Test des moniteurs iLoud Precision 6 MKII - Precision 6, le retour !

La série iLoud Preci­sion et la place des Preci­sion 6 MKII

Les moni­teurs IK Multi­me­dia se suivent, et ne se ressemblent pas forcé­ment. La marque italienne a inondé le marché ces dernières années, prin­ci­pa­le­ment avec de petites paires pas bien chères, mais insiste aussi depuis trois ans sur des produits plus ambi­tieux. La série Preci­sion, qu’on avait décou­verte en 2023, était le haut de gamme des moni­teurs iLoud du construc­teur, et voici main­te­nant la deuxième mouture – MKII – de cette même série. Comme l’ori­gi­nale, elle se décline en trois modèles : Preci­sion 5 pour un haut-parleur cinq pouces, Preci­sion 6 pour six pouces et demi, qu’on teste aujour­d’hui, et enfin les MTM qui ont deux haut-parleurs cinq pouces en plus du twee­ter. Depuis son origine, la série avait pour carac­té­ris­tique d’in­té­grer beau­coup des outils numé­riques qui ont marqué les géné­ra­tions récentes de moni­teurs : la marque était une des premières à propo­ser son propre système de correc­tion de pièce, mais aussi des simu­la­tions de systèmes moni­to­ring alter­na­tifs, et une commande à distance du DSP des enceintes par un logi­ciel depuis l’or­di­na­teur. On retrouve bien évidem­ment cet esprit dans la MKII, qui prolonge le travail d’IK Multi­me­dia sur le DSP des moni­teurs et toute la palette de ses possi­bi­li­tés. Une préci­sion impor­tante, cette nouvelle version est vendue autour de 1900€ la paire, soit moins chère que la première à sa sortie (2400€). Son prix la situe aux côtés de modèles comme les Gene­lec 8040, les HEDD Type 07, qui sont de très belles réfé­rences !

Premier contact avec les moni­teurs iLoud Preci­sion 6 MKII

Les Preci­sion 6 nouvelles ressemblent fort à leurs aînées, ainsi qu’à la majo­rité des enceintes iLoud : longi­lignes, unifor­mé­ment noires, aux bords légè­re­ment incur­vés et aux angles arron­dis. À l’avant, au-dessus du haut-parleur, on trouve un twee­ter 1,5'' renforcé au graphène, nouveau maté­riau utilisé par la marque, et le logo IK qui sert d’in­di­ca­teur lumi­neux dans divers contextes. Le construc­teur précise que l’en­ceinte elle-même a été opti­mi­sée pour réduire les réso­nances indé­si­rables. Au dos des moni­teurs, on retrouve, comme souvent chez IK Multi­me­dia, un certain nombre d’in­ter­rup­teurs, de LED, et même de connec­tiques, ainsi qu’un évent Bass reflex. Sans trop rentrer dans les détails, voici les réglages à dispo­si­tion. Les fréquences graves peuvent être utili­sées dans leur inté­gra­lité, ou bien filtrées à 50 Hz ou 80 Hz. Deux égali­seurs permettent d’aug­men­ter ou de dimi­nuer des étages LF en dessous de 100 Hz et HF au-dessus de 10 kHz. Un filtre Desk est acces­sible pour limi­ter les fréquences accen­tuées par la surface sur laquelle reposent les enceintes. On trouve égale­ment un rota­tif de volume, qui n’est pas cranté, ce qui ne nous satis­fait pas beau­coup, pour des raisons évidentes de cohé­rence entre les deux moni­teurs : on s’en servira donc soit au mini­mum, soit au niveau 0 où un léger cran arrête la course, soit au maxi­mum. Côté connec­tique, on peut entrer en XLR ou en jack, on trouve une deuxième entrée XLR pour connec­ter un micro de mesure, un port USB vers l’or­di­na­teur, ainsi qu’une prise mini-jack pour une télé­com­mande du DSP. Chaque enceinte est livrée avec le cordon d’ali­men­ta­tion, un câble USB, un micro de mesure IK Multi­me­dia, ainsi que quatre pads d’iso­la­tion en caou­tchouc. La puis­sance d’am­pli­fi­ca­tion totale pour les deux voies est de 150 W RMS, pour un niveau maxi­mal continu de 103 dB SPL, ce qui n’est pas énorme pour cette caté­go­rie de moni­teurs.

