49 touches semi-lestées, 8 pads, 8 potards, un joystick, une banque d’instruments General Midi, un HP intégré, une prise casque plus quelques petits bonus originaux, voilà la recette que nous propose aujourd’hui CME avec le U-Key Mobile Tone. Dans la ligne de mire : souplesse, portabilité, autonomie… Bref, du simple et du pratique dont nous allons sans plus tarder nous enquérir.
49 touches semi-lestées, 8 pads, 8 potards, un joystick, une banque d’instruments General Midi, un HP intégré, une prise casque plus quelques petits bonus originaux, voilà la recette que nous propose aujourd’hui CME avec le U-Key Mobile Tone. Dans la ligne de mire : souplesse, portabilité, autonomie… Bref, du simple et du pratique dont nous allons sans plus tarder nous enquérir.
Avec ses potards translucides assortis à une sérigraphie vert d’eau très poupée Barbie, ses petits pads neigeux et son Joystick bonbon à la menthe, le U-Key possède incontestablement un look de gros joujou débonnaire. CME, qui propose en général des designs assez classiques, (malgré le joli rouge de la coque, le panneau avant des séries UF est plutôt sévère, non ?) a certainement voulu ici briser la glace en présentant un produit à l’air sympa et un peu enfantin, propre à rassurer les hypocondriaques de la technologie, ce en quoi on peut avouer une certaine réussite, car le U-Key ne jurera absolument pas dans le décor d’une chambre d’enfant de 6 ans. Mais attention, n’allez pas croire pour autant que cette robe acidulée soit le signe d’un manque de sérieux, car dès les premières manipulations, on constate que, fidèle à sa réputation, le fabricant chinois en connaît déjà un long chapitre sur l’art de concevoir solidement un clavier.
Et le sérieux débute dès le déballage de l’engin qui doit être conduit avec le plus grand soin : attention en effet aux bandes de protection adhésives destinées à maintenir les touches en place lors du transport ! Avec une remarquable pugnacité dans la volonté de gluer, elles s’agrippent si fort aux keys de notre Mobiletone qu’il faut une bonne dose de douceur et de calme pour pouvoir les décoller sans dégât. Si vous êtes donc plutôt du genre « j’arrache le sparadrap d’un seul coup sec et fort », maîtrisez ici vos instincts sous peine de faire perdre quelques dents à votre nouveau clavier, ce qui serait du plus mauvais effet, même si certaines sont noires…
Construction et réponse solides
D’emblée, on reconnaît le clavier CME (le même que celui des UF), avec ses touches plutôt larges et très plates, dotées d’une bonne amplitude de course, que ne vient pas limiter ici l’épaisseur très réduite du clavier qui ne dépasse pas 4 cm. La réponse du semi-lestage est bonne, et l’on s’adapte facilement au toucher, quel que soit le style d’instrument à jouer, d’autant plus que nous disposons d’un paramétrage de réponse à la vélocité proposant une dizaine de courbes pour ajuster facilement le feeling du clavier à l’instrumentiste. Le Joystick, très ergonomique, et assignable à n’importe quel contrôleur Midi, renchérit largement sur cette maniabilité sonore et cette accessibilité à l’interprétation des différentes habitudes de jeu.
Les pads, à leur tour, subtilement illuminés de bleu, s’avèrent également suffisamment tactiles et sensibles à la vélocité pour des déclenchements relativement précis autorisant une programmation facile. Enfin, les potards, malgré leur aspect vaporeux, se révèlent tout à fait solides et consistants, offrant un bon contrôle général des flux de données, celui-ci étant d’ailleurs paramétrable grâce à 3 courbes d’accélération. Rien à dire, si le MobileTone est un petit clavier par la taille et le poids (3.3 kg), il est cependant pourvu de tous les atouts physiques d’un clavier de contrôle efficace et performant.
Eurékâ, j’ai du son !
Ah, mais c’est qu’on a presque l’impression de se retrouver 15 ans en arrière, l’époque bénie où, dans un clavier, il y avait toujours du son ! Eh oui, il suffisait alors de brancher, et bling, un beau chant de piano étincelant ou de nappe céleste vous faisait immédiatement oublier le découvert généré à coup sûr par la nouvelle craquerie. Et là, c’est du tout pareil : pas de câbles à brancher, sauf la connexion USB, pas de driver à installer (la bécane reconnaît tout de suite un périphérique audio USB générique), pas de programme à lancer, pas de sons à charger en mémoire : ça joue tout de suite ! Incroyable, hein ?
Et c’est là la grande originalité du U-Key qui mérite bien ici son surnom de MobileTone.
