Economie-fanzine
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Traumax
Pour parler de la science des idéologies qu'est l'économie.
Tu sais tout des Futures, des cycles schumeteriens, tu es fan de l'école de Chicago mais tu détestes la house ?
Hayek et fais bander mais t'aimes pas les actrices latinos ?
Tu shortes en intraday dans une stratégie win-win sur le forex ?
T'as rien compris aux phrases précedentes, mais tu veux apprendre ?
C'est ici. Les débats idéologiques seront tolérés, dans la limite de la courtoisie argumentée, et de la pédagogie de bon aloi.
Dr Pouet
une croissance (limitée) en valeur reste souhaitable ne serait-ce que parce qu'elle apporte une prospérité qui donne à manger aux gens
Si on divise la quantité de nourriture produite sur terre par le nombre d’habitants, il y a à manger pour tout le monde. Pas besoin de croissance pour ça. Évidemment ça a ses limites, qui ne sont pas forcément faciles à déterminer ; mais on peut imaginer que la terre ne peut pas nourrir 30 milliards d’habitants, même en tournant le problème dans tous les sens.
donne les moyens de transformer l'appareil productif
C’est l’énergie qui permet ça. Or pour la question de l’énergie, ça devient compliqué...
On oublie de distinguer une croissance en valeur et une croissance dans l'intensité d'usage des ressources.
Peux-tu donner des exemples de domaines concrets où on pourrait avoir une croissance en valeur et une décroissance d’usage de ressources ?
Une pièce de théâtre, oui ça consomme peu de ressources. Par contre construire une ordinateur émet une tonne de CO2, une voiture 15 tonnes. Mais avoir une croissance du PIB avec le théâtre (ou autre) versus la 5G, est-ce vraisemblable ?
Dr Pouet
ça devrait aussi rappeler que "trouver une corrélation" c'est bien plus "trouver une question" que "trouver une explication" et c'est d'autant plus vrai dans les sciences molles comme l'économie où la partie expérimentation de la démarche scientifique rencontre des limites
N.B. perso, la vieille discussion épistémologique sur "économie et science en est elle une" ne m'intéresse pas (plus)
Là dessus je suis d’accord. La science, c’est une méthode (avant tout faite de clarté et de rigueur). En histoire ou en astronomie, l’expérimentation à ses limites.
D’ailleurs, faire de la science, sans faire d’expérimentation, c’est précisément ce que Roland Lehoucq (fameux astrophysicien) s’amuse à faire en regardant et commentant des films (pas pour les critiquer, ce n’est pas le but).
kravatorf
pour tes points ci dessus:
L'ensemble des transformations souhaitables nécessitent des investissements massifs et sauf révolution légale/économique/géopolitique qui n'arrivera pas, les capitaux ne seront pas dispo/n'existeront pas sans "croissance en valeur". Cette dernière n'ayant pas besoin d'être exponentielle.
"tout le monde mange" => sachant que l'agroalimentaire est un secteur (très) polluant et que la production aujourd'hui n'est que très peu "locale", difficile de transformer tout ça en un truc plus vertueux tout en améliorant l'accès à la nourriture sans investissements massifs, donc sans capitaux et donc sans croissance.
Quant à la limitation de la population mondiale c'est un terrain où il est incroyablement facile de proférer des horreurs à base de "tuer des gens". Aux dernières nouvelles, le meilleurs moyen est l'éducation des jeunes femmes, et ça aussi ça s'imagine difficilement en situation de récession économique
transformer l'appareil productif = énergie ==> c'est réducteur mais ok. dans ce cas, le secteur de l'énergie étant parmis les plus intensifs en capital, faudra bien un peu de croissance pour faire bouger le schmilblick
exemple concret de croissance en valeur et décroissance de l'intensité d'usage des ressources: tous les secteurs dits d'aftermarket / recyclage (dépend évidemment du type d'énergie utilisée), un bonne part du trading, les produits/services à empreinte écologique positive... évidemment la bascule semble lointaine.
histoire de reformuler: Continuer une fuite en avant dans la sur exploitation des ressources est idiot. Le changement drastique vers un modèle de décroissance n'est pas bien réaliste et sans doute pas souhaitable. Utiliser la croissance et pour faire simple la capacité d'investissement et de transformation qu'elle apporte de façon à faire évoluer chaque secteur d'activité vers un fonctionnement plus vertueux, c'est pas facile mais ça semble déjà un peu plus jouable.
Une grosse moitié des grands groupes que j'ai eu pour clients sont dans cette logique depuis la cop21. C'est pas forcément bien visible ni suffisant en l'état. Je trouve plus utiles d'amplifier ce genre de truc avec les encouragements/incitations/règles qui vont bien que de balancer des discours à base de décroissance qui se comprennent le plus souvent comme "arrêtez tout bande d'affreux"
(oui c'est caricatural dit comme ça mais vous aurez compris le fond de ma pensée que j'espère plus nuancée et pétrie d'incertitude )
Dr Pouet
tous les secteurs dits d'aftermarket / recyclage (dépend évidemment du type d'énergie utilisée)
Oui recycler, réparer, c’est bien, et ça va dans le sens de réduire la consommation de ressources. Mais ça ira aussi dans le sens de la réduction du PIB.
un bonne part du trading,
Tout ce qui est informatique et réseaux est très consommateur en ressources, donc non.
les produits/services à empreinte écologique positive
La question est justement : lesquels.
Une agriculture bio et locale réduit la consommation de ressources. Mais là aussi ça s’accompagnera d’une baisse de PIB (ce qui sera bon signe).