Cali­bra­tion ARC X des iLoud Preci­sion 6 MKII et correc­tion de pièce

Comme on l’a abordé plus haut, IK Multi­me­dia s’est spécia­lisé depuis quelques années dans la correc­tion, ici appe­lée Cali­bra­tion et incar­née par le système ARC X, succes­seur de l’ARC et du X-Moni­tor. Brisons la glace sur le sujet, la correc­tion de pièce inté­grée aux enceintes, on est pour ! Mais on sait d’ex­pé­rience, et pour en avoir parlé avec de nombreux tech­ni­ciens, utili­sa­teurs, et ingé­nieurs qui déve­loppent ces produits, que plus l’en­ceinte a besoin d’être corri­gée, plus vite on attein­dra les limites du DSP, du proto­cole de mesure, etc. Dans l’idéal, on veut une enceinte qui sonne déjà très bien sans aucun filtre ni correc­tion, et le DSP vient ensuite travailler légè­re­ment pour compen­ser l’acous­tique de la pièce. En testant la première géné­ra­tion Preci­sion, on avait été assez impres­sion­nés par la correc­tion (d’au­tant plus que c’était, de notre expé­rience, une des premières paires qui permet­taient ça) et les possi­bi­li­tés du X-Moni­tor, mais il nous avait semblé que les enceintes partaient d’un peu loin, et on sera donc atten­tifs ici à la réponse de la MKII avant de se lancer dans une cali­bra­tion.

Écoute des iLoud Preci­sion 6 MKII sans correc­tion ni DSP

On commence par écou­ter les moni­teurs sans aucun réglage ni filtre, sur nos morceaux de réfé­rence habi­tuels. Après un petit tour d’ho­ri­zon, un premier constat s’im­pose : on perçoit des fréquences graves nette­ment trop fortes. Le construc­teur assure que ses moni­teurs peuvent se passer d’un sub en complé­ment, et qu’ils descendent jusqu’à 37 Hz, on ne lui donnera pas tort sur ce point, mais, pour nous, c’est déséqui­li­bré. Les enceintes étant posées sur la console (avec leurs pads d’iso­la­tion), on va rapi­de­ment tester l’uti­li­sa­tion du filtre Desk, dans l’objec­tif de compen­ser les fréquences ampli­fiées par la surface. Comme on s’en doutait, le filtre concerne des fréquences bas-médium, or c’est bien plus bas, surtout, qu’on trouve ces enceintes un peu trop géné­reuses. On va donc plutôt utili­ser le HPF, ou l’étage en dessous de 100 Hz, pour rééqui­li­brer cet aspect. En réalité, le coupe-bas offre quatre posi­tions : 35 Hz, 50 Hz, 65 Hz ou 80 Hz. On essaie à 35 Hz, puis à 50 Hz, puis on revient à 35 Hz combiné à une dimi­nu­tion de 1,5 dB en dessous de 100 Hz, et c’est dans cette confi­gu­ra­tion qu’on trouve le plus natu­rel­le­ment nos repères.

Radio­head – 15 Step

Une fois ce problème réglé, on est assez agréa­ble­ment surpris par l’équi­libre de l’en­semble, et même fran­che­ment séduits. IK Multi­me­dia a travaillé sur la linéa­rité et l’ali­gne­ment dans le temps des fréquences – sans donner plus de préci­sions sur ce travail – et on perçoit en effet dans la netteté des tran­si­toires et la préci­sion de l’image stéréo le résul­tat de cette amélio­ra­tion. Les épais bas médiums de la guitare à gauche sont bien là, tels qu’on les connaît.

Kendrick Lamar – Alright

Les moni­teurs sont en effet très à l’aise dans le bas, et la ligne de basse reste vrai­ment cohé­rente, même quand elle plonge dans les profon­deurs. Comme sur le titre précé­dent, les tran­si­toires des hi-hats et caisses claires, des consonnes de la voix, nous frappent par leur préci­sion. La disso­cia­tion des éléments et la lisi­bi­lité de l’image stéréo sont très inté­res­santes. On est encore sur une écoute géné­reuse dans le bas, il faut le garder en tête, mais cohé­rente et agréable.

