Blue Microphones est une marque que les AFiens connaissent bien et certains de leurs micros ont connu un franc succès. Alors quand cette même marque ajoute pour la première fois un casque à son catalogue, forcément, cela attise notre curiosité…
Lorsque l’on surfe sur la page officielle du Mo-Fi, on voit clairement que le casque veut manger à tous les râteliers : celui des audiophiles (son nom est d’ailleurs un clin d’œil à la Hi-Fi), des utilisateurs nomades, mais aussi des musiciens/home-studistes. On voit un homme assis tranquillement devant sa collection de vinyles, un autre dehors devant un mur taggué, une femme devant son clavier maître et son MacBook et une autre personne dans son studio. Mais un seul et unique casque peut-il convenir à tout ce beau monde ? Ces personnes, dont le rapport à la musique et les attentes sont différents, peuvent-elles se satisfaire du même produit ? Quand certains recherchent le plaisir simple, d’autres se soucient de la transparence et de la fidélité. Le Mo-Fi réussira-t-il son pari ? C’est ce que nous allons tenter de voir.
I’m Blue, da ba di da ba da
À l’ouverture de la boite, le Mo-Fi est assez intimidant. Son look ne laissera personne indifférent, certains aimeront et d’autres non, question de goût personnel, mais la qualité de construction est en revanche indiscutable. Le casque a l’air très solide, entièrement en métal, et son poids conséquent (466 g) rajoute à cette sensation de robustesse.
Une fois sur la tête, le Mo-Fi ne se fera pas oublier et son poids se fait toujours sentir, même s’il reste assez confortable et qu’un réglage existe au sommet du crâne afin de s’adapter à toutes les morphologies. L’isolation passive est assez bonne, ce qui sera utile dans certaines situations, mais les personnes claustrophobiques pourront être gênées. Enfin, il est à noter que le Mo-Fi ne se plie que très peu et qu’il prend une certaine place, même une fois complètement rabattu (21 cm x 14 cm x 12 cm).
Dans la boîte, on découvre une pochette permettant d’y glisser son précieux ainsi que les câbles. Concernant ces derniers, le Mo-Fi en propose deux : un de 3 mètres pour une utilisation sédentaire et un plus court (1,2 m) doté d’une télécommande (trois boutons) pour une utilisation nomade. Ajoutez à cela un adaptateur pour avion et vous obtenez la configuration parfaite pour s’adapter à toutes les situations et éventuellement pouvoir changer de câble en cas de casse. On retrouve aussi le câble micro-USB permettant de recharger la bête. Une recharge complète dure entre 3 et 4 h, pour une autonomie totale de 12 h. Plutôt pas mal, sachant que le casque pourra quand même fonctionner avec la batterie à plat : l’ampli sera juste désactivé. De plus, le Mo-Fi s’éteint automatiquement quand il est fermé. Côté technique, sachez que le Mo-Fi a une impédance de 42 Ohms.
Get you love drunk off my amp
Car l’une des particularités du Mo-Fi est d’intégrer un ampli. On retrouve au niveau de la prise pour le câble une petite bague à trois positions permettant de choisir un mode en fonction de ses besoins. Le premier mode Off fonctionne sans batterie et reste donc passif. Le constructeur le recommande pour une utilisation studio, et si vous possédez déjà un ampli casque de qualité. Le mode On active l’ampli, afin de délivrer tout le potentiel du casque, et un son, d’après le constructeur, naturel et détaillé. Le dernier mode On+ améliore la reproduction des basses fréquences, pour que ces dernières soient plus « douces et profondes », toujours d’après Blue. Le constructeur recommande ce dernier mode pour l’écoute de vieux enregistrements pouvant éventuellement bénéficier de basses supplémentaires. Pourquoi pas. Il est tout de même à signaler que le Mo-Fi n’intègre aucun DSP et que tout le traitement est analogique.
Écoute
Afin de tester le casque, nous avons fait une écoute comparative avec les AKG K 702 et Parrot Zik 2.0 (dont le test sera publié demain), tous les trois reliés à notre PreSonus Monitor Station v2, elle-même reliée à notre Metric Halo ULN-8. Nous avons utilisé des titres non compressés.
