Chez Messier, Brahé et Galilée : la taverne du gentleman astronome
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Dr Pouet
52038

Membre d’honneur
Membre depuis 21 ans
Sujet de la discussion Posté le 15/07/2007 à 13:02:09Chez Messier, Brahé et Galilée : la taverne du gentleman astronome
Un endroit dédié aux discussions astronomiques : que regardez-vous, quand, comment ? Explications scientifiques, liens utiles, conseils aux débutants...
Tous les amateurs d'astronomie sont les bienvenus !

Tous les amateurs d'astronomie sont les bienvenus !



sonicsnap
89133

Posteur haute vélocité
Membre depuis 18 ans
4041 Posté le 28/01/2025 à 15:09:16
Oui. Je ne pense pas qu'on se serait empoisonné à envoyer des télescopes dans l'espace s'ils n'étaient pas capables d'observations auxquelles on n'a pas accès depuis le sol. Par contre, j'imagine qu'il doit y avoir une sacrée file d'attente pour pouvoir utiliser ces télescopes..
0

props
5840

Je poste, donc je suis
Membre depuis 18 ans
4042 Posté le 28/01/2025 à 19:27:52
Citation de sonicsnap :
Bon, je reviendrai quand on aura des certitudes!
C'est justement ça qui est passionnant en Science

C'est quand on croit tout savoir tout comprendre d'un truc que Paf ! Une incohérence dans les mesures survient.
Le problème de l'avance du périhélie de Mercure a tenu en échec les savant durant des dizaines d'années. Jusqu'à ce Einstein utilise la théorie de la relativité générale pour expliquer et calculer précisément la précession de Mercure en tenant compte de l'effet relativiste dû à la proximité du Soleil. C'était pourtant limpide !
La tension de Hubble n'est pas près d'être résolue... Et c'est tant mieux !
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sonicsnap
89133

Posteur haute vélocité
Membre depuis 18 ans
4043 Posté le 29/01/2025 à 09:17:12
Oui, mais je ne serai plus là pour le savoir, et ça c'est quand même dommage.. 

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darinze
6779

Je poste, donc je suis
Membre depuis 3 ans
4044 Posté le 29/01/2025 à 21:06:40
Je t'enverrai quand même un MP sur AF mon sonichou 

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T'es pas obligé d'écouter toutes les conneries de DaRinze . Clip SONIC ON LOVE YOU

Dayb
130

Posteur·euse AFfiné·e
Membre depuis 6 mois
4045 Posté le 29/01/2025 à 23:28:10
Citation :
Je me fourvoie peut-être. Mais un téléscope posé à même le sol, et un autre envoyé à des centaines de km dans l'espace, au niveau praticité, entretien, et même coût tout court, tout ça ce ne doit pas être la même chose... et je ne suis pas sûr qu'on puisse déployer dans l'espace des téléscopes aussi grands que ceux qu'on peut construire sur Terre.
Clairement, ils existent déjà et depuis longtemps un nombre très important de télescopes spatiaux bien plus performants que ce qui se fait au sol, et qui sont parfaitement viables.
En fait, ce n'est pas tellement la résolution de l'image qui souffre de la pollution du ciel, car pour cela les outils spatiaux peuvent parfaitement s'affranchir de la pollutio existante sur terre et offrir des images du tréfonds du ciel qui vont au delà de ce qui fait à partir du sol .
Après, ce qui me semble le plus regrettable en rapport avec dégradation du ciel par l'activité humaine, c’est plus de nuire à l'action de veille du ciel d'un nombre non négligeable de personnes au sol, qui par le nombre permettent plus d'observations, des gens qui comme Sylvain alias leo sur AF qui peut encore nous offrir de très belles observations amateurs, des images et des découvertes à partir du sol, un accès et des découvertes du ciel par tout le monde et n'importe qui.
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[ Dernière édition du message le 29/01/2025 à 23:44:17 ]

sonicsnap
89133

Posteur haute vélocité
Membre depuis 18 ans
4046 Posté le 30/01/2025 à 10:22:21
+ Beaucoup!
Mon Rinzou > Je n'en attends pas moins de toi. J'espère qu'alors on ne sera pas trop jeunes pour comprendre quelque chose à tout ça!
Mon Rinzou > Je n'en attends pas moins de toi. J'espère qu'alors on ne sera pas trop jeunes pour comprendre quelque chose à tout ça!
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Sylvain alias leo
1691

AFicionado·a
Membre depuis 9 ans
4047 Posté le 01/02/2025 à 19:21:23
En parlant de télescope, les chercheurs ont fait de nouvelles découvertes sur l’énergie noire grâce au télescope DESI.
Voici l’article de la revue Epsiloon de février 2025, si dessous (bonne lecture) :
Voici l’article de la revue Epsiloon de février 2025, si dessous (bonne lecture) :
Spoiler - Cliquer ici pour lire la suite

