaître que le grain qu’il propose n’est pas de mes favoris. Mais comme je l’ai dit précédemment, l’heure n’est pas aux préjugés. Passons donc au compte rendu sonore, juste après que j’aie passé mon coup de gueule du jour : Je ne comprendrai jamais le paradoxe qu’imposent certains concepteurs d’instruments.
D’un côté on essaye de rendre la pile accessible rapidement, en affublant le compartiment prévu à cet effet d’une trappe aussi facile à ouvrir qu’elle ne l’est à être bousillée (c’est ici le cas). Et de l’autre, on enferme la tige de réglage derrière une plaque en plastique maintenue ancestralement non pas par trois, mais quatre minuscules vis, manifestement posées là pour faire enrager celui qui voudrait régler son manche. Résultat des courses, on finit avec du chatterton collé derrière sa basse dès les premiers changements de batterie et on paume la plaque du manche au bout de deux réglages, parce que se battre avec un tournevis pendant des heures ne convient généralement que deux secondes.
Voilà qui est fait, passons maintenant aux réjouissances sonnantes et percutantes.
Just play it !
Je commence ce chapitre en y incluant un détail omis précédemment, c’est en branchant mon jack que je viens d’y penser. L’entrée est sécurisée par un port NEUTRIK. Pour ceux qui ne connaissent pas les vertus de la chose, cela permet d’enfoncer son jack facilement, mais prévient tout arrachage fortuit de ce dernier. Pour débrancher le cordon, il faudra exercer une pression sur la petite excroissance rouge prévue à cet effet. Voilà un accessoire qui peut s’avérer utile quand on a recours à un jeu de scène musclé. Et c’est avec un esprit totalement en paix et sécurisé que j’entame donc la partie finale, ô combien importante et pourtant subjective, de ce banc d’essai.
Si je devais décrire le son, je dirais que je ne suis pas si loin de ce que j’attendais avec tout de même un petit plus. Pas si loin parce la touche EMG est bien là, dans la dynamique de la réponse, la brillance des aigus et la profondeur des graves. Rien ne bave, c’est propre comme un son neuf et il n’y a aucun parasite qui vient pourrir le rendu (ce qui n’est pas forcément difficile avec des doubles bobinages à basse impédance). Il y a bien sûr un niveau de sortie considérable, les contrôles réagissent au quart de tour, surtout le paramétrique qui permet de chasser efficacement la fréquence des médiums désirée.
Le son est assez droit, avec l’égaliseur à plat, les 40DC ne présentent pas plus de caractère que cela. On reconnaît presque le grain acoustique de l’instrument avec des graves légèrement soulignées. Les micros à basse impédance se reposent en général sur l’égaliseur pour prendre du caractère ; ici pas de dérogation à cette règle. On doit donc façonner soi-même son grain, du bout des doigts et avec les six contrôles posés sur la table. Maîtriser l’actif prend un peu de temps aux néophytes, mais un bon système en 9 volts (ou en 18V) couplé à des micros polyvalents permettent d’accéder à presque tous les désirs. Et là, il faut reconnaître que le couple contrôle semi-paramétrique et micros EMG fonctionne à merveille.
À défaut de sonner comme une standard (Jazz Bass ou Précision), cette BTB peut faire tout le reste. Et l’adjonction d’un contrôle des fréquences médiums ouvre encore plus grand les portes. Créer une bosse ou creuser précisément là où on veut permet des ajustements d’une grande finesse, l’idée étant de se rapprocher d’un son le plus transcendant possible. Je trouve pour ma part le rendu général efficace et même si elle en a les airs, le caractère et l’orientation de marché, cette basse ne se limitera pas aux affres du métal.
Ultra performante en Slap (EMG oblige), elle répondra à tous types de jeu musclé (Rock, Funk, etc.) avec éloquence. Les doigts, le médiator, le taping, strumbing et autres figures de style, tout passe plutôt bien sur la BTB. Pour les styles un peu plus roots, comme le Blues ou le Jazz, si l’Ibanez ne sera pas la plus adaptée à ces genres, elle donnera quand même le change au besoin.
- ibanez slap00:31
- ibanez micro grave00:41
- Ibanez micro aigu haut med00:26
- ibanez micro aigu bas mediums00:25
Dans la place…
Cette basse se place bien sur le marché, quand on la compare à ses concurrentes jouant dans la même cour. Proposant un manche conducteur, un égaliseur semi-paramétrique et une bonne paire de micros pour moins de 800 € ; la BTB plaira aux amateurs de belles actives, disposant d’un budget limité. À vous de voir, ou plutôt à vous de jouer !!!