Johnny Cash — Hurt
Le Blue Mo-Fi est bien moins brillant que les Zik 2.0 et K 702, notamment sur l’attaque de la guitare acoustique. Il a aussi un bas assez développé, bien plus que l’AKG et à peu près autant que le Zik 2.0, et on ressent une sensation d’enfermement due au côté très fermé du casque et à son relatif manque d’air par rapport à l’AKG. Le médium et le bas sont clairement mis en avant sur le Blue, ce qui donne une certaine chaleur au son, au détriment de l’air, et du détail par moment. Un autre bon point pour le Blue : il n’est jamais agressif. Le morceau, qui commence avec la guitare Martin de Johnny Cash, nous permet de détecter sur le Zik 2.0 un surplus vers 7/8 kHz qui a tendance à rendre l’attaque de la guitare avec le médiator un peu trop présente. Du coup, la voix de Cash passe un peu derrière, et c’est bien dommage. S’il le tout est bien détaillé, il y a une présence trop accentuée sur l’attaque des cordes de la guitare qui peut devenir gênante. La voix, en revanche, n’est jamais trop agressive, sauf lorsque la compression et saturation du morceau commencent à s’accentuer, mais c’est un effet voulu. Sur notre AKG K702, l’équilibre entre la voix et la guitare nous semble meilleur, et la guitare, bien que détaillée et précise, n’est jamais agressive.
Gorillaz – Feel Good Inc
Cette chanson va nous permettre d’écouter un peu plus attentivement le bas du spectre. Le Zik 2.0 se défend bien, avec un bas présent qui descend bien, agréable, mais pas boursouflé. On aime bien l’équilibre du bas du spectre avec le reste. La bosse vers 7/8 kHz se fait toujours ressentir, même si c’est un peu moins gênant sur ce morceau. Une fois le Mo-Fi chaussé, on tombe sur un son toujours un peu plus boxy, dû à la gestion du haut du spectre plus en retrait, donnant un sentiment de manque d’air comparativement aux deux autres casques. Le bas est assez présent (en mode normal), sans pour autant trop trainer et masquer le reste du spectre : c’est plutôt sec. En mode On +, les basses sont comparables au Zik 2.0 et ça descend assez bas. Avec le Blue, on est dans une écoute « in the face », avec une gestion très « physique » des basses. L’AKG reste très différent des deux autres casques, avec un bas beaucoup moins développé, laissant la part belle aux détails dans le milieu et le haut du spectre. Sa conception ouverte renforce bien évidemment ce sentiment.
Michael Jackson — Liberian Girl
On termine avec ce morceau de l’album « Bad » de Bambi. La nappe de l’introduction est retranscrite très différemment sur les trois casques, leurs bosses respectives mettant en avant certaines parties spectrales de la très riche nappe. Notamment un souffle à droite, qui ressort très bien sur le Zik 2.0 et l’AKG, et beaucoup moins sur le Mo-Fi. Le fait que les haut-médiums et les aigus soient un peu en retrait sur le casque Blue atténue quelques détails sur cette chanson. Le couple grosse caisse/basse sonne très plein sur le Blue, mais sans jamais masquer le reste. On reste quand même sur un son un peu claustrophobique et on aurait aimé avoir un peu plus d’air. Le Zik laisse le couple grosse caisse/basse un peu plus creux, avec toujours ce haut-médium/aigus en avant. Sur certaines sibilances, on ressent à cause de cela un peu d’agressivité, et à force, ça fatigue un peu. Comparativement, l’AKG ne donne aucune rondeur à la grosse caisse et à la basse, c’est très analytique : on peut aimer pour le mix, mais cela peut être un peu frustrant pour une écoute « plaisir ». Le haut du spectre de l’AKG est en revanche clairement au-dessous : c’est détaillé et aéré sans jamais être agressif. Toujours un must à ce niveau. Côté image stéréo, nous avons trouvé le Zik 2.0 assez étroit, surtout vis-à-vis de l’AKG. En revanche rien à signaler du côté de la dynamique, c’est du tout bon pour les trois casques.
Pour résumer, nous avons trouvé que le Blue Mo-Fi avait un bas du spectre plutôt bien géré, descendant assez bas sans pour autant masquer le reste du spectre. La chose qui nous a moins convaincus est le haut du spectre, nettement en retrait par rapport à nos deux autres références, donnant un son plus terne, moins d’air et de détails dans certaines circonstances. Cela peut-être gênant en situation de mix, moins en écoute « plaisir », d’autant que le Mo-Fi a le bon goût de ne jamais être agressif.
Conclusion
Le Mo-Fi a quelques avantages pour lui, à commencer par un look qui ne laisse pas de marbre et une qualité de construction excellente. Il est fait pour durer. Intégrer un ampli sur mesure dans le casque est bonne idée initiale, et permet de pouvoir gérer d’une manière analogique les basses fréquences. C’est plus dans le haut du spectre que le Mo-Fi nous a moins convaincus, manquant clairement de détail et de niveau dans cette partie du spectre pour une écoute en situation de mix. Néanmoins, en écoute « plaisir », certaines personnes pourront apprécier sa non-agressivité et son isolation.