Une première analyse est tombée en avril 2024, une deuxième vient d'arriver en novembre: le télescope DESI, perché sur le mont Kitt Peak, dans la rocaille du désert de Sonora, en Arizona, a livré ses résultats.
Des centaines d'astrophysiciens et de cosmologistes, la plupart scotchés à leur écran de visio, partagent la première mesure précise de l'énergie noire. Enfin des données! On sait depuis prés de trente ans que le cosmos gonfle: étoiles et galaxies s'éloignent les unes des autres à un rythme effréné. Sauf que personne ne comprend la nature de cette mystérieuse substance qui accélère l'expansion de l'Univers. «L'énergie noire, c'est le grand mystère, le grand enjeu de la cosmologie», pose Nathalie Palanque-Delabrouille, l'une des cheffes de la collaboration DESI, au Lawrence Berkeley National Laboratory.
Pour la première fois, on la voit vibrer à travers tout l'Univers
C'est la plus grande carte du cosmos jamais tracée: les positions précises de 6,4 millions de galaxies, jusqu'à 11 milliards d'années-lumière de la Terre. Tout I'Univers en pointillisme. Une vision en 3D de la multitude des mondes, frénétiquement collectée à raison de 20000 galaxies par nuit entre mai 2021 et juin 2022. Et surtout, 6,4 millions de points qui témoi-gnent, partout dans l'espace, de la vitesse à laquelle s'éloignent les galaxies, et donc de l'expansion du cosmos. Les chercheurs de la collaboration DESI ont analysé ces vitesses durant deux ans «à l'aveugle pour étre certains de ne pas biaiser les résultats », précise Nathalie Palanque-Delabrouille. Le verdict est un choc: l'énergie noire semble s'affaiblir avec le temps. Autrement dit, l'expansion de l'Univers parait ralentir.