Il ne faut pas oublier que pratiquement tout ce qu’on faisait en 1700 était renouvelable et durable. Mais ce n’est pas pour rien qu’on a changé. Tout ça est lié à la nature même de l’énergie : elle quantifie les changements. Dès qu’on change un truc : si on le déplace, si on le chauffe, si on le déforme... ça consomme une certaine quantité d’énergie. Et l’énergie « propre » ça n’existe pas. C’est pour ça que la croissance verte n’existe pas non plus.
Et puis on a un capital, pas besoin de croissance pour ça. Le capital c’est d’ailleurs surtout de l’énergie accumulée pour optimiser l’utilisation d’énergie : un tracteur, une pelleteuse.
kravatorf
(N.B. NON je ne fais pas des frères Koch des chantres de l'écologie, faut pas déconner. Juste, si cette boite, parmi les pire du monde, arrive à sortir ce genre de truc, aussi parcellaire et imparfait soit-il, il y a un petit espoir que tout ne soit pas fichu.)
le focus "énergie partout" de Jancovici c'est vraiment intéressant/malin/rigoureux... mais justement c'est un focus avec toutes les limites qui vont avec.
Pour exprimer (encore une fois différemment) le fond de ma pensée d'une façon beaucoup plus brutale et pratique: essaies donc de provoquer une "transition écologique" en allant dire aux états/grands groupes/petites entreprises/populations que "pour la planète, l'avenir c'est la décroissance." Les plus polis remercieront pour la qualité de la démonstration et diront gentiment un truc du genre "une politique à visée écologique qui in fine consiste à s'appauvrir on va y réfléchir mais on va sans doute faire autrement". Je te laisse imaginer ce que diront les moins polis.
Réfléchir secteur par secteur pour une transformation vers des cibles écologiquement vertueuses tout en garantissant la rentabilité de la cible et de la transition, c'est certes moins radical, peut être insuffisant mais au moins c'est entendable et réalisable (par ex. la ville de New York ou la Californie parviennent à obtenir des résultats dans les USA de Trump)
bref, perso, la décroissance comme champ d'étude c'est top, (plein de trucs à en apprendre, plein d'enseignements à en tirer), la décroissance comme "politique économique générale" je trouve ça irréaliste voire perché
(après m'être pas mal renseigné sur le sujet, ça reste mon opinion qui me semble ni pire ni meilleure qu'une autre)
samy dread
la décroissance comme "politique économique générale" je trouve ça irréaliste voire perché
l'inverse l'est davantage
Non je ne mettrai pas de pull
Dr Pouet
Le but c’est de réduire les émissions de CO2. De réduire pollution, déforestation, pesticides, insecticides et autres trucs suicidaires à moyen terme.
En faisant ça, certains comme Jancovici prédisent une décroissance. D’autres comme toi espèrent de la croissance. Si c’est le cas, soit (tant mieux, tant pis, peu importe...) ; à condition bien sûr de tenir les objectifs écologiques. Pour l’instant on est loin d’en prendre le chemin. On fonce plutôt vers la catastrophe.
Très longtemps Jancovici s’est retenu de parler de décroissance, même si c’est la conséquence évidente de sa démonstration. Il sait bien à quel point ça fait hérisser le poil. Après il y a quand même un souci si par exemple un nouveau système de retraite implique / nécessite de la croissance (cf le système Macron versus l’ancien), parce-que ça risque de (ça va) se planter.
Si on ne tient les objectifs écologiques, on aura aussi de la décroissance, très forte et très brusque, parce-que là ce sera le chaos.
[ Dernière édition du message le 22/04/2020 à 20:23:01 ]
Anonyme
Dr Pouet
n'existeront pas sans "croissance en valeur". Cette dernière n'ayant pas besoin d'être exponentielle.
Et on est bien d'accord qu'une croissance de 1% par an c'est une croissance exponentielle.
Si par contre on a une croissance linéaire, par exemple de 2% la première année, ça va donner :
2% les deux premières années, puis par séquence de 3 ans : 1,9% ; 1,8% ; 1,7%...
1,4% la vingtième année ; 1% à la 47ème... bref ça tend vers zéro.
tihouss
On sait, de manière certaine, que certaines industries vont se casser la gueule. Transport aérien, ou extraction pétrolière disons. Ça brasse beaucoup d'argent, le démantèlement volontaire ou subit détruira beaucoup d'argent.
À côté de ça, y a plein de secteurs qui pourraient avoir une croissance énorme à moyen terme sans mettre en péril ni l'argent investi ni notre environnement. Par exemple si on transforme notre agriculture pour un modèle de petites exploitations, intensif en main d'œuvre et qui améliore la campagne au lieu de la détruire on revalorise le foncier et l'immobilier de la diagonale du vide. On relance des croissances locales, les investissements ne sont pas perdus.
Par contre la croissance du deuxième ne compensera pas la décroissance du premier, ne serait-ce que parce que certains secteurs nuisibles (dont la finance, désolé) forment une telle bulle complètement déconnectée de toute réalité qu'ils sont hors de proportion par rapport à l'économie réelle.
Ce que je comprends pas du tout chez les investisseurs et la finance, c'est qu'il n'y a pas de recherche fondamentale d'assurer vraiment ses arrières et de lutter radicalement contre le changement climatique. Du vernis vert ça on en voit à tort et à travers, mais les crises à venir vont faire sauter ce vernis comme la pandémie a mis à poil nos dirigeants paumés.
L'appétit vient en mangeant ; la réforme, c'est pas sorcier ; le campement léger en plein air, non. Cupidon
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