En effet, grâce à ses petits haut-parleurs intégrés sous la coque, et à son générateur de son au format GM, comprenant les traditionnels 128 instruments Midi allant du grand piano à la sonnerie de téléphone, on peut s’éclater hic et nunc sans se prendre la tête. On peut même, et là ça en devient presque un blasphème, se passer d’ordinateur ! Oui, on se procure un adaptateur secteur pour alimenter le biniou sans USB, et l’on possède un clavier entièrement autonome, avec une entrée/sortie Midi, pour pouvoir même commander d’autres modules sonores, une prise casque et une sortie ligne stéréo, les 2 en mini-jack, et une prise pour une pédale de contrôle (volume ou sustain…), également (dommage !) en mini jack. Attention cependant, le U-Key n’est pas une carte son et ne permet ni l’acquisition de flux audio, ni la lecture de pistes en provenance de l’ordinateur. Seules les données Midi séquencées sur l’ordinateur peuvent être lues avec les instruments du générateur Midi du U-Key grâce à la connexion USB.
Notons en outre dans la rubrique clavier maître quelques fonctions bienvenues comme le traditionnel split du clavier en 2, ou la fonction de doublage Midi qui permet de faire jouer le clavier sur 2 canaux Midis simultanément, pour créer des layers et des effets sonores. Cette possibilité originale, très créative, est renforcée par la possibilité de désaccorder un canal par rapport à l’autre : bien vu !
3 modes
L’ergonomie du U-Key est simple, tout en étant suffisamment sophistiquée. Tous les réglages se font avec un led bleu à 3 chiffres et les touches du clavier, qui, grâce à un bouton Shift, permettent d’accéder directement à tous les paramètres, sans avoir à se balader dans d’interminables menus. L’incrémentation des données s’effectue au moyen d’un encodeur rotatif, ou grâce à une dizaine de touches du clavier assignée de 0 à 9 : très pratique ! Le Joystick quant à lui, permet, en plus de sa fonction classique à 4 vecteurs, de sélectionner les 3 modes de fonctionnement du clavier, clairement repérables par des diodes placées à côté.
Le premier mode, baptisé Song, est entièrement dédié au Midi. Dans ce mode, des séquences Midi peuvent être assignées à chacun des pads, pour pouvoir être déclenchées facilement. Différents modes de lecture sont proposés, permettant notamment de lire plusieurs fichiers à la suite (on enfonce simultanément plusieurs pads) et de créer des boucles. Ici, les potards servent de contrôle de volume aux différentes pistes Midi. On peut ainsi mixer en direct jusqu’à 7 instruments, le huitième contrôleur servant de contrôle master.
Le second mode, Master, est plus directement destiné au jeu de clavier. On peut affecter les différents sons de la banque GM au clavier, et utiliser les potards pour éditer ce son, grâce à différents paramètres de sound design, comme l’enveloppe, la résonnance, le vibrato, le délai…. Sur les pads, sont alors assignés divers one-shots de drums : grosse caisse, charlé, toms… pour pouvoir programmer des patterns rapidement.
Enfin, le 3e mode est plus spécialement dédié au contrôle d’un ordinateur. Il permet d’affecter des numéros de note ou de contrôle Midi à n’importe quel potentiomètre, pad, ou touche du U-Key, permettant de créer des configurations Midi complexes pour effectuer des contrôles précis et adaptés à chaque projet.
Notons enfin qu’un bouton lumineux très élégant en forme de lune et étiqueté U-Control, permet de passer dans une sorte de mode télécommande simplifié, chaque contrôleur physique étant alors préréglé selon les presets de la Mackie Control. Si votre séquenceur reconnaît la Mackie dans sa liste de compatibilité, vous pouvez ici vous passer d’assigner chaque contrôleur, les pads et les potards étant automatiquement assignés aux différents contrôles classiques (volume, mute, solo, record ready…), la sélection des 3 modes et le bouton shift permettant d’augmenter la diversité des contrôles. Heureusement, la notice, qui bien que traduite en français reste en général assez obscure et succincte, procure des tableaux de correspondance clairs et pratiques.
Insane in the Brain
Sur le site de CME, il est possible de télécharger un petit utilitaire permettant des transferts de données entre un ordinateur (version XP uniquement disponible) et le clavier via la prise USB. Dénommé U-Key Brain, le petit soft en est encore à sa version expérimentale, si l’on en juge par les bugs d’affichage (jugez-en par vous-même) qu’il comporte, et qui transforme son interface graphique en une sorte de Sudoku pour joueur confirmé. Mais on le sait bien, dans la course aux armements, les éditeurs préfèrent sortir un produit vite et pas fini que plus tard et fonctionnel. Si CME ne fait pas exception à la règle, ne soyons tout de même pas trop méchant, car le soft procure tout de même déjà quelques fonctions, et surtout, le mode de transfert des fichiers Midi vers le clavier. Ainsi, il suffit de placer ses séquences Midi dans le dossier d’installation du soft sur la bécane, et l’on peut ensuite les envoyer d’un seul clic (elles apparaissent sur un menu déroulant) vers l’un des 8 pads du clavier.