Ma première réaction a été la surprise. Et une fois que j'ai étudié les résultats de l'article, j'ai été encore plus excitée», raconte la théoricienne Kim Berghaus, à l'université Caltech « Si cela se confirme, ce sera L'une des plus grandes découvertes de ma carrière de physicien! », réagit Georges Obied, à Oxford. « Ça a été un choc! Toutes les données étaient masquées, Lorsque les premiers points sont apparus, il y a eu un grand silence. On s'est tous dit: il y a quelque chose! », témoigne Nathalie Palanque-Delabrouille, qui a pris la parole en avril 2024 pour annoncer les premiers résultats de DESI, fruits de l'analyse de la position précise de 6,4 millions de galaxies dans l’Univers.
RIEN D'UN DÉTAIL
Un grand moment, de l'avis de tous les témoins des émojis de tête qui explosent ont aussitôt envahi les messageries, «C'est excitant, réagit Nadathur, cosmologiste à l'université de Portsmouth, qui a travaillé sur l'analyse. C'est potentiellement une découverte énorme. » «Si c'est vrai, ce serait le premier véritable indice que nous aurions sur la nature de l'énergie noire depuis vingt-cing ans», soufle Adam Riess, astrophysicien et prix Nobel de physique à luniversité Johns Hopkins, pour avoir remis ce déroutant concept au centre de la cosmologie moieme à la fin du siècle demier.
Officiellement, ce n’est pour l'instant qu'une «anomalie», une «déviation », dont les membres de DESI évaluent à une chance sur 400 la possibilité d'être un hasard statistique - il faudrait une chance sur 1,7 million pour que cela soit reconnu comme une découverte, suivant l'échelle de valeur en vigueur en cosmologie, héritée de la physique des particules, première science à s'être confrontée à ce des flots de données. Mais cette «déviation» n'a rien d'un détail. Il ne s'agit pas d'un léger ajustement qui viserait à préciser à la marge le comportement du cos-mos. Ce que semblent dire les don-nées, c'est que l'énergie noire varie. «Il semblerait qu'elle s'amenuise pour les galaxies les plus proches de nous», décrit Pauline Zarrouk, au Laboratoire physique nucléaire et mantes énergies, à Paris. Et c'est une énorme surprise. Car les 700 membres de l'équipe DESI s'attendaient au contraire a trouver al confirmation d'une énergie noire constante. Tout le monde exhorte à la pa-tience: il ne s'agit que de la première année de données récoltées par le télescope. Et à la prudence: l'interprétation de ces données prête à discussion, d'autant qu'il s'agit de données combinées avec d'autres relevés, et il faut prendre le temps de démêler l'influence de chacun... « Dans notre étude, nous ne coyons pas l'anomalie annoncée, avertissent par exemple Marina Cortes et Andrew Liddle, à l'université de Lisbonne. Il faut vraiment attendre des données supplémentaires..>
PLUS PUISSANTE
Reste que neuf mois plus tard, l'ambiance n'est pas retombée, au contraire. Fin novembre, une deuxième analyse est même venue ajouter à l'excitation. «C'est cohérent avec nos conclusions précédentes, conclut Pauline Zarrouk, qui a participé à cette seconde étude. Ce sont deux méthodes complémentaires. En avril, il s'agissait d'une analyse plus simple, plus puissante, contraignante, robuste. Mais cette deuxième étude permet de retracer l'histoire de l'expansion. On est un peu moins sensibles, mais ça nous donne de la confiance. » Nathalie Palanque-Delabrouille, elle aussi, l'annonce: «Cette nouvele mesure vient renforcer les premiers résultats. En incluant l'étude de la formation à toutes les échelles, la prévision sur les propriétés de l'énergie noire est améliorée de 20% environ. Nous avons les données de 6 millions de ga-laxies, il en faut 40 millions pour une certitude statistique. On n'y est pas encore, mais on voit une tendance assez forte.» William Giarè, théoricien à l'université Sheffield, en Angleterre, résume: «Nous conseillons certainement la prudence. Mais même en tenant compte de toutes les réserves et limitations possibles, on ne peut s'empêcher de s'enthousiasmer: st elle est confirmée, cette déviation représenterait la première preuve concrète d'une nouvelle physique au-delà du modèle standard de la cosmologie. » Oui, l'ambiance est à la révolution. L’histoire racontée par le modèle standard est bien connue, celle d'un Univers né dans un big bang il y a 13,8 milliards d'années, qui a subi une expansion fulgurante en quelques fractions de seconde, puis une lente expansion, un refroidissement au cours duquel les particules élémentaires de matière se sont progressivement assemblées en atomes, poussières, étoiles et planètes. « L'espace-temps indique à la matière comment se déplacer; la matière indique à l'espace-temps comment se courber'», résumait
le célèbre physicien John Wheeler pour décrire ce monde surgi des équations de la relativité générale d'Einstein dans les années 1950.
IRONIE DU SORT
Depuis son invention, ce modèle cosmologique s'accorde avec toutes les observations des astrophysiciens, des premiers âges incroyablement lointains jusqu'aux galaxies voisines. Il a même résisté à la plus révolutionnaire de toutes les observations: la découverte de l'énergie noire en 1998. Deux équipes d'astronomes indépendantes, l'une menée par Adam Riess et Brian Schmidt, a l'université Canberra, en Australie, l'autre par Saul Perimutter, à Berkeley, avaient utilisé la lumière de dizaines d'étoiles mourantes pour mesurer l'expansion de l'Univers. Surprise: le flux apparent de ces étoiles était plus faible qu'attendu. Comme si la distance parcourue par la lumière de ces sunemove etait plus importante que prévu. Autrement dit, comme si l'expansion de l'Univers était en train d'accélérer.. «D'où pouvait venir cette acodéra-tion? Il fallait supposer l'existence d'une nouvelle composante énergétique capable d'accélérer l'expansion et qui ne soit ni de la matière ni du rayonnement», retrace Wiliam Giare. Les physiciens se sont vite aperçus qu'une telle composante peut être incluse dans leur modèle, sans rien changer du grand schéma: il suffisait ajouter un terme mathématique dans les équations, une constante, qui, ironie du sort, avait déjà été inventée par Einstein pour stabiliser son premier modèle cosmologique, avant d'être abandonnée par Edwin Hubble dans les années 1920, au moment de la découverte de l'expansion de l'Univers,
«À chaque fois qu'il y a un problème en cosmologie, on invoque la constante d'Einstein, sourit le cosmologiste Michael Turner, professeur émérite Kavli Institute for Cosmological Physics, à l'université de Chicago. À l'époque, on a eu tendance à se dire que la cosmologie était sauve, il y avait une constante et voilà. Mais c'était clair pour moi que l'histoire n'était pas si simple: nous ne comprenons pas cette valeur: » Cest pour mettre l'accent sur le mystère, pour garder les portes ouvertes, les esprits alertes », que le cosmologiste lance dès 1998 l'expression « énergie noire» - «quand on nomme quelque chose, il faut faire court, frappant, se justifie-t-il àujourd’hui.
L'idée de ce nom, c'était de concentrer l'attention et ça a marché: même si certains se sont contentés de la constante cosmologique, beaucoup ont pris conscience que c'était un grand et profond problème.»
PRÊTS À RECEVOIR LE CHOC
Depuis lors, des centaines de mesures ont été lancées pour sonder cette mystérieuse tension qui gonfle l'Univers - et qui représente 70% de son contenu énergétique, excusez du peu. Le spectre lumineux de centaines de supernovas a été analysé; Le télescope spatial européen Planck a sondé avec une précision ultime le bruit de fond micro-onde du cosmos, témoin de notre Univers alors âgé de 380000 ans; les astronomes ont exploité l'effet de lentille de la gravitation pour explorer la dynamique cosmique. Pour toujours conclure à une énergie constante. Jusqu'a aujourd'hui.
La constante cosmologique n'est pas constante. » L'annonce ressemble à une énigme, voire un paradoxe logique. Mais les théoriciens étaient prêts à recevoir le choc. Ils s'y préparaient même, menant ce qui jusqu'ici n'était qu'un jeu mathé-matique. «Cela fait longtemps que des travaux théoriques sont menés sur l'hypothèse d'une énergie noire qui varie, réagit Paul Steinhardt, cosmologiste à Princeton.
