Dans la tendance à la démocratisation et miniaturisation du matériel audio, KRK a déjà de l'expérience. La série GoAux en rajoute une couche avec de tout petits moniteurs prévus pour être transportés et installés très facilement.
Pour situer le type de produit auquel on est confrontés, les paires d’enceintes GoAux sont faites pour être transportables, petites et légères, et s’adressent davantage aux amateurs ou petits home-studios qu’aux studios professionnels. La paire se vend aux alentours de 450 €, donc on est plutôt dans un produit d’entrée de gamme du monitoring, mais ce n’est pas donné non plus. Et c’est d’ailleurs un peu plus qu’une paire de moniteurs qu’on reçoit, puisqu’il s’agit en fait d’un pack, incluant une housse de transport, les câbles nécessaires, deux supports en plastique et un petit micro de mesure. La housse est bien conçue, pratique pour transporter ce petit système et des câbles ou autres en plus, les supports sont de petits plateaux qui peuvent s’incliner pour que les enceintes visent vers le haut, à divers degrés. On comprend là que ces moniteurs sont pensés pour être posés sur un bureau, et non sur des pieds ou une console comme on le fait souvent en studio. Les enceintes GoAux 4 sont très petites, aux formes arrondies, et naturellement légèrement orientées vers le haut. Leurs deux haut-parleurs sont protégés par des grilles, et on retrouve la signature de la marque KRK, une membrane jaune sur le haut-parleur bas, petite touche colorée sur un ensemble noir. Si on regarde un peu ce qui se fait sur le marché dans cette gamme de produits, cette paire n’est pas particulièrement bon marché : beaucoup de marques proposent des 4 '' à partir d’une centaine d’euros (l’unité), et même chez KRK une paire de RP5 Rokit Classic est nettement moins onéreuse ! L’argument principal des GoAux, c’est donc bien leur portabilité, leur taille, leur poids. Elles mesurent 205 mm de haut pour 136 mm de large et 140 mm de profondeur, et en effet, c’est minuscule ; le pack complet, les deux enceintes et tout le reste, pèse 4,3 kg, ce qui ne risque pas de nous faire mal au dos. Il n’y a pas beaucoup (peut-être pas du tout) de modèles à ce point portables — compacts — faciles à déplacer et à installer, sur le marché.
Kompact monitoring
Étant donné leur format, on n’est pas complètement surpris que la connectique soit un peu différente de celle de nos moniteurs habituels. Toutes les entrées et tous les réglages se font sur une seule enceinte, qui est supposée être celle de gauche (en théorie, car pour nous, c’était bien plus simple de la mettre à droite pour accéder ensuite au panneau arrière – on a donc dû inverser la stéréo en amont pour la retrouver sur la paire GoAux). On entre en deux jacks TRS la stéréo à l’arrière de cette même enceinte, où on aurait également pu entrer en RCA, ou encore en USB. À noter par ailleurs la présence d’une entrée Aux en jack 3,5 mm mais aussi la possibilité de recevoir un signal Bluetooth. La connexion Bluetooth peut sembler gadget, mais cela s’avère assez utile pour écouter des références pendant des sessions de prise ou mixage. Plus original, la deuxième enceinte (censée être à droite) est connectée à la première par un câble dédié, branché sur des prises 4 pin, qui apportera le courant et le flux audio. L’alimentation, uniquement sur le moniteur de gauche donc, ne se fait pas par le traditionnel Schuko mais par un cordon bipolaire sans terre, ce qui ne nous inspire pas une grande confiance, mais on est dans le système compact donc c’est plutôt cohérent. Le fait d’avoir un branchement unique pour la paire est assez malin aussi, pour un monitoring portable. En repassant côté avant des enceintes, on trouve un potentiomètre de volume, sans précision de niveaux en dB et à rotation infinie, qui sert aussi à mettre les moniteurs en veille. Et pour finir, deux branchements se trouvent à gauche, l’un pour le micro ARC (sur lequel on reviendra plus tard) et l’autre pour brancher un casque qui se substituera aux enceintes… pourquoi pas. Si on fixe les GoAux sur leurs supports dédiés — c’est très facile et rapide — on peut choisir l’inclinaison vers le haut de la paire, à différents degrés, ce qui s’avérera utile pour celles et ceux qui travaillent sur un bureau. Le système est bien fait et semble plutôt solide.
Une corde de plus à son ARC
Comme on a pu l’expérimenter plusieurs fois récemment, la grande mode chez les constructeurs d’enceintes de monitoring, c’est de proposer un système de calibration automatique avec leurs nouveaux modèles. Avec l’aide d’un micro de mesure, souvent d’un logiciel de contrôle à distance, le DSP des moniteurs optimise leur réglage en fonction des caractéristiques acoustiques de la pièce. Ces corrections automatiques peuvent être d’une grande utilité quand elles sont bien faites, et on en a testé de très efficaces sur des modèles (bien) plus chers. KRK s’est donc mis au diapason et propose un ARC (Automatic Room Correction) version légère, proportionnée aux enceintes et à leur prix. Un petit micro à positionner au point d’écoute, deux clics sur un bouton derrière et la calibration se lance. Le processus est assez rapide, on n’entend pas une grande différence, et on manque un peu d’explications sur ce qui s’est passé. Habituellement ce processus passe par un logiciel qui nous donne un aperçu des mesures relevées avant d’activer des filtres ou autres réglages, ainsi on comprend ce qui se passe et parfois même, on peut l’affiner, mais ici tout se passe dans la boîte noire de gauche sans aucune transparence… pas très convaincus de l’efficacité de cette autocalibration. On est allé sur le site du fabricant, voir si on pouvait accéder à plus d’informations sur cet ARC, en vain… cela reste assez mystérieux.