Le système ARC X des iLoud Preci­sion 6 MKII en détail

Évidem­ment, le système de correc­tion ARC fait partie de la propo­si­tion, et même si ce n’est plus la nouveauté exci­tante d’il y a trois ans, c’est toujours un atout majeur pour une paire de moni­teurs. Pour accé­der à cela, il faut tout d’abord instal­ler le logi­ciel de contrôle distant du DSP. On lance donc ARC X, succes­seur du X-Moni­tor, et le logi­ciel détecte rapi­de­ment les deux Preci­sion 6 connec­tées en USB. Si vous êtes fami­liers avec l’ARC ou d’autres systèmes de correc­tions, les lignes suivantes ne vous appren­dront rien, mais il faut bien qu’on décrive un peu la procé­dure. Le micro de mesure est connecté à la carte son, et de premiers signaux servent à régler le niveau d’en­trée. Ensuite, on place le micro à sept lieux diffé­rents, le premier au point d’écoute, les six suivants autour. À chaque endroit, les enceintes, l’une après l’autre, émettent quelques balayages de fréquences, la mesure dure au total envi­ron six minutes. Une fois tout cela effec­tué, on atter­rit dans la fenêtre Edit du logi­ciel, où une correc­tion nous est propo­sée et appliquée par défaut. On peut ici contour­ner cette correc­tion pour écou­ter avec et sans, la visua­li­ser, et même la modi­fier – on y revien­dra plus tard. La repré­sen­ta­tion graphique nous renseigne sur les fréquences mesu­rées, en bleu, le résul­tat de la correc­tion propo­sée, en rouge, la réfé­rence en gris poin­tillé, et la cible en gris plein. La cible par défaut n’est en effet pas la réfé­rence linéaire, mais une courbe qui augmente légè­re­ment le grave et baisse légè­re­ment les hauts médiums et aigus… éton­nant. Il faut ici préci­ser qu’une autre option existe, puisqu’on peut procé­der à la cali­bra­tion depuis les moni­teurs, en connec­tant direc­te­ment le micro de mesure à une enceinte, puis à l’autre. À l’aide du bouton Cal/Preset situé sur le panneau arrière, on peut ainsi mesu­rer quatre lieux autour du point d’écoute, et obte­nir une cali­bra­tion pour chaque moni­teur, enre­gis­trée dans leurs DSP respec­tifs. On a privi­lé­gié la cali­bra­tion depuis le logi­ciel décrite précé­dem­ment, et on se projette rapi­de­ment sur une écoute pour concré­ti­ser cette étape.

Mode­rat – A New Error

Comme on l’avait pres­senti depuis le début, une correc­tion très impor­tante est appliquée dans le bas, puisqu’une bosse très impor­tante est mesu­rée autour de 40 Hz. À l’in­verse, entre 60 et 100 Hz, la correc­tion agit en posi­tif pour compen­ser un manque. La correc­tion est très effi­cace et bien­ve­nue, on retrouve de la cohé­rence dans toute cette zone grave si impor­tante pour ce type de musique élec­tro­nique, où le kick et les basses sont les vedettes. Si on change la cible, pour la remettre à plat comme la réfé­rence, on se rapproche encore des habi­tudes qu’on a sur ce morceau avec les enceintes Gene­lec du studio, avec une présence accrue des caisses claires, et des basses un peu moins domi­nantes.

La correc­tion peut donc être adap­tée, et ce, de plusieurs manières. Tout d’abord, sur la repré­sen­ta­tion graphique, on trouve six points d’éga­li­sa­tion para­mé­trique. Chaque point peut être libre­ment changé de fréquence, la largeur de la bande et son gain peuvent être modi­fiés dans le détail, les extrêmes peuvent être utili­sés en étage (ils le sont par défaut). En revanche, pas d’éga­li­sa­tion dispo­nible lorsqu’on contourne la correc­tion. Dommage, on aurait aimé faire une correc­tion manuelle et la compa­rer rapi­de­ment à celle propo­sée par l’ARC X. L’autre manière de travailler la cali­bra­tion, c’est de modi­fier sa cible ou sa réfé­rence. En main­te­nant la réfé­rence à plat par défaut, on peut donc, comme on l’a vu précé­dem­ment, viser des courbes légè­re­ment orien­tées vers le grave ou les aigus, suppo­sées repro­duire des habi­tudes d’écoute comme « Stan­dard Control Room » ou « Lively Room ». La démarche de corri­ger une pièce exis­tante pour en simu­ler une autre hypo­thé­tique pose un peu ques­tion, mais pourquoi pas… Quelle que soit cette courbe visée, on peut égale­ment choi­sir une autre réfé­rence que la réponse en fréquence linéaire, et là, ça se corse un peu. Comme sur les modèles précé­dents de l’ARC, on nous propose ici d’autres modèles de moni­teurs de studio, ainsi que des écoutes hi-fi, des enceintes Blue­tooth ou télé­phones portables. On n’a jamais été des adeptes de cette partie-là de l’ARC, et les courbes présen­tées comme celles des réfé­rences ATC, Gene­lec ou Neumann ne collent pas vrai­ment avec l’ex­pé­rience qu’on a de ces modèles de moni­teurs. D’autres options inté­res­santes sont dispo­nibles, comme le fait d’uti­li­ser l’éga­li­seur en phase linéaire ou natu­relle. L’ARC X peut par ailleurs être utilisé en plug-in, ce qui ouvre encore d’autres possi­bi­li­tés à la marge. La petite télé­com­mande en option permet de chan­ger de profil, on peut attri­buer à chacune de ses quatre touches diffé­rentes cibles dispo­nibles dans un menu.