D'idée est très naturelle. Sinon, ce serait la seule forme d'énergie que nous connaissons qui soit absolument constante dans l'espace et le temps. » Alors que la densité de matière du cosmos diminue par dilution à cause de l'expansion, il faudrait que l'énergie noire soit créée en pemanence pour maintenir son influence. Difficile à imaginer..
Les physiciens ont pensé l'expliquer par une énergie issue du vide, qui a l'avantage d'être partout, diffuse - et prédite par la théorie quantique qui décrit les interactions des particules. Las... «Sur la base des calculs standard de la théorie quantique des champs, on trouve une énergie entre 10% et 10:00 plus élevée que celle mesurée. C'est l'un des plus grands désaccords jamais trouvés entre les prédictions théoriques et les observations!, rappelle Pauline Zarrouk, cosmologiste à l’université de Montpellier. Cela semble bien au-delà de ce que les théories peuvent expliquer de manière réaliste.»
Mais une énergie noire qui varie, ça change tout. Ce concept n'est plus seulement une constante theorique dans une équation: il devient physique, « L’équation d'état de l'énergie noire n'est pas juste -1, mais peut être un peu plus exotique, un peu plus excitante», s'enthousiasme Andreu Font-Ribera, l'un des membres de DESI, à l'Institut de physique des hautes énergies à Barcelone.
Lannonce a donc déclenché un raz de marée de travaux théoriques. « Etant donné que toutes les forces et composantes connues de la nature ralentissent le taux d'expansion de l’Univers, l'accélération nécessite un mécanisme physique au-delà du modèle standard, capable de contrecarrer la décélération», résume William Giare.
Depuis avril, des dizaines d'articles ont été publiés, près de 2000 ont été déposés sur le site de pré publication d'après notre décompte. Certains pour confirmer ou discuter la pertinence statistique des résultats, beaucoup pour proposer une explication. «Nous avons commencé à travailler le soir même des résultats, raconte Kim Berghaus, Nous avons passé chaque minute d'éveil dans les deux semaines qui ont suivi à essayer de donner une explication à cette énergie noire qui varie.
Nous avons constaté qu'un modèle nommé quintessence peut très bien s'adapter aux données.
Cela suppose l'existence d'un champ scalaire ultraléger dans la nature, peut-être une nouvelle particule audelà de celles dej découvertes. »
Régime fantôme
La grande majorité s'oriente vers cette famille de modèles au nom évocateur: quintessence, pour décrire un Univers baigne d'un champ d'énergie qui varie dans l'espace et dans le temps. «Ces modèles sont nés à la fin des années 1980, recadre David Polarski, physicien théoricien travaillant en cosmologie. C’est un domaine théorique important qui avait été un peu mis en stand-by puisque toutes les observations penchaient pour la constante cosmologique. Eh oui, depuis le mois d'avril, il y a un regain d'activité. » Ce champ rempli-rait l'espace d'une quantité d'énergie qui semble constante au premier abord, mais qui finit par diminuer au cours du temps, glissant lentement vers un véritable vide. «Mes résultats indiquent que la valeur actuelle de l'équation d'état d'énergie noire ressemble à la quintessence», décrit Nandan Roy, théoricien à la Mahidol University, en Thailande, qui a publié ses conclusions dès le mois de mai. Même interprétation de Wen Yin, à T'université de Tokyo, ou de Rodrigo Calderon, à l'université de Prague. Ce serait le même type de champ qui, selon de nombreux cosmologistes, serait à l’origine de l'inflation, cette phase d'expansion exponentielle lors de la naissance de l'Univers.
Un point technique concentre les débats entre experts. D'après les me-sures de DESI, l'équation d'état de l'énergie noire aurait été inférieure à -1 dans le passé, et remonterait au-dessus dans le futur, quelque part entre -1 et 0... «Cela s'appelle le régime fantôme, décrit Vivian Poulin, théoricien au laboratoire Univers et particules de Montpellier. Franchir cette barre des -1, c'est un jalon physique: cela viole une condition d'énergie. Ce n'est pas interdit, mais cela provoque des dynamiques instables. Ou alors il faut imaginer une forme d'énergie exotique, plus exotique que les formes les plus simples d'énergie noire.» Ce régime fantôme, ce n'est pas physique!», s'énerve Marina Cortes. «C'est beaucoup plus exotique d'un point de vue théorique», convient Kim Berghaus. Mais parmi les modèles, certains réussissent à contourner l'obstacle. «Un modèle plus simple de quintessence fonc-tionne. Nous montrons que c'est leur interprétation des données qui fait franchir -1», rassure Paul Steinhardt. «Je vois un passage par un stade fantôme dans le passé, mais il n'est pas réel: on peut l'interpréter comme une indication de l'effondrement de la théorie dans l'Univers primitif, elle devrait être remplacée par une autre théorie», décrit de son côté le Japonais Yuichiro Tada, à l'université de Nagoya. Nouveaux vertiges de modèles en gestation. Certains théoriciens espèrent résoudre au passage le mystère de la matière noire, cette autre substance mystérieuse, invisible depuis les années 1970, qui semble s'enrouler autour des galaxies. «Cela va dans le sens de l'existence d'une particule ultralégère, l'axion», déduit Frank Qu, à l'université Cambridge. «Cela peut fournir des liens avec la théorie des cordes et nous amener à une description microscopique de la gravité», ajoute Georges Obied.
Tout est sur la table
Surtout, cette énergie noire qui varie pourrait libérer les astronomes d'une sinistre prédiction sur le sort ultime de l'Univers. Le scénario du modèle standard a en effet un côté un peu désespérant: avec une énergie noire constante, les galaxies ont vocation à s'éloigner inexorablement, de même que toutes les étoiles au fil des milliards d'années, jusqu'aux atomes qui sous l'effet de cette force irrésistible finiraient par se déchirer. À la fin, il n'y aurait plus rien, plus de vie, plus de lumière, à peine quelques atomes de fer flottant, figés pour toujours dans l'immensité...
La nouvelle quintessence raconte tout autre chose. «Je travaille sur des théories sur l'Univers primordial où le big bang est remplacé par un rebond, décrit Paul Steinhardt. L'Univers n'a pas de début, il vit une période de contraction et d'expansion. Et l'une des possibilités crédibles est qu'il se produise la même chose dans le futur; que l'expansion arrive à une fin et que l'Univers commence à se contracter.» Et le chercheur d'assurer que cette cosmologie cyclique est moins iconoclaste qu'il n'y paraît. «Cela peut paraître très exotique, mais les équations décrivent naturellement une transition vers une contraction lente. » Et cela expliquerait au passage l'homogénéité de l'Univers actuel. «Ça commence à devenir intéressant. On peut vraiment travailler! Tout est enfin sur la table!», s'enthousiasme le théoricien. «On cherche quelque chose de physique, un vrai mécanisme pour expliquer l'énergie noire. Avec la constante cosmologique, on reproduisait cet effet de force répulsive, mais sans donner une compréhension physique au phénomène - ni même expliquer la valeur de la constante. Là, il semble qu'il y ait à la cé un mécanisme physique», s'émeut Pauline Zarrouk.
Inutile de souligner que les prochaines données de DESI sont très attendues. L'anomalie va-t-elle devenir une découverte? Toute la communauté retient son souffle. «Nous avons déjà trois ans de données accumulées, rapporte Nathalie Palanque-Delabrouille. Nous commençons notre analyse, entièrement en aveugle, pour ne pas être biaisés. Les résultats seront publiés en avril prochain. »
Pour aller encore plus loin
Deux publications
Historique. L'analyse des données, publiée en avril et en novembre 2024 par la collaboration DESI: //arxiv.org/abs/2404.03002
Un livre
Profond. Le physicien Roland Lehoucq et le philosophe Vincent Bontems décortiquent la liste noire de la science. Les Idées noires de la physique, éd.
Les belles lettres (2016).
Une simulation
Somptueux. On ne se lasse pas de regarder les amas de galaxies s'étendre dans la simulation Illustris. www.illustris-project.org/
Une mission
Prometteur. Euclid, lancé en 2023, livrera ses premières données en 2026.
//cnes.fr/proiets/euclid