Go Sport
Assez tourné autour du pot, il faut maintenant les écouter ces enceintes ! Il se trouve qu’on a des KRK Rokit 5 qui traînent au studio et qu’on connaît un peu, on va donc choisir de les utiliser comme modèle de référence, plutôt que de comparer les GoAux à nos moniteurs habituels dont les haut-parleurs sont plus larges et qui se situent dans une gamme de prix nettement plus élevée. La première impression, en faisant défiler quelques morceaux et en alternant les deux paires de KRK, est que ces GoAux se défendent très bien dans le bas pour leur taille, mais sont un peu fermées dans le haut du spectre. Remarque importante à ce stade : le panneau avant des enceintes est légèrement courbé, et incliné vers le haut dans la partie haute, donc là où se situe le tweeter. À nouveau, on réalise que ces moniteurs sont pensés pour être placés sur un bureau, plutôt en dessous des oreilles et non pas au même niveau que nos autres moniteurs. On se rend bien compte qu’en se déplaçant un peu vers le haut, on gagne un peu de fréquences aiguës.
On effectue une mesure avec le logiciel SoundID Reference, qui confirme nos impressions : la courbe s’écroule un peu au-delà de 7 kHz puis surtout de 10 kHz. On constate également une certaine densité dans le bas médium, en dessous de 500 Hz. C’est le moment d’explorer les options de filtres qui nous sont proposées. Toujours à l’arrière de l’enceinte de gauche, deux petits réglages sont possibles, un pour les graves bizarrement situé en haut (!) et celui du dessous pour les aigus. Chacun de ces filtres propose trois positions : + 2 dB, 0 dB ou – 3 dB. Une diode nous indique par sa luminosité la position choisie, plus la luminosité est élevée, plus la bande de fréquence est haute… contrairement à ce que laisse penser la signalétique à côté, qui nous avait dans un premier temps fait craindre que ce soit encore inversé ! On choisit de rester à 0 dB pour les graves et d’appliquer le filtre à + 2 dB dans les aigus. Et ça marche très bien, on gagne beaucoup en clarté et le spectre s’ouvre de manière très naturelle.
Comparaison n’est pas raison
Confiants que ce réglage est le bon, on va donc se lancer dans notre exercice d’écoutes comparatives sur quelques morceaux dont on connaît très bien les mixes, notre écoute de référence étant toujours les Rokit 5.
Alright – Kendrick Lamar
Les basses profondes de ce morceau sont plutôt bien retranscrites pour des enceintes si petites ! C’est assez impressionnant, et plus performant dans ce secteur que les Rokit 5. Le bas médium très présent donne beaucoup de consistance à la voix, c’est peut-être légèrement excessif, mais c’est plutôt agréable. On ressent encore un léger manque d’ouverture et les transitoires, les caisses claires et charley s’en ressentent un peu, mais on a nettement rééquilibré le spectre en ouvrant le filtre des fréquences hautes.
Everything in its Right Place – Radiohead
Le grave du kick est à nouveau très bien restitué par ces toutes petites enceintes, bien mieux que sur nos moniteurs de référence. La consistance et la densité des médiums conviennent très bien aux différents claviers et synthés et à la voix. La comparaison est un peu moins à l’avantage des GoAux en ce qui concerne le haut du spectre et les consonnes de la voix de Thom Yorke. L’image stéréo est plutôt correcte en termes de largeur et de précision, en revanche, on sent un peu moins la profondeur. La sensation de différents plans n’est pas évidente, c’est un peu plat dans ce domaine-là. Mais on a l’habitude d’écouter ce mix sur des moniteurs nettement plus chers et donc nettement plus performants, on ne peut pas trop en demander au vu de la taille et du prix.
A New Error – Moderat
Au fil des tests d’enceintes, ce titre s’est imposé comme notre référence principale pour les basses fréquences, le juge de paix ou la cour constitutionnelle du grave si l’on veut. Et franchement, les petites GoAux se défendent très bien à ce jeu-là ! Les basses qui descendent dans les profondeurs sont pour beaucoup dans l’efficacité de ce morceau, et ces moniteurs leur rendent vraiment justice. La comparaison avec leurs aînés Rokit est nettement à l’avantage des nouvelles venues.
Conclusion
Le format, plutôt original finalement, de ces toutes petites enceintes dans un pack facile à transporter, peut s’avérer très utile et intéressant pour certains. Et au vu de leur taille, la performance sonore des GoAux 4 est assez louable, surtout dans le grave où c’est franchement très bien. À installer dans un studio fixe, ce n’est évidemment pas le bon choix, car leur format ne nous apporte pas grand-chose, et le prix n’est pas le plus bas du marché, mais pour un musicien ou technicien nomade, cela peut vraiment répondre à un besoin. Reste tout de même un manque d’ouverture et de clarté en haut du spectre, un peu dommage. Il faudra absolument l’avoir en tête pour mixer avec cette paire.