Attention, U-Key Brain n’est pour l’instant compatible qu’avec le format Midi 0, qui a pour particularité de regrouper tous les instruments sur une seule piste. Les chansons au format Midi 1, qui propose une piste séparée par instrument, devront donc être converties au préalable en 0 au moyen d’un utilitaire de conversion, par exemple l’excellent freeware GN1:0 (www.gnmidi.com).
Le soft permet également d’updater directement le système d’exploitation du U-Keys en téléchargeant des mises à jour sur le site du fabricant, ainsi que de paramétrer sur l’écran les contrôleurs physiques du clavier en leur assignant d’un seul clic le numéro de contrôleur Midi désiré. Mais pour cette dernière opération, on devra attendre une version un peu moins chaotique au niveau du graphisme, qui ne saurait certainement pas tarder !
Gamme en rUt
L’une des fonctions les plus originales du U-Key, c’est sans conteste sa possibilité d’adapter son clavier à différentes gammes. « Kesky raconte ? » pensez-vous probablement, puisque, bien sûr, n’importe quel clavier permet de faire différentes gammes, la seule contrainte étant de jouer les bonnes touches correspondant à la gamme. Et c’est là que U-Key yukaïda, car grâce au mode Scale, on peut affecter toutes les notes du clavier à une sorte de gamme, à choisir parmi une quarantaine : penta, mineures, be-bop, augmentées, hindoues, javanaises, hongroises, arabes, espagnoles, indonésiennes… Un vrai tour du monde gratuit !
En clair, on choisit par exemple la gamme penta, pour rester dans le domaine de l’universellement connu, et toutes les touches du clavier sont affectées aux 5 notes de la gamme penta, à savoir, en do, pour les cancres : Do, Ré, Mi, Sol, et La ! Ce qui signifie que toutes les autres notes du clavier sont aussi affectées aux notes de la gamme penta. Ainsi, le Do dièse du clavier jouera le Do bécarre de la gamme, tout comme le Fa et le Fa dièse joueront également le Mi. Vous me suivez ? Ainsi, il vous est possible de vous essayer à la composition dans les styles les plus worldissimes qui soient sans savoir un gramme de piano. Il suffit de poser ses gros doigts bien à plat sur les touches pour entendre s’élever jusqu’aux cieux les mélodies les plus sirupeuses et les accords les plus cristallins. Quel sentiment de puissance, comme dirait tonton Nietzsche ! Et le plus fort, c’est que cette fonction marche non seulement pour les sons internes de notre bêbête, mais aussi pour la transmission Midi, ce qui fait qu’on peut l’utiliser avec n’importer quel séquenceur. C’est pas top, ça ?
De plus, en assignant des sons non accordés, comme des drums ou des percussions, on peut tirer pleinement parti du dédoublage des notes du clavier pour créer facilement des roulements et des polyrythmies habituellement impossibles à réaliser facilement avec un clavier traditionnel.
Enfin, cette fonction est doublée d’un mode de paramétrage de tempérament, qui permet de comatiser différents degrés de la gamme (une quinzaine de presets sont proposés) pour obtenir les saveurs de la musique arabe et indienne. Et le mieux, c’est que là encore, les écarts à notre sacro-saint tempérament sont transmis en Midi dans un séquenceur externe sous forme de données de modification de pitch, pour pouvoir être utilisés avec n’importe quel VSTi.
Conclusion
Hybride, c’est certainement le mot qui désigne le mieux ce nouveau concept de clavier lancé par CME, qui mélange dans une seule unité ultra-portable, et donc particulièrement destinée aux voyageurs, un générateur de son, un lecteur de fichier Midi, et un module de contrôle. Alors certes, dans ces différents domaines, le U-Keys reste modeste, aussi bien au niveau des sons très corrects, mais basiques, que des contrôles (8 pads et 8 potards seulement).
Cependant, en offrant un clavier doté d’une bonne réponse, et de nombreuses petites fonctions très musicales, avec notamment un véritable outil de coloration des gammes et des tempéraments, il s’avère à la fois très versatile et pratique aussi bien pour un musicien nomade voulant simplement piloter son laptop, que pour un keyboardiste soucieux d’aller répéter sans sortir la camionnette, que pour un débutant désireux de découvrir les joies du clavier seul tout en pouvant profiter éventuellement d’une interface performante avec son ordinateur…
Et c’est cette polyvalence, suffisamment bien étudiée pour ne pas sacrifier à des détails indispensables à tous ses domaines d’utilisation, qui fait la force et l’attrait de ce nouveau style de clavier dont le U-Key est sans aucun doute le convaincant précurseur.