Une première analyse est tombée en avril 2024, une deuxième vient d'arriver en novembre: le télescope DESI, perché sur le mont Kitt Peak, dans la rocaille du désert de Sonora, en Arizona, a livré ses résultats.
Des centaines d'astrophysiciens et de cosmologistes, la plupart scotchés à leur écran de visio, partagent la première mesure précise de l'énergie noire. Enfin des données! On sait depuis prés de trente ans que le cosmos gonfle: étoiles et galaxies s'éloignent les unes des autres à un rythme effréné. Sauf que personne ne comprend la nature de cette mystérieuse substance qui accélère l'expansion de l'Univers. «L'énergie noire, c'est le grand mystère, le grand enjeu de la cosmologie», pose Nathalie Palanque-Delabrouille, l'une des cheffes de la collaboration DESI, au Lawrence Berkeley National Laboratory.
Pour la première fois, on la voit vibrer à travers tout l'Univers
C'est la plus grande carte du cosmos jamais tracée: les positions précises de 6,4 millions de galaxies, jusqu'à 11 milliards d'années-lumière de la Terre. Tout I'Univers en pointillisme. Une vision en 3D de la multitude des mondes, frénétiquement collectée à raison de 20000 galaxies par nuit entre mai 2021 et juin 2022. Et surtout, 6,4 millions de points qui témoi-gnent, partout dans l'espace, de la vitesse à laquelle s'éloignent les galaxies, et donc de l'expansion du cosmos. Les chercheurs de la collaboration DESI ont analysé ces vitesses durant deux ans «à l'aveugle pour étre certains de ne pas biaiser les résultats », précise Nathalie Palanque-Delabrouille. Le verdict est un choc: l'énergie noire semble s'affaiblir avec le temps. Autrement dit, l'expansion de l'Univers parait ralentir.

Ma première réaction a été la surprise. Et une fois que j'ai étudié les résultats de l'article, j'ai été encore plus excitée», raconte la théoricienne Kim Berghaus, à l'université Caltech « Si cela se confirme, ce sera L'une des plus grandes découvertes de ma carrière de physicien! », réagit Georges Obied, à Oxford. « Ça a été un choc! Toutes les données étaient masquées, Lorsque les premiers points sont apparus, il y a eu un grand silence. On s'est tous dit: il y a quelque chose! », témoigne Nathalie Palanque-Delabrouille, qui a pris la parole en avril 2024 pour annoncer les premiers résultats de DESI, fruits de l'analyse de la position précise de 6,4 millions de galaxies dans l’Univers.
RIEN D'UN DÉTAIL
Un grand moment, de l'avis de tous les témoins des émojis de tête qui explosent ont aussitôt envahi les messageries, «C'est excitant, réagit Nadathur, cosmologiste à l'université de Portsmouth, qui a travaillé sur l'analyse. C'est potentiellement une découverte énorme. » «Si c'est vrai, ce serait le premier véritable indice que nous aurions sur la nature de l'énergie noire depuis vingt-cing ans», soufle Adam Riess, astrophysicien et prix Nobel de physique à luniversité Johns Hopkins, pour avoir remis ce déroutant concept au centre de la cosmologie moieme à la fin du siècle demier.
Officiellement, ce n’est pour l'instant qu'une «anomalie», une «déviation », dont les membres de DESI évaluent à une chance sur 400 la possibilité d'être un hasard statistique - il faudrait une chance sur 1,7 million pour que cela soit reconnu comme une découverte, suivant l'échelle de valeur en vigueur en cosmologie, héritée de la physique des particules, première science à s'être confrontée à ce des flots de données. Mais cette «déviation» n'a rien d'un détail. Il ne s'agit pas d'un léger ajustement qui viserait à préciser à la marge le comportement du cos-mos. Ce que semblent dire les don-nées, c'est que l'énergie noire varie. «Il semblerait qu'elle s'amenuise pour les galaxies les plus proches de nous», décrit Pauline Zarrouk, au Laboratoire physique nucléaire et mantes énergies, à Paris. Et c'est une énorme surprise. Car les 700 membres de l'équipe DESI s'attendaient au contraire a trouver al confirmation d'une énergie noire constante. Tout le monde exhorte à la pa-tience: il ne s'agit que de la première année de données récoltées par le télescope. Et à la prudence: l'interprétation de ces données prête à discussion, d'autant qu'il s'agit de données combinées avec d'autres relevés, et il faut prendre le temps de démêler l'influence de chacun... « Dans notre étude, nous ne coyons pas l'anomalie annoncée, avertissent par exemple Marina Cortes et Andrew Liddle, à l'université de Lisbonne. Il faut vraiment attendre des données supplémentaires..>
PLUS PUISSANTE
Reste que neuf mois plus tard, l'ambiance n'est pas retombée, au contraire. Fin novembre, une deuxième analyse est même venue ajouter à l'excitation. «C'est cohérent avec nos conclusions précédentes, conclut Pauline Zarrouk, qui a participé à cette seconde étude. Ce sont deux méthodes complémentaires. En avril, il s'agissait d'une analyse plus simple, plus puissante, contraignante, robuste. Mais cette deuxième étude permet de retracer l'histoire de l'expansion. On est un peu moins sensibles, mais ça nous donne de la confiance. » Nathalie Palanque-Delabrouille, elle aussi, l'annonce: «Cette nouvele mesure vient renforcer les premiers résultats. En incluant l'étude de la formation à toutes les échelles, la prévision sur les propriétés de l'énergie noire est améliorée de 20% environ. Nous avons les données de 6 millions de ga-laxies, il en faut 40 millions pour une certitude statistique. On n'y est pas encore, mais on voit une tendance assez forte.» William Giarè, théoricien à l'université Sheffield, en Angleterre, résume: «Nous conseillons certainement la prudence. Mais même en tenant compte de toutes les réserves et limitations possibles, on ne peut s'empêcher de s'enthousiasmer: st elle est confirmée, cette déviation représenterait la première preuve concrète d'une nouvelle physique au-delà du modèle standard de la cosmologie. » Oui, l'ambiance est à la révolution. L’histoire racontée par le modèle standard est bien connue, celle d'un Univers né dans un big bang il y a 13,8 milliards d'années, qui a subi une expansion fulgurante en quelques fractions de seconde, puis une lente expansion, un refroidissement au cours duquel les particules élémentaires de matière se sont progressivement assemblées en atomes, poussières, étoiles et planètes. « L'espace-temps indique à la matière comment se déplacer; la matière indique à l'espace-temps comment se courber'», résumait
le célèbre physicien John Wheeler pour décrire ce monde surgi des équations de la relativité générale d'Einstein dans les années 1950.
IRONIE DU SORT
Depuis son invention, ce modèle cosmologique s'accorde avec toutes les observations des astrophysiciens, des premiers âges incroyablement lointains jusqu'aux galaxies voisines. Il a même résisté à la plus révolutionnaire de toutes les observations: la découverte de l'énergie noire en 1998. Deux équipes d'astronomes indépendantes, l'une menée par Adam Riess et Brian Schmidt, a l'université Canberra, en Australie, l'autre par Saul Perimutter, à Berkeley, avaient utilisé la lumière de dizaines d'étoiles mourantes pour mesurer l'expansion de l'Univers. Surprise: le flux apparent de ces étoiles était plus faible qu'attendu. Comme si la distance parcourue par la lumière de ces sunemove etait plus importante que prévu. Autrement dit, comme si l'expansion de l'Univers était en train d'accélérer.. «D'où pouvait venir cette acodéra-tion? Il fallait supposer l'existence d'une nouvelle composante énergétique capable d'accélérer l'expansion et qui ne soit ni de la matière ni du rayonnement», retrace Wiliam Giare. Les physiciens se sont vite aperçus qu'une telle composante peut être incluse dans leur modèle, sans rien changer du grand schéma: il suffisait ajouter un terme mathématique dans les équations, une constante, qui, ironie du sort, avait déjà été inventée par Einstein pour stabiliser son premier modèle cosmologique, avant d'être abandonnée par Edwin Hubble dans les années 1920, au moment de la découverte de l'expansion de l'Univers,
«À chaque fois qu'il y a un problème en cosmologie, on invoque la constante d'Einstein, sourit le cosmologiste Michael Turner, professeur émérite Kavli Institute for Cosmological Physics, à l'université de Chicago. À l'époque, on a eu tendance à se dire que la cosmologie était sauve, il y avait une constante et voilà. Mais c'était clair pour moi que l'histoire n'était pas si simple: nous ne comprenons pas cette valeur: » Cest pour mettre l'accent sur le mystère, pour garder les portes ouvertes, les esprits alertes », que le cosmologiste lance dès 1998 l'expression « énergie noire» - «quand on nomme quelque chose, il faut faire court, frappant, se justifie-t-il àujourd’hui.
L'idée de ce nom, c'était de concentrer l'attention et ça a marché: même si certains se sont contentés de la constante cosmologique, beaucoup ont pris conscience que c'était un grand et profond problème.»
PRÊTS À RECEVOIR LE CHOC
Depuis lors, des centaines de mesures ont été lancées pour sonder cette mystérieuse tension qui gonfle l'Univers - et qui représente 70% de son contenu énergétique, excusez du peu. Le spectre lumineux de centaines de supernovas a été analysé; Le télescope spatial européen Planck a sondé avec une précision ultime le bruit de fond micro-onde du cosmos, témoin de notre Univers alors âgé de 380000 ans; les astronomes ont exploité l'effet de lentille de la gravitation pour explorer la dynamique cosmique. Pour toujours conclure à une énergie constante. Jusqu'a aujourd'hui.
La constante cosmologique n'est pas constante. » L'annonce ressemble à une énigme, voire un paradoxe logique. Mais les théoriciens étaient prêts à recevoir le choc. Ils s'y préparaient même, menant ce qui jusqu'ici n'était qu'un jeu mathé-matique. «Cela fait longtemps que des travaux théoriques sont menés sur l'hypothèse d'une énergie noire qui varie, réagit Paul Steinhardt, cosmologiste à Princeton.
D'idée est très naturelle. Sinon, ce serait la seule forme d'énergie que nous connaissons qui soit absolument constante dans l'espace et le temps. » Alors que la densité de matière du cosmos diminue par dilution à cause de l'expansion, il faudrait que l'énergie noire soit créée en pemanence pour maintenir son influence. Difficile à imaginer..
Les physiciens ont pensé l'expliquer par une énergie issue du vide, qui a l'avantage d'être partout, diffuse - et prédite par la théorie quantique qui décrit les interactions des particules. Las... «Sur la base des calculs standard de la théorie quantique des champs, on trouve une énergie entre 10% et 10:00 plus élevée que celle mesurée. C'est l'un des plus grands désaccords jamais trouvés entre les prédictions théoriques et les observations!, rappelle Pauline Zarrouk, cosmologiste à l’université de Montpellier. Cela semble bien au-delà de ce que les théories peuvent expliquer de manière réaliste.»
Mais une énergie noire qui varie, ça change tout. Ce concept n'est plus seulement une constante theorique dans une équation: il devient physique, « L’équation d'état de l'énergie noire n'est pas juste -1, mais peut être un peu plus exotique, un peu plus excitante», s'enthousiasme Andreu Font-Ribera, l'un des membres de DESI, à l'Institut de physique des hautes énergies à Barcelone.
Lannonce a donc déclenché un raz de marée de travaux théoriques. « Etant donné que toutes les forces et composantes connues de la nature ralentissent le taux d'expansion de l’Univers, l'accélération nécessite un mécanisme physique au-delà du modèle standard, capable de contrecarrer la décélération», résume William Giare.
Depuis avril, des dizaines d'articles ont été publiés, près de 2000 ont été déposés sur le site de pré publication d'après notre décompte. Certains pour confirmer ou discuter la pertinence statistique des résultats, beaucoup pour proposer une explication. «Nous avons commencé à travailler le soir même des résultats, raconte Kim Berghaus, Nous avons passé chaque minute d'éveil dans les deux semaines qui ont suivi à essayer de donner une explication à cette énergie noire qui varie.
Nous avons constaté qu'un modèle nommé quintessence peut très bien s'adapter aux données.
Cela suppose l'existence d'un champ scalaire ultraléger dans la nature, peut-être une nouvelle particule audelà de celles dej découvertes. »
Régime fantôme
La grande majorité s'oriente vers cette famille de modèles au nom évocateur: quintessence, pour décrire un Univers baigne d'un champ d'énergie qui varie dans l'espace et dans le temps. «Ces modèles sont nés à la fin des années 1980, recadre David Polarski, physicien théoricien travaillant en cosmologie. C’est un domaine théorique important qui avait été un peu mis en stand-by puisque toutes les observations penchaient pour la constante cosmologique. Eh oui, depuis le mois d'avril, il y a un regain d'activité. » Ce champ rempli-rait l'espace d'une quantité d'énergie qui semble constante au premier abord, mais qui finit par diminuer au cours du temps, glissant lentement vers un véritable vide. «Mes résultats indiquent que la valeur actuelle de l'équation d'état d'énergie noire ressemble à la quintessence», décrit Nandan Roy, théoricien à la Mahidol University, en Thailande, qui a publié ses conclusions dès le mois de mai. Même interprétation de Wen Yin, à T'université de Tokyo, ou de Rodrigo Calderon, à l'université de Prague. Ce serait le même type de champ qui, selon de nombreux cosmologistes, serait à l’origine de l'inflation, cette phase d'expansion exponentielle lors de la naissance de l'Univers.
Un point technique concentre les débats entre experts. D'après les me-sures de DESI, l'équation d'état de l'énergie noire aurait été inférieure à -1 dans le passé, et remonterait au-dessus dans le futur, quelque part entre -1 et 0... «Cela s'appelle le régime fantôme, décrit Vivian Poulin, théoricien au laboratoire Univers et particules de Montpellier. Franchir cette barre des -1, c'est un jalon physique: cela viole une condition d'énergie. Ce n'est pas interdit, mais cela provoque des dynamiques instables. Ou alors il faut imaginer une forme d'énergie exotique, plus exotique que les formes les plus simples d'énergie noire.» Ce régime fantôme, ce n'est pas physique!», s'énerve Marina Cortes. «C'est beaucoup plus exotique d'un point de vue théorique», convient Kim Berghaus. Mais parmi les modèles, certains réussissent à contourner l'obstacle. «Un modèle plus simple de quintessence fonc-tionne. Nous montrons que c'est leur interprétation des données qui fait franchir -1», rassure Paul Steinhardt. «Je vois un passage par un stade fantôme dans le passé, mais il n'est pas réel: on peut l'interpréter comme une indication de l'effondrement de la théorie dans l'Univers primitif, elle devrait être remplacée par une autre théorie», décrit de son côté le Japonais Yuichiro Tada, à l'université de Nagoya. Nouveaux vertiges de modèles en gestation. Certains théoriciens espèrent résoudre au passage le mystère de la matière noire, cette autre substance mystérieuse, invisible depuis les années 1970, qui semble s'enrouler autour des galaxies. «Cela va dans le sens de l'existence d'une particule ultralégère, l'axion», déduit Frank Qu, à l'université Cambridge. «Cela peut fournir des liens avec la théorie des cordes et nous amener à une description microscopique de la gravité», ajoute Georges Obied.
Tout est sur la table
Surtout, cette énergie noire qui varie pourrait libérer les astronomes d'une sinistre prédiction sur le sort ultime de l'Univers. Le scénario du modèle standard a en effet un côté un peu désespérant: avec une énergie noire constante, les galaxies ont vocation à s'éloigner inexorablement, de même que toutes les étoiles au fil des milliards d'années, jusqu'aux atomes qui sous l'effet de cette force irrésistible finiraient par se déchirer. À la fin, il n'y aurait plus rien, plus de vie, plus de lumière, à peine quelques atomes de fer flottant, figés pour toujours dans l'immensité...
La nouvelle quintessence raconte tout autre chose. «Je travaille sur des théories sur l'Univers primordial où le big bang est remplacé par un rebond, décrit Paul Steinhardt. L'Univers n'a pas de début, il vit une période de contraction et d'expansion. Et l'une des possibilités crédibles est qu'il se produise la même chose dans le futur; que l'expansion arrive à une fin et que l'Univers commence à se contracter.» Et le chercheur d'assurer que cette cosmologie cyclique est moins iconoclaste qu'il n'y paraît. «Cela peut paraître très exotique, mais les équations décrivent naturellement une transition vers une contraction lente. » Et cela expliquerait au passage l'homogénéité de l'Univers actuel. «Ça commence à devenir intéressant. On peut vraiment travailler! Tout est enfin sur la table!», s'enthousiasme le théoricien. «On cherche quelque chose de physique, un vrai mécanisme pour expliquer l'énergie noire. Avec la constante cosmologique, on reproduisait cet effet de force répulsive, mais sans donner une compréhension physique au phénomène - ni même expliquer la valeur de la constante. Là, il semble qu'il y ait à la cé un mécanisme physique», s'émeut Pauline Zarrouk.
Inutile de souligner que les prochaines données de DESI sont très attendues. L'anomalie va-t-elle devenir une découverte? Toute la communauté retient son souffle. «Nous avons déjà trois ans de données accumulées, rapporte Nathalie Palanque-Delabrouille. Nous commençons notre analyse, entièrement en aveugle, pour ne pas être biaisés. Les résultats seront publiés en avril prochain. »
Pour aller encore plus loin
Deux publications
Historique. L'analyse des données, publiée en avril et en novembre 2024 par la collaboration DESI: //arxiv.org/abs/2404.03002
Un livre
Profond. Le physicien Roland Lehoucq et le philosophe Vincent Bontems décortiquent la liste noire de la science. Les Idées noires de la physique, éd.
Les belles lettres (2016).
Une simulation
Somptueux. On ne se lasse pas de regarder les amas de galaxies s'étendre dans la simulation Illustris. www.illustris-project.org/
Une mission
Prometteur. Euclid, lancé en 2023, livrera ses premières données en 2026.
//cnes.fr/proiets/euclid
2
[ Dernière édition du message le 01/02/2025 à 19:36:22 ]

Anonyme

4048 Posté le 01/02/2025 à 19:37:56
Merci pour cet intéressant partage ! 

1

props
5840

Je poste, donc je suis
Membre depuis 18 ans
4049 Posté le 01/02/2025 à 21:55:34
Super article 
Mais tu seras toujours là parmi nous, tes quarks ne sont pas près de disparaitre

Citation de sonicsnap :
Oui, mais je ne serai plus là pour le savoir, et ça c'est quand même dommage..
Mais tu seras toujours là parmi nous, tes quarks ne sont pas près de disparaitre

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sonicsnap
89133

Posteur haute vélocité
Membre depuis 18 ans
4050 Posté le 02/02/2025 à 15:15:10
Merci Sylvain d'avoir tapé ce long texte.
props > Tu me rassures grandement!

props > Tu me rassures grandement!


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